République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 25 janvier 2013 à 20h30
57e législature - 4e année - 4e session - 21e séance
PL 10438-A et objet(s) lié(s)
Premier débat
Le président. Nous sommes maintenant au point 26 de l'ordre du jour. (Brouhaha.) S'il vous plaît ! (Remarque. Commentaires.) Monsieur le député Bertschy, s'il vous plaît ! On n'entend que vous ! Il s'agit d'un débat en catégorie II: quarante minutes. Le rapport de majorité est de M. Eric Bertinat; le rapport de minorité, de Mme Prunella Carrard.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de majorité ad interim. Monsieur le président, je remplace M. Bertinat.
Le président. Oui, j'ai vu... (M. Marc Falquet a pris place à la table des rapporteurs.) ...vous remplacez M. Bertinat. Alors je vous passe la parole.
M. Marc Falquet. Mesdames et Messieurs, la commission des affaires sociales a traité deux projets de lois qui visent à modifier la loi sur les prestations cantonales complémentaires à l'AVS et à l'AI. Il s'agit du PL 10438, qui demande que les prestations complémentaires communales soient concertées avec le canton, et du PL 10439, qui vise à édicter une nouvelle loi autorisant les communes à accorder aux personnes domiciliées sur leur territoire des prestations complémentaires aux prestations sociales cantonales, en précisant que la valeur de l'aide financière communale ne sera pas prise en compte dans le calcul du revenu déterminant des bénéficiaires.
Cette histoire a commencé en 2007 par une pétition et une initiative de l'AVIVO pour légaliser le maintien de ces prestations complémentaires communales. Le Conseil d'Etat avait décidé de ne pas entrer en matière sur l'initiative en question et, suite au recours de l'AVIVO, le Tribunal administratif a finalement invalidé l'initiative.
Ce projet de loi concerne surtout la Ville de Genève, notamment 5000 personnes. Cela touche les gens qui auraient un revenu inférieur à 1900 F, déduction faite des loyers et de l'assurance-maladie, ce qui est déjà pas mal. Relevons que la Ville de Genève a été informée du fait que ces prestations complémentaires n'étaient plus conformes au droit fédéral et qu'un accord avait été trouvé avec le magistrat en charge des affaires sociales, mais apparemment la Ville a changé de position entre-temps. Hormis la Ville de Genève, relevons aussi que les autres communes ne distribuent pas de prestations complémentaires, mais uniquement des prestations ponctuelles, ce qui est tout à fait légal.
Le Conseil d'Etat n'avait pas demandé la suppression du droit à ces prestations pour les personnes qui en étaient déjà bénéficiaires, mais avait simplement évoqué la possibilité d'avoir des dispositions transitoires. En résumé, le Conseil d'Etat n'a pas toléré qu'une commune placée sous le contrôle constitutionnel et institutionnel du canton s'octroie des prérogatives de politique sociale qui ne lui reviennent pas et qui sont clairement inéquitables, et ce entre concitoyens d'une même commune. De ce fait, la majorité de la commission sociale, qui a traité cette affaire, vous suggère de refuser l'entrée en matière. Merci beaucoup.
Le président. Merci, Monsieur Falquet, rapporteur de majorité remplaçant. La parole est à Mme Prunella Carrard, rapporteure de minorité.
Mme Prunella Carrard (S), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. M. Falquet remplace effectivement M. Bertinat, donc il n'a peut-être pas eu le temps de se tenir au courant des derniers «rebondissements de l'affaire», j'ai envie de dire, puisque le dernier événement important date de juillet 2011... (Commentaires.) ...quand la chambre administrative de la Cour de justice a donné raison à la Ville de Genève sur la possibilité de maintenir les prestations complémentaires municipales, en complément des prestations cantonales. C'est vrai que ça peut sembler un événement lointain, mais ce projet de loi est déjà vieux et a mis du temps à arriver en plénière pour y être discuté.
Finalement, ces projets de lois ont été établis dans un esprit très visionnaire, qui caractérise les socialistes depuis toujours... (Exclamations.) ...car ils entérinaient en avance une décision de la chambre administrative de la Cour de justice cantonale. Aujourd'hui j'ai envie d'ajouter qu'on vous l'avait bien dit !
