République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 2 septembre 2010 à 17h
57e législature - 1re année - 10e session - 55e séance
PL 10529-A
Premier débat
M. François Haldemann (R), rapporteur de majorité. Tout le monde le sait, la situation du logement à Genève est très préoccupante... Seuls 0,2% des logements sont vacants !
Il nous faut donc construire de nouveaux logements. Et il est clair que la zone agricole ne doit pas être la seule à en faire les frais. Il faut aussi que la zone constructible remplisse sa part de nouveaux logements ou de zones d'activités commerciales et administratives par le biais de la densification, et cela, dans des périmètres stratégiques en termes d'infrastructures.
Genève est à la croisée des chemins. Nous savons tous comme il est difficile de réaliser un projet d'aménagement tant il y a de résistances et tant la voix des oppositions est utilisée à bon et mauvais escient. Et c'est maintenant - maintenant ! - que nous devons être courageux, montrer que le parlement genevois prend conscience de la situation et prend des décisions pour y remédier.
Alors, pourquoi devons-nous accepter cette modification de zone dans le périmètre du chemin de l'Ancien-Puits, qui est l'objet de ce projet de loi ? D'abord et surtout parce que ce périmètre s'y prête parfaitement: il est proche du centre, proche des infrastructures de transports publics - que notre canton réalise à grands frais, notamment le TCOB, qui est à une centaine de mètres - et c'est déjà un périmètre urbanisé.
On va sans doute nous rétorquer que la commune de Lancy s'y oppose et que celle-ci est largement engagée dans l'effort de construction de logements à Genève. Oui - oui ! - Lancy est très engagée, c'est vrai - il faut le relever - notamment avec le périmètre concerné de la Chapelle-Les Sciers, mais il faut aussi admettre que ce n'est pas la seule commune à participer à cet effort. Je peux citer personnellement la commune de Meyrin, qui est, dans le cadre du plan directeur cantonal, concernée par le projet des Vergers, et le Conseil municipal de Meyrin a aussi accepté très récemment un projet de modification de zone pour un très grand périmètre, actuellement en zone 5.
Deuxièmement, je dirai que la commune nous demande de patienter, mais elle reconnaît déjà - déjà maintenant - que ce périmètre, à terme, devra être densifié... Cet argument ne tient donc pas la route !
Mesdames et Messieurs les députés, il ne s'agit pas d'un vote de défiance par rapport à une décision de la commune ! Nous devons tout simplement impérativement nous décider et procéder à cette modification de zone maintenant ! Tout le monde - y compris les propriétaires qui s'y opposent - reconnait que ce périmètre, à terme, devra être déclassé. Mais si nous laissons ce périmètre en zone 5, certains propriétaires vont, dans l'intervalle, demander des dérogations dans l'IUS - l'indice d'utilisation du sol - et ce développement sera anarchique: en aucun cas il nous permettra d'atteindre les objectifs de densification souhaités. C'est pour cela que nous devons le déclasser maintenant, pour qu'il soit envisageable de densifier ce périmètre dans une quinzaine d'années ! Parce que l'on ne va pas les exproprier de leur propriété, il est clair que ce ne sera pas le cas ! Par contre, si nous ne procédons pas à ce déclassement maintenant, ce n'est pas à l'horizon de quinze ou vingt ans que nous pourrons construire, mais à l'horizon de trente ou quarante ans ! Pouvons-nous nous le permettre ?
Le président. Monsieur le rapporteur, il vous faut conclure !
M. François Haldemann. A l'évidence, non ! Je vous prie donc de bien vouloir accepter ce projet de loi de modification de zone.
M. Stéphane Florey (UDC), rapporteur de minorité. Si, effectivement, ce quartier est situé près de la route de Chancy et de la route du pont Butin, donc également près du futur TCOB, il n'est en aucun cas destiné à du logement: c'est un leurre ! Vous pouvez aller vérifier sur place: actuellement, toutes les constructions situées dans cette zone sont destinées exclusivement à des bureaux et à des activités commerciales ! Et en aucun cas à du logement !
Ce déclassement est un non-sens ! Il n'est pas satisfaisant et, du reste, il fait déjà l'objet de nombreuses oppositions, tant de la part de la commune que des habitants de ce quartier !
