République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 12 octobre 2012 à 20h30
57e législature - 3e année - 12e session - 70e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Pierre Losio, président.
Assistent à la séance: Mmes et MM. Pierre-François Unger, président du Conseil d'Etat, Charles Beer, François Longchamp, Isabel Rochat, Michèle Künzler et Pierre Maudet, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: M. David Hiler, conseiller d'Etat, ainsi que Mme et MM. Guillaume Barazzone, Beatriz de Candolle, Roger Golay, Philippe Morel et Guillaume Sauty, députés.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, l'ordre du jour appelle la prestation de serment de Mme Marion Sobanek. Je prie M. le directeur adjoint de la faire entrer, et l'assistance de bien vouloir se lever. (Mme Marion Sobanek entre dans la salle du Grand Conseil et se tient debout, face à l'estrade.)
Madame Sobanek, vous êtes appelée à prêter serment de vos fonctions de députée au Grand Conseil. Je vais vous donner lecture de la formule du serment. Pendant ce temps, vous tiendrez la main droite levée et, lorsque cette lecture sera terminée, à l'appel de votre nom, vous répondrez soit «je le jure», soit «je le promets». Veuillez lever la main droite.
«Je jure ou je promets solennellement:
- de prendre pour seuls guides dans l'exercice de mes fonctions les intérêts de la République selon les lumières de ma conscience, de rester strictement attaché aux prescriptions de la constitution et de ne jamais perdre de vue que mes attributions ne sont qu'une délégation de la suprême autorité du peuple;
- d'observer tous les devoirs qu'impose notre union à la Confédération suisse et de maintenir l'honneur, l'indépendance et la prospérité de la patrie;
- de garder le secret sur toutes les informations que la loi ne me permet pas de divulguer.»
A prêté serment: Mme Marion Sobanek.
Veuillez baisser la main. Le Grand Conseil prend acte de votre serment. La cérémonie est terminée. Dès maintenant, vous pouvez siéger. (Applaudissements.)
Mesdames et Messieurs les députés, nous continuons le traitement des urgences avec le point 116.
Premier débat
Le président. Je donne la parole à M. le député Pierre Weiss.
M. Pierre Weiss (L). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, hier vous avez accepté le traitement en urgence du projet de budget et vous savez fort bien qu'en ce qui concerne le PLR cette proposition de traitement en urgence a pour but, ce soir, d'aboutir à un vote d'entrée en matière par lequel une majorité de ce Grand Conseil, nous l'espérons, refusera ce projet de budget et le renverra au Conseil d'Etat. Pourquoi avons-nous fait cette proposition et quels sont nos objectifs ? Nous avons fait cette proposition parce que - nous l'avions d'ailleurs indiqué d'emblée - ce projet de budget est inacceptable en l'état. Et j'ajoute ce soir que ce projet de budget est inacceptable pour l'Etat !
Il est inacceptable pour l'Etat, pour cinq raisons que je vais vous donner. La première de ces raisons est qu'il est totalement déphasé par rapport aux prévisions de croissances économiques. Le Groupe de perspectives économiques qui est au service du Conseil d'Etat pour lui proposer une réflexion sur la conjoncture a indiqué, suite à sa dernière réunion de fin septembre, que, pour cette année, la croissance serait plus faible que ce qui était prévu et que, pour l'an prochain, elle serait aussi plus faible que ce qui avait été imaginé: 1,5% au lieu de 1,9%. Qui plus est, le Groupe relève qu'un certain nombre d'incertitudes planent sur l'évolution de l'économie genevoise et de ses entreprises, en particulier la situation en Asie.
La deuxième raison est que ce budget se traduit pour ce que nous avons pu voir jusqu'à présent par une croissance des effectifs qui, pour le moins, n'est pas «hollandaise», si vous me permettez cette référence à la pratique du gouvernement de M. Hollande, en France. En France, le nouveau régime - socialiste - a prévu que le total des nouveaux postes créés selon les priorités du gouvernement français devrait être inférieur au total de postes supprimés. C'est ainsi que les deux priorités du gouvernement français - l'éducation nationale et la sécurité - connaissent un nombre de postes nouveaux inférieur au total des postes supprimés dans tous les autres ministères, y compris au ministère de la culture, domaine tabou par excellence des socialistes français. Eh bien, ma chère collègue von Arx-Vernon n'est pas là pour voir ce qu'il en est de ce tabou-là, mais je peux lui dire que même la culture en France devra souffrir pour respecter l'objectif de M. François Hollande, indiqué à son premier ministre et évidemment traduit fidèlement par son gouvernement.
La troisième raison est que le déficit ou la dette n'est pas une fatalité. Il suffit de voir ce qui se passe de l'autre côté de la Versoix, où M. Broulis, au fil des ans, réussit à diminuer la dette au point de quasiment la supprimer. Il suffit de voir ce que font la plupart des cantons suisses: quand on regarde les budgets qu'ils ont proposés pour l'année 2013, on voit que nous faisons partie d'une petite minorité - une petite minorité qui n'arrive pas à maîtriser ses dépenses.
La quatrième raison qui fait que ce budget n'est pas acceptable pour notre Etat, c'est tout simplement parce que les plans financiers quadriennaux, qui sont proposés au fil des ans par le Conseil d'Etat, lui servent en réalité de maculature pour l'établissement d'un nouveau plan quadriennal. C'est ainsi qu'en 2010, pour le plan 2011-2015, le déficit prévu pour 2013 était de 120 millions. L'année qui suivait, le déficit a passé à 206 millions - voire 617 millions s'il n'y avait pas eu de mesure d'assainissement, celle que nous avons refusée du point de vue fiscal. Maintenant, pour 2013, on nous propose 278 millions. On nous propose, en apparence, 278 millions ! Parce que quand on y ajoute les 41 millions de l'Hospice général, qui seront votés, comme les 31 millions supplémentaires de cette année, comme les 12 millions supplémentaires de l'an passé et comme les 17 millions supplémentaires d'il y a deux ans, eh bien, nous aurons un budget qui sera déficitaire à hauteur de 329 millions !
Voilà quatre raisons qui me font douter - la quatrième notamment - qu'il puisse y avoir cet atterrissage en douceur dont parle le Conseil d'Etat. L'atterrissage sera d'autant moins doux que le Conseil d'Etat prend ses responsabilités en ce qui concerne la fiscalité des entreprises - avec raison, c'est fort bien, et là je l'en félicite - car pour l'horizon 2017-2018 ce sont plusieurs centaines de millions qui vont disparaître, et il s'agit de se préparer à cette disparition de centaines de millions de recettes.
Au surplus, à partir du 1er janvier 2014, il y aura 130 millions de dépenses nouvelles pour financer le nouveau système de pension, sauf si - j'allais presque dire: «Financièrement, par bonheur»; «Socialement, politiquement - du point de vue de la gestion - par malheur» - donc sauf si le référendum lancé par un quarteron irresponsable contre la réforme des pensions aboutissait.
Bref, à l'horizon 2015, 2016, 2017, 2018, on se rend bien compte que les choses vont se compliquer, et elles se compliqueront d'autant plus que le budget n'aura pas été modifié ! C'est pour cette raison que je me permets de conclure, Monsieur le président, en passant aux objectifs que nous poursuivons.
Le président. Il vous reste une minute !
M. Pierre Weiss. L'objectif évidemment idéal serait de faire en sorte que le nouveau budget n'ait plus de déficit; l'objectif optimum serait qu'il soit divisé par deux et que l'on soit autour de 150 à 160 millions. Et cet objectif optimum se ferait avec une augmentation des moyens mis à la disposition de la sécurité, parce que voilà une priorité qui a reçu insuffisamment d'attention ! Pour que cette priorité reçoive plus d'attention, il s'agit de couper - j'allais presque dire, puisqu'on est en termes militaires, «de sabrer» - dans d'autres départements.
Le moment est venu de prendre ses responsabilités. Nous appelons le Conseil d'Etat à prendre les siennes. En ce qui nous concerne, nous PLR, nous prendrons unanimement les nôtres ce soir en refusant l'entrée en matière. Je vous remercie. (Commentaires.)
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, ce soir une majorité d'entre nous s'apprête à renvoyer le projet de budget de plus de 7 milliards au Conseil d'Etat. Ce n'est pas un acte anodin, puisque je peux même dire que c'est l'un des sujets les plus importants que ce parlement a à voter chaque année. Nous allons, pour l'occasion, rejoindre le PLR et l'UDC, afin de renvoyer au Conseil d'Etat sa copie. mais pas tout à fait pour les mêmes raisons que le PLR. J'en veux pour démonstration que le député Weiss vient de parler de sabrage; eh bien, je crois que ce Conseil d'Etat est passé champion du monde dans l'autosabrage. J'aimerais quand même rappeler à cet hémicycle que le gouvernement est à majorité de droite ! Aujourd'hui, c'est donc bien la droite, à laquelle le MCG se joint, qui va renvoyer au gouvernement de droite sa copie.
J'aimerais quand même dire, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y a quelque chose qui cloche dans ce gouvernement ! Je veux bien qu'on ait critiqué pendant quelques années Isabel Rochat par rapport à la sécurité, mais finalement nous sommes en train de nous apercevoir qu'elle a fait ce qu'elle pouvait, avec les collègues qu'elle avait ! (Brouhaha.) Eh bien oui ! C'est la collégialité, Mesdames et Messieurs les députés ! Quant au nouveau conseiller d'Etat qui arrive et qui, bien sûr, dans la droite ligne de ce qui se faisait avant, demande des moyens supplémentaires, eh bien, le même collège à majorité de droite lui renvoie sa copie ! Et on fait passer la pilule comme ça à la population genevoise ! Alors je pose la question, Mesdames et Messieurs les députés, Mesdames et Messieurs du gouvernement: jusqu'à quand allons-nous nous moquer des citoyens genevois ? N'entendez-vous pas, Mesdames et Messieurs, ces Genevois qui demandent plus de sécurité dans les rues ?
On va m'accuser après de faire le lit du nouveau conseiller d'Etat... Eh bien, Monsieur Maudet, ce sera avec plaisir, je vous l'ai dit ! Le MCG n'a pas de dogmatisme: nous voulons de la sécurité supplémentaire ! Le peuple a choisi un nouveau conseiller d'Etat: nous l'appuierons dans cette démarche ! Ça, ça s'appelle une politique responsable ! Nous ne sommes pas dans les querelles de personnes, nous respectons le vote démocratique. Mais alors, de grâce, Mesdames et Messieurs du gouvernement, ne nous jouez pas maintenant un coup de violoncelle en disant: «Non non, nous n'avons pas les moyens, il n'y aura pas de sécurité»... Vous avez fait porter le chapeau à votre collègue, Mme Isabel Rochat; aujourd'hui, que voulez-vous faire ? Faire porter le chapeau au nouveau conseiller d'Etat ?! Que direz-vous ? «Oui, c'était son manque d'expérience, sa jeunesse»... Eh bien non, Monsieur le conseiller d'Etat, ne vous laissez pas faire ! Nous serons, nous au MCG, derrière vous pour la sécurité. (Brouhaha.) Je vous l'ai dit et je le répète publiquement: nous voulons plus de sécurité pour Genève ! (Commentaires.)
Maintenant, ce budget, Mesdames et Messieurs, ne va pas non plus en matière de promotion pour l'emploi. On le constate. On vous a dit - depuis sept ans ! - de tout faire, de tout entreprendre pour donner la priorité de l'emploi aux résidents genevois. Ce ne sont pas mes propos, Monsieur le président, ce sont ceux du député Weiss ! L'Hospice général, ô scandale, +41 millions !... Mais que fait l'Hospice général ? Rappelez-moi voir, j'ai un trou de mémoire... Ah oui, ils aident les chômeurs qui sont en fin de droit et qui n'ont pas retrouvé de boulot ! Damned ! Donc, on vous l'avait dit ! Et chaque année ce sera pire. Tant et aussi longtemps que vous n'ouvrirez pas les yeux, Mesdames et Messieurs, et que vous ne ferez pas tout ce qui est en votre pouvoir pour favoriser l'emploi des résidents genevois, eh bien le poste Hospice général continuera à augmenter !
Alors, le MCG n'entrera pas en matière sur ce budget. Parce que vos priorités, Mesdames et Messieurs du gouvernement, ne sont pas les bonnes, pour les Genevois ! A un moment, la plaisanterie doit s'arrêter ! A un moment, il faut que vous subissiez un électrochoc ! Et si ce n'est pas maintenant, eh bien peut-être que ce sera l'année prochaine, lors des élections générales ! Il y en a assez, maintenant ! La voix des Genevois doit être entendue, et c'est aussi le rôle d'un parti politique tel que le Mouvement Citoyens Genevois que de la faire entendre dans cet hémicycle. Pour ces raisons, nous refuserons l'entrée en matière sur ce budget et attendons avec impatience un budget revu et corrigé par rapport à la sécurité et à l'emploi !
Et je conclurai en disant, Monsieur le président, que, par respect pour les fonctionnaires, concernant l'hypothétique possibilité de partir en douzièmes, j'aimerais rassurer ici l'ensemble de la fonction publique, à la différence des membres du PLR. Quand on part en douzièmes, il n'y a pas d'annuités. Mais dans la loi, lorsque le budget est voté, c'est rétroactif au 1er janvier 2013 ! (Commentaires.) Sauf... (Brouhaha.) Sauf ! Sauf si le parlement prépare un projet de loi ad hoc pour ne pas les payer. Bien sûr, nous nous y opposerons. Avant la prochaine session du mois de novembre, le MCG déposera un projet de loi ! Et chacun d'entre vous sera face à ses responsabilités par rapport aux fonctionnaires, qui défendent l'Etat et qui font en sorte que Genève continue quand même d'avancer, malgré les erreurs de gestion du gouvernement. Le MCG déposera un projet de loi pour que, si nous devions partir en douzièmes dès le 1er janvier, les annuités soient payées aux fonctionnaires. Parce que les fonctionnaires n'ont pas à faire les frais de la gestion chaotique de ce gouvernement ! (Brouhaha.)
Je conclus, Monsieur le président, en disant qu'il y a certaines communes dont le gouvernement pourrait bien s'inspirer, notamment de celle où je suis magistrat délégué aux finances: Onex !
Des voix. Ah !
M. Eric Stauffer. Pour la deuxième année consécutive, en période de crise nous parvenons à déposer un budget dans les chiffres noirs, avec une marge suffisante ! Et ça, ça s'appelle le système D, mais évidemment il faut savoir calculer, ce qui n'est visiblement pas le cas du gouvernement !
Des voix. Bravo !
M. Roger Deneys (S). Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ont accueilli avec une certaine surprise la proposition de discussion immédiate sur le PL 11027. Pour les socialistes, la discussion sur le budget de l'Etat n'est pas une discussion anodine. On parle de plusieurs milliards, on parle de 8, 10 ou 15 milliards quand on regarde les comptes consolidés. C'est donc une discussion sur des montants exceptionnellement élevés, pour une collectivité publique qui représente près d'un million d'habitants; c'est une discussion qui engage des responsabilités à long terme pour une région entière. Parler d'un budget sur le siège - alors que cela ne se fait quasiment jamais devant ce Grand Conseil - c'est tout simplement inadmissible, c'est tout simplement infantile ! Je suis véritablement choqué qu'un parti qui est représenté en masse au Conseil d'Etat puisse faire une proposition pareille !
Le Conseil d'Etat, Mesdames et Messieurs les députés, ne fait qu'appliquer les lois et les propositions qui sont votées dans ce Grand Conseil - les propositions que vous avez votées, parce que vous êtes majoritaires, Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente, du PLR en particulier ! Donc ce budget est le résultat direct de votre politique !
Alors comment osez-vous aujourd'hui, en plénière, demander d'étudier des documents qui représentent - pour la partie de ceux que nous avons - près de deux kilos, si ce n'est trois !? Et ces documents vont être mis à la poubelle simplement à cause d'un mouvement d'humeur qu'un enfant de quatre ans n'aurait pas ! C'est tout simplement scandaleux ! L'administration a travaillé pendant des mois; la commission des finances se préoccupe des questions financières à longueur d'année; l'administration nous répond, nous donne des informations... Aujourd'hui, si vous n'avez pas déposé de projet de loi pour changer les chiffres, ce n'est pas la faute du Conseil d'Etat ! C'est le résultat de votre inconséquence permanente ! Et ça - je suis désolé de devoir le dire - un enfant de quatre ne le ferait pas ! C'est tout simplement scandaleux !
