République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 11 juin 2009 à 20h30
56e législature - 4e année - 9e session - 46e séance -autres séances de la session
La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.
Assistent à la séance: MM. David Hiler, président du Conseil d'Etat, François Longchamp et Charles Beer, conseillers d'Etat.
Exhortation
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.
Personnes excusées
Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. Laurent Moutinot, Robert Cramer, Pierre-François Unger et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mme et MM. Claude Marcet, Yves Nidegger et Véronique Pürro, députés.
Comme nous allons procéder à des prestations de serment, je demande à l'assistance de rester debout.
Le président. M. Philippe Cottet est assermenté. (Applaudissements.)
Le président. M. Pierre-Yves Demeule, Mme Ursula Cassani Bossy et M. Matteo Pedrazzini, juges à la Cour d'appel de la magistrature, de même que M. Gabriel Aubert, M. Philippe Preti et M. Pierre Schifferli, juges suppléants à la Cour d'appel de la magistrature, sont assermentés. (Applaudissements.)
La cérémonie est terminée, Madame et Messieurs les juges, vous pouvez vous retirer. Mesdames et Messieurs les députés, vous pouvez vous asseoir.
Annonces et dépôts
Néant.
Le président. Nous reprenons nos travaux sur le PL 10199-A, point 128 de l'ordre du jour.
Suite du premier débat
Le président. La parole est à M. Catelain.
Des voix. C'est Deneys ! (Commentaires. Exclamations.)
Le président. Excusez-moi, ce n'était pas inscrit sur mon tableau ! La parole est donc à M. Deneys, qui a parlé durant trois minutes et vingt-six secondes. (Commentaires.) Effectivement, Monsieur le député, vous n'êtes pas responsable de cette «alarme» !
M. Roger Deneys (S). Je vous remercie, Monsieur le président. On sait bien que ce sont les projets fumeux de l'Entente qui font sonner l'alarme pour les incendies... ce n'est pas étonnant !
Mesdames et Messieurs les députés, je vais donc reprendre mon intervention concernant ce projet de loi de baisse d'impôts qui est, à tort, appelée «baisse d'impôts pour les familles et la classe moyenne». Parce que, bien entendu, le projet que nous étudions aujourd'hui et que vous souhaitez voter conduit à une baisse de la fiscalité des contribuables, personnes physiques, de l'ordre de 400 millions de francs, plus 100 millions de francs concernant les communes, c'est-à-dire des recettes fiscales en moins. Et cette baisse de la fiscalité, Mesdames et Messieurs les députés, ne s'adresse pas exclusivement à la classe moyenne et aux classes défavorisées ! C'est bien pour cela que les socialistes ne peuvent accepter ce projet de loi dans sa forme actuelle.
Nous étions favorables à des mesures ciblées, en faveur des familles de la classe moyenne, nous étions favorables à des mesures en faveur des plus bas revenus ! Mais nous ne pouvons pas accepter que, dans un même projet de loi... (Brouhaha.) ... pour des revenus de plus de 200 000 F par an, donc des grandes fortunes, 200 millions de francs soient consacrés à ces contribuables-là ! Or c'est bien de cela qu'il s'agit aujourd'hui ! Et nous avons un projet de loi qui est de l'ordre de 250 millions de francs pour les familles et la classe moyenne... Donc, avec des mesures mieux ciblées, le parti socialiste aurait pu accepter, ou s'abstenir, car certaines mesures sont choquantes à nos yeux, vu la partie qui bénéficie directement aux plus riches contribuables ! Et je vois que Mme Künzler... (Brouhaha. L'orateur s'interrompt.)
Le président. Oui, Monsieur le député, vous avez raison, il y a beaucoup de bruit ! Mesdames et Messieurs, veuillez écouter en silence, s'il vous plaît !
M. Roger Deneys. Merci, Monsieur le président. (Brouhaha.) Cela n'a pas l'air d'avoir beaucoup d'effet... Je regrette que Mme Künzler ne soit pas là, parce qu'il est vrai que, concernant les chiffres évoqués tout à l'heure, on a dit que 85% des contribuables bénéficieront d'une baisse d'impôts. Certes, en pourcentage, cela paraît important, mais, Mesdames et Messieurs les députés, si votre baisse d'impôts est de 10 F ou si elle est de 200 000 F, l'impact n'est pas le même ! Et si vous gagnez entre 30 000 et 40 000 F par année, parce que vous travaillez comme vendeuse dans une grande surface qui ne respecte pas la convention collective, évidemment que vous ne payez peut-être pas d'impôts aujourd'hui - et vous continuerez - mais, fondamentalement, vos conditions de vie vont se dégrader !
Pour les socialistes, ce n'est pas seulement la baisse d'impôts qui entre en ligne de compte, c'est le revenu disponible au bout du compte ! Si cette baisse d'impôts, au-delà de 200 millions de francs par an, n'est pas supportable par le canton, cela signifie des prestations qui seront supprimées, des prestations dont le prix sera augmenté. Et, simplement pour cela, Mesdames et Messieurs, des prestations dont le prix augmente signifient que des personnes dont le revenu est bas ou moyen voient leurs conditions de vie se dégrader au quotidien !
Je prendrai deux exemples parmi d'autres. Vous avez des enfants qui, à midi, se rendent au parascolaire pour prendre leur repas... Comme les communes verront leurs revenus baisser, ce repas augmentera d'un franc par jour, ce qui vous coûtera 200 F de plus par année. Que votre revenu soit de 200 000 F ou de 30 000 F par an, c'est la même chose !
Deuxième exemple: les transports publics. L'abonnement augmente de 10 F par mois, ce qui représente une centaine de francs par année... Il y a aussi l'assurance-maladie qui, grâce à M. Couchepin, risque d'augmenter de 15% l'année prochaine... Et nous n'aurons pas d'argent pour augmenter les subsides en faveur des personnes à faible revenu. Eh bien, simplement pour cela, vous aurez des augmentations de l'ordre de 300 à 400 F sur l'année, et cela quel que soit votre revenu ! Ceux qui gagnent 30 000 ou 50 000 F par année verront leur revenu disponible diminuer au bout du compte !
Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes étaient en faveur de mesures ciblées en faveur de la classe moyenne et les familles de la classe moyenne. Pour cela, il aurait fallu pouvoir mener un véritable troisième débat, Monsieur Gros et Monsieur Meylan ! Il aurait fallu avoir ces chiffres finaux, dont nous ne disposions pas ! Et il aurait fallu connaître l'impact sur les communes. Je vous rappelle qu'il s'agit de 50 millions en moins pour la Ville de Genève...
Le président. Monsieur le député, vous avez épuisé votre temps de parole.
M. Roger Deneys. Oui, merci ! Je voudrais simplement vous dire que 50 millions en moins pour la Ville de Genève, alors qu'il manque aujourd'hui 2400 places de crèche, ce qui représente environ 90 millions de francs... Eh bien, Mesdames et Messieurs les parents qui faites partie de la classe moyenne, je vous le dis tout de suite: ce projet de loi sera certainement accepté, mais, simplement, vos conditions de vie ne seront pas améliorées par ce dernier. Elles seront même détériorées ! Et le plus scandaleux, c'est évidemment le bouclier fiscal qui permet que nonante-trois contribuables disposant d'une fortune de plus de 100 millions connaîtront des baisses d'impôts de l'ordre de 200 000 francs par an ! (Commentaires.) Et c'est totalement scandaleux d'avoir inclus cela dans le même projet de loi ! C'est scandaleux de la part du Conseil d'Etat ! Et c'est scandaleux de la part de l'Entente ! (Applaudissements.)
M. Gilbert Catelain (UDC). Il faut relever que payer ses impôts est un devoir et que, dans une république où l'on parle de solidarité, il conviendrait que la majorité des habitants s'en acquittent. Ce n'est aujourd'hui pas le cas et nous observons que le devoir fiscal repose sur une petite majorité des concitoyens, puisque, aujourd'hui, 40% des Genevois ne paient pas d'impôts et qu'ils bénéficient d'un certain nombre de répartitions sociales qui sont financées notamment par des contribuables aisés qu'il convient de conserver sur Genève. Ce projet de loi vise à conserver ces contribuables aisés, afin de maintenir l'effort de solidarité sociale entre les citoyens de ce canton.
Quant à l'UDC, elle aimerait que Genève reste un canton suisse et, ainsi, que ce dernier harmonise sa politique fiscale avec celle des autres cantons. Nous observons qu'au cours de ces dernières années la pression fiscale et les prélèvements sociaux se sont accrus: le Conseil fédéral nous a déjà annoncé des lendemains qui déchantent, avec une hausse des cotisations, notamment de l'assurance-chômage, du taux de TVA et des prélèvements du deuxième pilier. Par ailleurs, les partis de gauche nous ont préparé une série de projets qui vont augmenter ces prélèvements sociaux; je pense aux congés parentaux, aux congés de paternité. De plus, l'Office fédéral de la statistique nous apprend qu'au cours de ces vingt dernières années les dépenses alimentaires sont, en consommation, passées de 45,7% à 48,5%... Cela signifie que la situation, en moyenne suisse, de la population de ce pays s'aggrave ! Ce sont des chiffres qui ont été présentés il n'y a pas plus d'une semaine.
A revenu égal, et en comparaison nationale, le ménage genevois est fortement pénalisé. En 2006, l'Office fédéral de la statistique et l'Institut économique GFK ont analysé les dépenses moyennes d'un ménage suisse composé de 2,26 personnes: en moyenne et en Suisse, il dispose d'un revenu brut de 8490 F et consacre 2250 F aux dépenses incompressibles, à savoir les impôts, les contributions sociales et l'assurance-maladie, dont Mme Dreyfus elle-même - récemment, en commission de la santé - a considéré qu'il s'agissait d'un impôt.
Pour arriver au revenu moyen d'un ménage suisse, soit 5970 F par mois, il faudrait qu'à Genève ce même ménage ne paie que 350 F d'impôts par mois... Ce n'est pas le cas ! Pas parce que la fiscalité est trop lourde, mais parce que les charges sont trop élevées à Genève, notamment en ce qui concerne la caisse maladie. Et j'aimerais bien savoir quel est le différentiel d'un ménage suisse composé de 2,26 personnes et d'un ménage genevois, car je doute qu'avec 8490 F de revenu mensuel on ne paie que 350 F d'impôts à Genève... C'est cette situation-là - parce que c'est effectivement le revenu de la classe moyenne - que nous devons corriger ! Pour cela, vous devez de facto accorder un certain nombre d'avantages aux revenus les plus élevés pour qu'ils maintiennent leur domicile fiscal à Genève.
En résumé, entrer en matière sur ce projet de loi est une nécessité; le refuser serait une hérésie. Nous vous invitons à prendre vos responsabilités et à entrer en matière sur ce projet de loi, indispensable pour la classe moyenne et l'ensemble des citoyens de ce canton. Merci ! (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je donne la parole à M. Wasmer.
M. Olivier Wasmer. Je renonce !
Le président. Je la donne à M. Velasco.
M. Alberto Velasco (S). En préambule, je dirai à M. Catelain que j'aimerais aussi que tout le monde paie des impôts dans ce canton et - même, j'irai beaucoup plus loin - que personne ne fasse appel à l'assistance sociale. Mais, malheureusement, cette société est incapable de donner du travail à tout le monde. Elle produit des personnes qui n'arrivent pas à obtenir un revenu digne, qui, précisément, leur permettrait de payer des impôts... (Brouhaha.) C'est donc une grande partie de ces personnes-là qui n'en paient pas. (Remarque.) Mais il y en a effectivement d'autres, les rentiers.
Je reviens à ce projet de loi. La question de fond est de savoir si le postulat que la droite est en train de mettre sur la table... D'ailleurs, MM. Weiss et Gros l'ont relevé, nous sommes devant un grand projet de relance cantonale, et c'est en cela qu'il faut vraiment aller de l'avant. Mesdames et Messieurs de la droite, je vous rappelle que M. Reagan a déjà fait ce pari, et M. Sarkozy aussi, dernièrement. Le résultat fut on ne peut plus cinglant... Le résultat espéré ne s'est pas avéré: les caisses de l'Etat ont été vidées et, ensuite, on a dû effectuer certaines coupes ! Je dis cela, car vous êtes quand même téméraires en cette époque qui est des plus incertaines. On va soustraire 400 millions au Trésor public, en période d'incertitude, avec les baisses d'impôts qui vont être proposées au peuple... Peut-être 200 à 300 millions supplémentaires, je ne saurais le dire, mais, en tout cas, un certain nombre de millions dus à la crise dans laquelle nous entrons. Il est vrai, Monsieur Meylan, que la fameuse dette que nous avons en regard de la Banque cantonale sera épongée, et nous disposerons d'environ 200 à 300 millions, mais enfin, le compte n'y est toujours pas !
Ce qui me dérange dans cette histoire - et vous le savez, Messieurs de la droite ! - c'est que, si d'aventure la crise devait perdurer, il y a le fameux projet de loi appelé «Frein à l'endettement»... Qu'est-ce que ça veut dire ? Cela signifie que vous allez expliquer aux classes moyennes: «Maintenant que nous vous avons donné un tout petit peu, voilà l'hiver revenu, et à nous d'en décider si nous pouvons conserver ce cadeau...». Eh bien, si ce projet de frein à l'endettement venait à être appliqué, cela voudrait dire qu'il faudrait effectuer un choix - comme l'avait fait M. Weiss avec ses amendements, il faudrait procéder à une coupe des services de l'Etat ou à une coupe sur les prestations fournies au peuple... Je dis bien «des services ou de prestations» ! Eh bien, c'est ça l'enjeu ! Parce que, baisser les impôts, c'est très bien, mais je préférerais que les prestations soient assurées.
Concernant le bouclier fiscal, il y a quand même là une certaine indignité. Car jamais, dans l'histoire de l'humanité, on n'a assisté à des gains aussi faramineux pour certaines catégories sociales. Tout le monde en convient - même M. Sarkozy, d'ailleurs, et d'autres personnes de droite - les salaires que certains s'octroient aujourd'hui sont absolument incroyables ! (Remarque.) Et indécents, effectivement ! Et là, on met en place un bouclier fiscal pour protéger ceux-là mêmes qui bénéficient... Alors, Monsieur le conseiller d'Etat, vous me direz qu'il ne s'agit pas de la même ampleur que celui voté en France... Mais enfin, il y a quand même un bouclier fiscal !
Par ailleurs, la droite nous sort comme refrain qu'il y a la concurrence fiscale et que, quand les autres font comme ça, eh bien, nous devons faire comme ceci... Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, qu'un célèbre dramaturge et écrivain suisse, M. Dürrenmatt, avait écrit «Le retour de la vieille dame», oeuvre dans laquelle l'écrivain montrait jusqu'où la cupidité peut aller, à tel point que des êtres en perdent leur dignité. Eh bien, vous jouez un peu à cela !
Voici ce que je vous dis: quand on gagne de telles sommes aujourd'hui, comme on n'en a jamais gagné dans toute l'histoire, eh bien, la moindre des choses serait de participer à l'effort républicain ! Et, précisément, de participer au redressement financier ! Car, que voit-on ?! Que, dans les situations difficiles, c'est toujours l'Etat qui doit intervenir ! Et ce ne sont pas ceux qui ont bénéficié du bouclier fiscal qui se présentent ! C'est toujours l'Etat qui doit redresser la situation ! C'est donc cela, Mesdames et Messieurs, qui devrait vous faire réfléchir. Alors, nous sommes d'accord que des familles doivent être aidées, mais nous, nous préférons garantir les prestations.
Monsieur Weiss, quand vous déclarez... Excusez-moi, Monsieur le président, d'avoir interpellé mon collègue, je vais plutôt m'adresser à vous: quand notre collègue Weiss dit qu'il est un défenseur de la fonction publique, c'est le sommet du cynisme ! Car tous les amendements qu'il a présentés au dernier budget allaient précisément dans le sens d'une attaque de la fonction publique - et c'est d'ailleurs ce qui fait sa notoriété dans le canton... Franchement, Monsieur Weiss, quand vous dites que vous êtes un défenseur de la fonction publique, vous devriez ajouter: «Mais des hauts cadres de cette dernière» ! C'est vous qui avez déposé un amendement afin qu'ils gagnent, par année, 18 000 F supplémentaires ! Mais vous avez été suivi, Monsieur Weiss... Vous avez été suivi, il n'y a pas que vous ! (Remarque de M. Pierre Weiss.) Les PDC, les radicaux, l'UDC... Pas le MCG, c'est vrai ! Mais vous avez quand même des «suiveurs», et ils doivent aujourd'hui se poser des questions... Et quand vous prétendez être un grand défenseur des fonctionnaires, eh bien ce n'est pas le cas !
