République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1867-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour une régulation des cervidés à Genève
Rapport de M. Jean Romain (R)

Débat

Le président. Nous passons au point 195: P 1867-A. La parole est à M. Roger Golay.

M. Roger Golay (MCG). Merci, Monsieur le président, mais je crois que le rapporteur voulait s'exprimer avant moi.

Le président. Parfaitement, Monsieur le député, vous avez raison, c'est moi qui me suis trompé ! Monsieur Romain, vous me le pardonnerez, j'espère ! Vous avez la parole.

M. Jean Romain (R), rapporteur. Bien volontiers, Monsieur le président ! Pratiquement l'ensemble de la commission a été sensible à cette pétition, puisqu'elle s'est déplacée dans des champs tout à fait martyrisés, je dirais, par des cervidés, jusqu'à 80-90%. Au fond, la commission pense qu'il en va des cervidés comme des sangliers, en quelque sorte, c'est-à-dire qu'il faudrait trouver une solution de régulation. Alors bien sûr, les paysans et les agriculteurs sont dédommagés, mais je crois qu'il en va aussi de l'honneur de ces agriculteurs, qui entendent pouvoir vivre de leurs terres et non pas des subventions dues à une sorte de laxisme genevois par rapport à ces troupeaux qui détruisent leurs champs. En conséquence, l'immense majorité de la commission demande que cette pétition soit simplement renvoyée au Conseil d'Etat, afin qu'une solution analogue à celle des sangliers soit trouvée.

M. Roger Golay (MCG). Vous l'avez bien compris, ce que propose en tout cas le parti radical, parce que ce n'était pas le sentiment de l'ensemble de la commission, c'est de trouver des solutions, mais ce n'est pas forcément par des abattages. Il nous a été dit par le garde-faune que de tirer sur des cervidés ne sert à rien du tout, car ça ne les effraie pas plus de vingt-quatre heures et ils reviennent. Ce sont des bêtes qui sont attirées par les marais de Versoix et qui viennent du Jura; c'est une population de quarante bestioles qui sont de la région franco-valdo-genevoise... (Brouhaha.) ...et l'accueil qui leur est fait par le parti radical consiste à tirer sur ce type de population. Enfin bref ! Moi j'en appelle au grand coeur de Mme Künzler, parce que je suis persuadé qu'elle est beaucoup plus attentive aux cervidés qu'aux automobilistes... (Rires.) ...mais j'espère une chose, c'est que le renvoi au Conseil d'Etat ne sera pas compris comme un tir dans toutes les directions, un tir tous azimuts sur toutes les bestioles qui traîneront du côté de la Versoix. (Brouhaha.)

On parle de cerfs, d'une population de quarante animaux qui viennent manger des pousses de colza, c'est-à-dire les petites fleurs, pour une question de survie... (Brouhaha.) ...et il nous a été dit par les gardes-faune que le coût engendré par ces animaux était de l'ordre de 30 000 F. Les Genevois sont très sensibles au monde animal à Genève et, je vous le rappelle, notre constitution interdit toute forme de chasse. Alors oui, vous voulez les tirer, comme les sangliers, mais les sangliers, Monsieur Romain, sont effrayés et ne reviennent plus après un tir ! Ils ne reviennent plus pendant des semaines, voire des mois, parce qu'ils sont peut-être plus intelligents et comprennent le message. Ce n'est pas le cas des cervidés, alors je prie en tout cas le Conseil d'Etat d'être très attentif. On demande que soient trouvées des solutions pour éviter que ça n'ennuie nos amis les agriculteurs, parce que le MCG est tout aussi attentif à leurs préoccupations que vous, Messieurs du PLR - et Mesdames, bien sûr - mais nous sommes aussi très sensibles à la population des cervidés à Genève. (Applaudissements.)