Il est arrivé aux socialistes de refuser le budget parce que nous n'étions pas d'accord avec certains choix. Mais nous faisions des propositions ! L'an dernier, nous avons fait des propositions d'économies; nous avons fait des propositions de nouvelles recettes. Pour nous, c'est un travail sérieux, qui se fait sur des bases sérieuses. C'est-à-dire en étudiant les documents ! Au demeurant, rien n'empêche le PLR d'étudier, comme chaque année, ce projet de loi en commission, puis, au final, de déposer un certain nombre d'amendements ! En connaissance de cause ! Mais ce n'est pas ça qui vous intéresse ! On l'a déjà vu l'an dernier. L'an dernier, l'amendement du PLR c'était de dire: «Il faut un déficit de moins de 350 millions.» C'était le chiffre qu'il fallait atteindre ! D'où venait ce chiffre ? De nulle part ! Aucune analyse sérieuse, aucune analyse financière, aucune analyse scientifique ! Ce chiffre tombe du ciel ! L'année passée, 350 millions de déficit, c'était acceptable. Cette année, le Conseil d'Etat présente un budget avec moins 278 millions, et ce n'est pas acceptable pour vous ! Pourquoi ? Pour aucune raison sérieuse, ni scientifique, ni financière, ni rien ! Il n'y a aucune analyse dans votre décision ! C'est simplement vouloir mettre en porte-à-faux le Conseil d'Etat - de votre majorité ! Cette attitude est déraisonnable et franchement pas sérieuse pour un parlement. Les députés de la commission des finances ont toutes les occasions, toutes les semaines, de poser toutes les questions qu'ils veulent, et ils peuvent déposer des projets de lois s'ils veulent changer les choses ! Ils ne le font pas ! Vous ne le faites pas ! Et ensuite, vous venez vous plaindre de ce que le Conseil d'Etat ne fait pas son travail !...
Je vais vous donner un exemple. Lors de l'examen du budget 2012, vous avez accepté d'accroître les recettes en augmentant les taxes à payer par les cafetiers-restaurateurs, donc une augmentation de 700 000 F. Ça, vous l'avez accepté ! «On va taxer de 700 000 F les cafetiers-restaurateurs, parce que ça va sauver le budget de l'Etat»... Dans le même temps, vous avez refusé toutes les économies socialistes proposées, pour près de 8 millions, sur des postes précis, notamment les postes prévus concernant les plans stratégiques de développement, pour le Plan directeur cantonal que vous refusez pourtant. Vous votez des postes pour rien, mais, après, vous refusez de faire des économies sur les postes sérieux, et en même temps vous augmentez les taxes sur les cafetiers-restaurateurs ! Et vous prétendez défendre l'économie ?! C'est tout simplement scandaleux ! Votre attitude n'est pas responsable, et je pense que la moindre des choses pour un budget, même si on le refuse au final, c'est de l'étudier. C'est le minimum d'honnêteté intellectuelle de la part des députés qui travaillent dans ce parlement et c'est un minimum de respect envers le Conseil d'Etat. Je trouve donc qu'il est fortement inadmissible d'agir comme vous le faites. Pour cette simple raison, je demande immédiatement le renvoi en commission de ce projet de loi ! (Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission... (Remarque. Commentaires.) Nous sommes saisis d'une demande de renvoi de ce projet de budget à la commission des finances. (Brouhaha.) Je vous soumets cette proposition.
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 11027 à la commission des finances est rejeté par 51 non contre 38 oui.
Le président. Le débat se poursuit, la parole est à M. le député Eric Leyvraz.
M. Eric Leyvraz (UDC). Merci, Monsieur le président. L'UDC est quand même un peu consternée de voir avec quelle constance, avec quelle tranquillité, cet Etat va dans le mur, sans rien changer à sa direction: un déficit de 278 millions ! On peut encore discuter de 30 millions de plus, parce qu'il y a maintenant un recours sur les 30 millions que l'Etat a pris - subtilisé - aux Services industriels. Ce qu'on oublie de dire aussi, c'est qu'on a baissé de 200 millions les investissements. Donc, à paramètres égaux, on pourrait dire que le déficit devrait être de 500 millions. Parce que, pour une ville et un canton comme Genève, des investissements de 526 millions ne sont largement pas suffisants. Nous sommes quand même surpris par cette attitude, et je crois que tout le monde est responsable de ce qui se passe actuellement !
Nous constatons aussi que nous n'avons plus de marge de manoeuvre face à ce déficit: nous ne pouvons pas augmenter les impôts, puisque les impôts du canton de Genève sont les plus élevés de Suisse - l'impôt sur la fortune est le plus élevé du monde. Nous avons une dette qui est en moyenne cinq fois plus élevée que la moyenne suisse ! Comment faire pour faire rentrer de l'argent ? Le seul moyen que nous avons maintenant, c'est de dire qu'il faut réduire la voilure. Dans les années fastes, les cantons qui nous entourent ont tous diminué leur dette et assuré des finances saines, que ce soit le canton de Vaud, que ce soit Berne - qui a fait des efforts gigantesques parce qu'il avait des grosses dettes - que ce soit Fribourg ou que ce soit Zurich. Or, la seule réponse qu'on nous donne, c'est qu'on ne peut pas comparer... Alors, Mesdames et Messieurs, je vous livre un scoop: nous sommes incomparables ! A Genève, nous sommes dans une bulle, certainement avec d'autres lois physiques, avec d'autres lois financières qui ne concernent pas les autres cantons ! Nous sommes, à Genève, le nombril du monde, nous sommes le nouveau Cuzco international !
Alors ça me rappelle quelque chose que vous avez connu aussi, il y a bien des années. Nous sommes sur une autre planète, comme dans cette bande dessinée merveilleuse, les Shadoks, avec la voix absolument unique de Claude Piéplu. Les Shadoks vivaient sur une planète où les règles physiques n'étaient pas les mêmes, où il n'y avait pas du tout la même logique. Un jour, le bateau des Shadoks, la proue enfoncée, s'échoue sur la berge... Sur une planète avec une logique normale, on aurait un peu allégé le bateau et on aurait appelé un remorqueur pour remettre le bateau dans le fleuve. Les Shadoks, avec leur logique à eux, se sont dit qu'ils allaient trouver une idée géniale. L'idée géniale, c'était de faire une file de Shadoks sur le bateau et, avec des seaux, de prendre de l'eau derrière le bateau pour la mettre devant le bateau ! Eh bien, Mesdames et Messieurs, le bateau, c'est l'Etat ! Les Shadoks sur le pont, c'est nous; et celui qui nous fournit les seaux, c'est le Conseil d'Etat ! Parce qu'il est persuadé que c'est la bonne solution pour s'en sortir ! Alors, moi j'admire la fantaisie, l'imagination du Conseil d'Etat dans le choix des seaux: il en a changé la couleur, il en a augmenté la quantité, il en a changé la matière, et même, ces derniers temps, il nous a fourni des seaux avec des trous, ce qui fait que, quand on arrive à la moitié du bateau, le seau est vide. Mais pour ceux qui restent pour porter les seaux, c'est drôlement agréable parce qu'ils sont beaucoup plus légers.
Mesdames et Messieurs, nous sommes en plein délire. Il faut sauver cette république ! La situation est beaucoup plus grave que ce qu'on veut bien dire et nous ne pouvons pas accepter un déficit qui est structurel, cela depuis longtemps, et qui va enfoncer encore plus cette république dans des difficultés dont nous ne nous sortirons pas ! Car ce qui nous menace est à notre porte ! On sait que, quel que soit le résultat du référendum, il faudra payer des milliards pour les caisses de pension, que les problèmes de taxation des entreprises vont nous coûter 200, 300 voire 400 millions ! Où allons-nous ? Nous ne pouvons pas continuer comme ça et mettre en danger cette république ! Nous mettons en danger cette république pour plusieurs raisons: parce que l'attractivité de cette république, si nous ne sommes pas capables d'investir suffisamment dans les transports, dans les immeubles, dans la santé et surtout dans la sécurité - c'est ce que tout le monde demande maintenant - eh bien, cette attractivité va baisser, nous allons perdre des gens qui vont partir de ce canton ! Des gens qui payent des impôts ! Mesdames et Messieurs, à un moment donné, c'est dramatique, on a n'a plus le choix ! C'est tellement facile de dire que nous allons augmenter les subventions... Nous ne pouvons plus le faire et c'est maintenant qu'il faut prendre des décisions. Si nous ne les prenons pas maintenant, nous allons conduire cette république dans des situations extrêmement difficiles, dans des situations où il faudra licencier du personnel, mais alors à large échelle !
Simplement, l'Etat est beaucoup trop important, il dépense beaucoup trop d'argent. Quand on est à 8 milliards de francs de budget pour 460 000 habitants et qu'on ne s'en sort pas, c'est qu'il y a un problème de fond qu'il faut absolument résoudre. C'est pour ça que nous refuserons ce budget et le renverrons au Conseil d'Etat, car il faut absolument qu'on arrive à l'équilibre. (Applaudissements.)
Mme Emilie Flamand (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, en préambule, je m'étonne que nous soyons arrivés à une situation aussi catastrophique que celle que vous décrivez, avec un Conseil d'Etat composé de sept personnes bien suisses ! Il faudrait peut-être leur demander leur passeport, mais a priori ce sont des personnes bien de chez nous ! (Brouhaha.)
Plus sérieusement, les Verts considèrent qu'on ne peut pas refuser un budget sans l'avoir étudié. Nous ne soutiendrons pas le caprice du PLR, caprice d'autant plus étonnant que celui-ci compte trois conseillers d'Etat. Nous voterons donc l'entrée en matière et nous demanderons le renvoi en commission des finances, renvoi que je profiterai de demander à la fin de mon intervention. Les Verts regrettent que le Grand Conseil renonce ainsi à ses prérogatives. Certains comparent volontiers les parlementaires à des eunuques, mais aujourd'hui c'est le parlement qui s'automutile en renvoyant la balle au gouvernement sans se saisir de ce budget et sans fixer de vraies priorités.
Ce budget n'est pas parfait, certes, et les Verts auraient de nombreuses améliorations à y apporter. Le déficit nous inquiète et le remboursement de la dette nous tient à coeur. Nous étions d'ailleurs prêts à soutenir le plan financier quadriennal présenté par le Conseil d'Etat l'an dernier, lequel prévoyait des mesures permettant le retour à l'équilibre. Mesures qui concernaient des diminutions de charges, certes, mais aussi des augmentations de recettes, relativement indolores puisqu'elles touchaient essentiellement des niches fiscales. Alors les Verts ont accepté de jouer le jeu pour le budget 2012, mais la majorité de ce parlement ne l'a pas fait: elle a refusé toutes les propositions de modifications fiscales du Conseil d'Etat.
La majorité de droite et de «ni de gauche ni de droite» a ainsi compromis gravement le retour à l'équilibre, qui doit se faire, justement, de manière équilibrée, en agissant sur les dépenses et sur les recettes. Aujourd'hui, le PLR demande donc le renvoi de ce budget au Conseil d'Etat, trouve une majorité avec l'UDC et le MCG... La question est de savoir s'il en trouvera une pour voter l'hypothétique prochain budget. En effet, ni l'UDC ni le MCG ne sont connus pour leur soutien indéfectible au Conseil d'Etat et à ses budgets. Et je rappelle qu'il faut 51 voix pour adopter un budget déficitaire. Ce n'est certainement pas avec les mesures préconisées par le MCG - à savoir plus de prestations, moins d'impôts, les annuités aux fonctionnaires et encore un peu plus de crème dans les millefeuilles - que nous y arriverons !
Ces dernières années, au prix du gobage de quelques couleuvres, les partis gouvernementaux, ceux-qui sont censés assumer des responsabilités, et non pas tirer à vue, étaient parvenus à trouver des accords. Aujourd'hui, le PLR fait le choix d'une autre alliance, je ne suis pas sûre que cela servira au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Je vous engage, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter l'entrée en matière sur ce projet de loi et à le renvoyer à la commission des finances. (Applaudissements.)
Le président. Vous avez formalisé une demande de renvoi en commission que je mets aux voix.
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 11027 à la commission des finances est rejeté par 54 non contre 38 oui.
Le président. La parole est à M. le député Guy Mettan.
M. Guy Mettan (PDC). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, avant de commencer mon intervention, j'aimerais qu'on ait une pensée pour notre ministre des finances qui vient de subir une petite intervention à l'épaule, qui s'est bien déroulée. On lui souhaite un prompt rétablissement, car il aura besoin de toutes ses épaules pour supporter le fardeau que certains s'apprêtent à lui renvoyer ce soir. J'aimerais aussi le remercier des efforts qu'il a consacrés à la préparation de ce budget. Pourquoi? Parce que ce budget, tout le monde en convient, il n'est pas bon; il est même franchement mauvais, et nous sommes tous d'accord sur ce diagnostic.
Mais ce budget a aussi certaines qualités. Parmi ces dernières, il propose des postes supplémentaires pour la formation, avec une réforme du cycle d'orientation que vous avez tous votée, chers amis de l'Entente - et aussi des autres partis - mais que vous vous apprêtez à refuser ce soir. Il y a aussi des postes pour la justice. Vous avez insisté pour élire M. Jornot - et c'était un bon choix - comme procureur, et vous lui refusez ce soir les postes pour la sécurité, pour la justice que vous avez vous-mêmes voulue ! Voilà le choix que vous nous proposez !
Aussi, je pars de la considération suivante: vous nous dites: «Nous renvoyons ce budget au Conseil d'Etat - malgré ses points positifs, que j'ai soulignés - parce que nous estimons que le déficit est trop grave et qu'il faut retravailler ce budget»... Mais qu'est-ce que la finalité d'un parlement, sinon de voter un budget et d'améliorer ce qui n'est pas bon ? Si le budget est mauvais, eh bien, dans ce cas, il faut l'améliorer ! Il faut le rendre meilleur ! Et c'est le travail des députés que d'effectuer ce programme ! Et là, vous êtes en train d'abdiquer notre propre travail de députés en refilant la patate chaude au Conseil d'Etat ! Mais je refuse, personnellement, de considérer que j'ai été élu par le peuple pour ne pas remplir mon mandat, comme vous m'invitez à le faire ce soir !
Je ne comprends pas du tout la finalité de votre proposition. Comme je l'ai dit, si une chose est mauvaise, on travaille pour la rendre meilleure, et le parti démocrate-chrétien est prêt à travailler ! Nous, nous sommes prêts à travailler... (Brouhaha.) ...nous ne sommes pas paresseux au point de refuser d'entrer en matière et de faire le boulot qui nous est proposé, à savoir d'améliorer ce budget. Si cette finalité... Je n'arrive pas à la comprendre ! Elle est parfaitement incompréhensible ! Puisque le but que vous nous proposez va exactement en sens inverse de ce que vous prétendez vouloir ce soir. Je ne comprends pas du tout la stratégie, non plus ! Alors, je comprends la tactique; la tactique consiste à faire un coup politique, à pousser un coup de gueule, à avoir peut-être la une, demain, dans les journaux... Ça, je le comprends très bien. Mais pour moi, la politique, ce n'est pas que des coups, ce n'est pas que de la tactique: c'est de la stratégie. Si on réfléchit à la stratégie, il n'y a que deux possibilités. (Remarque.) Si on renvoie le budget, il n'y a que deux possibilités. La première, c'est que le Conseil d'Etat vous prenne au sérieux, c'est-à-dire qu'il recommence à faire tout le travail qu'il a effectué pendant six mois - donc il va prendre trois ou quatre mois pour tout réexaminer, refaire travailler tous les services pour trouver d'autres coupes. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire qu'on va partir dans les douzièmes. Or, si l'on part dans les douzièmes, il n'y a aucune amélioration possible. C'est impossible de faire un travail sérieux en trois semaines !
Une voix. Il aura trois mois !
M. Guy Mettan. Alors on va repartir dans les douzièmes provisionnels, et si on repart dans les douzièmes on ne gagne rien du tout, aucune économie, donc tous les buts que vous nous proposez seront ratés ! En plus, on n'aura pas les priorités de sécurité et d'enseignement que vous avez acceptées et auxquelles nous souscrivons aussi. Ça, c'est la première possibilité, si le Conseil d'Etat examine sérieusement à nouveau le budget.