Monsieur Golay, vous avez dit que la dette était telle aujourd'hui, qu'on pouvait tout se permettre... Soit ! Mais, lorsqu'on traitera des subventionnés, j'espère ne pas entendre dans ce parlement la perpétuelle rengaine : «On ne peut pas ! On ne peut pas, parce qu'on doit amortir la dette ! Vous comprendrez qu'on ne peut pas continuer à subventionner et à donner de l'argent par-ci, par-là...». Ce qui est vrai aujourd'hui le sera en septembre ! Avec le budget déposé par le Conseil d'Etat - je l'espère. Et j'espère aussi que ces messieurs de la droite n'invoqueront pas de nouveau la question de la dette pour s'attaquer aux subventionnés et aux prestations !
Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que j'avais à vous dire et, franchement, je pense...
Le président. Il faut terminer, Monsieur le député !
M. Alberto Velasco. Je termine ici, Monsieur le président. Il s'agit aujourd'hui d'un vote important: il engage la république dans les années à venir, car, après les 12% de baisse d'impôts - qui étaient de 350 millions par année en 2000 - on va aujourd'hui vers une nouvelle baisse de 300 millions puis, plus tard, vers 400... ce qui fera 750 millions de recette en moins par année. En l'espace de dix ans, nous aurons perdu environ 4 milliards de recettes et produit des baisses annuelles d'impôt de 750 millions ! Je souhaite, Messieurs de la droite, que vous ayez raison et que cette initiative fasse que notre économie devienne tellement florissante que nous aurons des rentrées fiscales, non pas de 700 millions mais d'un milliard ! Parce que, si ce n'est pas le cas, nous irons vers des années vraiment noires. Et ce sont toujours les mêmes qui le paieront... Toujours les mêmes ! (Applaudissements.)
Le président. Je donne la parole à Mme Keller. (Quelques instants s'écoulent.)
Mme Virginie Keller (S). Excusez-moi, Monsieur le président, j'étais en train de rêver.
Une voix. Cauchemarder ! (Commentaires.)
Mme Virginie Keller. Il me semble que c'est un député libéral qui, au début de cette séance, se lançait dans une grande diatribe contre les socialistes, essayant désespérément de ringardiser ces derniers - je crois que c'est un peu dans l'air du temps, n'est-ce pas ? - en disant: «Finalement, cela fait cinquante ans que vous posez les mêmes questions...». Eh bien oui, Mesdames Messieurs les députés, et cela fait même plus de temps encore que nous posons les mêmes questions !
Pourquoi autant d'inégalités ? Pourquoi davantage de millionnaires dans le canton de Genève, alors qu'il y a de plus en plus de pauvreté ? Pourquoi un quatre-pièces atteint-il à Genève le coût de 5000 F au centre-ville ? Pourquoi les assurances-maladie continuent-elles d'augmenter et les groupes pharmaceutiques de s'enrichir ? Pourquoi les médicaments sont-ils plus chers en Suisse qu'ailleurs ? Pourquoi les crèches sont-elles aussi chères et que nous n'arrivons pas à les financer, comme on le fait pour l'école publique ? Ne pourrait-on pas imaginer que les institutions de la petite enfance soient gratuites pour tout le monde ? Pourquoi certains salaires sont-ils encore aussi bas, et cela pour les professions les plus pénibles ? Pourquoi les femmes gagnent-elles toujours moins que les hommes ? Pourquoi certains pays sont-ils très riches alors que d'autres sont dans la misère ? Etc.
Alors, peut-être que cela ennuie M. Renaud Gautier que nous reposions toujours les mêmes questions... Mais elles sont, Mesdames et Messieurs, absolument actuelles, vous le savez très bien ! Et elles le seront de plus en plus. Pourquoi ? Parce qu'on sait qu'aux divers désastres économiques et aux grandes inégalités économiques s'ajoutent le désastre climatique et ses grandes inégalités ! Vous savez très bien que ceux qui seront le plus touchés seront les plus pauvres parmi les pauvres !
Voilà pourquoi les socialistes - et je fais un résumé - continuent de poser encore et encore les mêmes questions et de défendre encore et encore les mêmes gens ! C'est-à-dire les plus démunis ! Les plus défavorisés, ceux qui font les boulots les plus difficiles et sont les plus mal payés !
Après ça - c'était l'introduction - pourquoi sommes-nous contre ce projet de loi ? On a entendu: «Les socialistes sont contre la famille, les socialistes ne sont pas modernes, les socialistes ne comprennent rien, ils ne sont pas pour la relance»... (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs les députés de droite, quand les banques font faillite...
Une voix. Ah !
Mme Virginie Keller. ...c'est quand même à l'Etat qu'on va demander de l'aide ! Donc, vous conviendrez avec les socialistes qu'on a besoin, en Suisse comme ailleurs, d'un Etat fort ! Mesdames et Messieurs les députés, quand l'économie locale a besoin d'aide, c'est bien l'Etat qui intervient ! Et ceux d'entre vous, ici, qui êtes dans l'économie, vous le savez !
Quant aux salaires des fonctionnaires de l'Etat - qui sont les enseignants de vos enfants, les policiers de vos rues, les médecins et les infirmières - c'est aussi avec l'argent de l'Etat qu'on les verse ! Donc vouloir diminuer la capacité financière de l'Etat, alors qu'il faut pouvoir réguler, réagir et protéger l'ensemble de la population, eh bien, les socialistes ne peuvent pas être d'accord avec cela.
C'est vrai que cela nous fait mal au coeur de devoir refuser les deux ou trois petites améliorations pour les familles... (Commentaires. Brouhaha) ...améliorations qui nous semblent importantes. Il faudrait pouvoir résoudre la question du splitting. Il est évident qu'on peut rédiger un projet de loi à ce propos - on n'a aucun problème, on le votera, on peut même faire des propositions. Mais ce que nous trouvons mensonger et injuste aujourd'hui, c'est que vous avez lié deux problématiques ! Parce qu'en fait ce qui vous intéresse, c'est de faire baisser les impôts des plus riches, évidemment, et puis, de créer votre bouclier fiscal. Et là, pour pouvoir faire passer la pilule... (Exclamations.) ...on a fait deux ou trois petites introductions modestes pour les familles...
J'aimerais quand même vous rappeler, de même qu'à la population, sur quels thèmes les socialistes souhaitent défendre les familles: par exemple, en dénonçant le prix abusif des loyers à Genève, qui engraissent une minorité de spéculateurs ! (Brouhaha.) Pour dénoncer encore le prix des services publics tels que... (Brouhaha. Le président sonne la cloche.) ...les crèches, auxquelles on n'arrive pas à apporter plus d'aide financière, alors que les familles en on besoin ! C'est un besoin fondamental pour que les femmes et les hommes puissent travailler. Evidemment, nous dénonçons aussi le coût de l'assurance-maladie qui, comme les loyers, est le plus élevé de Suisse.
C'est sur ces questions-là que les socialistes vous ont fait des propositions depuis quatre ans, et c'est sur ces questions-là que nous continuerons de défendre la capacité des classes moyennes à vivre correctement, mais aussi la possibilité de la société entière et des pauvres d'avoir accès à des prestations qui soient de qualité pour toutes et tous. Voilà pourquoi les socialistes auront le courage de ne pas se conformer à l'air du temps - et peut-être de ne pas être à la mode - mais de continuer à poser cette question fondamentale: pourquoi, sur cette terre, certains ont tout et d'autres rien ?
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je me réfère à ce projet de loi et j'aimerais rappeler à Mme Keller - qui dit que c'est encore une fois les plus démunis qui... etc. - qu'il est précisé que ce sont quand même 67,4% de la population qui seront touchés par cette nouvelle loi. Et je ne pense pas que, dans ces 67,4%, il n'y ait que des riches. On ne peut pas dire qu'à Genève, sur 450 000 habitants, 400 000 soient riches. Ce n'est de loin pas le cas !
Parler dans le vide depuis des années n'a jamais porté de fruits et il me semble qu'on ne pourra jamais contenter tout le monde. On se retrouve une fois de plus dans le clivage gauche/droite, parce qu'on se fiche royalement des intérêts du citoyen et qu'on défend simplement son petit parti, sa petite personne, puisqu'on est en année électorale.
Je dirai les choses clairement, et avec ma franchise habituelle car il n'y a pas de raison que cela change: je trouve que ce projet de loi a été bien ficelé. Cela fait d'ailleurs un bon moment qu'on n'en a pas vu d'aussi bien préparés, d'habitude, c'est toujours fait à l'emporte-pièce, et avec un nombre considérable d'heures passées en commission, tout cela pour arriver à rien du tout.
Donc, j'ai envie de vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, soutenez ce projet de loi, car quelque chose est réellement effectué. En période de crise, c'est important, d'autant plus que nous n'en sommes qu'au début. Et il faut que l'économie redémarre !
Seulement, pour cela, il faut que les gens qui travaillent puissent aussi gagner plus, car on en arrive au stade - on voit cela aujourd'hui - où l'on travaille plus pour gagner moins. Il ne me semble pas que ce soit ce que l'on veut à Genève; on ne demande pas des millions, on demande à pouvoir travailler et gagner sa vie décemment. Et une fois qu'on a effectué ses paiements à la fin du mois, on aimerait bien qu'il nous reste un peu plus que 2,50 F dans le porte-monnaie...
Si l'on veut relancer l'économie, on le peut uniquement grâce aux gens actifs, qui travaillent, qui gagnent de l'argent et peuvent se permettre d'aller faire des achats. Ainsi, on peut maintenir les entreprises ! Car, sans le peuple, sans les citoyens qui sont là pour acheter, elles ne servent strictement à rien et font faillite les unes après les autres.
Donc, il faut trouver tous les moyens possibles pour améliorer les situations qui le nécessitent. Vouloir soulager les familles me semble un discours clair et constructif. Encore une fois, la gauche veut toujours aller à l'extrême des problèmes... Il faut les prendre les uns après les autres ! Je pense qu'on arrive à un point où l'on doit défendre une majorité de la population. Concernant les plus démunis, j'aimerais quand même rassurer les téléspectateurs - puisque c'est le maître-mot... (Remarque de Mme Michèle Ducret.) Oui, Madame Ducret ! Mais soyez gentille et polie, laissez-moi m'exprimer ! (Commentaires.) Vous n'avez pas de leçons à me donner.
J'aimerais rappeler aussi qu'à Genève on ne laisse pas les plus démunis à la rue, comme la gauche a envie de faire croire. Il y a l'Hospice général, le Centre social protestant, plus d'autres associations caritatives; on n'a jamais laissé un citoyen à la rue, sans manger, sans soins... Il peut même aller à l'hôpital s'il tombe malade. Peut-être y a-t-il des personnes ayant honte de demander de l'aide...
Le président. Il faudra terminer, Madame la députée.
Mme Sandra Borgeaud. ...et c'est donc là, au niveau associatif, qu'il faut faire les choses, pas au niveau politique.
Encore une fois: soutenez ce projet de loi, qui va enfin aider plus de 64% de la population, et ce n'est pas rien !
M. Michel Halpérin (L). Il s'agit d'un travail qui a été accompli par la commission fiscale, qui, je dois le dire, s'est impliquée et investie dans ce projet, avec une conscience et une efficacité qu'on n'a pas si souvent l'habitude de voir dans ce parlement et qui mérite un salut particulier. Je voudrais aussi féliciter l'extraordinaire travail du rapporteur qui, en très peu de temps, a réussi à restituer les travaux de cette commission et, surtout, à nous présenter un projet qui, je n'hésite pas à le dire, vaut à lui seul toute la législature.
Mesdames et Messieurs, ce projet - et Mme Borgeaud vient de le souligner - a été rédigé et présenté par l'Entente. Ce document a l'avantage de la cohérence. Il a aussi l'avantage d'avoir été un projet fédérateur pour la droite modérée, raisonnable, dynamique de ce parlement, qui a travaillé ensemble. Et je sais bien... (Commentaires.) ...parce que je l'ai vu dans le journal il y a deux jours... (Brouhaha. Le président sonne la cloche.) Je sais que, lorsque la droite se rassemble sur des idées fortes, cela dérange un certain nombre de gens qui préfèrent pouvoir la renvoyer à ses habitudes - qui, j'espère, sont passées - celles de la division et celles du particularisme.
Ici, nous avons travaillé ensemble, et le résultat, évidemment, en dépend. Ce résultat, Mesdames et Messieurs, n'est pas celui que tous les auteurs du texte avaient voulu dans son commencement. Je rappelle que les auteurs initiaux souhaitaient faire baisser le taux maximum de 19 à 16%, écarté par la commission. Je rappelle que nous voulions diminuer les recettes de l'Etat de 900 millions... (Brouhaha.) Cela a été balayé et réduit de plus de la moitié. Nous voulions créer un bouclier fiscal qui soit digne de ce nom... Je m'amuse assez à entendre nos adversaires nous expliquer aujourd'hui qu'il n'y en a que pour les riches... Mais l'argent des riches, ils le prennent ! Et ils le dépensent ! Parce que 5% des contribuables rapportent 50% des impôts et qu'un dixième de ces contribuables qui s'en vont, ce sont des crèches, ce sont des salles d'hôpitaux, et c'est un fonctionnement de l'Etat qui est mis en péril.
Alors, Mesdames et Messieurs, quand on a une pyramide aussi pointue - et qui tient sur sa base la plus fine - pour fiscalité à Genève, on est en danger permanent. Pas pour les riches, mais pour ceux qui en dépendent. Et entendre aujourd'hui toujours les mêmes se gausser et prétendre que faire des cadeaux aux riches c'est prendre aux pauvres, c'est tout simplement ne pas comprendre que, sans les riches qui sont à Genève, les pauvres qui y sont aussi n'auraient tout simplement plus de quoi subsister. (Brouhaha.)
Mesdames et Messieurs, les compromis que nous avons faits en acceptant un bouclier à 60%, c'est-à-dire qu'il faut travailler huit mois pour l'Etat et quatre mois pour soi, visent à permettre l'acceptation de ce projet pour ce qu'il a de crucial. Et ce qui est crucial dans ce projet, c'est un regard que nous adressons - enfin ! - à ceux, et ils sont innombrables à Genève, qui travaillent, qui gagnent leur vie, mais qui, bien qu'ayant gagné leur vie, entre les impôts, les charges sociales, les primes d'assurances, le coût des logements - et à propos, Madame Keller Lopez, le coût des logements augmente parce que la politique malthusienne de vos prédécesseurs a empêché la construction de logements à Genève - je ferme la parenthèse... (Commentaires. Applaudissements.) Parce que, disais-je, cette classe moyenne, qui travaille et qui, à la fin de l'année, a de la peine à boucler ses comptes, c'est elle qui fait Genève ! Et c'est à cette classe moyenne que nous nous sommes adressés, et c'est pour elle que nous avons abandonné un certain nombre d'exigences. Nous avons donc baissé l'imposition grâce à la mise en place du splitting intégral et grâce à la prise en compte de charges sociales.
A qui nous adressons-nous ? Eh bien, à ces couples innombrables qui travaillent - père et mère - professionnellement et qui ont de surcroît la responsabilité, comme chacun d'entre nous sans doute, de leur foyer et de leurs enfants. Ces gens-là ont besoin de pouvoir boucler leurs fins de mois à peu près normalement, et ça n'est pas parce qu'ils gagnent assez bien leur vie qu'ils y parviennent !
Alors, avec le système que nous avons choisi, nous restituons une petite partie du revenu disponible à cette classe moyenne. Et c'était bien la moindre des choses ! Ce qui est nouveau, et ce qui est flatteur pour ce parlement, c'est de s'en être aperçu et d'avoir porté aujourd'hui ce système sur les fonts baptismaux. Et je suis fier que les libéraux se soient ralliés à cette approche, même si elle n'était pas celle qu'ils avaient souhaitée, parce que l'essentiel - Monsieur Velasco - pour aujourd'hui et pour demain, dans ce temps de crise, ce sont les citoyens genevois qui travaillent. Et ça n'est ni la situation des plus pauvres ni la situation des plus riches qui fait problème, c'est celle de tous les autres ! Et c'est à eux que nous avons pensé.