Il faut le refuser essentiellement pour deux raisons. La commune - Conseil municipal et Conseil administratif - n'en veut pas, et les habitants n'en veulent pas. Alors, arrêtons cette fuite en avant qui consiste à déclasser sans rien construire et de faire croire à la population qu'en déclassant à tour de bras nous allons augmenter le nombre de logements construits: c'est totalement faux ! C'est ainsi ! Adopter ce projet de loi, c'est prendre l'option de ne rien construire du tout ! C'est malheureux, mais c'est comme ça !
Disons-le franchement, nous sommes en présence d'un Communaux d'Ambilly 4 ou 5 ! Je ne sais plus très bien, car, malheureusement, ces derniers temps, on parle beaucoup de projets de lois de déclassement de piètre qualité qui ne satisfont personne, qui rencontrent nombre d'oppositions et n'améliorent en rien la situation de notre canton en matière de logements !
Je vous rappelle également que la commune de Lancy a fait énormément d'efforts en matière de déclassement ces dernières années, et il est normal qu'elle puisse souffler un peu en matière de déclassement. Devant la ferme détermination de la commune et de ses habitants d'aller à la confrontation, je vous remercie de suivre les conclusions de la minorité et de refuser ce projet de loi.
M. Roger Golay (MCG). On peut bien comprendre les motifs qui poussent le rapporteur de majorité à dire qu'il faut arrêter de déclasser la zone agricole, car il est le président d'AgriGenève... (Commentaires.) Malheureusement, je vous rappelle, Messieurs les radicaux, Messieurs du parti démocrate-chrétien - Mesdames aussi - que vous avez toujours soutenu l'acquisition à la propriété dans ce pays. Aujourd'hui, vous abandonnez les propriétaires de villa - je suis d'autant plus à l'aise pour le dire que je n'en fais pas partie: je suis locataire ! En effet, à chaque fois qu'une association de quartier exprime des revendications pour défendre la zone villas, vous les oubliez ! Vous tenez un double discours au niveau fédéral: vous défendez l'acquisition à la propriété, vous dites que tout Suisse devrait pouvoir être propriétaire de son logement, mais vous êtes en totale contradiction avec ce que vous prônez, car, aujourd'hui, vous ne faites que chasser les propriétaires de villa !
Il faut savoir que si la zone qu'ils habitent est déclassée en zone 3, ils ne trouveront jamais, en cas de vente, l'équivalent ! On sait très bien que les prix des terrains en zone de développement 3 sont nettement inférieurs. Ces propriétaires n'auraient donc pas la possibilité de trouver un logement comparable ailleurs. Cela représenterait pour eux - et vous le savez très bien ! - une perte financière importante s'il fallait qu'ils vendent pour laisser la place à des zones de développement 3.
Comme l'a dit le rapporteur de minorité, le Conseil municipal dans son entier a voté contre le déclassement, mais, une fois de plus, vous bafouez les autorités communales. Et, pourtant, dieu sait - on le sait aussi - que les conseils municipaux constituent l'un des piliers de notre démocratie ! Vous vous couchez dessus, alors qu'ils représentent la population dans les communes ! Vous ne les suivez plus du tout ! C'est dommage ! Vous faites fi d'une partie de notre démocratie !
Cela a été dit, la commune de Lancy a fait des efforts considérables: la Chapelle-Les Sciers, les Marbriers, les Semailles, Praille-Acacias, et j'en passe. Aujourd'hui, la commune a besoin de souffler - les infrastructures, écoles, etc., coûtent cher - et elle ne peut plus développer pour le moment. J'en parle en toute connaissance de cause, puisque je suis, comme vous le savez, Lancéen et au Conseil municipal. Je le répète, elle demande simplement de souffler un peu, de surseoir à ce projet et d'envisager la suite avec une meilleure vue d'ensemble que la vôtre. En effet, votre projet ne concerne que quatre villas, qui appartiennent au même propriétaire et qui vont être vendues pour construire un petit immeuble en bordure de la route du Pont-Butin, alors que cet endroit ne se prête absolument pas à du logement, en raison du bruit, de la caserne des pompiers, etc. A cet endroit, il vaudrait mieux construire des bureaux administratifs que du logement et il faudrait construire les logements plus à l'intérieur du périmètre.