La deuxième possibilité, c'est que le Conseil d'Etat joue votre jeu et nous renvoie le projet de budget d'ici à trois semaines, un mois ou quinze jours, que sais-je, en faisant juste un petit aménagement technique. C'est-à-dire que, la semaine prochaine, on verra la publication des nouveaux résultats concernant l'évolution de la conjoncture. On sait, la conjoncture sera meilleure que celle qui nous a été dite, donc on va vers des recettes fiscales qui, pour les personnes morales, seront supérieures à celles qui ont été projetées, de 20 ou 30 millions. Donc le Conseil d'Etat, à ce moment-là, va nous renvoyer le projet en disant: «Voilà, la conjoncture nous indique qu'il y a 20 millions de recettes supplémentaires», il va nous le renvoyer avec un déficit à -250 millions ou quelque chose comme ça. Mais, Mesdames et Messieurs, il ne sert à rien de renvoyer le budget au Conseil d'Etat ! Un simple amendement en commission suffit à tenir compte de cette nouvelle réalité ! Donc, à partir de là, je ne comprends pas la finalité ! Et je ne comprends pas la stratégie ! Ce que je comprends, c'est que c'est un coup, mais c'est un coup qui va être un coup d'épée dans l'eau, et moi je vous engage à travailler sérieusement, à accepter ce budget, et à faire ce que l'on devrait, comme tous les députés responsables: à trouver... (Remarque.) Ne pas accepter le budget tel quel ! A le travailler pour trouver de nouvelles économies ! Mais ça, ça se fait en commission et il faut nous donner le temps de le faire. Si vous ne nous le donnez pas, rien ne va se passer ! (Brouhaha.)
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, je vous encourage à accepter l'entrée en matière et à travailler sérieusement pour trouver de nouvelles pistes d'économies et réduire ce déficit, comme nous essayons de le faire chaque année. C'est ça être responsable, pour Genève, pour le bien de notre république, ce soir ! (Applaudissements.)
M. Bernhard Riedweg (UDC). Mesdames et Messieurs les députés, cela a été dit tout à l'heure: Genève a les impôts sur la fortune les plus élevés de Suisse. Genève a les impôts sur le revenu les plus élevés de Suisse. Genève a la dette par habitant la plus élevée de Suisse, à 32 000 F. Genève compte 100 000 personnes bénéficiant d'une subvention pour l'assurance-maladie. Nous vivons au-dessus de nos moyens, il faut être conscient de cela.
Dans ce contexte, on attend un sursaut politique du canton en matière de finances, d'autant plus que la conjoncture économique va devenir plus difficile. Il y aura la hausse du franc suisse et le tourisme va souffrir. Les sièges des multinationales vacillent et le secteur bancaire est pris en tenaille entre les coûts en hausse et la levée du secret bancaire. Or, le secteur bancaire représente 19% de l'économie à Genève.
Les recettes fiscales devraient donc fortement baisser. Ce sont avant tout les industries du luxe qui soutiennent l'économie genevoise, j'ai nommé l'horlogerie, la bijouterie et la parfumerie, qui sont des secteurs éphémères. Or, en période de crise, on n'augmente pas les impôts, on augmente les investissements pour relancer l'économie, et sur cet aspect nous aurons des problèmes. L'Etat doit absolument s'attaquer aux subventions qui se montent à 3,8 milliards, c'est-à-dire à 48% des charges, ainsi qu'aux charges du personnel qui sont de 2,2 milliards, soit 28% des charges. Nous refuserons donc ce budget. (Applaudissements.)
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Mesdames et Messieurs les députés qui vous apprêtez à refuser sur le siège ce projet de budget, je voudrais d'abord vous répondre avec des arguments juridiques et formels. En faisant cela, vous vous asseyez sur l'article 201 de la loi portant règlement du Grand Conseil et, plus grave encore, sur l'article 80 de notre constitution - encore peut-être pour quelque jours - que je vous invite à lire tout à l'heure.
Cela dit, ce n'est pas le juridisme qui m'intéresse aujourd'hui, c'est la politique. C'est la politique, et, comme plusieurs d'entre nous l'ont dit ce soir, je ne comprends pas très bien votre position. Parce que vous vous attaquez à un Conseil d'Etat qui est le vôtre, majoritairement; avec une majorité relative du PLR. En plus, on nous a dit qu'en principe, et de manière générale, le PDC fait partie de l'Entente. Cette Entente a la majorité absolue au Conseil d'Etat, et je m'étonne que vous n'arriviez pas à faire passer votre politique ! Je m'en étonne d'autant plus que, historiquement, vous avez toujours été majoritairement au pouvoir ! Quatre ans seulement, entre 2005 et 2009, il y a eu une majorité de l'Alternative au gouvernement; concernant le parlement, il faut remonter à la période 1997-2001 - seulement quatre ans également. Donc le poids de la dette, le poids des problèmes actuels que vous êtes tous à souligner, c'est l'Entente qui les porte sur ses épaules, et non pas l'Alternative ! (Brouhaha.)
Ces problèmes sont aussi dus à des décisions que vous prenez, que vos partis prennent sur le plan fédéral, et là ça concerne très clairement aussi l'UDC. Vous souhaitez par exemple modifier la loi en matière de chômage et réduire les indemnités aux chômeurs: qui va payer pour cette masse de personnes qui arrivent à l'aide sociale ? Les cantons ! Il y a quelques jours encore, on nous rappelait qu'il y a 20% d'aides sociales à Genève, en faisant le lien avec la loi que vous avez votée. Vous avez voté sur le plan fédéral des réformes de la justice, soit, mais vos partis ont souhaité qu'on s'adapte au modèle zurichois, en termes de juridiction. Eh bien, c'est un modèle qui coûte beaucoup plus cher que notre système juridique genevois, qui était, au fond, bien plus efficient, si on parle de coûts.
Vous votez régulièrement des baisses d'impôts... C'est possible ! Vous les souhaitez. Mais la tactique est claire ! On agit ainsi en période conjoncturelle plutôt favorable, en disant que ce sera supportable; et dès qu'il y a un retour de conjoncture un peu plus mauvaise, vous dites: «Voyez, on n'y arrive pas, il faut baisser les prestations.» Et c'est cette spirale-là que vos partis mettent en place, tout simplement pour démanteler l'Etat.
Alors, moi j'ai une question que j'adresserai à vous, Mesdames et Messieurs les députés, mais aussi à vous, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat: est-ce que vous vous parlez de temps en temps ? Est-ce que vous communiquez ? Parce que là, moi j'ai un vrai problème ! Nous, nous n'avons qu'un conseiller d'Etat, mais il se trouve qu'on se parle, je crois, en tout cas plus que vous ou les uns et les autres !
En définitive, que cache votre demande ? D'une part, une certaine peur; je crois que vous avez peur, Mesdames et Messieurs les députés - du PLR notamment. Vous avez peur de ce qui pourrait arriver si nous avons deux exercices déficitaires consécutifs. Parce que vous avez vous-mêmes - vous-mêmes ! - souhaité mettre en place un mécanisme de frein à l'endettement. Et qu'est-ce qui va se passer en 2014 ? On va demander à la population de choisir ! Voulez-vous plus de policiers ? Plus de sécurité ? Ou acceptez-vous éventuellement une hausse d'impôts ? Voulez-vous qu'on diminue le nombre de lits à l'hôpital ou acceptez-vous une hausse d'impôts ? Moi, je prends le pari que la population aura la sagesse de souhaiter la hausse d'impôts ! Et c'est de ça, Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente et de l'UDC, c'est de ça que vous avez peur aujourd'hui. En définitive, ce que vous nous montrez maintenant, c'est votre incapacité à gouverner. Depuis toujours ! (Applaudissements.)
M. Renaud Gautier (L). Mesdames et Messieurs les députés, permettez à un incapable de prendre la parole pour essayer de répondre à deux ou trois interrogations ô combien fondamentales que celles et ceux qui généralement appuient de tout leur poids sur le budget - M. Mettan, par exemple - et proposent des solutions n'ont pas compris.
Madame Torracinta, vous qui parlez si régulièrement avec vos conseillers d'Etat, en particulier avec M. Beer... (Rires.) ...quand vous évoquez la problématique de la peur, vous n'avez pas entièrement tort. Ce n'est pas une peur, c'est une inquiétude. Lorsque le Conseil d'Etat présente son budget, il nous présente le fruit d'un travail auquel les fonctionnaires ont longuement travaillé. Et, le fruit de ce travail, il a deux bornes. La première, qui consiste à dire que le budget présenté est basé sur le principe du «soft landing», l'atterrissage en douceur. Mesdames et Messieurs, le «soft landing» est à l'économie ce que «Let it be», est à la chanson des Beatles: c'est un air de musique ancien, assez plaisant, mais somme toute relativement hors du temps. Le «soft landing» est une théorie économique inventée aux Etats-Unis dans les quatre-vingts, lorsque le souci se faisait assez aigu de s'imaginer qu'après une période de croissance on pouvait avoir des périodes de stagflation. Quelques universitaires, forcément grassement payés, ont donc inventé la théorie du «soft landing». Mais ça n'a aucun sens aujourd'hui et c'est vraiment prendre les députés pour des ânes que de ne pas voir que, derrière le joli jeu de mot de l'atterrissage en douceur, ça ne correspond pas à la réalité !
Monsieur Deneys, j'imagine qu'il y a beaucoup de «M. Deneys» en Grèce - ou qu'il y en a eu beaucoup dans le temps ! (Rires.) Regardez ce qui se passe autour de nous ! La réalité économique, telle que la présente le budget de l'Etat, c'est un peu le village des Gaulois: tout le monde est dans une merde économique incroyable, à part Genève !... A Genève, tout va bien aller ! On vit une espèce d'atterrissage en douceur et les problèmes qu'ont tous les pays autour de nous s'arrêtent à la frontière... Donc, nous n'aurons pas de problèmes économiques étrangers, tels qu'on les a évoqués ce soir, ce qui est quelque part extrêmement rassurant !...
La deuxième borne du principe consiste à dire que, de toute façon, dans deux ans, nous instaurerons le frein au déficit !... Alors là, Mesdames et Messieurs, quand on parle de supercherie, en effet, il y en a une ! Les gouvernants sont là pour quoi ? Pour diriger ou bien pour dire que le peuple sera amené à voter dans deux ans ? Quelle différence y a-t-il entre les sept personnes qui sont assises là et nous ? Eux, les gouvernants, ont été élus parce qu'ils devaient prendre des décisions, parce qu'ils devaient faire des propositions. Or ce budget n'en contient aucune; ce budget est une espèce de truc un peu acratopège, sans vraiment aucune qualité, qui ne propose strictement aucun choix, qui dit simplement qu'il faut ajouter le «mercredi scolaire» - soit ! - qu'il faut plus de policiers - soit ! - et qu'il y ait plus de postes pour la justice - soit ! Résultat, ce sont 280 postes en plus ! Est-ce qu'un effort, un seul, a été fait, dans le cadre de la présentation de ce budget, pour dire: «On a serré les boulons partout. On a besoin de 280 postes supplémentaires, mais en fait on en aurait besoin de 600, on devra trouver ailleurs» ? Pas un !
Mesdames et Messieurs, mon excellent collègue Edouard Cuendet raconte dans l'un de ses blogs quelle est la préoccupation actuelle de l'Etat: c'est de vérifier l'état des arbres importants à Genève, de façon à voir si le livre publié en son temps par Claude Haegi - à l'époque où la situation économique était différente - eh bien, c'est de vérifier si les arbres mentionnés dans ce livre sont toujours là !... On se pince ! Est-ce que la réalité économique, aujourd'hui à Genève, permet qu'on aille vérifier la qualité des arbres centenaires à Genève ?! Non ! Mais à force de faire ce genre de choses-là, à force de ne pas voir la réalité, à force de ne pas voir qu'il y a du chômage à Genève, que les secteurs les plus importants de Genève licencient, que l'avenir économique qu'on nous propose à Genève est fortement obéré, on présente effectivement le budget qu'a présenté le Conseil d'Etat !
Ce budget n'est pas acceptable à la forme et au fond, parce qu'il ne démontre pas ce que doit faire le Conseil d'Etat, soit faire des propositions. Vous appelez de vos voeux, Madame, une hausse d'impôts... Pourquoi pas ! Mais qu'on vienne nous expliquer pourquoi et comment; et après, on en parlera ! (Remarque.) Si ! vous avez dit ça ! De même que M. Deneys a dit que c'est grâce à nous que les impôts baissaient ! Heureusement ! Il oublie simplement de dire que la population, par hasard, était d'accord avec cet avis-là ! Ce n'est pas seulement ce parlement.
Donc, oui, on attend du budget d'un gouvernement qu'il propose des choix, qu'il propose des directions ! Il n'y en a aucune dans celui que vous avez proposé ! (Commentaires.) Dans la mesure où nous sommes cohérents et responsables, nous partons du principe qu'on ne peut pas attendre jusqu'au mois de décembre pour refuser un budget dont l'essentiel de ce parlement ne veut pas, y compris les PDC. Parce que nous sommes soucieux de la situation économique de cet Etat, il nous faut refuser maintenant ce budget, de façon que le Conseil d'Etat - qui a encore deux mois et demi jusqu'à la fin de l'année - puisse prendre les mesures nécessaires pour proposer un budget qui soit objectivement centré sur la réalité économique actuelle et future de Genève et ne soit pas une simple hypothèse de travail sur l'hypothétique «soft landing». (Applaudissements.)
M. Ivan Slatkine (L). Mesdames et Messieurs les députés, mon collègue Gautier a exprimé à peu près tout ce que je voulais dire. Il ne s'agit pas, pour les députés libéraux et radicaux, d'un mouvement d'humeur, il s'agit de prendre nos responsabilités. Et prendre nos responsabilités, c'est indiquer assez tôt au Conseil d'Etat que ce budget ne nous convient pas et c'est lui donner une chance de revenir avec un budget acceptable, de telle sorte qu'en 2013 nous n'en soyons pas aux douzièmes provisoires. C'est le premier élément !
Le deuxième, c'est assumer nos responsabilités. Parce que si le frein à l'endettement est une mesure extrême qui peut être prise, nous ne souhaitons pas en arriver au frein à l'endettement. Et le gouvernement, jusqu'à aujourd'hui, nous a proposé quoi ? Il nous a proposé des hausses d'impôts ! Il nous les a proposées, mais cette majorité, aujourd'hui, dans ce Grand Conseil, les a refusées ! Donc, le gouvernement doit être conscient que ce qu'on lui demande, c'est de nous proposer des baisses de charges ! Et dans le budget tel qu'il nous l'a soumis, il n'y en a pas.
Raison pour laquelle nous renvoyons aujourd'hui ce projet au gouvernement et nous lui demandons de revenir avec un projet de budget acceptable, pour parer au maximum les douzièmes et pour parer au frein à l'endettement, dans l'intérêt des Genevois. (Applaudissements.)
M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, non, ce n'est pas un caprice ! Il est difficile aujourd'hui, c'est vrai, de savoir si ce budget est acceptable ou n'est pas acceptable. Par contre, d'un point de vue d'observateur, cela fait sept ans que je fais cet exercice et il est vrai aussi que c'est difficile - même en analysant toutes les politiques publiques ou, à l'époque, tous les départements - eh bien, il est très difficile d'avoir un levier, comme député. On voit bien que ce n'est que sur un tout petit pourcentage qu'on peut influer. Les professionnels, ce n'est pas nous ! Nous, nous sommes les politiciens de milice. Les professionnels, ils sont là: c'est vous, Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, c'est vous qui êtes les mieux à même de travailler ce budget.