Mesdames et Messieurs les socialistes, vous avez choisi l'opposition stérile ! Cela ne m'étonne pas de vous, parce qu'il y a longtemps que vous avez abandonné vos objectifs et vos idéaux d'égalité. La seule chose qui vous intéresse aujourd'hui c'est de conserver les acquis qui sont les vôtres ! Et je vous dis, Mesdames et Messieurs, ce qui m'a dérangé... (Commentaires.) ...ça n'est pas votre combat pour l'égalité, oublié depuis longtemps, c'est votre refus de permettre à ceux qui le souhaitent de prendre leurs responsabilités ! (Exclamations. Applaudissements.)
Mme Loly Bolay (S). Mesdames et Messieurs les députés, la proposition que vous faites via ce projet de loi, c'est la politique des caisses vides, on la connaît - on la connaît au niveau fédéral - c'est celle qui consiste à tailler dans les recettes de l'Etat en période de haute conjoncture ou d'excédent budgétaire en année électorale. Cela s'appelle des cadeaux politiques ! Dans quelque temps, lorsque les caisses seront à nouveau vides... Parce qu'il faut relever qu'on a réduit la dette, qui était de 13 milliards. Grâce à un gouvernement de gauche, ne vous en déplaise, cette dette a été réduite de 2,5 milliards ! Mais quand, à nouveau, la dette va augmenter, eh bien vous allez revenir avec vos recettes de toujours, soit de couper dans le domaine social !
Monsieur Halpérin, vous dites que les socialistes servent un discours qui, si je vous ai bien compris, est dépassé... Non, Monsieur Halpérin ! Excusez-moi, Monsieur le président, je dois m'adresser à vous... Les socialistes sont les seuls dans cette enceinte à défendre les personnes prétéritées. A l'heure où une grave crise frappe Genève et le monde entier, et alors qu'il faut un Etat fort, vous, vous proposez de baisser les recettes, les impôts, et en faveur des plus riches ! Car, en ce qui concerne les familles - on vous l'a dit, Monsieur Halpérin... Monsieur le président, vous lui direz ! - le parti socialiste était parfaitement d'accord de réduire les impôts pour les familles de la classe moyenne. Nous l'avons répété ! Et ne venez pas raconter des choses que nous n'avons pas dites ! Seulement voilà, vous avez, comme en 1999, fait croire à la population qu'on allait faire des cadeaux... Mais ce fut des peanuts pour la petite classe et la classe moyenne ! Et ce sont les riches qui en on profité ! (Brouhaha.) Et il nous manque 2 milliards ! Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui on en est à la même page, puisque, pendant trois ans, ce sera 1,2 milliard qui manquera dans les caisses de l'Etat ! (Brouhaha.)
Qu'allons-nous faire avec le projet de loi que vous avez déposé ?! Puisqu'on veut plus de fonctionnaires à la police, on veut plus d'infirmières... Et on veut construire le CEVA, n'est-ce pas, Monsieur Barrillier ?! Mais où allons-nous trouver cet argent ? Voulez-vous me le dire ?! Et puis, vous allez revenir avec ça, avec votre recette pour diminuer l'Etat social ! Nous, socialistes, sommes les seuls à vous dire que, de cela, on n'en veut pas !
Je me souviens de vos discours d'il y a peu de temps: il fallait réduire la dette... Que n'a-t-on pas entendu ici ?! Qu'il fallait réduire la dette... Pour une fois, les socialistes étaient d'accord avec vous. Effectivement, il faut réduire la dette, parce qu'il faut abaisser les intérêts de cette dernière: 40 000 F par habitant. Avec les cadeaux que vous faites, comment voulez-vous réduire cette dette ?!
Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ne sont pas dupes ! Nous ne sommes pas dupes du tout... Si vous aviez accepté le projet de loi du Conseil d'Etat, qui visait uniquement les familles moyennes, nous l'aurions approuvé ce soir ! (Brouhaha.) Seulement voilà, vous êtes allés beaucoup plus loin en proposant 400 millions en 2012, 387 millions en 2011, et un peu plus de 200 millions pour l'année prochaine ! Voilà ce que nous, nous ne voulons pas ! Comment allons-nous payer Justice 2011 ? Et un bâtiment pour la justice ? Comment paierons-nous tout cela ?! (Commentaires.) Vous allez nous le dire ?
Eh bien, c'est la raison pour laquelle nous, socialistes, continuerons encore et toujours à défendre la classe qui est pénalisée tous les jours: par les loyers... (Commentaires.) ...et par les caisses maladie qui augmentent leurs primes !
Je termine ici et vous le redis: nous ne sommes pas dupes, nous avons compris votre manège, et ce que vous faites aujourd'hui ce sont des cadeaux politiques en année électorale !
Des voix. Bravo ! (Exclamations. Applaudissements.)
M. Michel Forni (PDC). Je me permets d'intervenir, puisque j'ai eu l'honneur de présider la commission fiscale, qui arrive à la décision de ce soir, et je me rends compte que nous sommes en train de nous enliser sur le chemin des chiffres, dans la bataille des idées, et que nous oublions le fond de cet objet. Ce projet que nous examinons est, au départ, une compétition entre le projet du Conseil d'Etat et celui de l'Entente. Nous arrivons ensuite à une fusion des idées et des mécanismes, puis à un compromis qui est fédérateur, comme cela a été dit.
Il est vrai qu'il y a toujours de bonnes et de mauvaises raisons d'avoir peur. Et lorsqu'on ose aborder le thème de la baisse des recettes fiscales en période de déficit ou d'endettement de l'Etat, il convient, bien sûr, de cibler quels sont les bénéficiaires potentiels auxquels on s'adresse. Et, il faut le dire, il n'y a aucune inconscience pyromane des membres de la commission qui étaient engagés dans ce débat, il n'y a aucun désir d'engager un duel dogmatique, et encore moins de mener une bataille des idées. Nous sommes face à une adéquation qui est celle de savoir si réformes fiscales, nous pouvons les faire, et réductions des déficits, nous pouvons les opérer. Nous sommes dans une situation qui est historique. Situation de crise, il est vrai, mais nous sommes aussi dans une situation évolutive. Et je voudrais vous rappeler une petite phrase de M. Winston Churchill...
Des voix. Ah !
M. Michel Forni. Oui, Monsieur Barrillier ! ...«Prendre le changement par la main reste préférable avant qu'il ne nous prenne par la gorge» ! Et ceci veut bien dire ce que cela veut dire: il y a des opportunités, et il n'y a pas que des sensations de sabotage ou de sous-entendu. Le meilleur impôt, disait-on, est celui dont les formes dissimulent le mieux la nature... Eh bien, M. Voltaire, lui, disait le contraire ! Et si vous relisez un petit livre qu'il a écrit pas loin de Genève, qui s'appelle «Le bel impôt» - et vous retrouvez cela dans «L'homme aux quarante écus» - il traite tout d'abord de l'impôt sur l'esprit... (Brouhaha.) ...puis de l'impôt sur la chanson, puis de l'impôt sur le rire. Il rappelle que depuis quelque temps on ne fait plus de chansons plaisantes, on a peur de ne pas échapper à la taxe, donc on ne devient que trop sérieux. Eh bien, ce soir nous allons rester sérieux, puisque nous sommes dans une décision où la politique familiale et celle de la classe moyenne sont les enjeux de ce texte.
Je rappellerai simplement à ceux qui l'oublient qu'il n'y aura pas de développement durable sans enfants et qu'il n'y aura pas de croissance sans berceaux ! Souvenez-vous aussi d'une petite chose: les mesures pour les pauvres finissent très souvent par devenir de pauvres mesures. Et j'ai peur que nous soyons en train de partir vers les petits-bourgeois, vers ceux qui veulent sauver leur santé, la prévoyance, l'épargne, la retraite... Mais enfin, c'est une symphonie antirequiem ! Et ce n'est pas du tout le but de notre projet de loi.
Il faut reconnaître aussi que, depuis les années 80, la classe moyenne a été trahie, il faut le dire, et le compte n'y était pas. Il y a eu les turpitudes de la finance, il y a eu la mondialisation de l'économie, et les inégalités sociales ont également affecté la classe moyenne. Cela a été dit ce soir, ce projet s'adresse aux jeunes familles, aux familles recomposées et aux pseudo-célibataires. Il ne s'agit pas d'une histoire de fric, il s'agit d'un raisonnement qui doit permettre d'équilibrer, au prix, il est vrai, de certaines sommes qu'il faudra débourser et qui pourraient effectivement peser lourd dans la balance... (Brouhaha.)
Mais les questions auxquelles nous devons répondre ce soir, soyons honnêtes, celles qui intéressent le citoyen, eh bien elles sont simples ! Et je me permets de vous les résumer en quelques mots. La première question c'est: paie-t-on trop d'impôts à Genève ? Ensuite, pour ceux qui le pensent: est-ce que la fiscalité des personnes est réellement dissuasive ? Ceux qui redoutent que ce soit un frein à la compétitivité ont-ils raison ? Enfin, est-ce que les impôts locaux sont trop élevés ? Ou alors, est-ce que les impôts directs sont indolores ? Mais le système qui les propose paraît complexe, et nous répondons simplement: nous voulons combiner une justice sociale et une efficacité économique.
Alors évitons de nous enfermer dans les chiffres. Parce que les chiffres, souvent, ça n'aboutit pas beaucoup à du sens et les marges d'erreur sont énormes. Il y a aussi des idées fausses, et on obtient des décisions erronées quand on se base sur des adéquations insuffisantes. Evitons donc une vaste manipulation politique où le chiffre devient un ingrédient majeur. Le chiffre n'est pas neutre ! Et, ce soir, s'il convient de bien décider et de bien discerner, c'est la politique que nous allons offrir à nos concitoyens, de façon à leur apporter, notamment à ceux de la classe moyenne et aux autres, le meilleur traitement qui leur permettra de progresser dans cette période de crise. Merci !
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau a décidé de clore la liste. Doivent encore prendre la parole: M. Stauffer, M. Velasco, Mme Schneider Hausser, M. Meylan, M. le conseiller d'Etat Hiler. Monsieur Stauffer, vous avez la parole.
M. Eric Stauffer (MCG). Je me dois de réagir à quelques propos de la gauche, qui m'ont fait littéralement bondir de mon fauteuil. Quand Mme la députée Bolay vient dire que c'est avec un gouvernement de gauche que la dette genevoise a diminué... Excusez-moi, je rigole ! Parce que, finalement, vous avez profité d'une bonne conjoncture. Or, vous l'oubliez ! Et c'est, à vous écouter, grâce à une rigueur de gestion à la sauce socialiste que la dette a diminué... Mais ça, c'est un mensonge, et les Genevois ne sont pas dupes !
Vous parlez de la dette. Eh bien, concernant la dette genevoise, puisque vous avez dit que c'était le gouvernement de gauche qui l'avait diminuée, rappelez-moi donc qui était au conseil d'administration de la BCG... Et qui est aujourd'hui conseillère fédérale ? Et qui a contribué à plomber les comptes de la république de plus de 2 milliards de francs ? Je vous laisse deviner. Je pense que les citoyens qui nous regardent l'ont déjà compris.
Mesdames et Messieurs, pour pouvoir faire du social et pour qu'il soit à la hauteur, il faut une économie forte ! Pour cela, il faut libérer de l'étau la classe moyenne, qui souffre depuis bien trop longtemps !
Je terminerai en relevant ceci: lorsque vous dites que les socialistes - et encore une fois, je me dois de réagir, vous ne m'en voudrez pas, puisque nous sommes ici en famille et entre nous... (Commentaires. Brouhaha.) Quand vous dites que vous défendez les plus défavorisés de notre canton, c'est vrai que vous autres socialistes, à l'image de M. Mouchet, aux Services industriels - qui gagnait 440 000 F pour un poste à 40%, et qui est socialiste - vous donnez aux Genevois une parfaite image de la cohésion de vos discours politiques ! (Brouhaha.)
Je terminerai, réellement cette fois, en ajoutant qu'il est dommage qu'à Genève il n'y ait pas un impôt sur la connerie, car, grâce aux socialistes, l'Etat serait autosuffisant ! (Rires. Applaudissements. Commentaires.)
Le président. Vous le savez, Monsieur Stauffer, et je le dis une fois de plus, vous devriez mesurer vos propos... Ce n'est pas la peine d'insister. Monsieur Velasco, vous avez la parole.
M. Alberto Velasco (S). Monsieur Halpérin, je suis tout à fait d'accord avec vous à propos de ce constat: la pyramide de redistribution fiscale à Genève est aujourd'hui extrêmement sensible par le haut. Et vous comme moi devons nous interroger pour savoir si cela est bon pour la république. Une pyramide fine vers le haut dénote quand même une fragilité excessive. Eh bien, moi j'aimerais que cette pyramide s'inverse et qu'il y ait davantage de personnes qui y contribuent, peut-être pour des sommes moins importantes mais mieux réparties. En effet, Mesdames et Messieurs les députés, et les citoyens qui nous écoutez, il suffit qu'un, deux ou trois de ces contribuables aient un pépin, pour que l'on se retrouve avec des déficits de 200, 300 ou 400 millions... Donc, c'est un problème, et ça n'est pas ce que j'appelle une économie saine.
Monsieur Halpérin, vous dites qu'il faut travailler huit mois pour l'Etat et qu'il est normal de garder quatre mois pour soi. Ce sont des chiffres qui ne veulent pas dire grand-chose... D'après ce que je sais, l'imposition est de 16%. Donc, à la limite, cela signifie qu'en travaillant un mois et demi ou deux mois au maximum à Genève, on arrive à payer sa fiscalité, ce qui n'est pas si mal.
Vous êtes une personne que je qualifie de républicaine, vous avez un passé politique respectable, et vous savez très bien, Monsieur Halpérin, que dans un Etat qui n'est pas redistributeur, que dans un Etat où, par exemple, s'accumulent les fortunes qui ne sont pas utilisées par la suite, il y a un problème tôt ou tard, dit de redistribution; il advient ce qu'on a vu aujourd'hui, c'est-à-dire un clash financier comme on le connaît. Il faut une régulation, Monsieur Halpérin ! Il faut effectivement une régulation, il faut que ces personnes gagnent un peu moins - un peu moins ! - et qu'elles donnent un peu aux autres; peut-être qu'à ce moment-là les sommes destinées aux familles seraient mieux réparties. Et ce n'est pas le cas avec le projet qui nous est soumis. J'aurais bien aimé que le financement de la politique familiale de ce canton soit réalisé justement grâce à la solidarité des personnes qui disposent de beaucoup plus. Cela aurait été la logique républicaine, or ce n'est pas le cas.
Avant de conclure, j'ajouterai que M. Stauffer connaît mal l'histoire - en cela, je peux l'excuser. Concernant la gauche dans ce canton, il y a eu au siècle dernier deux périodes durant lesquelles elle a été au pouvoir: l'époque de Léon Nicole - il est vrai que cela a duré très peu de temps - et entre 1997 et 2001, soit quatre ans. (Commentaires.) Durant le reste - tout le reste, Mesdames et Messieurs les députés ! - c'était la droite qui était au pouvoir !
Cela signifie que M. Stauffer se trompe quand il prétend que la gauche est responsable des difficultés financières de ce canton... Il se trompe ! C'est la droite ! La droite a géré ce canton pendant, précisément, tout le dernier siècle ! Donc, la responsabilité de ce qui nous arrive incombe à la droite: pendant un siècle, elle a eu la majorité dans ce parlement, la majorité au Conseil d'Etat et la majorité au niveau fédéral ! Donc, tous les déboires que nous connaissons, Messieurs, il faut être intellectuellement honnête pour reconnaître qu'ils ne sont pas imputables à la gauche ! Ce n'est pas la gauche qui a causé la crise et ce n'est pas la gauche qui a produit la dette abyssale que l'on connaît aujourd'hui ! Et je le répète: il est vrai que pendant les quatre années durant lesquelles la gauche a gouverné on a vu la dette diminuer. On pourrait nous dire qu'il y a eu une rentrée fiscale intéressante... Oui, mais le fait est qu'elle a diminué est dû à la baisse d'impôts de 12%, 350 millions par année, proposée par la droite, qui a péjoré les choses. Voilà la réalité, Mesdames et Messieurs !
Je le répète: j'aimerais vraiment que la droite ait raison en disant que ces 400 millions vont nous procurer un milliard de recettes supplémentaires. Or jusqu'à présent, Monsieur Halpérin, ni les livres, ni l'histoire, ni les expériences n'ont montré que vous puissiez avoir raison. Est-ce qu'on a une meilleure expérience à Genève, ou ailleurs, ce n'est pas vérifié scientifiquement... Est-ce que ce canton est tellement, disons «singulier», au point que nous allons démontrer au monde entier que, nous, nous sommes capables d'expérimenter une nouvelle politique économique, de sorte qu'on va rendre les gens heureux en augmentant la richesse, puis en baissant la fiscalité ? Cela ne s'est pas vu jusqu'à présent...