Je vous invite donc à refuser ce déclassement, ne serait-ce que pour le respect des institutions communales. Aujourd'hui, Lancy et les partis que vous êtes censés représenter au sein des communes vous le demandent, mais vous ne les écoutez pas... A se demander où est la cohésion des partis de l'Entente, mis à part les libéraux, qui, je le rappelle, ont soutenu le Conseil municipal de Lancy ! Les radicaux, les PDC et les Verts - qui étaient les plus virulents au Conseil municipal, pour garder cette petite zone qui constitue le poumon vert de Lancy - vous balayez les principes défendus par vos conseillers municipaux et vous ne respectez pas leur choix !
Le président. Merci, Monsieur le député !
M. Roger Golay. Je vous invite donc à refuser ce déclassement...
Le président. Très bien !
M. Roger Golay. ...et, éventuellement, à surseoir à celui-ci.
Le président. Merci ! Je rappelle que nous aimerions terminer à temps, mais je constate que chacun veut parler quatre minutes... Je donne la parole à M. Norer.
M. Olivier Norer (Ve). Je vous remercie, Monsieur le président. Je vais tâcher d'être bref dans l'intérêt de tous.
Les propos tenus par le rapporteur de majorité sont tout à fait conformes à ce que nous souhaitons. Effectivement, le groupe des Verts, au niveau cantonal, soutient largement la réalisation de logements dans le canton. La densification, au niveau genevois, par la force des choses, limite l'étalement urbain dans notre région. Nous souhaitons également la construction de logements dans cette zone bien spécifique, car elle y est propice. Cela vient d'être indiqué, il y a des villas et, de plus, certains propriétaires désirent les vendre pour réaliser des logements. Cela prouve effectivement qu'une réalisation de logements est déjà possible. Nous ne parlons donc pas dans le vide, nous ne votons pas dans le vide: nous allons réaliser prochainement quelques logements sur cette surface !
Il est clair que de manière globale, il ne suffit pas de voter un déclassement de zone villas pour que des immeubles soient automatiquement réalisés dans la foulée. Cela permet principalement la construction de logements à terme, c'est un signal politique, et c'est important de le signaler.
Il faut aussi relever les qualités propres de ce quartier. Il est situé à proximité d'un noeud de transports, en l'occurrence le quartier des Esserts où est réalisé en ce moment le tram, le TCOB. Il s'agit d'un tram de qualité, qui va relier rapidement le centre-ville. Cet espace est également bien desservi en termes de services: différentes écoles sont proches ainsi qu'un centre commercial. Ce quartier offre bien des services, ce qui n'est pas négligeable quant à la qualité de vie, et il n'y a aucune raison valable de refuser ce déclassement, à moins qu'on souhaite tout refuser à Genève, avoir une position de Neinsager en s'opposant à tout projet.
Le groupe des Verts souhaite aller de l'avant pour la construction de logements et, donc, il soutient le rapport de majorité.
M. Roger Deneys (S). Pour compléter les propos de mon collègue Norer et du rapporteur de majorité, j'aimerais dire qu'il faut évidemment tenir compte des préavis communaux: notre parlement ne peut pas prendre ses décisions en occultant les positions communales.
Il n'empêche que c'est quelque chose que nous faisons souvent ! Du reste, M. Golay, pour le MCG, le fait régulièrement lorsqu'il s'agit de voter des baisses d'impôt contre l'avis du Conseil municipal de la Ville de Genève, c'est-à-dire en ne tenant pas compte de la position de la moitié de la population de ce canton ! Donc, c'est une pratique courante dans ce Grand Conseil de passer outre les préavis communaux. Mais il ne faut pas seulement s'en souvenir lorsque cela concerne votre commune et vos intérêts électoraux, Monsieur Golay ! Dans le cas qui nous occupe, il faut tenir compte de l'ensemble de la problématique !