Raison pour laquelle nous pensons honnêtement - je le rappelle, ce n'est pas un caprice - qu'en vous renvoyant ce budget en octobre, il sera probablement possible de trouver encore quelques pistes qui pourraient nous échapper actuellement. J'en donne quelques-unes. Vous vous rappelez que le PLR était contre les investissements incroyables pour «En chardon», soit 300 millions pour un dépôt TPG. Je vous rappelle qu'on va en construire deux autres ! Ça fera pas loin d'un milliard... Je sais que ce sont les investissements ! Mais on a un peu l'impression que peut-être, dans ce genre de constructions, on dépense beaucoup - est-ce qu'en France voisine ils dépensent un milliard pour garer des trams et des bus ? peut-être pas ! peut-être qu'ils dépensent 200 ou 300 millions - et, là, nous aurions peut-être des économies à trouver. Quelques pistes: ce n'est pas à moi de dire si le projet de plage publique aux Eaux-vives est forcément quelque chose de nécessaire; ensuite, le nombre d'élèves par classe, ce n'est pas, non plus, à moi de le fixer. C'est peut-être le conseiller d'Etat en charge de l'instruction publique qui pourrait travailler ce levier.
Donc honnêtement - je vous le rappelle, ce n'est pas un caprice - on vous renvoie ce budget, afin que vous essayiez de trouver des pistes, mieux que nous, nous pourrions le faire.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est M. Roger Deneys, pour la deuxième fois.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, ce qu'il y a de certain, c'est que le député Gautier, comme ses collègues du PLR, parle en toute ignorance de cause. (Commentaires.) Le projet de budget n'a pas été étudié en commission, je ne sais donc pas comment il peut porter un jugement sur ce qu'il contient. Il le sait, je pense... par «infusion divine» ? Une tisane divine pour le PLR ? Soyons sérieux ! Pour parler du budget en toute connaissance de cause, il faut pouvoir l'étudier en commission ! La méthode élémentaire consiste à d'abord étudier, ensuite à faire des propositions - qui sont adoptées ou refusées - et, au final, on décide d'accepter ou pas le résultat financier qui en découle. Mais il faut pouvoir connaître les chiffres ! Il faut pouvoir connaître les propositions du Conseil d'Etat, voir ce qui a été accepté comme amendements, voir ce qui a été refusé comme amendements ! Et il ne s'agit pas d'une discussion de principe, avec des enjeux pareils ! J'insiste sur ce manque de sérieux.
En plus, ce qui me pose véritablement problème - et qui pose problème au parti socialiste dans son ensemble - c'est votre manque de rigueur dans l'analyse des causes de cette situation. Evidemment, on peut dire: «Le budget est déficitaire, Genève court à la catastrophe...», mais je vous rappelle quand même que nous vivons dans l'une des régions les plus privilégiées d'Europe et du monde... (Commentaires.) ...et que nous sommes dans un canton extrêmement riche. Ce qu'il y a de paradoxal, c'est qu'année après année l'écart entre les riches et les pauvres s'accentue ! Et que cette richesse globale qui fait qu'une moyenne peut donner un revenu par habitant tout à fait raisonnable et confortable est en réalité constituée au détriment des plus pauvres ! On le voit bien d'ailleurs aux Etats-Unis, où les baisses d'impôts successives des gouvernements Reagan et Bush ont conduit des populations entières dans la misère ! On l'a vu en Angleterre, avec Mme Thatcher, où nous avons eu les mêmes causes et les mêmes effets. Et nous l'avons vu aussi en France, avec MM. Chirac et Sarkozy. Et on voit bien aussi qu'une des conséquences directes de ces politiques, c'est l'exportation de la délinquance, dont nous sommes tous victimes aujourd'hui à Genève. D'ailleurs, à l'époque, le parti socialiste l'avait rappelé, dans les pays où les impôts baissent la criminalité augmente ! Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, c'est exactement ce qui va se passer à Genève... (Brouhaha.) ...parce que vous ne prenez pas vos responsabilités ! C'est déjà le cas et les Genevoises et les Genevois en subissent les conséquences.
De plus, aujourd'hui, la dette qui est de l'ordre de 11 milliards, elle a une cause, elle ne tombe pas du ciel ! Nous faisons des investissements, nous rattrapons un retard certain en termes d'investissements, notamment en termes de transports, et il y a aussi l'hôpital et le nouveau bâtiment des lits. Genève a pris du retard en termes d'investissements et il s'agit donc de rattraper ce retard. Si on investit, évidemment qu'on doit peut-être s'endetter.
Maintenant, j'aimerais aussi vous rappeler qu'en 2008, quand le Conseil d'Etat a présenté les comptes 2007, le Conseil d'Etat évoquait un équilibre financier structurel à moyen et long terme - ou plutôt à court et moyen terme, il ne faut pas exagérer ! Mais, pour lui, la situation était confortable, maîtrisée. Dans la foulée, vous proposez une baisse d'impôts, dont le montant était estimé à 400 millions de francs par année. Vous avez voté cette baisse d'impôts. Conséquence directe: les recettes fiscales du canton ont diminué de 400 millions de francs par année ! Donc avec ces recettes fiscales supplémentaires - mais manquantes actuellement - le budget 2013 serait bénéficiaire ! Ces chiffres ont été confirmés dans le débat sur la fusion des caisses de pension, le Conseil d'Etat nous a écrit pour confirmer que c'était bien la conséquence de cette baisse d'impôts. Et là ou j'aimerais insister, c'est que les socialistes sont attachés à des équilibres: donc si la situation évolue négativement parce que cet équilibre à moyen terme n'est pas obtenu, eh bien il faut pouvoir corriger le tir, sans précipitation, sans exagération ! Nous sommes dans un Etat qui doit ménager les uns et les autres, les plus démunis, peut-être les plus aisés aussi, mais les sacrifices et les efforts doivent être partagés.
Alors, contrairement à ce que vous avez dit tout à l'heure, le Conseil d'Etat a déjà fait des propositions. Il a proposé de nouvelles recettes fiscales: vous les avez déjà refusées ! Je vous rappelle le bouclier fiscal, qui ne bénéficie qu'aux grandes fortunes - certaines personnes économisent 2 millions de francs par année, avec ce bouclier fiscal ! Certaines grandes fortunes économisent donc 2 millions par année avec ce bouclier fiscal, et vous ne voulez même pas entrer en matière ! Mais vous votez, comme j'ai dit tout à l'heure, les 700 000 F pris sur les cafetiers restaurateurs ! Ce sont vos choix ! Mais les socialistes constatent simplement que le partage des efforts n'est pas effectué.
Et puis alors, ce qu'il y a quand même de plus paradoxal, c'est le discours lénifiant de l'UDC, qui vient nous dire qu'on n'a pas les moyens, que ce n'est pas possible, qu'on vit au-dessus de nos moyens... Et que fait l'UDC dans le même temps ? Elle dépose une initiative pour une double traversée de la rade ! (Brouhaha.) Pour 2020 ! A réaliser dans les six ans ! Vous êtes en train de pleurer pour dire que vous n'avez pas d'argent, et vous proposez de faire deux traversées de la rade ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Si vous n'avez pas d'argent, je ne sais pas comment vous pouvez faire des propositions pareilles ! (L'orateur est interpellé. Le président agite la cloche.) Vous n'êtes pas conséquents ! Vous n'avez aucune capacité d'analyse... (Brouhaha.) ...et, ce qu'il y a de bien pire en politique...
Le président. Il vous reste une minute !
M. Roger Deneys. ...vous n'avez aucune capacité d'autocritique ! Car il faut être capable de reconnaitre ses erreurs ! Il faut être capable de revenir en arrière quand on doit prendre une grande décision ! Et le minimum d'honnêteté intellectuelle consiste à admettre que l'Etat ne se manipule pas comme un... pédalo dans la rade ! Faire des réformes prend un certain temps; faire évoluer, ne serait-ce que le nombre de postes dans l'enseignement, prend un certain temps. La dramatisation que vous faites, dans ce parlement, est totalement fausse, malhonnête, artificielle, et ne répond à aucune réalité par rapport aux besoins de Genève, par rapport aux projets de Genève, par rapport à notre région... (Brouhaha.) ...et par rapport à l'augmentation de la population qui, je vous le rappelle, est de 100 000 habitants en vingt-deux ans. Genève grandit ! Genève doit avoir des moyens !
Le président. Vous avez épuisé votre temps de parole, Monsieur le député.
M. Roger Deneys. Je vous invite donc à renvoyer ce projet de budget à la commission des finances. (Remarque. Applaudissements.)
Le président. Merci. Je donne la parole à M. Claude Jeanneret. (Commentaires. Le président est interpellé.) Ah ! C'est une demande formelle ? (Brouhaha. Quelques instants s'écoulent.) Je vous soumets le renvoi en commission du projet de budget 2013. (Brouhaha durant la procédure de vote.)
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 11027 à la commission des finances est rejeté par 53 non contre 39 oui.
Le président. La parole est à M. le député Antoine Bertschy. (Exclamations.) Pardon ! Excusez-moi, Monsieur Jeanneret, votre nom a disparu de la liste - je la rétablis volontiers ! La parole est ainsi à M. le député Claude Jeanneret.
M. Claude Jeanneret (MCG). Merci, Monsieur le président. Je serai très bref. J'ai entendu quelque chose d'un peu spécial de la part de notre collègue, qui confond un budget de fonctionnement avec un budget d'activité et un budget d'investissement. Je crois, pour un budget d'investissement, que s'il n'est pas malsain de s'endetter, évidemment que pour un budget de fonctionnement ce n'est pas le cas. Je ne comprends donc pas comment on peut faire une pareille confusion au niveau de notre parlement, parce que ça veut dire que les prises de décision ne sont pas toujours faites en bonne compréhension de ce qui se passe.
Simplement, ce qui est regrettable actuellement, c'est que le budget de fonctionnement est mauvais, et cela n'est pas acceptable. C'est-à-dire que ce budget doit tout simplement être renvoyé à ceux qui l'ont établi. Qu'on nous redonne un budget équilibré dans le fonctionnement ! Pour les investissements, on avisera; mais, sur le fonctionnement, c'est inadmissible !
Présidence de M. Gabriel Barrillier, premier vice-président
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Antoine Bertschy. Le Bureau a décidé de clore la liste, tous les groupes s'étant exprimés plusieurs fois. Vous avez la parole, Monsieur le député.
M. Antoine Bertschy (UDC). Monsieur le président, je vous remercie. J'aimerais faire un peu d'histoire en revenant à une année auparavant. Une partie du groupe UDC avait voté un budget 2012 déficitaire en disant faire confiance au Conseil d'Etat pour trouver des solutions dans l'année qui venait, afin de nous proposer un budget au moins à zéro pour le prochain exercice. Il se trouve que c'est pire que l'année précédente ! Nous avions proposé aussi quelques solutions, elles n'ont pas été prises en compte ! Par exemple de passer à 42 heures par semaine pour les fonctionnaires, or il y a eu un refus de discuter là-dessus.
J'ai ouï-dire... Enfin, j'ai entendu notre ami du PDC, Guy Mettan, dire que c'était une déresponsabilisation de la part de ce parlement que de ne pas renvoyer ce budget à la commission des finances. Je ne suis pas d'accord ! Je vous montre juste le pavé que c'est à étudier ! Ce sont 700 pages ! C'est 700 pages de chiffres à étudier, Mesdames et Messieurs ! (Brouhaha. Rires. Le président agite la cloche.) Comment un parlement de milice peut-il étudier 700 pages en deux semaines ? Ce n'est juste pas possible ! Par contre, le Conseil d'Etat - et vous l'avez dit, Mesdames et Messieurs - travaille depuis des mois là-dessus. Il connaît parfaitement ce budget ! Si on lui demande de revoir sa copie, si on lui demande de faire des réductions de charges, c'est parce qu'il est le plus apte à le faire, bien plus que la commission des finances ! Donc renvoyons ce budget au Conseil d'Etat, redisons-lui que nous voulons quelque chose à l'équilibre pour cette année ! En tout cas, c'est ce que souhaite l'UDC. La commission des finances va travailler des mois, des semaines, des heures, autant que vous voulez, et tout cela pour arriver à un résultat qui sera insuffisant... Alors que le Conseil d'Etat peut, connaissant le sujet parfaitement, effectuer ce travail beaucoup plus vite, en quelque temps, et ensuite revenir avec un nouveau projet ! Et après, la commission des finances planchera dessus ! C'est pour ça qu'il y a ce non aujourd'hui.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. François Lefort (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, depuis une heure, les députés PLR et consorts en appellent à la raison. La raison serait de leur côté ! Et pourtant on ne peut être que surpris par la position complètement irresponsable du PLR ! Non pas du PLR, mais de cette faction putschiste du PLR qui s'oppose, curieusement, à un conseil d'administration... (Rires.) A un Conseil d'Etat, pardon ! Un Conseil d'Etat majoritairement de droite, où siègent trois conseillers d'Etat PLR.
Mesdames et Messieurs de la faction putschiste, le message que vous donnez à la population, c'est que vous l'ignorez pour poursuivre vos lubies ! Ce serait risible si cela n'occultait les conséquences désastreuses de la cabale de cette faction PLR menée contre vos propres conseillers d'Etat ! La discussion immédiate que vous demandez est une véritable insulte à la population ! Une insulte commise par une faction PLR qui succombe de plus en plus, comme vous l'avez remarqué ce soir lors du débat sur les TPG, à l'attraction fatale de la lumière obscure du populisme ! (Exclamations. Applaudissements.)
Des voix. Bravo !
M. François Lefort. Mais oui, Mesdames et Messieurs de la faction putschiste, fascinés comme vous l'êtes, comme des lucanes fous, par ce que vous prenez pour les lanternes du populisme ! Alors, vous l'avez remarqué, certain journaliste célèbre actuellement l'éveil... (Brouhaha.) ... l'éveil plébéien - je l'ai lu dans la presse ! - l'éveil plébéien des patriciens fatigués. (Rires. Commentaires.) Eh bien, pour nous et pour la population, c'est une mauvaise nouvelle ! Ce n'est pas de l'éveil plébéien, c'est l'éveil au populisme, et j'espère que vous reviendrez à la raison, si ce n'est ce soir, le mois prochain ! (Applaudissements.)
M. Jacques Jeannerat (R). J'en suis à mon onzième exercice budgétaire, et les premières années j'étais un peu naïf; on avait 100 millions, 200 millions de déficit, et puis - effectivement, Monsieur Mettan - le budget partait en commission, on arrivait à racler 25 ou 30 millions, et tout allait bien... Ensuite, dix-huit mois après, à l'examen des comptes, on constatait qu'on avait sous-estimé les recettes fiscales, et puis, au fond, tout le monde s'arrangeait et tout le monde était content. Oui, mais là, le problème est différent cette fois ! Parce que dans les projections pour les budgets 2012 et 2013, on en est à un milliard de déficit cumulé sur les deux dernières années. Donc la récréation est terminée, Monsieur Lefort ! On ne fait pas du populisme, on est réaliste ! Nous attendons du gouvernement - je dis «du gouvernement», et non pas des sept chefs de département - une action politique et un engagement politique ! Il s'agit de fixer des priorités ! Et ce n'est pas aux services de l'administration de savoir s'il faut trois postes en plus chez les gardes-chasse ou cinq contrôleurs de plus pour les parkings ! C'est au Conseil d'Etat de fixer des priorités ! Quand on a un milliard de déficit sur deux exercices, on attend du Conseil d'Etat une action politique et qu'il fixe des priorités.
Non, Madame Emery-Torracinta, nous n'avons pas peur du fameux article que nous avons voté, que le peuple a d'ailleurs aussi voté. Nous sommes simplement réalistes. Vous, vous êtes sûre que les Genevois vont accepter les hausses d'impôts... Moi je suis certain qu'ils vont être raisonnables en matière de prestations. Il ne s'agit pas de diminuer le nombre de lits à l'Hôpital, Madame. Il ne s'agit pas de diminuer le nombre de gendarmes ! Mais il s'agit peut-être d'arrêter l'inflation des secrétaires généraux de département ! Il y a un département, Madame Torracinta, qui est tenu par quelqu'un de votre parti depuis des années, qui, il y a dix ans, avait quatre secrétaires généraux adjoints. Et maintenant, on en est à vingt-quatre !... Quand le peuple saura ça, eh bien il ne va pas voter vos hausses d'impôts ! ça, rassurez-vous ! (Bravos. Applaudissements.)