Je vais terminer en ajoutant que c'est quand même les libéraux, les «Lumières» donc, qui ont instauré la politique de la redistribution fiscale. Effectivement, la justice fiscale a été introduite par les libéraux éclairés du XVIIIe siècle ! Je veux dire par là que nous, quelques siècles plus tard, nous ne faisons que défendre - puisque, malheureusement, nous le devons toujours - ce que vos prédécesseurs, Mesdames et Messieurs les libéraux, ont voulu instaurer ! Et je regrette qu'aujourd'hui vous soyez en train de mettre à bas cette politique qui, pendant longtemps, a démontré qu'elle a été le lien pacificateur de l'Etat social que nous connaissons. C'est cela que vous remettez en cause ! (Applaudissements.)
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Avant que cette entrée en matière soit close, il m'appartient de rappeler quelques points suite aux propos que j'ai entendus. La majorité parle de relancer l'économie privée... Très bien ! Mais c'est comme si l'Etat mangeait à tout jamais les revenus de l'impôt. Excusez-moi, mais tout l'argent qui, au niveau de la fiscalité, entre à l'Etat est redistribué ! Et vous êtes tous là pour en être témoins. Chaque franc est contrôlé, on regarde où il va, on s'assure qu'il soit bien géré et comment il est dépensé: soit en salaires, soit, je le rappelle quand même, en faveur des entreprises, puisque tant le Grand Conseil que le gouvernement viennent de faire un effort dit «de relance» via des investissements et des travaux.
Autre petite pointe... Tout le monde parle de 2010, en regard de l'entrée en force de cette loi, si le peuple l'accepte en septembre. Mais, dans les faits, les retombées pour les familles, s'il y en a, seront effectives à partir de 2011, puisqu'on est dans le postnumerando !
Il y a eu pas mal d'attaques sur le rabais d'impôts, qui est une «genevoiserie» et qui est clairement né à la période de Mme Calmy-Rey, c'est vrai. Beaucoup de personnes parmi la majorité et même des experts auditionnés contestent; ils disent que le rabais d'impôts n'est plus possible, qu'il n'est plus compatible avec la LHID, qu'il faut vraiment anticiper un jugement potentiel... Mais, dans les faits, à aucun moment ce jugement n'a été rendu: «il y a des prémices» ou «on pourrait imaginer»... Et pour cause ! Je crois qu'il n'est pas simple d'attaquer ce rabais d'impôts et, surtout, il est difficile à remplacer en termes de justice sociale par rapport à des déductions sur l'impôt qui sont identiques: c'est-à-dire que chaque enfant vaut la même chose en termes de charges, que ses parents soient fortunés ou pas.
M. Catelain a dit que tous les contribuables ne paient pas d'impôts. C'est faux ! Aujourd'hui, avec la courbe qu'on a - qui est d'ailleurs très compliquée, on a dit que ce n'était pas clair quant à la formule... Or, avec la formule figurant dans la LIPP, chaque contribuable paie un impôt ! En revanche, après, à posteriori du calcul de l'impôt, arrive le rabais. Et ce dernier fait qu'une partie des contribuables paient le minimum, c'est-à-dire les frais administratifs qu'a coûtés l'imposition.
Il est vrai que dans la nouvelle loi qui nous est proposée - et contrairement à ce que j'ai beaucoup entendu dans les rangs de droite, selon lesquels «tout le monde doit payer un impôt, même s'il est minime» - on démarre à 17 000 F ! Il y a un impôt zéro ! C'est-à-dire que même dans la fiscalité on exclut des contribuables, des citoyens, parce qu'ils ne gagnent pas assez ! Voilà une chose qu'il faut relever, et je trouve qu'il y a là un élément contradictoire dans ce projet de loi.
Ensuite, bien sûr, M. Weiss, M. Gros et d'autres ont attaqué le parti socialiste... Est-ce par manque d'argumentaire sur le projet de loi et la matière de ce dernier ou parce qu'on n'est pas juste dogmatique ? Nos critiques ou nos arguments ne sont peut-être pas si faux que cela.
Pour terminer, j'aimerais relever que ces arguments, quel que soit le calcul que l'on choisisse, sont en faveur des familles - vous dites tous que c'est pour les familles moyennes. Or, la base de ce projet de loi est une défiscalisation en proportion des revenus et en proportion de la fortune. Bien sûr qu'une famille de deux personnes qui travaillent gagne plus et qu'elle a un revenu imposable plus important. Donc, il y a un passage... Tant mieux ! Tant mieux, puisque ce projet de loi va être accepté ce soir et que certaines familles vont y gagner. Mais ce sont quand même les familles avec un certain revenu qui y gagneront le plus, et ce que ce projet de loi apporte, c'est qu'il n'y a pas de plafonnement ! A part - à part ! - la mesure concernant les personnes retraitées, où, là, on a pu reproduire dans la loi nouvelle qui sera proposée une dégression de déduction selon le revenu.
Voilà ce que je voulais vous rappeler, même si je l'avais déjà évoqué au préalable, et c'est vrai que le mécanisme de ce projet de loi est basé sur le revenu imposable, et les diminutions sont proportionnelles à ce dernier.
M. Alain Meylan (L), rapporteur de majorité. En tant que rapporteur de majorité - majorité assez large - je laisserai naturellement les groupes s'exprimer comme il se doit, cependant j'aimerais rappeler quelques points évoqués qui ne me semblent pas tout à fait exacts - ils sont peut-être même erronés.
Dire que le travail a été bâclé, alors que cela fait sept ans que l'on travaille sur la refonte de la LIPP... C'est à l'ordre du jour, j'ai encore bien contrôlé tous les procès-verbaux de la commission fiscale, elle a passé de la refonte de la LIPP à d'autres refontes depuis les années 2002-2003. Dire que le travail a été bâclé n'est donc pas tout à fait exact ! Cela fait sept ans que nous travaillons sur cette matière, et elle n'est pas facile. Nous examinons des textes, nous prenons connaissance des commentaires et des explications - tout à fait intéressantes - de la part des personnes de l'administration fiscale, et je crois que nous avons bien planché sur des projets de lois. Lors du deuxième débat, nous n'avons pas entendu beaucoup de propositions; lors du troisième, les chiffres ont été consolidés - on les connaissait depuis plusieurs mois - mais sans surprise, puisque nous étions tous au courant du montant, à quelques millions près, de la cible à atteindre par les modifications que l'on préconisait. Je le répète: dire que le travail a été bâclé me paraît tout à fait erroné.
Des personnes parlent d'inégalités et disent qu'on provoque ces dernières... Mais que fait-on d'autre que, précisément, les supprimer par ce projet de loi ? On supprime les inégalités entre les couples mariés et les partenaires concubins, on supprime les inégalités en regard des couples avec famille... Nous sommes véritablement dans la situation où nous pouvons essayer de supprimer les inégalités et apporter une bouffée d'oxygène pour la classe moyenne ! On parle des neuf dixièmes de ce projet de loi... Mais les neuf dixièmes iront à cette classe moyenne et à ces familles !
Encore un petit chiffre qui figure dans le rapport et concerne les simulations fiscales. Si l'on fait un cumul, les 250 millions qui vont être restitués aux familles, aux couples, aux contribuables en général, eh bien, ces 250 millions, si l'on fait - comme beaucoup d'économistes ou de nombreuses théories - la part des 80/20, les 80% de ce gain pour les contribuables, soit 200 millions, vont aux ménages qui gagnent 200 000 F et moins par année. On voit ainsi qu'on a extrêmement bien ciblé cette révision de la fiscalité.
C'est pourquoi je remercie l'ensemble des groupes qui ont participé à ce travail et apporté leur appui, ce qui a permis d'obtenir une large majorité. Cela dénote un travail de fond, complet, total et exemplaire; cela prouve qu'on arrive à un large consensus sur des sujets aussi importants que la fiscalité, dont le rôle doit être, il est vrai, redistributeur, tout en tenant compte de ceux qui le permettent. Ainsi, la classe moyenne pourra bénéficier d'un gain fiscal qui lui donnera une certaine indépendance financière au cours de ces prochaines années. Aussi, je vous remercie d'entrer en matière sur ce projet de loi.
M. David Hiler, président du Conseil d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, en m'adressant tout d'abord aux 80% de ce parlement qui vont voter cette loi, je dirai ceci: si vous voulez qu'elle soit plébiscitée comme elle le mérite, restez-en aux faits, et rien qu'aux faits ! Car ces faits à eux seuls disent que cette loi est une bonne loi et ils disent aussi les dangers qui s'y trouvent.
Alors, Mesdames et Messieurs, en politique, on fait toujours - l'expression, je crois, a été utilisée - «des paris sur l'avenir». Si l'on parle de la loi elle-même, elle est évidemment importante, parce qu'elle corrige une inégalité crasse qui veut qu'au-dessus d'un revenu de couple de 80 000 F les personnes mariées soient dans un barème plus élevé que les autres. Et comme il se trouve que ces personnes ont des enfants - puisqu'elles constituent quand même la majorité - et que les familles monoparentales sont imposées au barème des familles mariées, eh bien, évidemment, c'est au niveau social et au niveau de la justice - toute simple, terre à terre - injuste !
Pour remédier à cela, certains l'ont dit, l'idéal serait la taxation individuelle. A Berne, on n'arrive pas à se décider entre splitting et taxation individuelle, ce dossier est bloqué. Nous avons attendu; nous ne pouvons plus attendre ! Ce qui nous est possible, c'est d'approcher au plus près de ce qui serait l'idéal: par splitting. Ce n'est pas rigoureusement identique, et on va tout de même revenir sur ce petit problème et sur la manière dont le Conseil d'Etat a cru devoir le résoudre.
Le splitting, c'est donc de dire qu'il y a un seul barème, qu'il s'agisse des personnes mariées ou des célibataires, et que, lorsqu'il y a un couple, on divise les revenus par deux et on applique le barème. Et c'est le barème unique.
Evidemment que si l'on n'avait établi que le splitting, qui est juste et nécessaire pour l'égalité hommes-femmes, et qui est nécessaire pour que, finalement, le deuxième salaire ne soit pas réservé au paiement de la crèche et aux impôts, il faut quand même admettre que la progressivité de l'impôt est cassée en certains cas. Parce que si un couple gagne 300 000 F, évidemment, on fait comme si on gagnait 150 000 F. Or, si c'est un couple où une personne gagne 300 000 F et l'autre, zéro franc, il faudrait payer plus, n'est-ce pas, puisqu'il y a la progressivité de l'impôt. Pour compenser ceci, qu'avons-nous fait ? Nous avons établi un barème qui est plus bas pour les premiers milliers de francs, même les premières dizaines de milliers de francs qui suivent les 16 000 F sur lesquels il n'y a pas d'imposition, parce que, ce que permettait le rabais d'impôts, nous avons voulu le maintenir. Le revenu minimum ne doit pas être soumis à l'impôt, il ne l'est pas plus aujourd'hui qu'il ne l'était dans l'ancienne loi.
A partir de là, le coût renchérit, il faut le dire, parce que les gens qui sont «allégés» sont très nombreux, forcément. Quel est le résultat ? C'est qu'en cumulant une augmentation assez forte, puisque chacun peut déduire - c'est-à-dire 9000 F, puis 10 000 F l'année suivante, pour chaque enfant, avec le splitting et une baisse du barème - il y a une très forte concentration sur les groupes où les contribuables sont les plus nombreux. Cela coûte ! Et je ne prends pas ce problème à la légère. Mais évidemment, c'est là que se situe finalement la grande masse des Genevois, et ce sont eux qui vont profiter, à 80% - le chiffre est exact - de cette baisse d'impôts.
Alors oui, c'est d'abord pour les familles, et en particulier pour les familles monoparentales ! Oui, une famille monoparentale, avec un revenu de l'ordre de 90 000 F - on enlève 15% pour savoir ce qui entre dans le compte en banque - aura une diminution d'impôt de moitié... Oui ! Et, précisément, cette diminution a pour but d'éviter que les personnes qui se trouvent à la limite de devoir demander de l'aide, une fois ou l'autre ou au premier accident, soient précarisées par des prélèvements trop importants. C'est vrai aussi pour les couples mariés. Concernant les célibataires, seuls les petits salariés ont une baisse spectaculaire. Tout cela, vous l'avez sous les yeux, ce sont des experts qui l'ont fait deux cents fois pour votre commission - mais préalablement deux cents fois pour votre serviteur - et qui le mesurent !
Donc socialement - et c'est le paradoxe, évidemment - il y a un côté sang mêlé de cette loi. Parce que, d'un côté, il y a la droite qui privilégie en réalité des gens pour la plupart modestes - ou au beau milieu de l'échelle sociale - et, de l'autre côté, il y a des personnes qui se situent plus à gauche de l'échiquier politique qui acceptent une baisse assez considérable. Puis-je dire que le montant est de centre-droite et que les bénéficiaires sont de centre-gauche ? Pour résumer... (Commentaires.) Voilà pour l'essentiel de la loi.
A partir ce là, il y a quand même une catégorie dont on a peu parlé, ce sont les rentiers. Rentiers AVS-AI: 75 millions, splitting compris ! Et enfants compris, parce que, contrairement à ce qu'on croit, les rentiers en ont aussi. Donc, 75 millions pour des gens qui sont, pour 90% d'entre eux, au-dessous de 120 000 F, couples compris. Qu'est-ce que cela signifie ? Que l'on a rendu justice à une catégorie de contribuables: ce sont les personnes qui ont cotisé au deuxième pilier avant 1986, qui ont été imposées sur leurs versements, et qu'on réimpose à la sortie ! D'où l'abattement de 20%. Et ça, c'est 75 millions ! Alors, je veux bien que ce soient des cadeaux aux riches, mais enfin, ce sont 75% de gens qui ont cotisé au deuxième pilier avant qu'il soit obligatoire. Tous les cantons connaissent cette mesure. On avait cru pouvoir dire que le rabais double pour les rentiers permettait de rétablir l'équilibre: pas tout à fait. Et effectivement, en baissant le barème unique pour les tranches basses, on a rapproché le salarié du rentier quant à l'imposition. Ce qui fait qu'on n'a pas besoin de leviers aussi puissants que ce qu'on avait avant, sauf cette déduction sociale de 10 000 F, mais qui touche effectivement les rentiers modestes, n'est-ce pas, on parle de 50 000 F de revenu ! Et c'est là l'importance, l'intérêt, de limiter - limiter ! - l'effet de seuil par rapport aux personnes qui touchent les prestations complémentaires - puisque, quand vous êtes juste en dessus, à tout le moins vous avez une déduction qui s'applique à vous.
Et c'est pour cela, Mesdames et Messieurs, que j'aimerais - même si, à ce stade, je ne les ai pas encore - vous donner toutes les données pour vous en convaincre et vous supplier de ne pas employer des expressions comme «gratis burger»... C'est «gratis burger», vous l'avez dit !
Quant aux gens qui ne paient pas d'impôts, il faut savoir de qui l'on parle... On parle de veuves ! Qui ont vécu, évidemment, à une période où il n'y avait pas de deuxième pilier, qui se retrouvent avec des AVS et des deuxièmes piliers partiels de leur mari, qui ont travaillé dur - et pas quarante heures, n'est-ce pas ?! L'existence était dure au moment où ces personnes étaient dans la vie active. Aujourd'hui, il se trouve que, dans une ville aussi chère que Genève, il faut strictement ne pas leur prendre un franc ! Parce que la vie est bien assez dure comme ça. De plus, notre société vieillit et ces personnes sont nombreuses.
De l'autre côté, je ne trouve pas très psychologue non plus de dire à des jeunes, qui sont comptés comme contribuables, mais qui font formation - nous nous en réjouissons - et formation, parfois, parce que personne ne leur donne de chance de travailler... Donc, je ne trouve pas très psychologique de leur dire: «Vous êtes des profiteurs du système»... Non ! Mesdames et Messieurs, nous sommes dans une solidarité normale !
Alors, il est vrai... (Commentaires.) Il est vrai, Mesdames et Messieurs les députés, qu'en passant... (Commentaires. Un martinet est entré dans la salle du Grand Conseil.) Eteignons peut-être la lumière... Et je recommence. Car la vie d'un oiseau vaut tous les discours du monde, bien sûr ! (Brouhaha.) Il faut éteindre la lumière ! (La lumière est éteinte. L'oiseau se dirige vers la galerie du public. Exclamations.) Ah, le gendarme va s'en occuper ! (Brouhaha. Le gendarme de garde attrape le martinet. Exclamations. Applaudissements.)