M. Eric Leyvraz (UDC). Le premier film que j'ai vu de ma vie, en 1950 au cinéma Pélican, c'était «Bambi», et je me rappelle avoir pleuré toutes les larmes de mon corps... (Exclamations.) Eh oui ! Mais avec l'âge, la sensibilité diminue et, cette fois-ci, s'il faut tirer sur Bambi, je verserai peut-être encore une larme, mais je sens que c'est nécessaire. Il faut absolument qu'on puisse réguler cette population de cervidés qui cause beaucoup trop de dégâts. Ce sont certainement encore des cervidés qui sont frontaliers, vous pouvez imaginer... (Commentaires.) Alors je pense qu'il faut renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, c'est nécessaire.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Renaud Gautier. (Exclamations.)

M. Renaud Gautier (L). Monsieur le président de séance, ce parlement est définitivement le lieu où souffle la science. Entendre M. Golay nous parler de la problématique des cervidés et de toutes les connaissances qu'il a de la question est effectivement impressionnant. Un instant, mais un instant seulement, j'ai cru qu'il allait dire qu'il fallait tirer les automobilistes et pas les cervidés, mais heureusement il s'est arrêté avant ! Je constate néanmoins que les problèmes importants de la république, à savoir s'il faut ou non tirer les cervidés, occupent ce parlement au moins autant que d'autres problèmes. (Commentaires.) Je partage l'avis qu'il faudrait renvoyer tous ces cervidés au Conseil d'Etat; d'abord cela le distrairait dans sa salle... (Exclamations.) ...et ensuite probablement pourrait-il choisir entre les bons et les mauvais cervidés, ceux qu'on pourrait peut-être tirer, ceux qu'il ne faudrait pas tirer, et ceux enfin que la commission des finances mangera lors de son fameux banquet ! (Exclamations.) Je suis content, Monsieur le président, d'avoir amené une solution à ce grave problème. (Quelques applaudissements.)

Mme Loly Bolay (S). Moi je n'ai pas affaire à des cervidés au Grand-Saconnex, mais à des renards... (Exclamations.) Et je crois bien qu'ils viennent de Ferney... (Brouhaha.) ...alors j'aimerais bien que M. Golay me dise ce qu'il faut faire ! Ce sont des frontaliers, vous vous rendez compte ! Pas des cervidés, mais des renards qui viennent devant chez moi au Grand-Saconnex et qui arrivent de Ferney ! Alors vous me donnerez la recette, parce qu'ils crient la nuit et ne me laissent pas dormir ! (Exclamations. Commentaires.)

Mme Michèle Künzler, conseillère d'Etat. Comment intervenir après ce qui a été dit ?! (Rires.) Mesdames et Messieurs les députés, j'ai déjà dû m'exprimer lors de l'assemblée générale d'AgriGenève avec un défilé de cerfs derrière moi et une centaine d'agriculteurs assez remontés. Mais il faut être clair: on doit faire quelque chose, parce qu'il est difficile d'accepter de voir sa culture détruite, même si on est remboursé. Cela dit, abattre des cerfs... Ce n'est pas très populaire d'abattre Bambi ! Non, je pense que la mesure que nous envisageons est meilleure, puisque la situation de cette année était assez exceptionnelle: ce sont en effet la durée de l'hiver et l'enneigement très prononcé sur le Jura qui ont permis aux animaux de redescendre dans la plaine et de trouver de la nourriture. C'était donc une situation exceptionnelle, mais on peut trouver des mesures d'effarouchement, que nous sommes en train de mettre au point. En effet, comme on l'a dit, la mémoire des cervidés n'est pas aussi développée que celle des sangliers et par conséquent il ne sert à rien de pratiquer une mesure d'effarouchement par les tirs. D'autres mesures doivent donc être prises et je pense que nous sommes déjà actifs sur ce point et que nous avons trouvé une solution, qui vient d'ailleurs de France, puisque ces problèmes existent aussi là-bas. Ces mesures vont être mises en place pour l'hiver prochain, mais il ne s'agit pas de tirs de cervidés. Je vous remercie d'avoir prêté attention à ces problèmes importants. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Je mets aux voix les conclusions de la commission, soit le renvoi au Conseil d'Etat.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 1867 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 53 oui et 12 abstentions.