Et puis, pour l'historique, ça a été tout un méli-mélo en raison d'une histoire d'interprétation de la loi fédérale entre le canton et les communes. La chambre administrative a finalement donné raison aux positions communales, ce qui permet de continuer d'octroyer cette aide municipale aux personnes qui, malgré ce que semble en penser M. Falquet, vivent avec seulement 1900 F par mois. J'estime que ce n'est pas beaucoup, quand on a une famille à charge et un certain nombre de dépenses qui sont, on le sait, à Genève, relativement importantes. Cela concerne des personnes âgées et des invalides de condition très modeste, car il s'agit de personnes au bénéfice d'une rente AVS et AI.
Le parti socialiste vous propose donc la chose suivante. C'est d'accepter l'entrée en matière et le projet de loi 10438, qui finalement entérine la décision de la chambre administrative de la Cour de justice, la décision de juillet 2011 que j'évoquais et qui confirmait la possibilité de maintenir les aides municipales en complément des aides cantonales pour ces personnes à revenu très modeste. Et si ce Grand Conseil a la sagesse d'accepter ce projet de loi qui - encore une fois - entérine cette décision de la Cour de justice, nous renoncerons au second projet de loi qui visait à créer une loi ad hoc. Le premier projet de loi nous suffit, car cela inscrit ce principe, cette décision, dans la loi sur les prestations complémentaires cantonales.
Enfin, j'aimerais lancer un petit appel aux communes qui, à l'époque - suite à la lettre qui leur avait été adressée par le Conseil d'Etat, disant que les prestations municipales n'étaient plus légales - avaient aboli ces prestations, eh bien, j'ai envie de lancer ici un appel pour vous dire, Mesdames et Messieurs les magistrats communaux, que ces aides sont légales, que ces aides peuvent être octroyées aux personnes au bénéfice d'une rente AVS ou AI de condition modeste ! Rétablissez-les, ces personnes en ont besoin ! Je vous remercie. (Applaudissements.)
M. Patrick Saudan (R). Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, vous direz à ma préopinante que malheureusement nous allons la décevoir, parce qu'à l'époque le groupe radical n'était pas entré en matière sur ce projet de loi, et il ne va toujours pas le faire. Même s'il est vrai que ces projets de lois auraient ancré dans la loi sur les prestations cantonales complémentaires la possibilité, pour les communes, d'octroyer des prestations communales complémentaires en sus des prestations cantonales.
Mme Carrard a évoqué la raison juridique pour laquelle nous nous étions opposés. Effectivement, à l'époque, nous pensions - et nous pensons toujours - que ces prestations sont contraires au droit fédéral. D'accord, il y a eu en août 2011 un jugement du Tribunal administratif qui a confirmé la légalité de ces prestations complémentaires municipales, mais il y aussi deux autres principes qui guident notre opposition à ces projets de lois. Il y a d'abord un principe d'équité, qui est assez simple: si vous habitez à Vernier, vous n'avez pas droit à ces prestations municipales; en revanche, si vous habitez à Châtelaine, vous y avez droit. Donc il y a une iniquité fondamentale au niveau cantonal s'agissant de ces prestations. (Commentaires.) A fortiori, il y a même une iniquité à l'intérieur de la commune de la Ville de Genève, puisque ces prestations municipales ne sont pas accordées automatiquement, elles ne sont accordées que sur demande et après examen.
Le deuxième principe qui guide notre opposition, c'est qu'au PLR nous sommes contre les doublons. Nous pensons que les prestations sociales doivent être accordées au niveau cantonal, et qu'il n'y a pas de prestations sociales qui doivent l'être au niveau municipal. Pour ces deux raisons, le groupe radical restera sur son opposition envers ces projets de lois et n'entrera pas en matière. Je vous remercie.
M. Michel Forni (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, il est toujours difficile de traiter des vieux projets de lois en essayant de les ranimer au dernier moment, suite à quelques artifices légaux qui ont lieu durant l'été, quand il y a de fortes chaleurs... Je rappelle que ces deux projets de lois ont été examinés durant l'hiver 2010-2011, suite à une nouvelle répartition des tâches entre la Confédération et les cantons, comme cela a été dit. Et ces prestations complémentaires n'étaient plus conformes au droit fédéral lorsque cette pétition a été déposée, pétition qui demandait le maintien de ces prestations complémentaires communales en les légalisant. Le regroupement des trois objets de lois qui y est associé visait à édicter une nouvelle loi autorisant les communes à accorder à des personnes domiciliées sur leur territoire ce type de prestations complémentaires aux prestations sociales cantonales. Il y avait donc une forme de doublon, et cela a été bien dit et confirmé. Mais le Conseil d'Etat s'est pris dans une tentative de réguler, et la saga a bien sûr commencé par le Tribunal administratif, qui a invalidé. Puis durant l'été, comme cela a été dit, la chambre administrative a donné raison à la Ville et le jugement a donc été confirmé dans le sens d'une légalité.