Alors, pour conclure, Mesdames et Messieurs, je suis, comme vous, un peu contrarié qu'on arrive jusqu'à 30% et un peu plus de personnes. Et cela, c'est un peu par les effets cumulés des différentes mesures que nous avons prises. Vous avez pu constater au cours de deux cents simulations que la maîtrise d'effets conjoints donne une complexité qui ne permet pas d'aller à l'idéal, surtout quand on s'est fixé certaines contraintes. Mais l'essentiel est sauf et... (Exclamations.) Mais... (Brouhaha. Rires. Un nouveau martinet est entré dans la salle.) C'est comme avec les criminels: vous les arrêtez, et vous les relâcher tout de suite ! (Rires. Applaudissements.)
Des voix. Oui ! (L'huissier a fait sortir le martinet par la fenêtre. Applaudissements.)
M. David Hiler. Rien ne vaut un huissier ! (Brouhaha.) Fermez la fenêtre ! (Les députés ferment toutes les fenêtres.) Je suis, disais-je, un peu contrarié - comme vous - de cette entité, maintenant. Si la dynamique que l'on connaît devait se poursuivre, on devrait avoir un nombre décroissant de personnes à la retraite qui sont dans cette situation, parce que, effectivement, la généralisation du deuxième pilier a des impacts positifs. Malheureusement, il est vrai aussi que la pratique courante et tout à fait honorable du divorce fait que, parfois, les gens ont des rentes coupées; mais ils devraient pouvoir sortir de ce «zéro», même si l'imposition ne sera pas très importante dans certains cas.
Alors, Mesdames et Messieurs, il reste deux problèmes qui, me semble-t-il, justifient, aux yeux de ceux qui défendent cette opinion, le rejet. Le bouclier ! Effectivement, cela a été dit, le premier bouclier... J'aimerais quand même vous rappeler qu'il pesait 600 millions, le triple bouclier ! Je ne suis pas absolument sûr que c'était ce qu'avaient pensé et imaginé les auteurs du projet de loi, mais enfin, toujours est-il que c'est ce qu'il pesait. Et on aurait effectivement pu qualifier cela d'assez sarkozyste, comme mesure !
J'ai demandé à l'administration de trouver le bouclier qui, par rapport à la situation en Suisse occidentale, me garantissait un non-exode - qui n'a pas eu lieu jusqu'à présent, on a vérifié tous les chiffres en commission; la méthode qui nous a tentés, dans un premier temps, était valaisanne. Le canton de Vaud a adopté le bouclier sur lequel vous allez vous prononcer. Il s'est avéré d'abord, en termes de concurrence fiscale et de protection, avoir rigoureusement la même méthode, avec quelques avantages puisque notre seul véritable concurrent, c'est le canton de Vaud, et que celui-ci coûtait 35 millions. Pas 600: 35 millions. Et aujourd'hui, il coûte 35 millions. Alors, était-ce indispensable ? Je peux très bien comprendre, et vous aussi, que, dans la situation que j'occupe, je n'ai pas tellement envie de prendre de risques, donc je suis prêt à prendre une assurance à 35 millions. Je peux très bien comprendre, d'un point de vue de discours, qu'on ait une autre opinion. Je le comprends parfaitement ! En revanche, je suggère, peut-être... Mais je sors de mon rôle, excusez-moi. Si vraiment c'est cela le problème, alors, comme dans le canton de Vaud, que le parti socialiste vote l'ensemble de la loi, et l'on suivra l'initiative pour abolir le bouclier ! Parce que... (Remarque.) Oui, c'est ce qu'ils ont fait ! Parce qu'effectivement il s'agit de deux questions. Je ne pouvais pas - le Conseil d'Etat ne pouvait pas, la commission ne pouvait pas - splitter à l'infini les thématiques ! Il est question d'enfants, de retraités, de barèmes, de splitting... On ne peut pas faire huit projets de lois ! A un moment donné, il faut une refonte complète, et chacun a le loisir de changer ce qui lui déplaît.
Ainsi, et je conclurai par là, il y avait deux options. Soit nous disons: «Cette loi est une bonne loi, mais, la crise étant ce qu'elle est, nous la laisserons entrer en vigueur en 2012»; soit nous disons: «Cette loi est une bonne loi, elle peut s'inscrire dans un dispositif de relance, puisque la population qui va en profiter a une faible propension à épargner et a une assez forte propension à consommer, et que, pour beaucoup de gens, cela sera simplement, en termes de disponible, une compensation à l'augmentation des caisses maladie au cours de ces deux prochaines années, à l'augmentation des cotisations chômage, à l'augmentation de la TVA, et à l'augmentation, pour certains, du taux de cotisation au deuxième pilier. Donc, il faut garder le disponible, ce qui se consomme, ici.»
Il y a alors un risque, et cela, Monsieur Barazzone, j'aimerais vous le dire clairement. Depuis que le Conseil d'Etat a présenté le plan de relance, depuis que nous avons intégré dans notre réflexion une diminution un peu plus basse que celle-là - 300 millions, nous l'avons dit - il y a un prix à payer. Le prix à payer, c'est que l'objectif maximal que le Conseil d'Etat peut atteindre dans la préparation du budget, c'est d'être en dessous de 500 millions avec un prix Placette ! Cinq cents millions de déficit ! Mais, si ce n'étaient pas 500 millions de déficit, je suis désolé, ce ne serait pas une mesure de relance ! La relance, c'est d'injecter un pouvoir qu'on emprunte, autrement ce n'est pas de la relance ! Or il se trouve que, dans le cas d'espèce, nous les avons, et c'est ça la réserve conjoncturelle. La réserve conjoncturelle, c'est de n'avoir pas dépensé - comme nous aurions pu le vouloir, comme cela nous aurait diminué, à nous, conseillers d'Etat, nos journées de travail - l'entier de ce que nous avons obtenu.
Mais tout de même ! Honnêtement, il faut rejoindre l'équilibre en 2012; cela se joue à 100 ou 200 millions près. Aujourd'hui, la marge d'erreur d'une projection en 2012 est telle qu'on ne peut pas être affirmatif. Quoi qu'il en soit, pour 2010 et 2011, l'intention du Conseil d'Etat est unanime: ne pas faire des coupes claires. L'intention est de s'en tenir à deux tranches où l'on va, en deux ans, dépenser la réserve conjoncturelle.
Et maintenant - si je peux me permettre, là encore, de regarder un peu vers tous les bancs - il y a quand même, au cas où cela ne tournerait pas aussi bien qu'on le voudrait, à savoir que la relance soit un peu plus haute, et elle dépend essentiellement des achats d'autres pays - donc, M. Halpérin et moi-même n'y pouvons rien du tout - eh bien, il y a tout de même quelque chose qui nous permettrait d'en venir à de pénibles expédients: c'est de déclasser assez rapidement les terrains Praille-Acacias-Vernets. Non pas pour les vendre, mais nous sommes aux normes IPSAS ! (Commentaires.) Et les normes IPSAS indiquent évidemment qu'un déclassement donne une valeur théorique, que celle-ci doit être dans le bilan et que cela doit passer par le compte de fonctionnement... Car nous ne sommes plus en période de bilan d'entrée ! Et que ceci devrait réduire assez substantiellement nos problèmes, comptablement dans un premier temps, avant d'apporter des revenus, que ce soit par rentes de droit de superficie assez confortables, ou, ici ou là, par une vente, si c'est la meilleure solution. (Brouhaha.)
Mais en d'autres termes, que vous dis-je par là ? Mesdames et Messieurs, soit Genève, sur un certain nombre d'éléments contestés, se reprend: «Oui, l'OMC doit rester ici, la Genève internationale est stratégique»; «Oui, il faut faire le pas avec le CEVA» et, permettez-moi de vous le dire, le plus rapidement possible ! «Oui, il faut avoir des zones industrielles supplémentaires pour le déménagement d'autres besoins»; «Oui, il y a dans le monde des entreprises qui ne viennent pas à Genève, parce qu'il n'y a ni bureaux ni logements» - et c'est écrit dans la presse londonienne, ce qui est quand même un peu ennuyeux !
Alors, Mesdames et Messieurs, si nous arrivons à réunir à nouveau nos forces autour de ce projet, le pari sur l'avenir dont a parlé Mme Künzler, je suis sûr que nous pouvons le gagner ! Mesdames et Messieurs, si, par hasard, le ciel nous tombe sur la tête... Si la crise dure dix ans... Eh bien, comme je le dis à chaque fois, il sera question de beaucoup plus que 300 millions et que d'une baisse d'impôts: des sacrifices devront être demandés au niveau des recettes, au niveau des prestations. Mais, est-ce que, honnêtement, dans cette salle, quelqu'un a la conviction profonde que le ciel va nous tomber sur la tête ? (Remarque.) Alors que nous sommes les enfants gâtés de l'humanité ! (Commentaires.) Pour ces raisons, Mesdames et Messieurs les députés, je vous invite à approuver ce projet de loi. Je vous invite à vous unir derrière lui, je vous invite à dire la vérité sur ce projet de loi. Et, surtout, que personne ne se l'accapare: il appartient à tous les gens qui ont travaillé, et notamment à un certain nombre de techniciens qui ont fait quatre cents simulations au total ! Merci de votre attention. (Applaudissements nourris.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Monsieur Gros, demandez-vous l'appel nominal ?
M. Jean-Michel Gros (L). Oui, Monsieur le président ! (Appuyé.)
Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 10199 est adopté en premier débat par 70 oui contre 15 non et 2 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 à 13.
Le président. A l'article 14, nous sommes saisis d'un amendement de la minorité, qui demande l'abrogation de l'alinéa 2. Je donne la parole à M. Deneys.
M. Roger Deneys (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons bien écouté les propos de M. le conseiller d'Etat David Hiler. Comme socialistes, nous avons évidemment, et peut-être n'en avons-nous pas assez parlé tout à l'heure, soutenu toutes les mesures consensuelles en faveur de la classe moyenne: nous avons soutenu les mesures en faveur des rentiers; nous avons soutenu les déductions relatives aux charges de famille; nous avons soutenu les mesures pour le splitting. Et, fondamentalement, les socialistes auraient adhéré sans aucun problème à un projet de loi dont l'ampleur fiscale se limitait à 200 ou 250 millions de francs par an. (Brouhaha.) Il faut savoir que les prévisions fiscales sont un exercice extrêmement délicat, et ce n'est pas le conseiller d'Etat David Hiler qui nous dira le contraire, compte tenu des difficultés de prévisions que rencontre chaque conseiller d'Etat en charge des finances.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, dans ce projet de loi, certes, nos travaux ont duré de nombreuses années, mais le troisième débat qui aurait éventuellement permis d'introduire certaines corrections pour limiter l'ampleur... (Brouhaha. Le président sonne la cloche.) ...totale du projet qui est à 400 millions... (Brouhaha.) Eh bien, pour limiter cette ampleur totale, il aurait fallu pouvoir changer certains chiffres. Nous n'en avons pas eu le temps; le forcing a été fait parce que le deuxième débat s'est déroulé non-stop, sans pause. Nous ne revenons pas sur un article déjà voté en deuxième débat - et c'était bien normal - mais, simplement, il n'y a pas eu en troisième débat le temps matériel pour pouvoir faire des propositions. Et c'est bien ce que nous déplorons ! Il n'y a pas eu de temps pour procéder à des simulations supplémentaires; il n'y a pas eu de temps pour consulter les communes, afin de savoir quelles étaient les conséquences de ces baisses sur leur budget et leurs projets en matière sociale et de politique familiale. Pour cette raison, nous socialistes étions très embarrassés au bout du compte !
Quatre cents millions de recettes fiscales en moins pour le canton de Genève nous parait absolument exagéré. Et l'on sait très bien que cet argent qui retournera aux ménages ne sera pas exclusivement dépensé à Genève: il sera épargné, investi, y compris ailleurs sur notre terre, et il sera évidemment aussi dépensé par ceux qui partent en vacances ou qui achètent des propriétés à l'étranger. C'est la raison pour laquelle l'impact sur l'économie genevoise n'est certainement pas aussi positif qu'on peut le penser.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ont cherché à trouver des mesures qui permettaient d'engranger de nouvelles recettes fiscales pour diminuer l'impact total du projet de loi.
Ici, cette proposition de supprimer l'alinéa 2 de l'article 14 vise à supprimer l'une des mesures les plus indécentes de la fiscalité helvétique - et de celle d'autres pays occidentaux, d'ailleurs - ce sont les forfaits fiscaux, puisqu'ils s'adressent aux ressortissants étrangers qui bénéficient d'un traitement fiscal privilégié, indécent, incorrect, et tout simplement non citoyen, car ils ne respectent pas les critères d'équité élémentaires entre les contribuables !
La droite, pendant des années, n'a pas arrêté de nous répéter qu'un franc était un franc et que chaque franc de revenu devait être taxé... Et ici, que voyons-nous ?! Que les contribuables étrangers cherchant à échapper au fisc de leur propre pays trouvent l'asile fiscal à Genève et en Suisse ! Certes, le canton de Genève ne peut certainement pas supprimer lui seul cette mesure, qui est amorale, mais, fondamentalement, les socialistes, ici, cherchent à garantir des revenus supplémentaires au canton de Genève pour éviter l'apparition trop précoce de la catastrophe qui s'annonce. Parce qu'avec la réserve conjoncturelle de 750 millions à 400 millions, s'il n'y a pas de relance, vous êtes très vite en déficit ! Et je vous rappelle que la dette du canton de Genève s'élève aujourd'hui à environ 10 milliards, soit 200 à 300 millions de francs - allons à 350 millions - d'intérêts par an ! Donc, simplement pour payer les intérêts, nous dépensons 300 millions de francs par an. C'est une somme énorme ! Rien que pour cette raison, prendre des risques excessifs en acceptant ce projet de loi tel quel est beaucoup trop dangereux pour les socialistes. Et lorsque les contribuables de la classe moyenne connaîtront peut-être une baisse d'impôts de 1000 F, ils vont finir par le payer en baisse de prestations: en places de crèches qu'ils ne trouvent pas, en enseignement qui sera de moins bonne qualité car le nombre d'élèves par classe va augmenter, et parce que les enseignants seront moins bien rétribués. Et cela, nous ne le voulons pas !
Donc, nous vous demandons d'accepter cette mesure de suppression des forfaits fiscaux.
M. Eric Stauffer (MCG). Quelle désolation d'entendre ces propos concernant les forfaits fiscaux ! Encore une fois je dirai que, quand cette gauche vient prôner qu'il ne faut pas abaisser les impôts parce que cela entraînera une diminution des prestations, c'est juste un mensonge ! Et c'est un tel mensonge que, à vous écouter, chers collègues socialistes, il faudrait croire que derrière chaque Genevois vous voulez un assistant social qui devrait être payé par l'impôt... Eh bien nous, au MCG, nous aimerions que chaque Genevois ait déjà un emploi et qu'il soit en mesure de payer des impôts. Car il y a des gens qui travaillent, mais qui, malheureusement, ne gagnent pas assez ! Et ils ne paient pas d'impôts, puisqu'ils sont en dessous du barème.
Maintenant, vous venez nous bassiner avec les forfaits fiscaux... Mais de quoi parlez-vous ? Vous parlez de gens qui sont fortunés, qui vivent dans des pays où il y a une fiscalité à la mode socialiste absolument aberrante, parce que ce sont des pays qui n'ont pas su gérer l'Etat de manière satisfaisante !
Vous prenez l'exemple de la France, qui était arrivée à près de 75% d'impôts sur les revenus des entrepreneurs, notamment... Et vous voudriez que nous, en Suisse, qui avons su depuis plus d'un siècle gérer notre pays de manière suffisamment performante pour avoir un niveau fiscal parmi - je dis bien «parmi» - les plus bas du monde, eh bien, vous voudriez nous aligner sur les pays européens pour nous noyer dans la masse... Laissez-moi vous rappeler, Mesdames et Messieurs de la gauche, que si vous pouvez être fiers aujourd'hui de ce qu'a construit la Suisse, ce n'était en tout cas pas avec une politique telle que vous la prônez, mais bien grâce à une politique et une économie fortes, et un système fiscal que je qualifierai d'adéquat et de correct.