Déclasser à Genève est indispensable, mais il n'est pas envisageable non plus de procéder à des déclassements uniquement en zone agricole: l'effort doit être réparti ! D'ailleurs, on sait qu'aujourd'hui les jeunes ne recherchent plus forcément les zones villas à l'ancienne, avec les haies de thuyas: des études - effectuées par le Crédit suisse, notamment - le montrent. Et puis, avec un périmètre voisin déjà urbanisé, il semble raisonnable de dire qu'il est logique de densifier le périmètre qui nous occupe.
Par ailleurs, Monsieur Golay, vous avez répété plusieurs fois tout à l'heure que ce périmètre n'était pas adéquat pour du logement... Vous nous faites bien rire ! A ce moment-là, il faudrait immédiatement déclasser ce terrain en zone agricole. Aujourd'hui, il y a des gens qui habitent ces villas ! Expliquez-moi pourquoi les conditions seraient bonnes pour des villas, et pas pour des immeubles qui permettraient de loger davantage de personnes ! Je ne comprends vraiment pas votre raisonnement ! (Commentaires.)
Quoi qu'il en soit, les propriétaires sont maîtres du foncier: ils peuvent réaliser des projets qui correspondent parfaitement bien à leurs souhaits. Ils ne sont pas obligés de partir: ils peuvent habiter sur place et faire, en plus, une opération financière intéressante.
Mesdames et Messieurs les députés, il semble opportun de réaliser des logements sur ce périmètre, dans la continuité des constructions déjà existantes. Les terrains voisins étant déjà bâtis, il semble tout à fait normal et logique d'envisager ce déclassement. Toutefois, cela ne veut pas dire que des logements vont être réalisés tout de suite: c'est un projet, et la commune de Lancy peut s'opposer à un projet ou à un autre.
Par conséquent, je vous invite à voter ce déclassement. Et je suis très intéressé par la position des libéraux, qui nous font des théories sur le logement à longueur d'année - y compris Mark Muller qui stigmatise la position des socialistes dans les débats auxquels il participe. En l'occurrence, je voudrais bien savoir ce que les libéraux vont voter pour ce projet qui propose de déclasser un petit périmètre de zone villas pour y construire davantage de logements.
Mme Christina Meissner (UDC). Mon préopinant, qui se trouve à ma gauche, a extrêmement bien décrit la situation, et je l'en remercie.
En l'occurrence, il s'agit encore d'une zone villas, entourée d'une zone de développement, qui est vouée au déclassement: une de plus ! Il est vrai qu'elle se situe dans un quartier bien desservi et proche des infrastructures: il y a donc une certaine logique de construire la ville en ville.
Cependant, les Verts oublient que cette zone villas se situe en continuité d'une zone verte: les bords de l'Aire et le parc Navazza. Elle constitue l'une des dernières poches de verdure dans un quartier qui subit d'énormes transformations, dans le cadre des infrastructures qui sont en train d'être réalisées, mais, aussi, dans le cadre des immeubles qui sont en train d'être construits. Or, en voyant ce que le développement et le sacrifice d'autres zones proches a donné en termes de type et de densité de constructions, nous pouvons sérieusement nous interroger !
Certains prétendent qu'il faut faire du toilettage - un mot très à la mode - c'est-à-dire supprimer cette dernière zone villas qui subsiste au milieu d'une zone de développement.
Si les Verts, en voulant procéder à un toilettage, devaient raser toute zone qui fait tâche, bien des petits bois urbains sont en situation préoccupante ! Si toiletter consiste à ne pas respecter les plans directeurs - cantonal ou communal - nous avons du souci à nous faire sur le respect de nos propres processus décisionnels ! Si toiletter consiste à aller à l'encontre de la volonté de la commune et des habitants, notre démocratie a du souci à se faire ! Si toiletter consiste à déclasser aujourd'hui pour construire dans quarante ans, Lancy regorge de zones déjà déclassées qui ne sont pas construites, et cela, depuis une vingtaine d'années ! Certaines ont été mentionnées, les Marbriers notamment...
Quelles contraintes allons-nous léguer à nos enfants ? Des densités ou des implantations obsolètes, comme celles qui ont contraint l'Etat à construire des mini-immeubles le long de la route de Chancy, à l'angle de la route du Pont-Butin ! Là où il aurait été possible de construire bien davantage que trouve-t-on ? Pas du logement, mais un hôtel, des bureaux, etc. !