Monsieur Deneys, on va dans le mur ! Nous ne sommes pas dans une crise des recettes, ça n'est pas vrai, vous vous mettez le doigt dans l'oeil ! Mes préopinants de l'UDC ont dit qu'on avait les impôts les plus élevés de Suisse en matière d'impôts sur la fortune: ce sont des chiffres qui sont réels ! On peut vous montrer les tableaux quand vous voulez. Le problème, c'est la crise des dépenses. C'est trop facile de dire: «Oui, mais 85 ou 90% du budget, c'est lié par des lois, donc on ne peut rien faire»... Mais, Mesdames et Messieurs du gouvernement, faites des propositions pour modifier ces lois ! Déposez des projets de lois ! On les votera ! Soyez un gouvernement, et non pas sept chefs de département ! (Bravos. Applaudissements.)
Présidence de M. Pierre Losio, président
Le président. La parole est à M. Charles Selleger.
M. Charles Selleger (R). Monsieur le président, faut-il attendre, comme nous le suggère M. Deneys, d'étudier longuement ce projet de budget en commission des finances, pour se rendre compte qu'il est inacceptable ? Pour M. Deneys, certainement oui ! Pour nous, certainement non ! Pourquoi ? Pour la première et simple raison que ce budget n'amène aucune piste vers la réduction des dépenses; il ne fait que proposer des augmentations de dépenses et des augmentations, donc, de la fiscalité qui, cela a été rappelé par d'autres personnes avant moi, est la plus haute de Suisse. Non, il ne s'agit pas d'attendre longuement, il s'agit de voter la non-entrée en matière de ce budget, afin que notre Conseil d'Etat, dans sa grande sagesse, nous propose un budget acceptable qui vise à réduire les dépenses.
Mme Sophie Forster Carbonnier (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais commencer par regretter le débat de ce soir, car je le trouve également irresponsable - donc la méthode qui a été choisie par le PLR, l'UDC et le MCG pour voter l'entrée en matière de ce budget. Ce qui nous est demandé est extrêmement peu respectueux du travail du Conseil d'Etat et des institutions.
Des voix. Oh !
Mme Sophie Forster Carbonnier. Aujourd'hui - ce soir - seuls quinze députés sur cent ont eu accès à ce budget, seuls quinze ! Sans qu'on l'ait étudié, on demande à ce parlement de voter !... Nous ne savons ainsi pas clairement quelles sont les coupes qui ont été opérées et quels sont les moyens supplémentaires qui ont été octroyés. Personnellement, j'ai eu l'occasion de mener deux courtes auditions avec mon collègue, M. Cuendet, et tout ce que j'ai appris c'est que le pouvoir judiciaire a besoin de 11 millions supplémentaires cette année et que l'Hôpital va supprimer 125 postes. Je trouve que c'est trop peu d'informations pour me prononcer sur un budget !
Les Verts voteront l'entrée en matière. Non parce que nous jugeons que ce projet est bon, mais parce que nous estimons qu'il est de notre devoir d'étudier un projet avant de le refuser ou de l'accepter. Notre vote ne préjuge donc en rien d'un vote final.
Le PLR veut nous faire croire que sa précipitation à refuser un budget va engendrer une meilleure proposition... Mais, Mesdames et Messieurs les députés, quel est le message envoyé ce soir au Conseil d'Etat ? Comment devrait-il revoir sa copie, pour satisfaire d'ici à quelques mois 51 députés ? Cinquante-et-un ! Les alliances de ce soir me semblent bien fragiles, et les messages envoyés pour le moins contradictoires ! Les Verts regrettent donc cet état de fait et estiment que le parlement ne sort pas grandi de cet exercice. Nous offrons un bien piètre spectacle à la population genevoise.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous appelle à entrer en matière sur ce projet de loi ou à le renvoyer à la commission des finances. (Remarque.)
Le président. Est-ce une demande formelle, Madame la députée ?
Mme Sophie Forster Carbonnier. Oui ! (Brouhaha. Quelques instants s'écoulent.)
Le président. Nous nous prononçons sur cette demande de renvoi. (Brouhaha durant la procédure de vote.)
Mis aux voix, le renvoi du projet de loi 11027 à la commission des finances est rejeté par 54 non contre 38 oui. (Commentaires à l'annonce du résultat.)
Le président. Je donne la parole à Mme Schneider Hausser.
Des voix. Ah !
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Merci, Monsieur le président. Oui !... Je ne sais pas si je dois rire ou pleurer... (Exclamations.) Franchement ! Je crois en tout cas que je suis en train de rêver, de faire un mauvais rêve en termes de démocratie. Nous avons ici un parlement avec une majorité de droite, claire et nette; un Conseil d'Etat avec une majorité de droite, claire et nette !
Des voix. Ah non ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Mme Lydia Schneider Hausser. C'est une partie de ping-pong ! Ou alors, une partie de patate chaude ! Mais que contient cette patate chaude ? A mon avis, ce qu'elle contient, c'est un manque de courage ! Parce que, les idées, les gens les ont et les énoncent dans les couloirs - «Il faut couper ici !», «Il faut couper là !»... En tout cas, ce que l'on sait, c'est qu'au niveau de la majorité du Grand Conseil il n'y a pas de volonté, même pour un temps limité à deux ans, d'obtenir plus de ressources pour l'Etat, étant donné que vous avez refusé toutes les hausses ou tous les changements fiscaux qui auraient pu nous rapporter un peu plus de revenus ! Le manque de courage est dans cette partie de ping-pong. Normalement, depuis ce soir, la balle est dans le camp du Grand Conseil, dans le camp de la commission des finances, qui, si elle n'est pas contente, Mesdames et Messieurs les députés de droite, devrait choisir des coupes, considérant cette logique de refus de revenus supplémentaires pour l'Etat. Or, c'est quand même magnifique, on renvoie le bébé au Conseil d'Etat ! Peut-être sait-il déjà ce qu'il va faire ? Prétendument, ce sera moins douloureux, mais, à un moment donné, il faudra l'avoir, ce courage, de dire où vous voulez couper, si vous ne voulez pas augmenter les impôts, augmenter les revenus de l'Etat. Le social vous gêne ? Vous voulez plus de police ? Allez-y, il faut juste que vous ayez le courage de le dire une fois, de manière claire et nette.
Ce soir, je trouve qu'on est très sympas, nous socialistes, nous de la gauche, et même du PDC, de croire encore aux institutions ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Parce que ce qui est en train de se passer, c'est grave ! Et je partage l'avis de M. Lefort: on est en train de se moquer des gens qui nous ont élus pour prendre nos responsabilités. Je regrette fortement le débat de ce soir, il donne vraiment une image de l'Etat et de ce que peut représenter un législatif au plus bas de ce que j'imaginais qu'il pouvait être.
Des voix. Non !
Le président. Merci, Madame la députée. La parole à M. Roger Deneys.
Des voix. Encore ?! Oh non ! (Brouhaha.)
Une voix. Allez Roger !
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je crois que l'éventuelle non-entrée en matière sur le budget est réellement le triomphe des eunuques. (Rires.) Et vous assumerez les conséquences directes de l'image pitoyable que vous donnez de ce parlement, qui ne prend pas ses responsabilités.
Un renvoi en commission est le seul moyen de connaître les propositions du Conseil d'Etat et de savoir pourquoi il faudrait ou non les accepter. (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Vous prenez une lourde responsabilité et j'ai envie de dire - après avoir entendu un député UDC se plaindre du nombre de pages du document budgétaire - que, si vous étiez conséquents, eh bien vous auriez démissionné depuis longtemps ! Parce que vous ne servez absolument à rien dans ce parlement ! (Commentaires.) Votez une nouvelle constitution qui dit que le déficit doit être à zéro et démissionnez ! On peut supprimer le Grand Conseil ! Parce qu'on ne sert plus à rien ! Le Conseil d'Etat s'occupera très bien de parvenir à un budget à zéro, ce sera beaucoup plus facile sans vous et on ne perdra pas notre temps ! (Commentaires.)
Ce n'est pas sérieux d'imaginer qu'on peut voter, discuter d'engagements financiers pour une population de 500 000 habitants sur le canton - d'un million, si l'on prend en compte le bassin de population - sans, au minimum, étudier les documents ! (Brouhaha.) Je crois que les socialistes ont déjà montré qu'ils étaient en faveur d'équilibres et d'efforts partagés, mais je vous rappelle que, l'an dernier, vous, vous avez refusé toutes les propositions socialistes d'économies ! Je l'ai dit tout à l'heure, vous avez voté tous les postes sur les plans stratégiques de développement, alors même qu'au final vous avez refusé le plan directeur cantonal ! Les économies proposées par les socialistes, c'était 8 millions de francs par année, soit 160 millions sur vingt ans. Vous avez refusé de suspendre le bouclier fiscal, soit 50 millions de recettes supplémentaires par année, soit un milliard de francs de recettes supplémentaires sur vingt ans ! Eh bien, vous avez refusé ! Evidemment, vous avez accepté une économie que j'avais proposée, celle d'épargner 450 F sur les revues militaires... (Brouhaha.) Ah ça, je vous félicite ! Je vous félicite d'avoir fait réaliser cette économie «essentielle» au canton de Genève ! (Commentaires.) Bravo, félicitations ! La cohérence du PLR pour faire des économies, elle est absolument remarquable ! Eh bien c'est ça, la réalité ! C'est que vous n'avez, l'an dernier, proposé aucun amendement pour faire des économies ! Vous n'avez proposé aucun amendement pour des dépenses supplémentaires, alors même qu'après, en cachette, en cours d'année, qu'est-ce que vous faites ? Vous votez des dépassements de crédit en commission des finances ! Comme pour le pouvoir judiciaire, pour lequel vous venez voter les postes que vous avez refusés au moment du budget ! C'était aussi un amendement socialiste ! Parce que nous, nous sommes conséquents: si nous votons des lois, nous votons les moyens pour les appliquer ! Simplement, nous sommes conséquents jusqu'au bout: s'il y a de nouvelles dépenses, il faut peut-être de nouvelles recettes ! Il n'y a pas de dogme là-dedans, il y a simplement la volonté de respecter des équilibres à long terme.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, comme les socialistes sont contre le triomphe des eunuques, je demande une ultime fois le renvoi à la commission des finances. (Exclamations.) Avec le vote nominal !
Des voix. Ah ! (Commentaires.)
Le président. Vous êtes suivi. Nous nous prononçons sur cette demande de renvoi. (Commentaires durant la procédure de vote.)
Mis aux voix à l'appel nominal, le renvoi du projet de loi 11027 à la commission des finances est rejeté par 55 non contre 36 oui. (Exclamations à l'annonce du résultat.)
Le président. Je donne, en fin de débat, la parole à M. le conseiller d'Etat François Longchamp.
M. François Longchamp, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en ma qualité de suppléant de notre ministre des finances David Hiler, retenu pour les raisons que vous savez, permettez-moi de vous dire au nom du Conseil d'Etat que celui-ci ne peut être satisfait de vous présenter un budget déficitaire. On ne peut jamais être satisfait d'un budget déficitaire !
Toutefois, au titre des regrets qui sont les nôtres, il en est un plus fort encore, celui de savoir qu'il y a, à la salle des Pas-Perdus, une pile d'enveloppes non ouvertes - celles de vous tous, députés - qui contiennent un document, et ce document est le budget. Si j'en crois ce que j'entends, il se dit qu'il contient trop de chiffres. A l'époque, Salieri disait aussi qu'il y avait trop de notes chez Mozart !... Mesdames et Messieurs, si vous aviez ouvert vos enveloppes, si vous aviez lu ces chiffres, vous auriez déjà eu une partie des réponses aux questions qui ont été posées.
Quelques-uns d'entre vous ont indiqué que ce budget ne définissait aucune priorité. Si vous l'aviez lu, vous auriez vu qu'il en définissait pourtant un certain nombre: il y a des priorités dans ce budget ! Que sont des priorités ? Ce sont des budgets que, délibérément, nous avons choisi de vous présenter en augmentation. Que sont des priorités ? Ce sont des budgets que, délibérément, nous vous avons proposés réduits, pour compenser une partie des augmentations que nous vous soumettons. Sur sept départements, quatre verront leur budget diminuer l'année prochaine, pour permettre de dégager des priorités - des priorités politiques fortes.
Mesdames et Messieurs, j'entends ici ou là, sur certains bancs, qu'il faut plus de sécurité. Si vous l'aviez lu ce budget, vous auriez entendu et vu qu'il prévoyait des priorités en matière de sécurité. Il y a 10 millions de francs de plus pour la sécurité, 6 millions de plus pour les prisons, afin soutenir le projet qui vous a été présenté - pour ceux qui en sont membres - en commission des travaux, mardi dernier, par mon collègue Pierre Maudet et par moi-même. Il y a 4 millions de francs de plus pour la police, afin d'avoir 35 policiers et 15 ASP supplémentaires, pour consolider les efforts que le département de la sécurité - et, autrefois, le département de la sécurité de la police et de l'environnement - avait définis. Ce sont de vraies priorités. Et la première des conséquences, ce soir, avec le renvoi de ce budget, c'est qu'il y aura moins de sécurité, parce qu'avec un budget fonctionnant sur le mode des douzièmes provisoires, ces 10 millions de francs, ils ne seront pas dans le budget ! (Commentaires. Le président agite la cloche.)
Mesdames et Messieurs, il y a une priorité qui n'est pas celle du Conseil d'Etat, mais qui est presque encore plus essentielle que la sécurité. Elle n'est pas celle du Conseil d'Etat, parce qu'elle concerne un pouvoir qui n'est pas le sien: le pouvoir judiciaire. La justice est une priorité, nous lui accordons 11 millions de francs supplémentaires, Mesdames et Messieurs, alors même que l'équilibre des pouvoirs pourrait faire en sorte que nous nous passions de soutenir le pouvoir judiciaire. Mais si nous voulons le soutenir, si nous voulons défendre le budget du procureur Jornot et de la magistrature, c'est parce que nous croyons qu'il y a un réel problème de justice dans notre canton et qu'il faut lui donner des moyens supplémentaires, et c'est la deuxième des priorités.
Mesdames et Messieurs, il y a encore une troisième priorité ! C'est une priorité qui a été voulue par l'ensemble de votre parlement, ou presque. Elle a été voulue par 73% des citoyens genevois: elle s'appelle la réforme du cycle d'orientation. Elle prévoit 55 postes supplémentaires au département de l'instruction publique, parce que nous pensons qu'il faut travailler plus pour être formé plus.
Voilà nos trois priorités, Mesdames et Messieurs. Et puis, il y a les autres priorités qui, au nom des priorités que nous avons énoncées, si vous aviez lu le budget, ont dû faire des efforts, ont dû se restructurer et se restructurer encore. Pour certaines d'entre elles, il y a des restructurations qui durent depuis des années, Mesdames et Messieurs ! Je ne peux donc pas laisser dire, nous ne pouvons pas laisser dire que ce budget n'exprime pas des priorités: il en exprime, et sans aucune polémique, permettez-moi de le dire ! Il y a dans ce budget une volonté d'affermir le pouvoir judiciaire, pour le rendre plus puissant.
Si vous aviez lu le projet de budget, il y aurait aussi un constat à faire. Le budget va augmenter de 1,8% au titre des charges et de 2,8% au titre des recettes. Pendant ce temps, le budget du Grand Conseil, celui de votre pouvoir, aura augmenté de 20% en deux exercices ! Monsieur Stauffer, vous en doutez ? Vous disiez tout à l'heure qu'à Onex vous expérimentiez le système D. Eh bien, à Onex, vous avez un budget équilibré, et il n'y a rien d'exceptionnel à cela: c'est une obligation pour toutes les communes ! (Exclamations. Applaudissements.) Vos dépenses, Monsieur Stauffer, à Onex, ont passé en un an de 43 200 000 F à 45 300 000 F, soit une augmentation de 5% - trois fois celle que nous vous proposons, sans compter les crédits supplémentaires ! Le système D, à Onex, ça doit être D comme déraisonnable, D comme délire, D comme dysenterie ! (Applaudissements. Exclamations. Huées. Commentaire inaudible de M. Eric Stauffer. Le président agite la cloche.)