Alors non ! Le MCG va s'opposer à la suppression des forfaits fiscaux. Pourquoi ? Parce que ces gens qui ne travaillent pas sur Genève mais qui viennent simplement y vivre paient tout de même des impôts. Et ils font tourner les commerces, vous savez, ces choses qui sont des mots étrangers pour vous autres socialistes... Par exemple, il y a le mot «PME». Alors, quand ces gens viennent ici, ils font des achats dans les PME ! C'est bon pour l'économie. Et c'est un système où tous les Genevois, même les plus défavorisés, s'y retrouvent.
Quelle inconscience, donc, que de venir dire qu'il faut supprimer ces forfaits fiscaux ! Eh bien nous, en tout cas la majorité de ce parlement, nous vous laisserons être responsables de vos paroles et, bien sûr, nous demanderons encore une fois le vote nominal. En tout cas le MCG le demandera, tellement les mesures que vous proposez sont incroyables.
Ensuite, vous dites que vous autres, socialistes, défendez à Genève les plus faibles d'entre nous... Laissez-moi relever ce que j'ai entendu dire - en tout cas, c'est la manière dont je l'ai perçu - par notre conseiller d'Etat David Hiler. Il a dit que la loi actuelle sur la fiscalité était injuste, qu'il y avait de vilains impôts qu'il fallait corriger; il a parlé d'injustice, il a parlé de personnes âgées qui sont deux fois taxées, puisque, lorsqu'elles ont payé l'AVS alors qu'elle n'était pas obligatoire, elles avaient déjà payé une partie des impôts... Finalement, Mesdames et Messieurs les socialistes, défendez-vous vraiment la population la plus défavorisée, ces personnes âgées qui, aujourd'hui, n'ont que l'AVS pour vivre ? Et que vous voulez taxer, parce que cela représente 75 millions ? Je me demande vraiment si cette gauche qui est devenue si bourgeoise et qu'on appelle dans les rues de Genève plus communément «la gauche caviar» n'est en fait pas un mythe, mais une réalité ? (Brouhaha.)
Vous dites, Monsieur le député Deneys - Monsieur le président, vous transmettrez ! - que vous ne voulez pas de l'asile fiscal. A vous écoutez, concernant l'asile fiscal, cela donne: «Non non, ça rapporte à Genève, on n'en veut pas; que ces gens aillent ailleurs, parce qu'il y a assez de pays qui proposent des forfaits fiscaux»... En revanche, ce que vous proposez aux Genevois, c'est l'asile pour les dealers de drogue et les pseudo-réfugiés, mais, cette fois, à la charge de l'Etat ! Et je me demande bien où vous allez chercher l'argent pour entretenir ces gens qui, eux, ne rapportent rien au canton de Genève et, au contraire, coûtent beaucoup ! (Brouhaha.)
Je vous l'avais dit il y a quelques séances de cela, Mesdames et Messieurs, à force de convoiter l'argent du riche, vous finirez par voler celui du pauvre ! Et la démonstration est faite ce soir. Tel est le cas, puisque vous vous opposez à la baisse des impôts pour la classe moyenne, la plus défavorisée. Finalement, vos propos électoraux sont mensongers et vous ne méritez pas que les Genevois vous accordent à nouveau leur confiance ! (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). Faut-il abolir les forfaits fiscaux ? Oui. Mais pas ce soir. On a peu discuté de ce problème en commission. Vous avez déposé un projet de loi dans ce sens, et je pense que ce sujet mérite une étude assez approfondie. (Brouhaha.)
Il est vrai que, sur le fond, il y a une inégalité de traitement, avérée. Et les plus riches de nos concitoyens devraient se plaindre, comme ils l'ont fait à Zurich, parce qu'il est foncièrement injuste que, concernant un même revenu - et là, on parle de gens extrêmement aisés - certaines personnes paient moins que d'autres simplement parce qu'elles sont étrangères et ne travaillent pas en Suisse. Ce problème doit être réglé d'abord au niveau fédéral. La conférence des conseillers d'Etat aux finances s'en est saisie cette semaine, et nous sommes satisfaits qu'on s'en occupe. Certains cantons ont abusé de la situation - et je ne parle pas de Genève - on peut les nommer. Par exemple, les Valaisans ont établi des forfaits assez attrayants... Nous pensons que ce n'est pas normal. Il faut donc abolir cette possibilité et régler ce problème au niveau fédéral. Or, ce soir, ce n'est pas le moment de s'y atteler. (Brouhaha.) Par ailleurs, je ne pense pas que cela augmenterait les rentrées. Il me semble même que cela les diminuerait plutôt, parce que ces gens ne sont là pratiquement que pour cette raison. (Brouhaha.)
C'est pourquoi il faut bien étudier cette mesure et l'abolir au niveau fédéral, car c'est le seul moyen de ne pas se tirer une balle dans le pied.
M. Alberto Velasco (S). Comme les citoyens n'ont pas tous ce projet de loi sous les yeux, il est intéressant de lire cet alinéa 2: «Lorsque ces personnes ne sont pas des ressortissants suisses, le droit de payer l'impôt calculé sur la dépense peut être accordé au-delà de cette limite.» Effectivement, en matière d'égalité de traitement, c'est une petite merveille ! Si vous êtes citoyen suisse, vous devez vous soumettre à la loi de l'égalité de traitement; en revanche, si vous ne l'êtes pas, on vous fait une fleur !
Cela est deux fois injuste. Pourquoi ? Parce que ces personnes qui viennent dans notre pays ont en réalité bénéficié chez eux de tout un environnement qui leur a permis d'arriver à leur situation ! Si je prends les sportifs, par exemple, ils ont été formés dans un pays, ils ont pu accéder chez eux au niveau qui est le leur, ils ont bénéficié des infrastructures, ils y ont terminé leurs écoles, etc. Et, lorsqu'il s'agit de rendre la monnaie au pays qui leur a permis cela... Ils «évadent» les bénéfices en se soustrayant aux lois ! C'est valable pour les sportifs, mais aussi pour d'autres. Pour les chanteurs, par exemple. On m'a dit que, à l'époque, la tournée de Johnny Hallyday dans les salles de France avait été financée par le gouvernement français... Alors, c'est marrant de voir que ce bonhomme s'est fait financer ses tournées par le gouvernement français et que, ensuite, il s'est réfugié dans notre pays pour payer moins d'impôts... (Brouhaha.) Là, il y a quand même un petit problème d'éthique. Je ne sais pas comment on peut avaler cela, mais il y a un truc indigeste ! Ici, je m'adresse à mes collègues du PDC et relève que leur conseillère fédérale s'est élevée contre cette injustice. (Brouhaha.) Elle a même déclaré, à un moment donné, qu'il était injuste que M. Federer, notre champion vénéré et aimé, ne bénéficie pas d'une égalité de traitement vis-à-vis de ces réfugiés de l'évasion fiscale... (Remarque.) Et moins bon joueur, effectivement ! Donc, elle trouvait cela injuste.
Il me semble que c'est là une manière de vampiriser les pays. Et il est normal, Mesdames et Messieurs les députés, que les autres pays d'Europe aient parfois un regard disconvenant à notre égard et... (Brouhaha. Le président sonne la cloche.) ...un peu revanchard. Car effectivement, on s'arrange pour fixer chaque fois des dispositions qui leur soustraient des impôts.
C'est vrai qu'on dit: «Oui, mais, dans ces pays, il y a une imposition confiscatoire»... Chaque pays a le droit d'avoir l'imposition qu'il juge nécessaire pour répondre à ses besoins, mais ouvrir les frontières et servir de refuge pour que certaines personnes puissent échapper au fisc de leur pays de résidence et de gains financiers... Il y a quand même là un petit problème de solidarité entre les Etats ! (Brouhaha.) Et je suis désolé qu'une personne qui a bénéficié des avantages d'un pays pour pouvoir s'enrichir parte ailleurs, là où on lui permettra de payer moins d'impôts ! Et «moins d'impôts»... Même beaucoup moins que n'en payent les citoyens du pays dans lequel la personne se réfugie !
Il y a donc là une injustice, une indignité, Mesdames et Messieurs, que l'on ne peut pas accepter ! C'est pourquoi il serait normal et logique que vous participiez à l'abrogation de cet alinéa 2. Merci !
M. Michel Halpérin (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, comme tout le monde le sait, cet impôt sur la dépense a déjà été mis au point il y a très longtemps, à l'intention d'une catégorie très particulière de contribuables: des gens qui n'habitent pas ici, qui ne sont pas de nos concitoyens, qui, généralement, ont atteint ou dépassé l'âge de la retraite, qui n'ont pas d'activité professionnelle dans notre pays et qui, par conséquent, ayant gagné leur argent ailleurs, font le choix de venir le dépenser ici. C'était l'idée qui était à l'origine de ce système. Nous ne sommes pas les seuls à l'avoir, il y en a d'ailleurs de plus sophistiqués et de plus avantageux dans des pays qui n'ont pas craint récemment de placer la Suisse sur la liste des paradis fiscaux, sans s'occuper beaucoup de la poutre qu'ils ont dans l'oeil, si tant est que nous y ayons une paille... Mais laissons ces considérations historiques et penchons-nous sur l'amendement qui nous est proposé.
J'observe qu'aux débats en commission a voté contre cette proposition, telle qu'elle vous est soumise aujourd'hui à l'article 14, une seule personne, socialiste, il est vrai, et que les autres socialistes se sont abstenus. Il faut imaginer que, depuis lors, la sagesse leur est venue de Zurich... Mais s'ils ont envie d'avoir des informations importées de la Limmat, alors je leur conseille l'«Agefi» d'aujourd'hui: les effets instantanés de l'alignement fiscal, la suppression des forfaits à Zurich, semblent déboucher déjà sur une vague de départs.
Tout à l'heure, vous nous avez expliqué avec quelques trémolos, Messieurs et Mesdames les socialistes, que vous voyez fondre la manne genevoise... Vous pleuriez beaucoup pour un bouclier qui va nous coûter 35 millions, disiez-vous. Et voilà que vous proposez d'en rajouter 70 ou 75. C'est ce que nous rapportent les forfaits fiscaux chaque année. Cela ne paraît pas très cohérent.
Nous avons, dites-vous, une inégalité dans la loi; vous trouvez que ce statut est inégal, qu'il est inéquitable. J'observe que vous vous gardez bien de nous donner une définition de l'équité. A première vue, ce qui est inéquitable, c'est ce qui vous paraît inéquitable... C'est une approche qui en vaut beaucoup d'autres, je le conçois volontiers, disons qu'elle est subjective. Mais je voudrais vous proposer ceci, Mesdames et Messieurs les députés: ce qui est inéquitable, c'est que de riches étrangers paient moins d'impôts que de riches Suisses ! C'est la première fois que je vois les socialistes prendre la défense des riches Suisses ! Et cela mérite un salut. Je vous félicite ! (Commentaires.)
Je voudrais vous faire observer une dernière chose, Mesdames et Messieurs: inégalité pour inégalité, vous savez peut-être - et si non, je me réjouis de vous l'apprendre - que, dans notre loi fiscale, nous avons exonéré les premières parentèles d'impôts sur les successions, mais pas pour les invités forfaitaires, qui sont désormais les seuls dans notre canton à payer un impôt de succession, même si, à leur décès, leurs héritiers sont leur conjoint et leur descendance. Le résultat des courses, mes amis, c'est que l'an dernier, en sus des 75 millions habituels et récurrents, nous avons eu une entrée de 160 millions d'impôts de succession, dont vous voulez également nous priver !
Messieurs et Mesdames les auteurs de l'amendement, je vous trouve très légers avec l'argent que vous appelez de vos voeux. Vraiment, votre amendement... Il est bizarre. Bizarre ! Autant qu'étrange. (Applaudissements.)
M. Roger Deneys (S). Je tiens tout d'abord à relever le fait que les députés de l'Entente ont une lecture, ma foi, partielle de ce rapport. Mais ce n'est pas forcément étonnant, parce qu'il est relativement volumineux et comporte deux parties. Evidemment qu'au deuxième débat, à l'examen article par article, les socialistes se sont abstenus quand nous sommes arrivés à l'article 14, parce que ce n'était pas le but de ce projet de loi: le but était d'aider les familles et la classe moyenne. Donc, il ne s'agissait pas d'allumer des feux supplémentaires au sujet de problématiques sur lesquelles nous ne sommes pas d'accord, mais bien d'essayer d'arriver à un consensus allant de la gauche à l'extrême droite, pour favoriser la classe moyenne et les familles. Pour nous, c'était un objectif réaliste, moyennant le problème du bouclier fiscal qui s'adresse aux grandes fortunes, mais qui était réaliste.
Evidemment, quand nous sommes arrivés à l'issue du deuxième débat, que nous avons vu que l'impact de ce projet de loi était de 400 millions, qu'il y aurait encore 100 millions supplémentaires de baisse d'impôts pour les communes, nous nous sommes vraiment inquiétés. Et c'est vrai que, là, nous nous sommes dit: «Mais où pourrons-nous retrouver ces millions qui vont disparaître ?» Le temps consacré au traitement en troisième débat n'a pas permis d'étudier l'hypothèse à l'infini. Nous n'avons même pas pu obtenir des simulations sur quelques chiffres, nous avons pu les avoir sur trois chiffres, et nous avons eu une séance pour en discuter.
Pour ces simples raisons, Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes ont cherché là où les cadeaux aux riches rendaient dangereux les - petits ! - cadeaux pour la classe moyenne. Car ces 150 millions qui vont aux plus riches, la classe moyenne risque de les payer en prestations qui seront facturées davantage. Donc, nous avons cherché ici 60 millions. Les forfaits fiscaux rapportent 60 millions aujourd'hui; en les supprimant, nous n'empêchons pas ces personnes de rester à Genève, nous demandons simplement qu'elles soient traitées... (Brouhaha.) ...comme n'importe quel contribuable ! Et je suis même certain que la plupart d'entre elles resteront à Genève ou en Suisse, parce que c'est dans tous les cas nettement plus avantageux que dans leur pays d'origine. Et, Mesdames et Messieurs les députés, cette mesure vise à récupérer... (Brouhaha. Le président sonne la cloche.) ...l'argent qui a été gaspillé ailleurs que pour les familles ! (Applaudissements.)
M. Gilbert Catelain (UDC). J'aimerais relever rapidement qu'on aurait pu appeler cet article 14 «Bouclier fiscal», puisque, quelque part, il garantit une non-progressivité de l'impôt en fonction du revenu.
Mais j'aimerais surtout souligner que cette imposition d'après la dépense est cadrée. En effet, l'alinéa 3 prévoit toute une série de types de revenus qui font l'objet d'une imposition sur le barème ordinaire, lui-même calculé dans le cadre du barème de l'impôt. On ne peut donc pas dire que cette imposition selon la dépense permet d'échapper totalement à la loi fiscale.
Sur le fond, l'UDC est pour la concurrence fiscale: elle protège l'ensemble des citoyens d'une ponction trop lourde de la part de l'Etat; elle permet de maintenir un certain pouvoir d'achat, et je rappelle qu'au moins à Genève et dans ce pays les riches contribuables étrangers sont imposés - de l'autre côté, vous avez de riches contribuables suisses qui vont passer leur retraite en Angleterre, parce qu'elles sont totalement exonérées de l'impôt... Donc, pour ce motif, je vous invite à refuser l'amendement socialiste.
M. Alain Charbonnier (S). Je ne pensais pas prendre la parole, or je vais le faire car il faut donner des chiffres. Quand j'entends M. Catelain dire que ces gens paient quand même des impôts... Il faut savoir de quoi on parle. Nous avons des exemples connus... Evidemment qu'il y a un secret fiscal, on ne peut donc pas savoir très précisément ce que paient les gens au forfait par rapport à ce qu'ils devraient en regard de leur fortune, etc. Comme je le disais, nous avons des exemples vivants - deux - ils ont été cités dans la presse, ce n'est pas moi qui les ai trouvés. C'est le bon Roger Federer qui, pour le même revenu que Johnny Hallyday paie environ 3 millions d'impôts, alors que Johnny Hallyday en paie 900 000 F. Vous voyez la différence ! Quand on dit que les gens ne doivent pas exercer d'activité lucrative en Suisse, je vous signale quand même que Johnny Hallyday y chante régulièrement. Il y a donc, dans notre pays, des petits arrangements qui ne sont pas supportables. (Brouhaha.) D'ailleurs, d'autres personnes dans cette salle ont toujours trouvé le moyen de s'arranger avec des gens qui viennent dans notre pays pour y planquer leur argent et, surtout, se faire taxer fiscalement d'une façon honteusement basse.