Encore une zone villas sacrifiée pour rien, c'est de la qualité de vie en moins pour les habitants, habitants qui ne pourront même pas demeurer dans les futures constructions ! Alors, comme la commune, comme les habitants, je dis non, l'UDC dit non: ça suffit ! Je vous remercie de refuser le projet de loi de l'Ancien-Puits !
Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Girardet, le temps de votre parti étant épuisé, je passe la parole à M. Dal Busco.
M. Serge Dal Busco (PDC). Mesdames et Messieurs, chers collègues, c'est l'un des tout premiers projets de lois à avoir été traités en commission de l'aménagement, en début de la législature, sur des déclassements de zones villas et de zones agricoles. C'est une problématique qu'il faut considérer dans un ensemble, dans une certaine globalité. Je me suis abstenu, lors du vote en commission, parce que les conditions qui prévalaient à l'époque le justifiaient - en tout cas à mes yeux.
Aujourd'hui, face à la situation que nous connaissons en matière de logement, extrêmement aiguë et délicate - c'est un euphémisme ! - il faut avoir une position franche, une position limpide, une position lisible et cohérente. Nous l'avons entendu: il faut vraiment avoir une position cohérente dans cette situation.
On a parlé des préavis communaux... Et vous savez quelle est ma sensibilité à ce propos. Bien évidemment, il faut être à l'écoute de la population locale, mais il faut aussi avoir une vision d'ensemble qui soit cohérente. Nous sommes ici dans un parlement cantonal, et nous devons traiter d'une problématique de portée cantonale ou régionale.
Le parti démocrate-chrétien apportera donc son soutien à ce déclassement pour deux raisons très claires. La première, pour une question urbanistique. Les avantages ont été clairement énoncés, et il suffit de se rendre sur place pour se rendre compte qu'une densification de cette zone est judicieuse du fait de l'environnement immédiat et des infrastructures déjà à disposition. C'est une évidence: il faut procéder à ce déclassement, en tout cas à terme ! Cela est tout à fait clair étant donné la situation de certains propriétaires, étant donné leur volonté. Nous sommes parfaitement respectueux du droit de la propriété, de la volonté des propriétaires: ils peuvent continuer à user de leur bien comme ils le font aujourd'hui. Il n'y a absolument aucun problème à ce sujet: cette urbanisation n'interviendra - en tout cas, dans sa totalité - que dans un certain nombre d'années ! Il n'empêche que certains propriétaires sont prêts à développer ce site, à faire un effort très concret en matière de logement.
Nous l'avons compris au cours des auditions, les collègues de la commune de Lancy souhaitent, en quelque sorte, temporiser un peu le développement de ce périmètre, précisément parce que d'autres périmètres pouvaient également être développés.
Je pense en particulier au périmètre SOVALP - dont votre serviteur était un fervent défenseur lorsque nous l'avons voté - précisément parce qu'il permet d'apporter à la Ville de Lancy une compensation pour les efforts extrêmement appréciables qu'elle fait en matière de logement. A SOVALP, nous créons, il sera créé un nombre important - plusieurs milliers - de places de travail, qui apporteront les ressources bienvenues et bien méritées à la commune de Lancy pour les efforts qu'elle fait en matière de logement. De ce point de vue, il y a une cohérence certaine: on accepte de déclasser un terrain qui se prête particulièrement bien à l'urbanisation et on compense, en quelque sorte, les effets problématiques qu'une urbanisation excessive en matière de logement pourrait avoir par des emplois. Je peux vous garantir qu'en matière d'urbanisation, c'est quelque chose qui est extrêmement apprécié au niveau des communes genevoises.
La deuxième raison - et j'insisterai sur celle-là - pour laquelle il faut voter ce déclassement ce soir, c'est que, Mesdames et Messieurs, chers collègues, c'est un signal politique. En effet, nous devrons nous prononcer très prochainement, peut-être - je l'espère, personnellement - lors de la prochaine session, sur un périmètre autrement plus important: celui des Cherpines, où il s'agira de déclasser de la zone agricole. Et il est évident que le signal que le parlement va donner ce soir aura une influence sur les futurs déclassements, notamment des Cherpines...