Mesdames et Messieurs, jamais le Conseil d'Etat ne pourra se résoudre au constat du déclin de Genève ! Jamais le Conseil d'Etat ne pourra entendre que Genève doit être comparée à la Grèce et qu'elle est la dernière des terres sur lesquelles on entend vivre ! C'est une terre de prospérité et nous aurions pu, si vous aviez renvoyé ce budget en commission, vous annoncer un certain nombre d'éléments, puisque vous commentez avec beaucoup d'à-propos la situation économique, Mesdames et Messieurs les députés. Comme c'est l'usage, comme chaque année en commission, c'est en général avant les vacances d'octobre que nous vous présentons les nouvelles estimations fiscales, celles qui sont plus précises, celles qui se basent sur les déclarations d'impôts les plus compliquées, mais aussi les plus lucratives, celles des concitoyens qui ont des situations particulières, mais qui paient beaucoup d'impôts et qui contribuent à notre prospérité, comme celles des entreprises qui font des bénéfices importants. Mesdames et Messieurs, nous n'aurons même pas l'occasion de vous donner ces chiffres ! Ils auraient pu nous permettre de vous dire avec quelle précision la réalité des recettes fiscales sert à déterminer ce qu'est la réalité du poids économique.
Mesdames et Messieurs, Genève n'est pas un canton qui s'enfonce dans la crise; son budget est en amélioration. Mesdames et Messieurs les députés, ce canton n'est pas un canton qui vit dans une situation financière désespérée. Ces dix dernières années, le gouvernement vous a présenté des budgets qui se sont avérés systématiquement être moins bons que le résultat des comptes. Chaque fois que les comptes, les vrais chiffres, vous étaient présentés, ils étaient meilleurs que ceux que nous vous avons présentés et ils étaient noirs ! Alors oui, nous traversons des difficultés et la moitié des cantons suisses sont dans notre situation. Quand on fait des comparaisons intercantonales, allons jusqu'au bout.
Mesdames et Messieurs, le Conseil d'Etat a des regrets et il en a un particulièrement fort, c'est celui de savoir que vous n'allez pas entrer en matière sur ce budget, que vous allez lui renvoyer ce budget, sans même vouloir prendre la peine de l'examiner. Mesdames et Messieurs, il y a quelques années, il y a quelques siècles même, sur une terre qui s'appelle aujourd'hui le Royaume-Uni, une institution magnifique a été inventée: elle s'appelle le parlement. Le parlement, l'institution parlementaire a été créée pour une seule et unique raison, à son origine, celle de lever l'impôt et de dire à quoi on affectait le produit de l'impôt, c'est-à-dire de voter un budget. Ce soir, Mesdames et Messieurs, deux jours avant le vote sur le projet de nouvelle constitution, le parlement genevois va se résigner à ne même pas assumer cette responsabilité que, depuis des siècles, dans les démocraties occidentales, les parlements assument. (Exclamations. Applaudissements.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je mets aux voix l'entrée en matière... (Remarque.) Ça sonne depuis vingt secondes ! On demande le vote nominal. (Appuyé.)
Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 11027 est rejeté en premier débat par 54 non contre 38 oui. (Commentaires à l'annonce du résultat.)
Débat
Présidence de M. Gabriel Barrillier, premier vice-président
Le président. Nous sommes au point 119... (Remarque. Brouhaha.) S'il vous plaît, Monsieur le député ! Les motionnaires proposent de renvoyer sans débat cette motion à la commission de l'économie. (Remarque.) Monsieur le député Özden, vous voulez vous exprimer: je vous donne la parole.
M. Melik Özden (S). Monsieur le président, j'aimerais en effet m'exprimer sur la motion. (Brouhaha. Commentaires.) Sous couvert de défendre l'emploi à Genève, la motion 2110 vise à faire des cadeaux fiscaux supplémentaires aux milieux financiers et à des compagnies transnationales, notamment celles actives dans le négoce de matières premières. (Brouhaha.) Il y a deux questions principales que nous devons nous poser. Premièrement, ces entités privées ont-elles besoin d'argent public pour développer davantage leurs activités à Genève ? Deuxièmement, quels sont les impacts réels des activités de ces entités à Genève et à l'étranger ? (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs, un peu de silence ! Ecoutez votre collègue !
M. Melik Özden. Merci, Monsieur le président. La réponse à la première question a été donnée cette semaine par une enquête menée par la RTS au niveau national sur la fiscalité des entreprises étrangères en Suisse. Entre 2005 et 2009, les 30 000 compagnies étrangères qui jouissent d'un statut fiscal spécial en Suisse ont engrangé 266 milliards de francs de bénéfices. Le manque à gagner pour les autorités helvétiques, genevoises incluses, est estimé à 30 milliards de francs.
Quant à l'impact des activités de ces entités précitées à Genève, il n'est pas toujours positif comme on veut nous le faire croire. Il ne faut pas oublier que certaines compagnies transnationales créent très peu d'emplois à Genève puisque leurs activités principales s'effectuent à l'étranger, à travers de multiples filiales et sous-traitants, et elles font également venir leurs cadres de l'étranger.
Nous devons garder à l'esprit que certaines institutions financières et des compagnies transnationales basées en Suisse et à Genève sont souvent accusées de fraudes fiscales, de spéculations boursières qui font des dégâts incommensurables dans le monde, d'hébergements de fonds illicites provenant de régimes dictatoriaux tels ceux de Marcos, Mobutu, Abacha, Ben Ali ou de Moubarak. Il semble qu'on ne mesure pas assez l'impact de l'agissement de ces entités sur d'autres secteurs économiques dans ce pays et sur l'image de la Suisse à l'étranger.
Le président. Il vous faut conclure, Monsieur le député !
M. Melik Özden. J'arrive à la conclusion, Monsieur le président ! Par contre, les motionnaires ont raison sur un point: la Suisse reste la première place financière au niveau mondial et Genève gère presque un tiers de fonds transnationaux privés. Cela confère à la Suisse un pouvoir non négligeable. (Brouhaha.) Toutefois, qui dit pouvoir dit également responsabilité. C'est pourquoi les autorités politiques helvétiques devraient s'engager résolument dans l'élaboration de règles strictes au niveau national et international sur le fonctionnement du secteur financier et les statuts juridiques des compagnies transnationales - sociétés holding, mixtes ou sociétés de domicile - qui permettent justement à ces derniers de recourir à des montages complexes pour échapper aux impôts. Notre parlement devrait envoyer un message dans ce sens aux autorités fédérales.
En effet, les principes qui devraient guider la politique fiscale de notre république sont l'universalité, l'égalité devant la loi et la capacité économique des contribuables. Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste votera contre cette motion.
M. Pierre Weiss (L). Monsieur le président, je demande le renvoi sans débat de cette motion en commission.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je mets aux voix cette demande de renvoi à la commission de l'économie.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 2110 à la commission de l'économie est adopté par 54 oui contre 12 non et 5 abstentions.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes encore saisis de deux urgences que nous nous étions engagés à traiter, à la demande du groupe socialiste. Nous serions tentés... Le groupe socialiste n'insiste pas pour le traitement ce soir, mais il est 22h10, et, en tant que vice-président, je trouve que nous pourrions traiter au moins le point 49, PL 10625-A. J'estime que nous aurions ainsi employé notre temps de façon rationnelle et optimale. C'est la raison pour laquelle j'invite les deux rapporteurs à s'installer à leur table. Nous traitons donc ce point et, après, nous nous arrêterons.
Premier débat
Le président. Il s'agit d'un objet classé en catégorie I: débat libre. A vous de gérer vos interventions, Mesdames et Messieurs les députés ! (Remarque.) M. le rapporteur de majorité a retrouvé sa documentation ? (Commentaires.) Quelques flottements... (Remarque.) Voilà ! Monsieur le rapporteur de majorité, est-ce que vous avez changé de registre... Voulez-vous prendre la parole ?
M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, je ne pense pas intervenir tout de suite... (Commentaires.) ...mais j'y suis prêt, le cas échéant, en fin de débat.
Le président. Bien ! Je vous remercie. Je vais donc passer la parole à Mme Prunella Carrard, qui, elle, a sans doute quelque chose à dire.
Mme Prunella Carrard (S), rapporteuse de minorité. Monsieur le président, je constate que M. Weiss fait peu de cas de ce projet de loi pour lequel il a mis un an à rendre un rapport de majorité. C'est pourquoi nous parlons de ce projet de loi aujourd'hui, soit près de deux ans après le vote en commission !
Le vote en commission a eu lieu en janvier 2011 et je vais vous en faire un résumé. La majorité de la commission a donc refusé d'entrer en matière sur ce projet de loi, ce qui signifiait un refus d'entrer en matière sur ce qu'il proposait, soit trois points principaux. Premier point, mesures à mettre en place avant l'arrivée au chômage des personnes concernées. Deux angles possibles: d'une part, une politique de prévention du chômage, c'est-à-dire la mise en place d'une politique de promotion économique par la régulation du marché de l'emploi, impliquant une adéquation entre les personnes en recherche d'emploi et les travailleurs; d'autre part, une politique de création d'emplois liée à l'évolution démographique - garderies d'enfants, crèches, assistance aux personnes âgées ou handicapées, aide à la mobilité, soutien scolaire, etc. - et une politique de création d'emplois qui soient relatifs au développement durable - isolation des logements, développement des réseaux de transports en commun, production d'énergie renouvelable, réorientation vers l'agriculture de proximité.
Deuxième point sur lequel la majorité a refusé d'entrer en matière en refusant ce projet de loi, ce sont les mesures à mettre en place pendant la période de chômage. D'une part, ce projet de loi proposait une politique de réinsertion professionnelle basée sur une évaluation socioprofessionnelle dès le début d'une période de chômage, pour une prise en charge plus rapide et afin de prévenir la désinsertion sociale; par ailleurs, la majorité refusé le maintien d'un pilier intermédiaire entre le chômage et l'aide sociale, c'est-à-dire des mesures cantonales spécialement activées pour les chômeurs de longue durée. Enfin, la majorité a refusé une réflexion générale sur l'articulation des mesures et une collaboration harmonisée entre les acteurs, institutions et services de l'Etat, etc., afin d'assurer un suivi coordonné des individus - une sorte de «case management», comme on l'appelle.
Le projet socialiste constituait une loi-cadre s'inscrivant dans une politique de création et promotion d'emplois durables. Il constituait une dimension essentielle d'une politique de l'emploi cohérente et efficace, interinstitutionnelle et proactive. Il proposait une vision moderne de la gestion du chômage: en développant un dispositif spécifique pour les chômeurs de longue durée, en offrant d'autres pistes que l'aide sociale, soit un dispositif intermédiaire entre le chômage et l'arrivée à l'aide sociale, dispositif que notre canton a fait le choix de supprimer, début 2011 déjà, au moment même où les pays du nord de l'Europe les plus efficaces en matière de réduction du chômage le développaient et alors même que le Bureau international du travail ainsi que la Conférence suisse des institutions d'action sociale le recommandaient.
Voilà sur quoi la majorité a refusé d'entrer en matière, refusant de discuter sur ce projet de loi, alors même qu'on apprenait par la «Tribune de Genève», il y a deux jours, une augmentation massive du nombre d'inscrits au chômage. Franchement, quel manque de vision !
Le président. Merci, Madame le rapporteur. Est-ce que M. le rapporteur de majorité veut s'exprimer ?
M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, s'il a fallu que ce rapport ne soit déposé qu'en février de cette année, alors que les discussions en commission avaient eu lieu deux ans auparavant, c'est pour une raison bien simple ! C'est parce que la commission a adopté un autre projet de loi - qui a d'ailleurs fait l'objet d'une adoption populaire - et que le projet de loi socialiste est devenu pour l'essentiel sans objet, que, ce projet étant devenu sans objet, le temps de la reddition ne pressait pas ! Et surtout - surtout ! - Monsieur le président, il fallait d'abord attendre que l'on connaisse la volonté populaire pour voir la nécessité de donner une suite à ce projet de loi !
En l'occurrence, il a été considéré qu'il fallait un traitement séparé. Ce projet de loi a fait l'objet d'une forte opposition en commission, seules les voix de l'Alternative l'ont appuyé. Je crois d'ailleurs que la brièveté des débats consacrés spécifiquement à ce projet montre que même ses auteurs, qui se sont essentiellement consacrés, pendant les auditions, à parler du projet 10599, avaient en réalité laissé leur bébé orphelin. J'allais dire que j'ai repris ce projet de loi comme un père adoptif, en vous le présentant ce soir; et en vous disant que maintenant ce projet de loi ne mérite qu'une seule chose, c'est qu'on le refuse en cette enceinte, comme on l'a refusé en commission, vu qu'un contre-projet a été adopté !
M. Patrick Saudan (R). Mesdames et Messieurs les députés, le groupe radical n'est pas entré en matière sur le projet de loi socialiste, pour deux raisons très simples. Comme vient de l'évoquer le rapporteur de majorité, ce projet de loi était devenu caduc, avec l'adoption de la loi sur l'aide sociale individuelle, soit le PL 10599 - donc «dix mille cinq cent quatre-vingt-dix-neuf» ou «dix mille cinq cent nonante-neuf», pour faire plaisir à certains puristes - qui était le projet de loi du Conseil d'Etat. Ça, c'était la première raison.
La deuxième raison, c'est que ce projet de loi - même si, à première vue, ses intentions étaient relativement nobles et généreuses en accordant un droit à une formation continue qu'on appelle la «flexicurité» - incluait des dispositions inacceptables ! Ce que la rapporteuse de minorité appelle le «case management», à l'alinéa 3 de l'article 5, est, pour nous, totalement inacceptable ! Je vous lis cet alinéa 3: «Les services de l'Etat, les communes et les institutions de droit public, ainsi que les concessionnaires de services publics, sont tenus d'apporter leur appui dans l'offre de places de travail dans leurs secteurs.» Ce n'est pas notre vision de l'aide sociale que l'Etat doit offrir ! Ceci est une vision socialiste, c'est une vision collectiviste ! Pour nous, l'Etat doit fournir les conditions-cadres permettant à une économie d'être florissante, ce qui favorise une réinsertion rapide des chômeurs, et non pas offrir une place de travail à tous les chômeurs. C'est tout ! Nous avons donc une vision philosophique très différente de l'aide sociale, et c'est pour cela que le groupe radical n'est pas entré en matière sur ce projet de loi.
Mme Anne Emery-Torracinta (S). Mesdames et Messieurs les députés, M. Weiss et le PLR sont pris la main dans le sac, ce soir ! Pourquoi ? Ils viennent de nous donner des leçons concernant la bonne gestion des deniers publics, comment ne pas gaspiller l'argent... Eh bien, avec ces rapports sur ce projet de loi, voici quelques dizaines de milliers de francs que notre Grand Conseil a allègrement gaspillés ! Pourquoi ? Parce que ce projet de loi a été déposé au moment où le Conseil d'Etat - M. Longchamp - proposait une réforme de l'aide sociale, la suppression du RMCAS, et la commission des affaires sociales a discuté parallèlement des deux projets ! Il y a eu quatorze séances, conjointes. Les auditions ont eu lieu au départ sur les deux projets et, après, la majorité - cela a été le choix de la commission, choix que je respecte tout à fait - a choisi de traiter du projet du Conseil d'Etat ! Et, à la fin des débats, eh bien on a enterré celui-là ! Et c'est aussi un choix que je respecte.
Lorsqu'il s'est agi de déterminer comment on allait faire des rapports, le PLR a refusé de présenter un rapport conjoint sur les deux projets de lois, ce qui aurait permis d'économiser non seulement les jetons de présence que M. le député Weiss et Mme la députée Prunella Carrard ont eus pour la rédaction de ces rapports, mais également d'économiser l'heure que nous passons ce soir en plénière. Donc en comptant tout - les impressions, etc., et le travail - cela représente certainement quelques dizaines de milliers de francs ! Vous me direz que c'est un épiphénomène, face à 8 milliards de francs, c'est vrai, mais c'est comme ça que le PLR gère les deniers publics ! C'était ma première remarque.
Ma deuxième remarque porte sur le fond. Ce projet de loi a deux ans; la discussion en commission a deux ans aussi. Donc, plutôt que de revenir aux propositions qui étaient faites, j'aimerais m'adresser à Mme la conseillère d'Etat Rochat, qui a dû, au pied levé, reprendre la gestion de l'emploi et du chômage. J'espère qu'elle saura manoeuvrer le bateau de l'office cantonal de l'emploi avec un peu plus de réussite que ce qui s'est passé ces derniers temps !