Je vous lirai simplement un passage relevé dans le Mémorial du 19 mai 2005. Voici ce que disait David Hiler, député à l'époque, au sujet des forfaits fiscaux et de leur suppression: «[...] il s'agit d'un principe: pourquoi, diable des personnes aisées - et même très aisées - devraient, parce qu'elles viennent d'un autre pays, bénéficier d'un barème fiscal plus avantageux que celui appliqué à tous les citoyens de ce canton ?» Oui, tous les citoyens, y compris tous les riches ! D'ailleurs, à Zurich, ils ont trouvé cela scandaleux... Et la droite du canton s'est finalement effritée devant l'injustice crasse que provoquent ces forfaits fiscaux !
Je poursuis avec les paroles de David Hiler: «L'équité devant l'impôt est un principe républicain. On peut appeler cela comme on le veut, mais le régime des forfaits fiscaux nous paraît contraire à l'équité, à la limite de la corruption légale.» C'est David Hiler - aujourd'hui conseiller d'Etat, dont on ne remet pas en cause l'intégrité en tant que député auparavant - qui affirmait cela et qui le pense aujourd'hui, on peut lire dans la presse qu'il trouvait ces forfaits fiscaux iniques.
Mme Künzler vient de nous dire que ce n'est pas le jour... «Ce n'est pas le jour» ! Mais attendez... M. Hiler a dit qu'on procédait actuellement à une refonte totale de cette loi sur l'imposition ! Donc, si ce n'est pas le jour, quand est-ce que ce le sera ? Et puis, Mme Künzler oublie peut-être qu'en 2007 elle tenait exactement les mêmes propos que M. Hiler ! Je vous épargnerai une autre lecture, mais cela figure également dans le Mémorial. Mme Künzler expliquait que ces gens payaient trois à quatre fois moins d'impôts que ce qu'ils devraient verser et surtout - surtout ! - que ce que doit payer le citoyen genevois, riche ou pas !
Il y a donc une iniquité monstrueuse devant l'impôt, et c'est pourquoi nous vous encourageons à voter oui à cet amendement. (Applaudissements.)
M. Alain Meylan (L), rapporteur de majorité. Rapidement, je m'exprimerai sur les travaux de la commission. On a traité de ce projet de loi pendant une année; lors d'une certaine séance, on a obtenu des explications, des propositions ont été faites, notamment par les socialistes, et, effectivement, en deuxième débat, ils se sont pour la plupart abstenus, pour revenir en troisième débat - en peu rapidement, environ une semaine avant l'échéance qu'on s'était fixée, et qu'ils connaissaient - sur le traitement de ce projet de loi.
Ce projet visait certains objectifs, lesquels ont été rappelés lors de l'entrée en matière. Il ne s'agissait pas de revoir toute la fiscalité dans son ensemble: il s'agissait de la revoir sur le plan formel, à savoir la réunification des cinq LIPP, en corrigeant certaines inégalités touchant des personnes ciblées. Mais il est vrai que, pendant une année, nous n'avons pas entendu le parti socialiste sur ces projets-là.
Maintenant, je vous propose, au nom de la majorité, de refuser cet amendement.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, on a, à vous entendre, l'impression qu'à Genève les socialistes sont des extraterrestres par rapport aux forfaits fiscaux ! (Exclamations.) Si ! Si, si ! Preuve en est qu'il n'y a pas si longtemps - comme l'a relevé M. Charbonnier - le peuple zurichois a émis une autre appréciation de ce mode de faire ! Et ce n'est pas seulement la «Liste Alternative» qui a proposé l'initiative, mais aussi des gens qui étaient fortunés et trouvaient inacceptable qu'ils doivent, eux, payer un impôt républicain alors que d'autres arrivaient à négocier, comme au souk, un forfait.
Quelle que soit la source d'une grande fortune ou d'un haut revenu, le principe du forfait n'est pas acceptable en termes d'égalité. Bien sûr, les cantons suisses gagnent de l'argent avec cela, Genève comme d'autres. En 2004, l'estimation se montait à 600 millions - certainement que M. Hiler aura des chiffres plus précis. Mais cette somme gagnée, ou plutôt volée, par la Suisse représente, en revanche, une perte énorme, quasi exponentielle, pour les pays d'origine des riches contribuables. Le montant des pertes de ce coulage est difficile à estimer, mais plusieurs organismes ont essayé de le faire et, pour 2004, ils le chiffraient à une dizaine de milliards de francs de pertes de contributions pour les pays ou régions que ces gens ont quittés.
Bien sûr que si l'on pense aux forfaits fiscaux, les personnes qui peuvent prétendre à ces derniers ne sont plus des contribuables mais deviennent des clients, et c'est cela aussi qui est dérangeant: il faut savoir amadouer ces personnes, les attirer sur son territoire... Ce sont des gens qui ne remplissent plus leur devoir de contribuables dans le pays qui leur a permis d'amasser leur fortune et, ainsi, il n'y a précisément pas redistribution, ce qui est le propre de l'impôt. Oui, les directeurs des finances des cantons suisses ne sont pas entrés en matière pour supprimer le forfait fiscal, mais est-ce une raison pour que des élus genevois acceptent de construire une prospérité sur un principe qui a appauvri d'autres pays du monde ?
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement. Vu la majorité, vu l'ambiance de ce soir, on connaît le résultat, il n'y aura pas de miracle... Or, en déposant un projet de loi, la cohérence voudrait, aux yeux des socialistes, que l'on ait un certain courage, que, excusez-moi de le dire, vous n'avez pas... (Brouhaha. Le président sonne la cloche.) ...en termes de majorité. Car, si vous aviez le courage de séparer le bouclier fiscal de ce projet, eh bien, cela commencerait à devenir intéressant !
M. David Hiler, président du Conseil d'Etat. Vous avez raison, Monsieur Charbonnier, je n'ai rigoureusement pas changé d'avis sur cette question... (Remarque de M. Alain Charbonnier.) Non, Monsieur Charbonnier, reprenez les archives vidéo: j'ai dit à la télévision que je pensais qu'il fallait abolir ce système. Je l'ai déclaré une deuxième fois, je l'ai déclaré dans l'«Hebdo»... (Brouhaha.) Le problème, Monsieur Charbonnier, c'est que, quand on se bat pour des principes, il faut les mettre en oeuvre de manière à ne pas causer plus de dégâts en résolvant un problème qu'en ne le résolvant pas ! Et si vous avez bien lu le texte de 2005 que vous avez cité, il y a une deuxième partie. Cette dernière mentionne que si une majorité se trouvait - et elle ne s'est pas trouvée, comme vous le savez - pour abolir ces forfaits, nous ne pourrions pas le faire du jour au lendemain... Non, nous ne pourrions pas le faire du jour au lendemain ! C'est ma déclaration de mai 2005 - parfois, je relis quand même les choses que je dis.
Dans ce cas-là, il faut comprendre que, si votre véritable souhait est de sortir de ce système, vous le devrez de manière organisée: la piste est évidemment d'accorder un certain temps ! Et l'exemple zurichois est pleinement intéressant. Pourquoi la majorité des Zurichois, avec une bonne partie de la droite, a-t-elle aboli les forfaits ? Parce qu'un certain nombre de personnes avaient manifestement une activité lucrative en Suisse, qu'elles bénéficiaient de forfaits dans le canton de Zurich, qu'elles étaient assez voyantes et que certaines avaient quelques difficultés avec la FINMA, ce qui commence à faire un peu beaucoup.
Aujourd'hui, le problème du forfait, c'est qu'il est extrêmement difficile dans le monde actuel de démontrer que quelqu'un a une activité lucrative, alors qu'un portable suffit pour diriger une entreprise à distance. Et ceci devrait d'ailleurs tôt ou tard mettre le système sérieusement à mal, si des cautèles ne sont pas prévues. L'autre danger qu'il y a autour de ce système, c'est qu'un certain nombre de cantons, excusez-moi de le dire, distribuent des forfaits dans des pochettes-surprises ! On est vraiment, là, sur le traitement ordinaire de l'impôt, et vous savez à quel canton je fais évidemment référence. Mais si vous voulez sortir de ce système sans pertes de recettes fiscales, alors vous êtes obligés de prévoir une période de transition d'une bonne dizaine d'années ! De manière, simplement, à arrêter d'accorder de nouveaux forfaits, de permettre aux gens de pouvoir finir leur vie comme ils l'avaient souhaité et de permettre aussi à de nouveaux contribuables de prendre l'espace géographique assez retreint que nous avons à disposition pour les personnes aisées à Genève. Autrement, comme à Zurich, vous allez simplement perdre les recettes... C'est ce qui s'y est passé: les gens vont à Schwytz ou à Nidwald, soit ils vont en Autriche... Donc, les personnes qui sont ici, généralement de culture anglophone ou francophone, iront dans le canton de Vaud ! Où est la morale, de ce point de vue là ?
Si vous voulez vraiment résoudre ce problème, le plus simple serait quand même qu'une initiative soit lancée - et je veux bien en être le premier signataire - parce qu'une bonne partie de la Suisse ne connaît pas ce système - c'est un système genevois, vaudois, et des Grisons ! C'est le seul endroit où on l'applique depuis quatre-vingts ans. Alors, posez la question une fois ! Et si vous voulez en sortir localement, ce dont nos amis vaudois se féliciteront à l'évidence, il faut le faire d'une certaine manière. Vous ne pouvez pas, au hasard d'un projet de loi, le présenter ainsi ! Vous allez déposer un projet de loi - c'est courageux, c'est très bien; la commission doit en discuter; un jour, je suppose, une initiative sera lancée; un contreprojet sera peut-être aussi présenté - c'est une question intéressante. Mais, là, rigoureusement, étant donné qu'on n'avait aucune mesure transitoire permettant de garantir autre chose que des pertes - effectivement 160 millions cette année, mais quand même encore un petit peu l'an prochain, semble-t-il - et, dans ces conditions, ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder, même en étant d'accord, Monsieur Charbonnier.
Pour le reste, sachez tout de même - et reconnaissez-le - que, s'il est un endroit où l'administration fait de son mieux pour vérifier les critères et fixe les seuils les plus hauts, c'est bien Genève. Et c'est effectivement, IFD comprise, des impôts en moyenne à 250 000 francs... C'est-à-dire, quand même - et sauf erreur - quatre fois ce que je dois payer, moi qui ne suis pas absolument à plaindre !
Donc, Mesdames et Messieurs, oui, ce débat doit avoir lieu ! Non, je n'ai pas changé d'avis, ni sur l'opportunité de le faire, ni sur le fait que, malgré tout, on ne met pas à la porte des gens de qualité - à qui on a fait des propositions il y a vingt ou trente ans et qui sont aujourd'hui âgés de septante ou quatre-vingts ans - au motif que, tout d'un coup, on a changé d'avis ! On peut sortir de ce système, on peut donner des délais et on peut respecter aussi un peu la parole donnée. Je vous suggère, dans deux semaines, lorsque vous recevrez les textes de ce Mémorial, de comparer cette déclaration avec celle de mai 2005. (Applaudissements.)
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons nous prononcer sur cet amendement, soit l'abrogation de l'alinéa 2 de l'article 14. Le vote nominal a été demandé par M. Stauffer. Etes-vous soutenu, Monsieur le député ? (Appuyé.)
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 57 non contre 16 oui et 13 abstentions.
Mis aux voix l'article 14 est adopté, de même que les articles 15 à 24.
Le président. Je donne la parole à M. le conseiller d'Etat Hiler, qui l'a demandée.
M. David Hiler, président du Conseil d'Etat. Effectivement, Monsieur le président, non pas pour déposer des amendements, parce que ce sont des sujets techniques - et j'ai annoncé en commission que je le ferais - mais pour vous signaler que, vraisemblablement, concernant la reconduction du plafonnement de la valeur locative à 20%, l'issue d'un procès éventuel n'est pas certaine.
Je ne peux vous le dire, ce n'est pas légal, mais je signale simplement à ce Grand Conseil qu'il se prépare à renouveler dans cette loi une clause dont la majorité des juristes de l'administration fiscale estiment qu'elle est non compatible avec la LHID et que, le cas échéant, la loi que vous adoptez pourrait, sur cet article 24, faire l'objet d'un recours.
Mis aux voix, l'article 25 est adopté, de même que les articles 26 à 31.
Le président. A l'article 32, nous sommes saisis de deux amendements. Nous commençons par la première demande qui concerne la lettre a). Il s'agit d'une nouvelle teneur ainsi exprimée: «Les primes d'assurance-maladie et celles d'assurances-accidents qui ne tombent pas sous le coup de l'article 31, lettre a, du contribuable et des personnes à sa charge, à concurrence d'un montant équivalent, pour l'année fiscale considérée, au double de la prime moyenne cantonale relative à l'assurance obligatoire des soins déterminée par l'Office fédéral de la santé publique par classe d'âge des assurés;» Donc, ce sont les mots «au double de la prime moyenne...» qui sont importants. Je donne la parole à Mme Künzler.
Mme Michèle Künzler (Ve). Merci, Monsieur le président, mais je présenterai mon autre amendement, qui est le plus éloigné. Il devrait ainsi passer en premier, puisqu'il se réfère à la prime moyenne cantonale et non pas au double de la prime moyenne cantonale.
Donc, la déduction...
Le président. Pour nous, c'était l'autre qui était le plus éloigné. Enfin, peu importe...
Mme Michèle Künzler. Non !
Des voix. Non !
Mme Michèle Künzler. La situation actuelle figurant dans la loi que nous avons votée permet la déduction totale de toutes les primes maladie, qu'elles soient obligatoires ou complémentaires. Cet article est clairement non compatible avec la LHID, puisque cette dernière - donc la loi fédérale - prévoit un plafond de primes. Ce projet de loi ne le prévoit pas, donc ce n'est pas compatible.
Maintenant, il faut choisir le plafond qui sera possible. Il nous semble clair que nous sommes à la jonction de deux politiques, une politique fiscale mais aussi une politique sociale, ce que M. Longchamp est venu nous expliquer en commission, et je partage totalement son point de vue. Qu'elle soit fédérale ou cantonale, la politique de la santé incite les gens à agir en vue de diminuer les frais relatifs à la santé, donc à choisir plutôt une prime basse. Alors pourquoi, dans un élan tout à fait contraire, récompenser par la fiscalité les personnes qui choisissent la prime la plus élevée et, encore, des complémentaires ? Concernant les complémentaires, la plupart des citoyens n'en prennent plus, ils n'en ont plus les moyens. La prime ordinaire est bien assez élevée comme ça, c'est donc une infime minorité qui a une prime complémentaire.
C'est pourquoi nous vous invitons à faire comme tous les cantons de Suisse: c'est-à-dire que c'est la prime moyenne cantonale qui est valable pour déduction. En l'occurrence, c'est ce que nous suggérons. C'est exactement le point de vue de M. Longchamp, qui avait proposé la même chose pour ne pas avoir deux politiques divergentes.
Nous vous invitons donc à voter cet amendement-là et, en tout cas, à prendre position sur ce point, la proposition du projet de loi n'étant pas compatible avec le droit fédéral.
M. Roger Deneys (S). J'ai envie de compléter les propos de Mme Künzler, parce que la question essentielle ici - et je crois même qu'en l'occurrence les socialistes cherchent à vous rendre service en essayant de ne pas faire capoter ce projet de loi - est de fixer un plafond. En effet, une association d'usagers se préoccupant des coûts de la santé à Genève pourrait déposer un recours contre cette disposition et, simplement, avec un effet suspensif, empêcher l'entrée en vigueur de cette loi.
Alors, la position maximaliste de la droite, qui a consisté à dire: «Nous acceptons la déduction de tous les frais d'assurance-maladie, quels que soient les montants, y compris pour des assurances privées pour les plus riches» n'est tout simplement pas acceptable d'un point de vue social, n'est pas acceptable d'un point de vue de politique de la santé, et n'est évidemment pas acceptable d'un point de vue légal !
Mesdames et Messieurs les députés, les socialistes pensent que la prime moyenne est une solution raisonnable. Le double de la prime moyenne laisse une marge de manoeuvre, parce qu'il y a évidemment la question du changement de caisse, des assurances qui font des cadeaux aux «bons risques», et, donc, il faut réadapter les primes l'année suivante... Les mécanismes de la LAMal sont particulièrement complexes à suivre. Pour cette raison, l'essentiel est de voter une disposition qui plafonne le montant déductible des dépenses d'assurance-maladie.
Nous socialistes pensons que la prime moyenne laisse une marge de manoeuvre, mais le double est dans tous les cas nettement plus raisonnable que votre proposition qui fait des cadeaux aux plus riches.
Le président. Merci, Monsieur le député. Comme nous sommes saisis de deux amendements exactement à la lettre a) de l'article 32, l'un demandant le double de la prime, l'autre la prime moyenne, nous discuterons des deux, puis les voterons séparément. Je donne la parole à M. Stauffer.