Le président. Monsieur le député, il vous faut conclure !
M. Serge Dal Busco. Certaines personnes ne veulent pas déclasser du terrain agricole, parce qu'elles estiment que c'est aux autres de faire des efforts. Il faut donner des garanties...
Le président. Il vous faut conclure !
M. Serge Dal Busco. Bien sûr, Monsieur le président: je vais conclure immédiatement ! Pour être cohérent, il faut une certaine symétrie des efforts...
Le président. Parfait !
M. Serge Dal Busco. ...déclasser ces terrains et déclasser également les Cherpines ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Ducret.
M. Michel Ducret (R). Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, premier rappel, si les propriétaires citoyens de Lancy, qui habitent actuellement ces villas, veulent y rester - malgré les nuisances, n'est-ce pas - qu'ils y restent ! A Genève, certains périmètres où il y a des villas ont été déclassées il y a plus de septante ans, et les habitants sont toujours là et très contents d'y être ! Un déclassement montre l'intention du politique à long terme, et c'est ce que nous devons montrer ce soir; c'est le sens du vote auquel nous allons procéder.
Certains politiciens dans cette arène ont une fâcheuse propension, d'ailleurs, à se substituer aux professionnels, notamment aux professionnels de l'immobilier, qui se chargent aujourd'hui de chercher des biens à vendre, à acheter ou à louer. Savez-vous qu'aujourd'hui à Genève ce ne sont pas les villas qui sont les plus recherchées ? Non, pas du tout: c'est l'appartement à vendre en PPE ! Petit détail juste en passant...
Certains aussi - qui n'en ont pas la formation, mais qui se prennent pour des architectes - affirment qu'il n'est pas possible de construire dans un lieu où il y a des nuisances ! C'est faux, Mesdames et Messieurs: il est possible de construire sur des sites où il y a des nuisances de ce type - et, même, très bien et très facilement ! Ce serait d'autant plus facile que la parcelle en question, par rapport à la route qui génère des nuisances, est située de façon que le côté des immeubles qui nous intéresse est bien exposé - côté sud et ouest - à savoir à l'opposé du côté où il y a des nuisances. Il est donc tout à fait possible de réaliser une architecture adaptée à ce site ! Alors, respectons d'abord le savoir-faire des professionnels et occupons-nous ensuite de ce qui nous concerne, c'est-à-dire l'intention politique !
Ce déclassement, Mesdames et Messieurs, est tout à fait logique: tout le monde à Genève s'accorde à dire qu'il faut construire des logements, que nous manquons cruellement de logements et qu'il faut construire la ville en ville - en priorité, bien entendu. Eh bien, Mesdames et Messieurs, qu'on le veuille ou non, Lancy, c'est la ville ! Tout le monde dit aussi qu'il faut, avant de déclasser des périmètres nouveaux, remplir les dents creuses du territoire et finir de bâtir les périmètres où il y a déjà des constructions.
Toutes ces conditions, Mesdames et Messieurs, sont réunies ici ! Alors, s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs, un peu de cohérence ! Celui qui a proposé tout à l'heure de laisser cette zone villas en l'état, que nous suggère-t-il pour construire des logements, ces logements qui sont réclamés par tous ! Savez-vous qu'il s'oppose également au déclassement des Cherpines-Charrotons, dans la plaine de l'Aire ? Cela devient intéressant: il n'est d'accord de déclasser ni un périmètre ni l'autre !
La question qui se pose est donc la suivante: où faut-il construire, Mesdames et Messieurs ? Où ? Il n'est pas possible de réclamer des logements et s'opposer à tous les déclassements, quels qu'ils soient ! Aucun périmètre à Genève ne lui convient, dont acte, mais quelles propositions fait-il pour pouvoir réaliser du logement ? Il n'en fait tout simplement pas, Mesdames et Messieurs, et nous les attendons ! Si la ville en ville ne lui convient pas, ni la ville à la campagne, sur le territoire genevois, alors ce sera la ville ailleurs, Mesdames et Messieurs ! Mais ce sera aussi la prospérité ailleurs ! (Applaudissements.)