Je reviens un peu en arrière avec deux exemples: lundi, j'entendais à la radio un journaliste se moquer de Neuchâtel, disant que Neuchâtel avait fait pire que les Genevois et qu'ils étaient les derniers de classe en termes d'emploi et de taux de chômage... Et puis, trois jours après, on découvrait, un peu penauds, que l'OCE, à cause de son déménagement, n'avait pas pu, apparemment, inscrire tout le monde à temps. Si ça se limitait à ça, soit ! Mais je vais vous exposer un cas tout récent, vécu à l'Etat de Genève, et qui est plus inquiétant.
C'est l'histoire d'un service dans lequel il manque brutalement quelqu'un, un technicien, et qu'il faut remplacer. Comme la procédure le veut dans ces cas-là, ce service s'adresse à l'OCE - c'était en mai dernier. Il reçoit un accusé de réception - vous savez, il s'agit de lettres automatiques - de l'OCE. Les semaines passent, l'été passe, le service en question se dit que c'est un peu inquiétant, qu'il n'y a rien, et puis, à la fin de l'été, il reçoit l'appel d'une personne qui est au chômage et demande à se présenter dans ledit service. Le responsable la reçoit et lui dit: «Eh bien, je suis content que l'Office cantonal de l'emploi vous envoie». Mais la personne répond: «Mais je ne suis pas envoyée par l'OCE; c'est mon voisin, qui travaille dans votre service, qui a entendu dire qu'il y avait un poste et qui m'a conseillé, comme j'étais au chômage, d'aller me présenter !» Là, le responsable du service téléphone à l'OCE: le chômeur en question était inconnu au bataillon, son dossier avait été perdu probablement pendant le déménagement ! Alors, Madame la conseillère d'Etat, je vous invite à voir ce qui se passe dans ce grand paquebot, qu'il ne se transforme pas en Titanic, mais si possible qu'il y ait des vents un peu plus favorables en ce qui vous concerne.
Deuxième chose, concernant la nouvelle loi et la manière de la mettre en question. J'aimerais aussi qu'on examine ce qui se passe au niveau des stages qui sont organisés aux EPI, afin d'évaluer ce qu'on appelle la distance à l'emploi - c'est un terme un peu horrible, mais enfin, c'est la distance à l'emploi des personnes qui sont au chômage. J'ai là sous les yeux un article que je vous remettrai, Madame la conseillère d'Etat, qui mentionne des pratiques assez inquiétantes, non pas que les gens fassent mal leur travail, mais probablement que, faute de moyens - et je reviens là à une question budgétaire - eh bien, faute de moyens et faute de personnel, le travail se fait inadéquatement.
Mesdames et Messieurs les députés, pour conclure et pour qu'on ait des réponses à nos questions, je vous invite à renvoyer en commission l'excellent projet de loi socialiste ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Madame la députée. Je vous soumets, Mesdames et Messieurs les députés, cette demande de renvoi en commission.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10625 à la commission des affaires sociales est rejeté par 44 non contre 16 oui et 5 abstentions.
Le président. Nous poursuivons notre débat avec l'intervention du député Michel Forni.
M. Michel Forni (PDC). Monsieur le président, le thème que nous traitons ce soir un peu tardivement est important. Pour nos concitoyens qui sont dans la difficulté, il me paraît important de rester sérieux et de prendre encore quelques minutes pour essayer d'arriver au bout de cette discussion.
Nous traitons donc d'un projet de politique de l'emploi. Ce projet a été associé, comme cela a été dit, à une démarche jumelle, évoquée dans le projet de loi 10599, qui reste l'élément déterminant de notre politique sociale, et le contre-projet qui découlait de ce projet socialiste ne pouvait pas renverser les acquis du PL 10599 qui avaient été bien capitalisés. C'est pourquoi la commission des affaires sociales a peut-être refusé de traiter ces deux textes simultanément. Il y avait toutefois certaines complémentarités, raison pour laquelle, dans un premier temps, le parti démocrate-chrétien, mon cher confrère, est parti en travaillant de pair sur ces deux projets. Il y avait donc un principe de complémentarité, qui par la suite a disparu étant donné que nous n'avons pas pu entrer en matière.
Alors, pourquoi l'importance de ce texte ? Parce que, comme on l'a dit tout à l'heure, le taux de chômage à Genève reste relativement élevé; le nombre de jours de chômage par chômeur à Genève reste élevé. D'autre part, nous sommes tous acquis au fait que l'activité crée la richesse, donc l'emploi. Mais, s'il convient de travailler plus pour travailler tous ensemble, il est important aussi de noter que si les fourmis s'activent, les cigales vivent mieux ! Pour désigner la fraction du travail qui reçoit une rémunération, il est important de pouvoir disposer d'une capacité productive; à l'opposé, lorsqu'on est sans travail, on est peut-être disponible, mais on cherche surtout à retrouver une activité. Et, là derrière, il y a ce principe de flexibilité qui a été décrit ce soir, peut-être d'une façon un peu abrupte. Cette flexibilité peut être numérique quand elle concerne l'embauche, elle peut être fonctionnelle quand cela fait appel à la polyvalence, elle peut être salariale lorsqu'il y a des ajustements. Cela n'a pas été traité très en détail, compte tenu des circonstances.
Toutefois, il est important aussi d'avoir des chiffres, et ces chiffres ne ressortent pas. Personnellement, j'ai été très frappé de voir que, chez nos amis français, par exemple, la réinsertion d'une personne, lorsqu'elle peut être remise dans le circuit en un an, rapporte à la collectivité trois fois plus qu'elle ne coûterait si elle restait, malheureusement, hors d'activité.
Il y a des cas particuliers: chez les jeunes, il faut y penser, ceux qui sortent de l'université et qui ne trouvent pas de travail; chez les anciens, ceux de plus de 52 ans, qui sont licenciés, et rapidement et impitoyablement disqualifiés. On ne peut pas les oublier. Ceci fait aussi partie du PL 10599, et heureusement. Il y a donc des mesures pour lutter contre cette exclusion sociale et professionnelle.
Voilà pourquoi, dans les incertitudes et les difficultés, nous avons été très frappés par les carences de ce texte. Par conséquent, nous sommes restés très intéressés à tenter de travailler sur les deux projets de lois. Comme on l'a dit, l'évolution et le traitement de ces deux derniers n'ont pu avoir lieu, raison pour laquelle un consensus semble de nouveau exister entre les acteurs dominants dans un certain jeu social, et puis, ceux qui sont le maillon faible et qui, malheureusement, par leur silence, restent un peu dans l'oubli.
Alors pourquoi, ce soir, n'entrerons-nous pas plus loin en matière ? Parce que nous n'avons pas de projection concernant d'autres variantes; parce que nous n'avons pas d'autres modèle de gestion du chômage autre que l'aide sociale; parce que nous n'avons pas de chiffres concernant les coûts. Et nous restons sur notre faim, parce que ces stratégies reprennent de nombreux éléments qui sont déjà cités dans l'autre projet de loi et, finalement, ce contre-projet devient caduc. Il n'est toutefois pas totalement caduc, puisque, comme je l'ai dit, les réponses suffisantes existent dans l'autre PL. Ainsi, le PDC restera sur sa faim ce soir, n'ira pas plus loin et renoncera à entrer dans une autre bataille.
M. Serge Hiltpold (L). Mesdames et Messieurs les députés, ce projet de loi a été traité en même temps que le PL 10599, pour la suppression du RMCAS, et j'entends bien les remarques de la députée Torracinta qui critiquait la scission des deux rapports, pour des jetons de présence, et qui nous proposait, il y a cinq minutes, un renvoi en commission. Je pense, Madame, que vous n'êtes pas très cohérente dans vos propos. Ça, c'est le début de mon intervention.
Sur le fond, votre projet pour l'emploi propose une vision planifiée et interventionniste de l'Etat, décalée de la réalité économique de notre pays et de notre canton. Je vous rappelle que le tissu économique local est composé de 80% de PME. Je lis un extrait de l'article 1 de votre projet de loi: «La présente loi a pour but de promouvoir un dispositif cantonal favorisant la création d'emplois et la régulation du marché de l'emploi par la mise en adéquation entre les personnes disponibles à l'emploi et les besoins des employeurs.» C'est complètement décalé de la réalité ! Dans l'article 2, ce projet définit l'emploi par un contrat de travail à durée indéterminée, un CDI. Surprenant ! Il omet le travail temporaire, il omet les indépendants, il omet les contrats à durée fixe. A l'article 2, je cite votre projet de loi: «Au sens de la présente loi, on entend par personne sans emploi toute personne n'ayant pas un emploi stipulé par un contrat de travail à durée indéterminée ou toute personne n'ayant pas encore eu l'occasion d'entrer dans un tel emploi ainsi que les indépendants ayant exercé une activité pendant plus d'une année.» C'est complètement décalé de notre monde économique.
Ensuite, après ces deux premiers articles, notre groupe s'interroge également sur le terme suivant - sauvegarde - dans l'article 3: «La présente loi définit les mesures de prévention par lesquelles l'Etat favorise la sauvegarde d'un emploi.» Comment sauvegarder un emploi: une aide directe ? une aide indirecte ? sur quel critère et sur quelle base ? La réponse d'un entrepreneur est simple. Pour créer des emplois, voire les maintenir, envoyez déjà des messages clairs et différents de ceux que vous avez votés dernièrement. Hausse des augmentations des allocations familiales financées par les entreprises, diminution du taux de perception de l'impôt à la source, une bureaucratie qui est imposée par l'Etat et qui n'est pas la tâche de l'entreprise, voilà deux signaux négatifs envoyés récemment aux mêmes employeurs auxquels vous demandez de porter l'emploi, de former et de réinsérer ! (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs les députés, les déclarations de bonnes intentions ne suffisent pas. Elles sont nombreuses dans ce projet de loi et ne répondent en rien sur les conditions-cadres propices aux PME qui développent et maintiennent l'emploi, surtout dans des conditions de crise. Car lorsque vous êtes dans les PME, vous essayez de préserver le capital humain, qui est un facteur positif pour votre entreprise. C'est avec ce point de vue que le groupe libéral vous recommande, comme la majorité de la commission des affaires sociales, de rejeter ce projet de loi.
Mme Esther Hartmann (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, la loi sur l'aide sociale, la loi sur le chômage ont subi des bouleversements capitaux et fondamentaux ces deux dernières années, avec une restructuration majeure, que ce soit dans l'aide sociale ou dans l'accompagnement des chômeurs, y compris ceux de longue durée.
Certains choix n'ont pas convenu aux Verts, mais les Verts ont décidé d'en prendre acte, même si cela peut faire mal au coeur. Lors des travaux de la commission de l'économie, nous avons abordé le projet de loi sur le chômage. Le groupe socialiste a apporté des amendements issus du projet de loi proposé ce soir, pour enrichir les travaux de la commission. Quelques-uns de ces amendements ont été approuvés et soutenus par les Verts, d'autres pas, et nous avons abouti à un certain résultat. Nous en prenons acte et nous n'allons pas entrer en matière sur ce projet de loi.
Par contre, nous ferons extrêmement attention, car nous sommes inquiets, Mesdames et Messieurs les députés. Nous avons entendu les débats sur le budget; nous avons entendu le souci de renforcer la sécurité, le souci de couper dans certains budgets. Nous espérons que les choix effectués par ce parlement ne seront pas, en quelque sorte, détruits par des personnes qui souhaitent couper extrêmement fortement dans les budgets sociaux et dans les budgets relatifs à l'accompagnement des chômeurs. Plusieurs soucis qui ont été mentionnés par notre collègue, Mme la députée Emery-Torracinta, concernant l'accompagnement des personnes aux EPI et aux stages d'insertion sont effectivement parvenus à nos oreilles de nombreuses fois et nous sommes préoccupés de voir que cela pourrait s'aggraver si des coupes budgétaires devaient encore avoir lieu en ce domaine.
Donc nous vous remercions de faire attention lors de vos travaux, nous faisons appel à votre éventuelle sagesse dans le traitement budgétaire qui risque de venir, et nous confirmons que nous n'entrerons pas en matière par rapport à ce projet de loi.
Mme Lydia Schneider Hausser (S). Mesdames et Messieurs les députés, le relèverai ceci. Je crois, Monsieur Weiss, que votre position est bien claire, comme l'a indiqué ma camarade Emery-Torracinta. En disant que le projet de loi ne pouvait pas être couplé à l'autre projet, vous avez retiré ce débat. Débat il aurait pu y avoir au moment où les deux PL sont sortis de commission; il est clair que c'était plus simple pour vous de l'éviter, pour promouvoir le projet de loi sur la LIASI uniquement !
Monsieur Hiltpold, vous critiquez le texte du projet de loi à ce stade. C'est vrai qu'en tant que députés de milice nous n'avons pas les moyens identiques à ceux d'un département qui présente un projet de loi sur l'emploi, avec tous les chiffres à l'appui. Toutefois, en termes d'étude et de réflexion dans le domaine de l'insertion et de la sécurité sociale professionnelle, tous les spécialistes actuels s'accordent à dire que, pour qu'un système fonctionne, il faut joindre la volonté de la personne à sa capacité. Pour que les gens atteignent une capacité à se réinsérer, il faut des indemnités généreuses, un revenu de remplacement élevé et des moyens de qualification. Dans plusieurs pays développés s'est pratiquée une politique sociale basée sur le principe de la «flexicurité». En termes de sécurité, nous passons de la sécurité du poste de travail à la sécurité du marché du travail. Nous travaillons sur la sécurité de l'emploi, du marché du travail et des mesures de transition. En termes individuels, cela correspond à une sécurité du parcours professionnel qui implique une protection pendant la carrière professionnelle de l'individu, quand il est sur le marché du travail ou quand il est en emploi ou pas. A défaut d'avoir des emplois pour tout le monde, il est bénéfique à l'économie et à toute une population d'avoir des personnes en activation, prêtes à entrer en emploi rapidement si la situation le demande. Le but est d'adapter le concept du chômage à la flexibilité demandée dans le marché économique sans que le demandeur d'emploi en fasse les frais en raison d'une situation désespérée ou de précarité. C'est le but de la «flexicurité» ! Alors, comme le dit le rapporteur de majorité, ce n'était pas soutenu par la droite, ni par les syndicats totalement, c'est sûr. Beaucoup de pays développés ont choisi cette alternative, ce «mix» qui permet au travailleur de suivre le marché et l'évolution du marché de l'emploi. Une personne seule vit de plus en plus dans sa vie professionnelle différentes missions et différentes professions. Les moments d'inactivité professionnelle entre deux postes sont et doivent être mis à profit dans le projet de loi tel qu'il était présenté, pour l'acquisition de compétences et de connaissances certifiantes. Partant de là, nous demandions le maintien du pilier intermédiaire du RMCAS, à l'époque, non pas pour maintenir un service absolument tel qu'il était et ne pas le réformer, mais comme pilier intermédiaire de revenu. Le principe des revenus échelonnés, suivant le processus d'insertion et le stade auquel on se trouve, a pour volonté de stimuler les gens à une recherche d'emploi et à une recherche des capacités nécessaires à l'emploi à venir. Ce n'est pas ce qui a été prôné et ce n'est pas ce qui a été choisi par ce parlement, qui a opté pour ce concept: soit les gens sont en emploi, soit ils ont des indemnités chômage, soit ils ont l'aide sociale. Mais il n'y a pas d'intermédiaire. (Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Le projet de loi pour l'emploi prévoit un dispositif flexible: un travail décloisonné entre l'OCE, l'Hospice général et les partenaires d'insertion, une sécurité du parcours professionnel et d'insertion qui propose des formations qualifiantes et leur intensification entre le demandeur d'emploi, l'Etat et l'employeur. Ce sont les trois acteurs de l'économie, en termes de sécurité sociale et professionnelle. Plus il y a de dialogue entre ces trois acteurs - non pas quand les choses ne vont pas, mais avant que les choses aillent mal - et quand l'employeur a besoin d'un certain nombre de travailleurs, s'ils sont formés sur le territoire, il va les trouver. Effectivement, plus les politiques de l'emploi se distendent et plus la sécurité à l'emploi est difficile, plus les personnes en recherche d'emploi ont besoin d'avoir une sécurité, même lorsqu'elles ne sont pas en emploi, afin de ne pas être exclues de tout le système. La sécurité sociale, Mesdames et Messieurs les députés, n'a pas été chiffrée en commission, cela a été dit ce soir. Bien sûr, cela a un coût, mais en ce qui concerne l'emploi actuellement, avec le pourcentage de non-emploi que nous avons à Genève, il y a quand une partie structurelle. C'est-à-dire que, même si les gens veulent travailler, il n'y a pas d'emplois. Donc il faut les former différemment, il faut les former durant le parcours, et cela coûte. Mais cela coûte beaucoup moins cher, comme l'a relevé M. Forni, de dépenser de l'argent à la formation et à la qualification que d'attendre que ces gens soient à l'aide sociale pendant des années.