M. Eric Stauffer (MCG). Pour rebondir sur les propos de Mme Künzler qui évoquait les primes, je voulais juste vous informer que la résolution concernant les primes d'assurance-maladie que ce parlement a adoptée et adressée à Berne a été refusée par les Chambres fédérales au motif que ce n'était pas aux parlements cantonaux de demander quoi que ce soit, mais à l'autorité des fonctionnaires des assurances-maladie à Berne de décider !
Voilà, c'était juste pour vous donner cette petite information et pour vous dire que, finalement, les Chambres fédérales n'ont que faire des pensées des Genevois et du taux de primes qu'ils paient.
M. Jean-Michel Gros (L). Mesdames et Messieurs les députés, en matière de déduction des primes d'assurance-maladie, l'article 9, alinéa 2, lettre g) de la loi sur l'harmonisation prévoit la fixation d'un plafond déterminé par le droit cantonal sous forme d'un montant ou d'un forfait. Alors, pour être sûr de se conformer à la loi fédérale, il aurait ainsi suffi de fixer un énorme montant dans notre loi, par exemple 20 000 F par année. C'est un plafond, on peut l'imaginer comme ça.
Or, ce que veulent le groupe libéral et la grande majorité de la commission fiscale, c'est que les contribuables puissent déduire l'ensemble de leurs primes d'assurance-maladie, qu'elles soient obligatoires ou complémentaires. Ce n'est que justice et, en plus, cela ne change rien par rapport au système actuel. Donc, il n'en résulte aucune diminution des recettes fiscales.
Le plafond exigé par Berne est ainsi exprimé dans la loi que vous avez sous les yeux, à concurrence du montant, pour l'année fiscale considérée, de la prime effectivement payée par le contribuable. Certaines personnes doutent de la conformité d'un tel plafond avec les exigences fédérales: nous maintenons que, oui, il est conforme.
Mais venons-en au fond du problème. Les rares opposants en commission - deux commissaires en moyenne - considèrent que cette notion n'encourage pas les assurés à choisir les caisses les meilleur marché et, ainsi, favorise l'augmentation des primes. Il faut savoir que changer de caisse maladie constitue aussi un risque d'augmentation des primes, souvent à très court terme. (Brouhaha.) Lorsque plusieurs milliers d'assurés se précipitent vers la caisse qui affiche les primes les plus avantageuses, celle-ci ne peut souvent pas assumer cet afflux soudain et se voit contrainte d'augmenter ses primes une année ou deux plus tard. C'est le risque que j'ai vécu moi-même avec une caisse gérée par AgriGenève, dont je suis membre du comité.
Il faut ensuite penser aux personnes âgées, qui bien souvent ne savent pas quels sont leurs droits et qui restent fidèles à leur caisse maladie, qu'elles connaissent depuis longtemps et dont elles apprécient les services à la clientèle. Le choix de souscrire à des franchises élevées pour payer des primes plus basses a été d'autre part très échaudé par certaines décisions du Conseil fédéral, qui, pour des raisons sociales, a décidé de diminuer drastiquement l'intérêt des franchises. Malgré tout, le projet de loi ne peut décourager le contribuable à se tourner vers une caisse meilleur marché, car il faut rappeler qu'il ne s'agit ici que d'une déduction fiscale sur l'ensemble du revenu. (Brouhaha.) Le citoyen gagnera de toute façon de l'argent en choisissant la caisse la plus avantageuse. Mais le plus important reste la possibilité de déduire l'ensemble de ces assurances complémentaires. Celles-ci sont chères, notamment pour les personnes âgées, mais les personnes qui ont souscrit permettent à l'Etat de réaliser des économies. Oui, quelqu'un qui se fait hospitaliser en clinique coûte moins cher qu'un patient de l'Hôpital cantonal ! Alors encourageons, comme c'est le cas actuellement, les gens à conclure de telles assurances.
Les personnes âgées, qui ont payé toute leur vie une assurance complémentaire, certes premièrement pour leur confort personnel en cas de maladie, mais aussi en induisant des économies pour le budget de l'Etat, ne doivent pas risquer de voir leurs cotisations devenir non déductibles de leur déclaration d'impôts. Ceci touche la classe moyenne, voire moyenne supérieure, et c'est celles que l'ensemble de ce projet de loi vise. Les amendements aujourd'hui proposés par les groupes socialiste et Vert n'ont obtenu en commission qu'une voix - c'est à la page 292 du rapport.
Le groupe libéral vous demande ainsi de confirmer le vote de la commission fiscale et de refuser ces amendements.
M. Roger Deneys (S). Je reviendrai sur les propos de M. Gros et j'aimerais relever que, lorsqu'il dit: «Nous aimerions que tous les frais médicaux soient déductibles», cela prouve bien qu'il ne s'agit pas d'un amendement en faveur de la classe moyenne ! Ce sont aussi les frais de la classe aisée - par exemple les liftings du côté de Cologny et de Champel, qui sont aussi pris en charge... Et cela, ce n'est pas la classe moyenne qui se le paie, Monsieur Gros, je suis désolé de vous l'indiquer !
Et lorsque vous dites que ce projet de loi est en faveur de la classe moyenne, démonstration est faite que ce n'est pas le cas !
M. Antoine Bertschy (UDC). L'assurance-maladie est obligatoire: du moment qu'elle l'est, c'est une forme d'imposition. De ce fait, si nous ne pouvons pas la retirer de notre déclaration fiscale, il y a une double imposition. Il est absolument inacceptable que nos concitoyens soient doublement imposés pour un montant qu'ils sont obligés de payer ! Pour cette raison, le groupe UDC refusera cet amendement.
M. Renaud Gautier (L). Monsieur le président, juste une remarque liminaire: je trouve très désagréable la constance avec laquelle un député socialiste se livre à des attaques personnelles lors d'un débat. Le dernier exemple qu'il vient de nous en donner est de dire qu'ici est la preuve qu'il ne s'agit pas d'une loi sociale et que la proposition de mon collègue Gros consisterait simplement a payer des liftings pour les gens de Cologny ou de Champel... Cela n'est juste pas recevable, quand on entend parler sérieusement d'un problème.
Je vous rends donc attentif, Monsieur le président, au fait que, si vous voulez que ce débat se déroule bien, vous devez empêcher ce genre de remarques: elles sont vraiment hors de propos, elles sont désobligeantes pour beaucoup de gens et, en plus de cela, fondamentalement erronées ! (Brouhaha.)
M. Alain Meylan (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, j'aimerais savoir où l'on en est, car il me semble qu'il y a un petit problème de procédure. Mme Künzler a présenté son amendement consistant à déduire une fois la prime moyenne, et il y a un deuxième amendement... Apparemment, le débat a été mené sur ce point-là jusqu'à maintenant. Or un autre amendement est annoncé par le parti socialiste, qui vise à déduire jusqu'à concurrence de deux fois la prime moyenne. J'aimerais juste que la situation soit clarifiée. Parlons-nous maintenant de ces deux amendements ? Voterons-nous plus tard sur l'amendement des Verts, puis sur celui des socialistes ? (Remarques.)
Le président. Nous avons discuté des deux amendements, mais nous les voterons l'un après l'autre: nous commencerons par le double de la prime et, ensuite, nous voterons sur la prime moyenne. (Remarques.)
M. Alain Meylan. Si je peux me permettre d'apporter l'avis du rapporteur de majorité, laquelle s'effrite déjà... Et ce n'est pas pour rien qu'elle s'effrite, car nous avons eu en commission passablement de discussion, lors du débat de préconsultation, puis lors des deuxième et troisième débats !
Je partage tout à fait l'avis de M. le député Gros sur l'interprétation qu'on peut faire et qui a été celle de la majorité de la commission à la fin des débats: déduire ! Et avoir la possibilité de déduire l'ensemble des primes d'assurance-maladie de base et complémentaires dans leur intégralité. C'est-à-dire la situation actuelle. La LHID est en vigueur depuis pas mal d'années, et, jusqu'à preuve du contraire, nous n'avons pas eu connaissance de contestations à l'encontre de notre législation cantonale par rapport à cette manière de procéder. Il serait donc assez surprenant que l'on ait, pour d'autres raisons occultes, une opposition sur ce principe.
Néanmoins, je crois qu'il subsiste quand même - et cela a été dit - un certain risque lié à cette situation. C'est pourquoi, quant à réaliser un projet de loi que d'aucuns disent exemplaires, il faudrait, à ce stade de la discussion, que l'on puisse procéder à une petite réflexion sur cet aspect du projet de loi.
Je vais donc coiffer une casquette un peu particulière pour vous proposer ceci: par gain de paix et pour éviter le minuscule risque qui pourrait exister quant à une contradiction découlant de la LHID, je suggère d'accepter la proposition du groupe socialiste, soit de prendre en compte jusqu'à concurrence de deux fois la prime moyenne cantonale comme plafond de déductibilité des assurances-maladie.
Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. C'est vrai qu'en abaissant le seuil de déductibilité de 1 à 0,5% du revenu imposable auquel on a déjà appliqué les déductions possibles on offre une prise en charge ou une déduction plus rapide des frais de santé. Mais il faut toujours relever que les déductions profitent majoritairement à des revenus plus élevés. Or voilà que, derrière ce seuil, l'idée était de pouvoir déduire également des cotisations sans limites.
D'amples discussions ayant eu lieu maintenant, je vais aussi jouer un rôle un peu particulier. Compte tenu du dépôt de l'amendement des Verts, les socialistes proposent la chose suivante: ils retirent leur amendement et demandent un sous-amendement à l'amendement des Verts, c'est-à-dire de reprendre l'amendement des Verts en proposant non pas la prime moyenne cantonale, mais... Je reprends le texte: «Les primes d'assurance-maladie et celles d'assurances-accidents qui ne tombent pas sous le coup de l'article 31, lettre a, du contribuable et des personnes à sa charge, à concurrence d'un montant équivalent, pour l'année fiscale considérée, à la prime relative à l'assurance obligatoire des soins déterminés par l'Office fédéral de la santé publique par classe d'âge des assurés;». Cela permettrait à chaque contribuable de pouvoir déduire sa prime LAMal de base sans pouvoir déduire ses complémentaires, sachant que les primes LAMal représentent la prime moyenne cantonale qui a un montant plafond et qu'il existe des primes d'autres assurances avec des montants plus élevés.
La proposition est que la prime LAMal de chacun des contribuables puisse être déduite.
Le président. Monsieur Meylan, désirez-vous reprendre la parole ?
M. Alain Meylan (L), rapporteur de majorité. Oui, merci, Monsieur le président. En termes de procédure, je ne sais pas où l'on en est... Mais naturellement que si l'amendement socialiste est retiré, et c'est celui que je proposais au nom de l'Entente qui a déposé le projet de loi, je suis obligé de le reprendre à mon compte et de le soumettre au vote.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
Le président. Nous sommes saisis d'un troisième amendement concernant ce même alinéa, soit la lettre a) de l'article 32. Il émane du MCG qui reprend les mots: «[...] au double de la prime moyenne...» et se termine par: «...les assurés genevois».
Nous allons commencer par nous prononcer sur l'amendement mentionnant uniquement la prime moyenne. Puis, je donnerai la parole à M. le conseiller d'Etat. Ensuite, nous voterons l'amendement demandant le double de la prime moyenne pour les assurés genevois. Et nous terminerons par l'amendement demandant le double de la prime.
M. David Hiler, président du Conseil d'Etat. «Majorité effritée», Monsieur Meylan ? Le Conseil d'Etat lui aussi, sur ce sujet, a parlé à deux voix. Si vous donnez la priorité à la politique de la santé, à la réduction des coûts de la santé, il faut accepter la prime moyenne. Par prime moyenne, on entend évidemment dans l'application la prime du groupe d'âges considérés; on ne va pas, pour un enfant, calculer une déduction qui serait celle d'une personne de cinquante ans. Et c'est ainsi que, quoi qu'il en soit, l'administration l'interprétera.
Ce n'est pas exactement ce qui a prévalu dans la majorité du Conseil d'Etat, étant donné qu'il nous a paru souhaitable de plutôt pousser les gens à prendre une complémentaire - et de la prendre jeune, car après, vous savez comment c'est... On n'est pas facilement accueilli dans une complémentaire si l'on a été malade. Donc, il nous a semblé que pour la diversification du tissus médical et pour un certain nombre de maladies aussi - pouvant poser problème si l'on n'a que l'assurance obligatoire - il fallait accepter la complémentaire. Cependant, il y a un argument premier que j'aimerais rappeler: il faut fixer un plafond. Pas seulement parce qu'on risque un recours, mais parce que, quand on est un Grand Conseil, on respecte le droit fédéral. Car, si nous ne respectons pas ce dernier, je ne vois pas pourquoi les jeunes gens de Genève respecteraient les lois à leur tour ! A un moment, il y a des choses - on peut défendre la légitimité contre la légalité quand on est jeune, quand on manifeste et qu'on veut changer le monde - mais il y a des choses, lorsqu'on est dans les institutions, qu'on se doit de les faire respecter.
Deuxième point: la position de M. Longchamp par rapport à celle de M. Hiler s'est singulièrement renforcée quand même. Pour une raison: si l'on a été si généreux en matière de primes d'assurance, c'est parce qu'on avait des barèmes beaucoup trop élevés. Ce sont des compensations à la genevoise ! Oui, nous sommes hors marché sur le taux de la fortune... Monsieur Gros, au détail près, on est supposé évaluer les immeubles à leur valeur vénale, et on ne le fait simplement pas ! En réalité, on ne sait même pas si l'on est hors marché ou pas. Ce qui est sûr, c'est qu'en promotion économique on a sérieusement l'air d'être hors marché. Eh bien, là, c'est la même chose ! Dès lors que le système fiscal qui ressort est plus favorable ici pour les couples mariés - jusqu'à 200 000 F - que dans le canton de Bâle et dans le canton de Vaud, qu'il est plus favorable pour les célibataires que dans le canton de Vaud et que dans le canton de Bâle, et que, jusqu'à des revenus assez respectifs, il est parfaitement concurrentiel à Zurich - pas à un million, non, on n'en est toujours pas là; et pas à 400 000 F pour un célibataire, non, et j'en suis assez content - mais il me semble que ce cadeau, parce qu'on est par ailleurs trop élevé, n'a plus beaucoup de sens !
Votez l'amendement «une fois la prime d'assurance-maladie», qui sera interprétée dans la classe d'âges considérés; votez «deux fois la prime moyenne», qui sera interprétée de la même manière, mais, je vous en supplie, votez quelque chose qui fixe un plafond ! Pas parce qu'il y a un risque - il n'y en aura pas avant cinq ans - mais tout simplement parce qu'on se doit de respecter le droit fédéral à Genève aussi.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous avions trois amendements; nous n'en avons plus que deux, puisque le MCG a retiré le sien - une certaine fatigue se fait sentir...
Nous commençons par nous prononcer sur celui de Mmes Künzler et Captyn. Article 32, lettre a) (nouvelle teneur), après «Sont déduits du revenu», voici le texte: «a) les primes d'assurance-maladie et celles d'assurances-accidents à concurrence du montant équivalent à la prime moyenne cantonale...».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 54 non contre 30 oui.
Le président. Le deuxième amendement de la minorité, repris par M. Meylan, stipule la chose suivante: «Sont déduits des revenus: a) les primes d'assurance maladie et celles d'assurances-accidents qui ne tombent pas sous le coup de l'article 31, lettre a, du contribuable et des personnes à sa charge, à concurrence d'un montant équivalent, pour l'année fiscale considérée, au double de la prime moyenne cantonale relative à l'assurance obligatoire des soins déterminée par l'office fédéral de la santé publique par classe d'âge des assurés;».
Mis aux voix, cet amendement est adopté par 55 oui contre 11 non et 17 abstentions.
Mis aux voix, l'article 32 ainsi amendé est adopté par 54 oui contre 20 abstentions et 7 non.
Troisième partie du débat: Session 09 (juin 2009) - Séance 47 du 12.06.2009
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande encore une petite seconde d'attention ! Le Bureau a pris la décision suivante: demain à 17h, nous poursuivrons nos travaux relatifs au projet de loi 10199. Nous étudierons ensuite l'initiative 142, que nous devrons absolument terminer pour une raison de délai. Si nous n'y arrivons pas, nous devrons siéger samedi matin.
Je vous souhaite une bonne rentrée et vous donne rendez-vous demain à 17h.
La séance est levée à 23h15.