Dans ces conditions, Mesdames et Messieurs, vous l'aurez compris: à trop flatter les égoïsmes, on rentre dans l'incohérence, ce que le parti radical ne veut absolument pas. Il est donc évident, dans ces circonstances, que notre parti vous recommande chaudement, Mesdames et Messieurs, de soutenir le rapport de majorité.
Une voix. Bravo !
Le président. Merci, Monsieur le député. Très bien: vous avez parlé exactement quatre minutes. Monsieur Haldemann, je suis désolé, mais je ne peux pas vous donner la parole. Je la donne à M. Lussi, à qui il reste une minute vingt.
M. Patrick Lussi (UDC). Merci, Monsieur le président: cela suffira ! J'aimerais intervenir surtout pour contredire mon préopinant... Je rappelle en effet qu'il ne s'agit pas de s'opposer à ce déclassement simplement parce que quelques privilégiés ne veulent pas construire !
Mesdames et Messieurs, j'aimerais revenir sur un sujet essentiel, dont nous avons débattu tout à l'heure - vous avez même fustigé un des leaders du MCG, en disant qu'il fallait arrêter de douter de nos autorités. Le Conseil administratif... (Commentaires.) Un conseiller administratif de Lancy - qui n'est pas de ma couleur politique - a fait un plan directeur communal, qui a été voté le 18 décembre 2008, dans lequel cette petite zone - petite zone - n'était pas prévue en zone de développement.
Par ailleurs, j'adresserai cette pique à mon préopinant des Verts, parce que j'ai eu la chance de siéger dans ce conseil communal et que j'avais de très bonnes relations, même des relations sympathiques avec les Verts. Etant nouveau dans ce parlement, j'ai l'impression, Mesdames et Messieurs les députés, que lorsqu'on siège dans un conseil communal - et c'est valable pour tous les partis - on y envoie des gens en salopettes, mais que, quand on passe la porte de cette salle, on se vêt d'un «froc» et, surtout, d'un chapeau claque, pour balancer des gifles à tous ceux qui sont «au-dessous» ! Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, je dénonce ici fermement, de la part de ce Grand Conseil, une déviance que je qualifierai de «jacobine» ! Les communes existent: elles ont des conseils administratifs responsables, qui nous donnent des signaux clairs ! Il nous faut refuser ce projet, autrement tout notre système risque de se déliter ! Nous risquons d'arriver, presque...
Le président. Monsieur le député, il vous faut conclure !
M. Patrick Lussi. ...à un système pharisien ! Je vous propose de rejeter fermement ce projet de loi ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Je passe la parole à M. Florey, à qui il reste une minute et quarante-cinq secondes.
M. Stéphane Florey (UDC). Formidable ! Ça ira juste pour ce que j'ai à dire ! A la question de M. Ducret - où faut-il construire du logement ? - je répondrai ceci: dans les périmètres déjà déclassés depuis plus de quarante ans ! Et il y en a ! Si vous regardez les cartes des zones de Lancy, vous verrez que ces périmètres représentent quasiment la majorité - la totalité, bientôt - des zones villas de Lancy !
Et puis, je vous le rappelle - je l'ai déjà dit tout à l'heure - il n'y aura pas de logements dans ce périmètre: il n'y aura que de l'administratif et des bureaux ! Allez voir ce qui se construit actuellement ! C'est tout à fait ça: des hôtels, des dépôts pour les pompiers, tout ce que vous voulez sauf du logement !
En conclusion, pour éviter des blocages inutiles et éviter de braquer les communes - finalement, c'est ce qui va se passer: nous allons de plus en plus vers des confrontations totalement inutiles - je vous invite à suivre le rapport de minorité et à refuser ce projet de loi, pour la paix des ménages.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vais passer la parole à M. Muller, puisque le rapporteur de majorité a épuisé son temps de parole, ainsi que le parti radical. Monsieur Muller, vous avez la parole.