A part le problème des doublons, il y a celui des personnes qui devraient bénéficier de ces prestations - ou qui pourraient en bénéficier. Deux chiffres ont déjà été articulés: 1900 F pour ceux qui ont un revenu inférieur; et environ 5000 personnes qui sont censées être concernées à Genève. Il est vrai que la technique de la rébellion, telle qu'elle découle de cette proposition, n'apporte finalement pas un principe de grande justice. Et à part le problème du doublon et celui des équités - qui a été répété - nous tombons dans un dispositif d'organisation collective qui a craqué sous les coups de boutoir et, en définitive, qui permet à d'autres de dire que l'effritement du dispositif assure une forme de cohésion sociale et doit donc le rééquilibrer. Il y a une sorte d'instabilité dans le raisonnement et visiblement, surtout, une forme d'illégalité par rapport au droit fédéral. Nous ne pouvons pas adopter cette politique des rustines - tantôt le mea culpa tactique et tantôt la tentation du ridicule - en disant que nous avons raison alors qu'auparavant on avait tort ! Nous sommes persuadés que l'individualisation de cette aide doit pouvoir se faire dans certains cas, mais ce pacte virtuel de stabilité reste actuellement à l'état embryonnaire et les indicateurs dont nous disposons ne parlent que pour une forme de catastrophisme éclairé. C'est la raison pour laquelle nous ne pourrons pas souscrire à l'entrée en matière de ce projet. (Applaudissements.)
Mme Esther Hartmann (Ve). Les Verts ont beaucoup discuté de cet objet, et les membres de la commission des affaires sociales étaient en effet extrêmement frustrés de voir que la commission refusait d'entrer en matière sur l'étude de ce projet. Nous avions le sentiment qu'on ne tenait pas compte des besoins qui pouvaient éventuellement se faire jour chez nos plus anciens lorsqu'ils se retrouvent dans une situation économique difficile.
D'un autre côté, nous nous posions aussi des questions et nous avions des doutes quant à ce texte, mais nous aurions souhaité l'étudier et, le cas échéant, pouvoir l'amender.
S'agissant de l'utilisation de cet argent, nous nous demandions si, par exemple, les 185 F qui étaient distribués individuellement ne pouvaient pas être utiles autrement, sous forme d'une action communautaire qui aurait peut-être permis de travailler de manière plus ciblée sur la lutte contre l'isolement de nos personnes âgées dans les situations les plus précaires, ou sur des plans de prévention de la santé.
Toujours est-il que nous, les commissaires aux affaires sociales, sommes extrêmement déçus de la position de la majorité de cette commission. Cette déception n'a malheureusement pas été partagée par l'ensemble des députés Verts, et ce soir nous serons trois, je pense, à voter oui à l'entrée en matière, alors que le restant ne l'acceptera pas et la refusera.
Mme Marie-Thérèse Engelberts (MCG). En commission, le groupe MCG n'avait effectivement pas accepté l'entrée en matière sur ces deux projets de lois; au vu du jugement Tribunal administratif, le MCG se ravise et acceptera cette entrée en matière.
J'aimerais dire qu'il y a un certain nombre d'années, pour des personnes qui étaient très démunies, eh bien, avec 1900 F par mois - dont 1100 F pour le loyer, plus l'assurance-maladie... Je ne suis pas sûre que, même à 80 ans, on s'en trouve extrêmement content... (Brouhaha.) ...ni que ce soit beaucoup d'argent par rapport à la vie qu'on a envie d'avoir. Je crois qu'il faut réaliser quel est le coût de la vie autour de nous et, 1900 F, ça ne me paraît quand même pas énorme.
Deuxièmement, ce qui nous avait fait hésiter sur l'entrée en matière, c'était cette légalisation entre les différentes communes. Mais c'est un point que nous pourrons reprendre, avec ceux qui ont été indiqués par ma préopinante, et nous proposons donc un retour de ces deux projets en commission.