C'est pour cela, Mesdames et Messieurs les députés, que nous avions proposé cette alternative, afin qu'il y ait plusieurs paliers. Car s'il n'y a pas plusieurs paliers pour les demandeurs d'emploi, vous allez reporter les coûts sur les différentes étapes servant d'alternative au chômage, comme l'assurance-invalidité, comme l'assurance-maladie, et peut-être, à un moment donné, la mendicité. (Applaudissements.)
Le président. La parole est à M. le député Marc Falquet. (Brouhaha.)
M. Marc Falquet (UDC). Merci, Monsieur le président ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mesdames et Messieurs les députés, les contribuables de ce canton ont un service spécialisé qui se nomme office cantonal de l'emploi. Dans cet office cantonal, il y une série de fonctionnaires qui travaillent et qui s'appellent des placeurs. Ces placeurs ne sont pas des professionnels de la réinsertion. Ce ne sont pas de vrais professionnels de l'emploi et, en règle générale, ils ne font qu'étudier des dossiers. Ils sont submergés de dossiers, ils sont complètement démotivés et ils ont absolument lâché leur tâche principale qui, en fait, serait de chercher du travail pour les gens. Ils ne le font pas, ils ne font que mettre des coches sur les formulaires, et c'est tout ! Donc, je pense qu'il y aurait là quelque chose à améliorer, c'est-à-dire employer ces personnes à bon escient, afin qu'elles recherchent, afin qu'elles s'évertuent à rechercher du travail pour les demandeurs d'emploi. Or ça, elles ne le font pas ! C'est très rare qu'elles le fassent. Et je vous demanderai, Madame la conseillère d'Etat - si vous voulez bien nous éclairer à ce sujet - si l'on pourrait améliorer l'efficacité de cet office et des placeurs. Je vous remercie.
M. Mauro Poggia (MCG). Chers collègues, il est tard, je ne serai pas long. D'abord, je voudrais remercier le groupe socialiste pour avoir déposé un projet de loi qui a certainement demandé beaucoup de travail et de réflexion, parce que c'est un projet de loi élaboré, indiscutablement. Mais, comme l'ont dit certains avant moi, si ce projet est une succession de bonnes intentions auxquelles nous pouvons tous adhérer, elles ont toutefois peu d'ancrage dans la réalité. La mise en pratique serait particulièrement difficile, pour ne pas dire impossible. Nous ne pouvons pas avoir une accumulation de lois sur l'emploi de manière générale, il s'agit d'en avoir une bonne et de la corriger, le cas échéant. Vous savez que, simultanément à cette loi, nous avons adopté la LIASI, loi sur l'intégration et l'aide sociale individuelle, qui n'apporte peut-être pas toutes les réponses voulues, nous nous en rendons compte aujourd'hui; peut-être que les critiques qui avaient été émises à l'époque n'étaient pas dénuées de fondement. Il s'agira éventuellement de remettre l'ouvrage sur le métier, afin d'examiner ce qui peut être amélioré dans cette loi qui, sur le fondement, est exact. Parce qu'il ne convient évidemment pas uniquement de donner des prestations aux personnes qui cherchent un emploi, mais, comme l'a dit très justement M. Falquet, d'agir activement pour les aider à trouver un emploi.
La loi pour l'emploi, ce n'est pas uniquement créer des emplois ! L'Etat peut évidemment, dans une certaine mesure, créer des emplois, mais nous ne sommes pas là non plus pour faire de l'Etat l'employeur numéro un du canton. L'Etat est là surtout pour faire en sorte que les demandeurs d'emploi soient en adéquation avec les postes proposés et qu'on leur donne réellement les moyens de correspondre au niveau des emplois disponibles. Et je ne pense pas que les stages qui sont aujourd'hui offerts auprès des EPI - établissements publics pour l'intégration - soient de ce niveau-là. Je pense qu'effectivement les demandeurs d'emploi ne sont pas respectés comme ils devraient l'être. Il y a beaucoup de travail à faire à ce niveau-là, mais certainement pas avec une loi comme celle-là, même si les motivations de celles et ceux qui l'ont établie étaient louables, et nous pouvons bien sûr y adhérer.
Donc nous ne soutiendrons pas cette loi, mais nous considérons qu'il y a beaucoup à faire dans ce canton pour aider les demandeurs d'emploi à trouver un «job», si vous me passez l'expression. Je regrette que le parti socialiste répugne encore à aborder une question qui nous paraît, de ce côté-ci, absolument essentielle, laquelle est aussi - et je ne vois rien dans ce sens dans votre projet de loi - de donner, chaque fois qu'on peut le faire, une priorité, à compétences égales, aux demandeurs d'emploi qui sont ici. Il est évident qu'il y a des accords internationaux auxquels nous ne pouvons pas déroger; par contre, lorsqu'il s'agit de l'Etat ou des régies publiques, nous avons un devoir moral d'aider celles et ceux qui habitent ce canton à trouver un emploi. Et je n'ai rien entendu dans ce sens du côté socialiste, puisqu'au nom d'une internationale des travailleuses et des travailleurs vous considérez qu'il faut instaurer une internationale du chômage !
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme la rapporteure de minorité Prunella Carrard.
Mme Prunella Carrard (S), rapporteuse de minorité. Deux considérations en conclusion: la première, sur le fond. Monsieur Poggia, notre ancrage, l'ancrage de ce projet de loi, était notamment le même que celui de la Conférence suisse des institutions d'action sociale - qui n'est pas non plus novice en la matière - qui publiait il y a quelque temps un article sur le chômage de longue durée. Je vous en lis un extrait.
M. Pierre Weiss. Petit !
Mme Prunella Carrard. «Les personnes qui restent sans travail risquent de régresser financièrement et socialement. Pour la Conférence suisse des institutions d'action sociale, il y a lieu d'agir. Elle propose d'octroyer aux personnes concernées des prestations liées au besoin - une sorte de prestations complémentaires. Celles-ci pourraient éviter qu'un passage à vide entre l'assurance-chômage et l'aide sociale ne devienne un piège de pauvreté.» Voilà notre ancrage, Monsieur Poggia !
Sur la forme enfin, il y a moins d'une heure, la droite majoritaire de ce parlement a basté sur un projet de loi... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...sans même en parler quelque peu, et a refusé l'entrée en matière. Or, pour ce projet de loi socialiste, en commission - même si la discussion concernait aussi l'autre projet de loi du Conseil d'Etat et était conjointe - en réalité, ce projet de loi socialiste a été abordé lors de la dernière séance de la commission l'espace de... allez, trente minutes ! Franchement, ce n'est pas là un traitement sérieux - ni, d'ailleurs, respectueux du travail des collègues députés - que de refuser l'entrée en matière au bout de trente minutes à peine de discussion sur ce projet de loi ! (Brouhaha.) Franchement, Mesdames et Messieurs les députés, quel manque de sérieux ! Quel manque de travail ! Quel manque de vision pour Genève ! (Applaudissements.)
Le président. Merci. La parole est M. le rapporteur de majorité Pierre Weiss.
M. Pierre Weiss (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais mettre du baume au coeur de Mme Carrard. Parce que je lui reconnais, en commission comme dans la rédaction de son rapport, un dévouement, une profondeur de travail... (Commentaires.) ...une quantité de travail ! remarquables, pour une cause qu'elle savait perdue. Ce n'est pas parce qu'elle la savait perdue qu'elle a renoncé à faire son travail, et je tenais à lui rendre cet hommage, tout d'abord.
J'aimerais aussi dire, Monsieur le président, qu'il est parfois dommage de voir qu'un projet de loi qui tenait du «machin bureaucratique», il faut quand même le reconnaître, n'a pas réussi à convaincre une commission, qui lui a préféré un contre-projet, en fait indirect, bien fait par le Conseil d'Etat ! Et, mon Dieu, il faut savoir - je le dis pour Mme Emery-Torracinta - être bonne perdante ! Pas seulement bonne perdante ce soir, alors que vous avez aligné les défaites ! Mais bonne perdante aussi par rapport à ce qui a été adopté en commission et qui, je le crois, pour les personnes concernées de notre canton est meilleur. Il y a un moment où il faut savoir aussi que le mieux est l'ennemi du bien. Vous avez de la peine, Madame, je le regrette, à le comprendre, mais je ne pense pas que je ne réussirai pas, un jour, à vous convaincre de ne pas aller trop loin. J'aimerais aussi dire, d'ailleurs, que vous avez compris que ce projet était mort, puisque vous posez des questions sur la suite. Vous auriez mieux fait, en réalité, au fond, de retirer ce projet de loi.
J'aimerais juste encore contredire deux choses ! Il a été dit par Mme Schneider Hausser qu'il n'y avait pas d'emplois à Genève... Quand on sait que le nombre d'emplois créés par des entreprises s'élève à des dizaines de milliers, alors là, vraiment, c'est quelque chose d'ahurissant ! Et ce genre de projet de loi rend les choses, au contraire, plus difficiles ! Et puis, l'autre point que je tenais à relever c'est pour rétablir la réputation de l'office cantonal de l'emploi: on ne peut pas dire des placeurs qu'ils sont des personnes qui ne connaissent pas leur travail et qui sont inefficaces. (Brouhaha.) Il y a eu notamment des réformes dans la structure de l'office cantonal de l'emploi: regardez ce qu'il en est de la réussite du nombre de personnes qui sortent du chômage grâce au travail de l'office cantonal de l'emploi ! Alors, s'il vous plaît, ne mettez pas en doute l'Etat social - que vous appelez d'ailleurs de vos voeux ! C'était le deuxième hommage que je voulais rendre ce soir au travail considérable qu'effectue l'Etat genevois !
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Sont encore inscrits: M. Poggia et M. Deneys. (Commentaires.) Nous sommes en débat libre ! Je donne à chacun d'eux la possibilité de s'exprimer. Ensuite, la parole sera à Mme Rochat.
M. Mauro Poggia (MCG). Je demande le renvoi à la commission des affaires sociales.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets cette proposition. (Brouhaha durant la procédure de vote.)
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10625 à la commission des affaires sociales est rejeté par 46 non contre 37 oui.
Le président. Je donne la parole à M. le député Deneys.
M. Roger Deneys (S). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais simplement faire remarquer au rapporteur de majorité qu'évoquer le nombre de personnes qui sortent de l'office cantonal de l'emploi, quand ce dernier perd des dossiers... Je ne crois pas que ce soit une preuve de réinsertion !
Le président. La parole est à la conseillère d'Etat. (Brouhaha.) S'il vous plaît, un peu de silence, nous arrivons au bout !
Mme Isabel Rochat, conseillère d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons très largement abordé ce soir une question essentielle, le budget, qui n'est autre que l'expression d'une volonté politique. Cette volonté politique que vous nous demandez de revoir, de corriger, après de nombreux débats, cette expression politique s'exprime dans une très large mesure à travers les efforts considérables que l'Etat, le gouvernement et le parlement ont faits depuis de nombreuses années - et feront encore - en matière de politique sociale. Sur un budget de plus de 1,7 milliard de francs, dont près de 400 00 millions pour l'action sociale, je peux vous dire qu'il n'est pas question d'en rogner le premier centime. Il n'est pas question qu'il y ait des gagnants, qu'il y ait des perdants. Il est question surtout que le gouvernement et le parlement assument leurs responsabilités en matière de préservation de l'emploi et en matière, surtout, de prise en charge de nos demandeurs d'emploi.
Nous avons évoqué les turbulences, nous avons évoqué l'incertitude - il a été question de bateau, il a été question de navigabilité, il a été question de paquebot... Pour avoir quelques notions de navigation sur les eaux du Léman, je peux dire pour vous rassurer, Madame Emery-Torracinta, que le gros paquebot qui a déménagé cet été a pris sa route et maintient son cap. Il s'agit de le faire naviguer dans des eaux qui sont tumultueuses, et il s'agit de garder le cap ! Certes, certaines erreurs, non pas de cap mais de pilotage, ont peut-être été la cause de retards, lesquels ont été relevés très abondamment par la presse. Elles ont été corrigées par la suite, dans la mesure où nous n'avons jamais essayé de vous duper ou de vous tromper.
J'aimerais, avant d'aborder le fond de ce projet de loi, rappeler que le député Weiss a sauvé non pas le soldat Ryan mais le soldat «Office cantonal de l'emploi», en rappelant les efforts considérables effectués sous la houlette de mon prédécesseur, M. François Longchamp. Des réformes ont été menées, afin de rendre ce service ô combien stratégique le plus performant possible !
Il ne s'agit pas que de simples placeurs, Monsieur Falquet. C'est un service qui a été créé, et je vous encourage très vivement vous rendre à la rue des Gares, afin de visiter ce nouveau paquebot, inauguré très récemment et qui abrite en son sein, dans une de ses cabines, un service «Employeurs». Ce dernier n'a d'autre but que de mettre en relation les employeurs et les demandeurs d'emploi, de façon à assumer cette responsabilité qui est de faire qu'un demandeur d'emploi reste le moins longtemps possible dans cette situation très difficile de demandeur d'emploi.
Sans citer la Conférence, qui a émis un certain nombre de recommandations, je citerai déjà le professeur Flückiger, que vous avez reçu en commission il n'y a pas très longtemps et qui affirmait que la durée du chômage était un aspect fondamental. La courte durée du chômage est une condition fondamentale à la réinsertion, et c'est en tout cas une chose sur laquelle nous ne reviendrons pas.
Quant au fond de ce projet de loi, son but est tout à fait louable mais il y a malheureusement un écueil, ou même quatre écueils. Tout d'abord, ce projet de loi ne simplifie pas l'organisation mais, au contraire, la rend plus complexe, et c'est vrai que l'adoption de la LIASI, en février 2012, a rendu beaucoup plus cohérents et concrets un certain nombre d'objectifs qui figuraient dans votre loi.
Et surtout, cela a été rappelé à de nombreuses reprises, les changements législatifs qui sont intervenus permettent maintenant d'atteindre les objectifs qui ont été prévus dans cette loi. La LIASI entrée en vigueur propose un certain nombre de mesures très concrètes. Je vous parlais de ces stages qui ont besoin aussi de prendre leur envol, ces stages qui comportent un certain nombre d'imperfections, comme l'ont relevé la presse et les utilisateurs eux-mêmes. Je suis allée voir de quoi il s'agissait. C'est vrai, ces nouvelles mesures nécessitent de guérir de leurs maladies de jeunesse, et je m'y emploierai, dans la mesure où il s'agit de ne pas dégoûter les gens, mais de leur permettre de donner une nouvelle orientation à leur carrière.
Il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain à travers le hublot du paquebot, mais offrir à nos demandeurs d'emploi un cadre confirmé par la base légale, de façon qu'ils puissent trouver un emploi dans les meilleures conditions. Sachant que l'arc lémanique est la région où se créent le plus d'emplois - cela a été rappelé par le député Poggia - l'Etat n'a pas pour vocation d'être créateur d'emplois, mais de mettre en place un certain nombre d'infrastructures et de bases légales qui permettent à nos demandeurs d'emploi d'être réinsérés le plus rapidement possible. C'est tout l'enjeu de cette nouvelle LIASI ainsi que de la nouvelle loi entrée en vigueur le 1er août de cette année. Je vous remercie de votre attention.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous faire voter l'entrée en matière de ce projet de loi. (Brouhaha durant la procédure de vote.)
Mis aux voix, le projet de loi 10625 est rejeté en premier débat par 51 non contre 15 oui et 14 abstentions.
Le président. Avant de lever la séance, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais qu'on ait une pensée pour le président Losio, atteint dans sa chair. Il n'est pas au mieux, j'aimerais donc qu'on pense à lui ! Il arrive au bout de son année présidentielle et je crois qu'on peut lui rendre hommage. On le fera la prochaine fois, mais, aujourd'hui, il a dû rentrer parce qu'il n'était vraiment pas bien ! Je lève la séance et vous souhaite un bon week-end ! (Applaudissements.)
La séance est levée à 23h.