M. Mark Muller, conseiller d'Etat. Merci, Monsieur le président. Mesdames et Messieurs les députés, une tâche rude nous attend: celle de construire davantage de logements. Lorsque je dis «nous», c'est parce que, évidemment, ni le Grand Conseil, ni le Conseil d'Etat, ni un conseil administratif, aussi actif soit-il, ne peut atteindre cet objectif tout seul. C'est un effort collectif que nous devons fournir.
Deux mille cinq cents logements par an, c'est à peu près le double de ce qui s'est construit ces dernières années. Pour ma part, j'ai bon espoir que cette performance s'améliore dans les années qui viennent, avec tous les grands projets qui sont sur le point de voir le jour.
Toutefois, les grands projets qui vont donner lieu à des ouvertures de chantier, ces prochains mois, ces prochaines années, sont ceux qui trouvent leur origine dans des déclassements qui ont été votés il y a dix ans, parfois plus ! Monsieur le rapporteur de minorité, vous avez évoqué des déclassements, vieux de quarante ans, qui n'ont pas encore donné lieu à des plans localisés de quartier ou à des projets, c'est vrai. C'est pourquoi nous devons continuellement augmenter le nombre de terrains à bâtir, au fur et à mesure que ceux qui ont été déclassés depuis longtemps se construisent ! Et cet effort doit être soutenu et continu !
M. Dal Busco a dit tout à fait justement tout à l'heure que l'effort devait être réparti harmonieusement... Il n'y a pas qu'une solution pour construire davantage: la surélévation d'immeubles n'est pas la solution miracle, le déclassement de la zone agricole non plus, pas plus que la densification de la zone villas ! Il faut simplement - cela peut paraître bête - appliquer le plan directeur cantonal, qui est notre instrument de planification majeur ! Le Grand Conseil en a adopté un en 2001, et le projet de loi qui vous est soumis aujourd'hui n'est que la mise en oeuvre de ce plan directeur cantonal.
Alors, c'est exact, Monsieur Lussi, le plan directeur communal ne prévoit pas le déclassement de ce périmètre, mais le Conseil d'Etat, lorsqu'il a approuvé le plan directeur communal, avait fait une réserve en mettant en évidence le fait que, malheureusement, sur ce point-là, le plan directeur communal de Lancy ne respectait pas le plan directeur cantonal. Et, donc, je ne crois pas que l'on puisse dire que l'on trompe quiconque !
J'en viens maintenant au projet. Je ne vais pas allonger le débat: il est 19h10 bientôt, et la journée a été longue et fructueuse... Cela étant, regardez où se trouve cette parcelle, Mesdames et Messieurs ! (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Elle se trouve en ville, dans ce qu'il faut bien appeler la ville, à Genève; elle est située à 50 mètres d'une future ligne de tram et, à l'évidence, il faut densifier ce type de périmètre. Et il y en aura certainement d'autres du même genre.
On prête l'intention au département de vouloir adopter des plans de quartier prévoyant des bureaux, des activités... Je ne sais pas d'où vous viennent ces soupçons ? Encore des soupçons, ce soir ! Vous pouvez me faire confiance pour défendre ardemment la construction de logements ! (Commentaires.) C'est l'objectif numéro un du Conseil d'Etat dans ce domaine. Il y aura - si ce n'est en totalité, du moins en grande majorité - du logement dans ce futur périmètre, et non pas davantage de bureaux.
Je vous invite donc à voter ce déclassement de la zone villas ce soir. Je vous invite d'ores et déjà à vous préparer pour la fin du mois, puisque nous déclasserons une importante portion de la zone agricole. Et nous aurons encore d'autres déclassements à voter dans le futur. Vous savez, tous les projets suscitent des oppositions provenant de milieux qui varient d'un projet à l'autre. Parfois, la commune y est favorable: tant mieux ! De temps en temps, il est difficile de se mettre d'accord avec elle, et je le regrette beaucoup. Quoi qu'il en soit nous avons une mission à remplir sur le plan cantonal: celle de construire plus de logements qu'aujourd'hui, et cela passe, malheureusement, en consentant un certain nombre de sacrifices.
Je vous remercie pour ce dernier vote de la soirée, et je vous souhaite une bonne fin de journée.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 10529 est adopté en premier débat par 44 oui contre 26 non.
La loi 10529 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10529 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 41 oui contre 28 non.