Troisièmement, je voudrais quand même dire que l'apport financier qui est donné représente une évolution par rapport à une situation antérieure. Autrefois, les assistantes sociales et les infirmières apportaient à domicile, aux personnes les plus démunies, des paniers de nourriture. En effet, j'ai connu cette époque... (Brouhaha.) ...où, sur nos vélos - sur lesquels je ne peux plus aller, évidemment - on apportait des paniers. Mais on ne donnait pas d'argent, ce n'était absolument pas possible. Parfois, on apportait aussi du bois - on allait le long de la Jonction, etc. Je veux dire que, finalement, ces prestations communales complémentaires ont été instaurées parce que, à un moment donné, ce n'était plus d'actualité d'apporter des paniers de nourriture et du bois aux personnes âgées.
Maintenant, lorsqu'on dit que la plupart des personnes âgées seront - dans un certain nombre d'années, prenons 2030 - au bénéfice d'un deuxième pilier, eh bien, tout à fait d'accord, c'est certain. Mais je vais prendre juste un exemple. Aujourd'hui, à l'EMS de Vessy, 70% des personnes âgées sont au bénéfice de prestations complémentaires; donc si l'on regarde la situation autour de nous, il y a encore énormément de personnes qui ont besoin de ces prestations. Et puis, il y a toutes celles qui n'osent pas les demander et, cela, je crois que c'est quelque chose qu'on devrait revoir en commission. Il n'est pas normal qu'une prestation complémentaire communale soit juste l'effet d'une demande. Il y a énormément de personnes - vu la culture que nous avons, l'éducation que nous avons reçue - qui ne vont pas la demander, et très souvent ce sont les plus démunies.
Pour toutes ces raisons, nous allons changer de position, accepter l'entrée en matière, et nous souhaiterions que ces deux projets de lois repassent en commission. Je vous remercie. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Formellement, vous demandez le renvoi en commission avant l'entrée en matière, ou après ? (Commentaires.) Tout de suite. Donc c'est un renvoi à la commission des affaires sociales. Peuvent s'exprimer maintenant les deux rapporteurs et Mme la conseillère d'Etat. Madame la rapporteure de minorité, vous avez la parole - sur le renvoi de ces deux projets de lois en commission.
Mme Prunella Carrard (S), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le président. C'est sûr qu'il y a matière à discussion, c'est sûr que nous avons été particulièrement frustrés du traitement... (Brouhaha.) ...effectué et de la rapidité des débats concernant ces deux projets de lois. M. Forni a dit qu'on y avait travaillé durant l'hiver 2010 et 2011; en réalité, il y a eu deux séances - deux petites séances ! - de la commission sociale à propos de ces projets de lois, pour parler d'une aide fondamentale touchant 5000 personnes rien qu'en ville de Genève. Bien entendu, c'est un sujet fondamental. Et bien entendu aussi qu'il serait tout à fait appréciable de pouvoir en parler en commission. Nous accédons donc volontiers à la demande du MCG de renvoyer en commission ces projets de lois. Je vous remercie.
Le président. Merci, Madame la rapporteure. Monsieur le rapporteur de majorité, vous pouvez vous exprimer sur le renvoi.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de majorité ad interim. Sur le renvoi, non.
Le président. Mais vous voulez vous exprimer ?
M. Marc Falquet. Non, pas sur le renvoi.
Le président. D'accord. Madame la conseillère d'Etat, vous avez la parole - sur le renvoi.
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Sur le renvoi, non. Enfin... (Commentaires.) Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut être très clair. Laissez-moi quand même vous rappeler brièvement le contexte.
Depuis 2005, le Conseil d'Etat s'est toujours opposé à ce que les communes versent des prestations à leurs communiers. Je peux vous le dire, j'étais parmi les maires qui donnaient ces prestations, donc j'ai pris cette décision de plein fouet. Et je sais que, pour le Conseil d'Etat, cela a été un enjeu fondamental. Cet enjeu fondamental, Mesdames et Messieurs, j'aimerais juste vous le rappeler brièvement... (Brouhaha.) ...ce ne sont pas les prestations complémentaires ! Il n'est pas question de ne plus en donner, ni concernant l'Etat, ni concernant les communes. Mais un point a été réglé ! La chambre administrative de la Cour de justice a donné raison, donc ce point est sans objet, les communes continueront... S'agissant des prestations complémentaires AVS et AI, c'est réglé, c'est bon ! La chambre administrative a prononcé son arrêt. Et je crois que, là, c'est vraiment «Circulez, il n'y a rien à voir !» On est tous d'accord là-dessus.
Maintenant, la question se pose par rapport aux prestations complémentaires élargies au SCARPA, donc aux pensions alimentaires, à l'Hospice général et au service des assurance-maladie. C'est sur ce projet-là que j'aimerais vous rappeler certaines choses, de même que l'enjeu fondamental. L'enjeu fondamental revient à définir la marge de manoeuvre ! La marge de manoeuvre que, respectivement, les communes et l'Etat ont dans cette répartition des prestations complémentaires. Or, deux principes essentiels ont été rappelés - et j'aimerais vraiment insister là-dessus - soit le principe de subsidiarité et le principe d'équité. Ces deux principes sont absolument indispensables dans la mesure où - et il me semble important de le dire pour celles et ceux qui préconiseraient un retour en commission - le fait de prendre en compte dans le revenu déterminant les prestations qui seraient versées par les communes, eh bien cela rendrait beaucoup plus difficile et plus précaire le versement des prestations qui seraient délivrées par le canton. Donc je pense que ce n'est vraiment pas dans notre intérêt. On est absolument convaincus d'un principe... (Brouhaha.) ....c'est qu'un franc est un franc - qu'il vienne des communes ou qu'il vienne de l'Etat - et qu'il faut prévenir les doublons et accorder des prestations complémentaires à ceux qui en ont besoin. Je préconise - et je vous y encourage - de ne pas entrer en matière sur le premier projet et de rejeter le deuxième.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, nous allons nous prononcer sur le renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10438 à la commission des affaires sociales est rejeté par 42 non contre 36 oui et 1 abstention.
Le président. Nous procédons de même pour le deuxième objet.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10439 à la commission des affaires sociales est rejeté par 39 non contre 35 oui et 5 abstentions.
Le président. Nous poursuivons le débat. La parole est à Mme la députée Emery-Torracinta.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Merci, Monsieur le président. Madame la conseillère d'Etat, Monsieur Saudan, les socialistes sont aussi pour l'équité. Et j'aimerais vous dire que je me réjouis de savoir que le parti radical et le parti libéral vont prochainement soutenir notre initiative pour l'abolition des forfaits fiscaux ! Parce qu'il n'y pas de raison, tout le monde doit être égal devant l'impôt - certains les paient, d'autres ne les paient pas de la même manière... (Commentaires.) Et je me réjouis aussi de savoir... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...que vous approuverez, entre autres, le fait que les centimes additionnels soient les mêmes dans toutes les communes, et que Genthod cesse de payer 25 centimes, alors qu'Avully paie, par exemple, 51 centimes ! Donc voilà l'équité ! Dans tous les domaines ! Lorsque vous défendrez aussi l'équité fiscale, eh bien nous accepterons peut-être d'entrer en matière par rapport à ces projets de lois.
Cela dit, je reviens au sujet qui nous intéresse ici. Le vrai problème, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que depuis quelques années nous assistons systématiquement à ce qui était d'abord un grignotage, mais qui s'apparente maintenant à du démantèlement sur le plan social. Depuis que je suis au parlement, soit depuis début 2005, on assiste à des baisses: d'abord des baisses dans l'aide sociale, des baisses avec la suppression du RMCAS, des baisses avec le projet de budget qui, pour la première fois, propose une diminution des subventions sociales aux personnes âgées et à toutes les associations et institutions pour personnes handicapées ! Voilà la réalité de ce canton. Et si les socialistes vous demandent de soutenir ce projet de loi, c'est parce qu'il leur est insupportable que systématiquement, quand vous parlez d'équité, vous procédiez à un nivellement allant vers le bas.
Voilà pour l'essentiel. Je vous invite donc à approuver ces projets de lois ou, si vous souhaitez qu'on vote encore, éventuellement à les renvoyer une nouvelle fois en commission. (Applaudissements.)
M. Serge Hiltpold (L). Mesdames et Messieurs les députés, je crois que nous devons rappeler quelques principes qui régissent les aides sociales dans notre canton. Le premier élément concerne l'assurance-vieillesse et l'assurance invalidité, qui sont d'ordre fédéral, alors que le canton s'occupe d'une politique cantonale à travers les prestations complémentaires et qu'il a été un pionnier, à l'époque, avec l'Hospice général. Je crois que le principal argument c'est que le Conseil d'Etat n'a pas à rougir de sa politique sociale. Il n'a pas à rougir de sa politique sociale ! Nous avons voté, il y a quelque temps, une loi sur les travailleurs pauvres et diminué les effets de seuil sur les prestations complémentaires.
Par ailleurs, je suis sensible à l'appel de Mme Carrard aux magistrats communaux, afin qu'ils développent des aides sociales communales. Je ferai le même appel à ces mêmes magistrats, mais pour qu'ils mettent ces aides en corrélation avec leur budget et leurs difficultés communales, sachant qu'il va y avoir une nouvelle assiette fiscale et que la part des communes sera bien changée. A elles de prendre leurs responsabilités.
Si le parti socialiste avait une vision dans ce projet de loi, le parti libéral et le parti radical ont une ligne de conduite qu'ils maintiennent... (Brouhaha.) ...jusqu'à ce jour, laquelle est de respecter un principe d'équité de prestations sur le plan cantonal en diminuant les effets de seuil. Nous vous invitons donc à garder cette position, soit à rejeter ces deux projets pour les motifs évoqués. Merci.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la rapporteure de minorité Prunella Carrard, à qui il reste trente secondes
Mme Prunella Carrard (S), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, merci ! Rapidement: on ne va pas en faire une maladie, de toute façon la chambre administrative nous a donné raison. Donc les communes peuvent maintenir les aides municipales, les rétablir si elles les avaient supprimées, et j'appelle encore une fois les communes à le faire pour ces personnes qui en ont véritablement besoin - je le rappelle, ce sont les rentiers AVS ou AI à très faibles revenus. Et enfin, j'aimerais dire à M. Forni que, non, nous n'avions pas tort auparavant: nous avons toujours eu raison.
M. Marc Falquet (UDC), rapporteur de majorité ad interim. Concernant le grignotage des prestations, c'est vrai ! Mais cela ne concerne pas seulement les gens qui sont à l'AVS, cela concerne surtout le secteur privé. Bien entendu, cela ne touche pas les fonctionnaires, puisque c'est comme s'ils étaient dans une espèce de bulle, sans se rendre compte de la situation en général... Donc il ne faut quand même pas pousser.
En ce qui concerne... (Brouhaha.) ...la pauvreté, relativisons la pauvreté ! Je ne sais pas si vous savez, mais la plupart des pays du Sud n'ont aucune protection sociale ! Les gens doivent se débrouiller... (Protestations. Le président agite la cloche.) ...et ils ne sont pas plus malheureux que nous ! Je pense qu'il y a moins de psychiatres et moins de suicides dans les pays du Sud - notamment en Afrique - qu'à Genève. Et le gros problème, ce n'est pas l'argent.
Concernant les prestations complémentaires, n'oublions pas que ce sont des prestations qu'on octroie à des gens qui n'ont pas suffisamment de revenus. Donc maintenant, on veut donner des prestations complémentaires par-dessus les prestations complémentaires ! La prochaine fois, on va donner des prestations complémentaires sur les prestations complémentaires des prestations complémentaires !... Non ?!
Je vous propose donc de refuser l'entrée en matière, les prestations de l'Etat étant parfaitement aux normes. Ma maman, qui est à l'AVS - je crois qu'elle a 1900 F par mois - se débrouille avec...
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le rapporteur.
M. Marc Falquet. ...et ce n'est pas ça qui dérange. Voilà, refusons l'entrée en matière !
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que tout a été dit. Que ce soit le principe de subsidiarité qui prévale, ou le principe d'équité, peu importe ! Le principe qui prévaut, et je le répète ici, c'est qu'un franc est un franc, qu'il vienne des communes ou qu'il vienne de l'Etat. Encore une fois, ne pas prendre en compte ces prestations communales dans le RDU serait contraire à l'article 4 de la LIASI. Je crois qu'il y a un principe fondamental qui veut qu'il y ait une certaine subsidiarité entre le canton et les communes, et la volonté de celui-là et de ces dernières est quand même que nous ne laissions personne au bord du chemin. Je crois que c'est l'essentiel qu'il faut retenir ici, et je vous recommande encore une fois de rejeter ce projet de loi. Merci.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Je vais, Mesdames et Messieurs les députés, vous faire voter séparément l'entrée en matière de ces projets de lois. D'abord, celle du PL 10438. (Brouhaha durant la procédure de vote.)
Mis aux voix, le projet de loi 10438 est rejeté en premier débat par 38 non contre 34 oui et 4 abstentions.
Le président. Nous passons maintenant... (Brouhaha.) S'il vous plaît, Mesdames et messieurs ! Nous nous prononçons sur l'entrée en matière du second projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 10439 est rejeté en premier débat par 40 non contre 33 oui et 5 abstentions.