République et canton de Genève

Grand Conseil

La séance est ouverte à 20h30, sous la présidence de M. Eric Leyvraz, président.

Assistent à la séance: MM. François Longchamp, Robert Cramer et Charles Beer, conseillers d'Etat.

Exhortation

Le président. Mesdames et Messieurs les députés, prenons la résolution de remplir consciencieusement notre mandat et de faire servir nos travaux au bien de la patrie qui nous a confié ses destinées.

Personnes excusées

Le président. Ont fait excuser leur absence à cette séance: MM. David Hiler, président du Conseil d'Etat, Laurent Moutinot, Pierre-François Unger et Mark Muller, conseillers d'Etat, ainsi que Mmes et MM. David Amsler, Guillaume Barazzone, Caroline Bartl Winterhalter, Mariane Grobet-Wellner, Michel Halpérin, Olivier Jornot, Claude Marcet, Yves Nidegger, Pascal Pétroz, Louis Serex, René Stalder, Eric Stauffer et Daniel Zaugg, députés.

Annonces et dépôts

Néant.

M 1822
Proposition de motion de MM. Henry Rappaz, Eric Stauffer, Roger Golay, Sébastien Brunny : Réintroduisons l'hymne national dans nos écoles

Débat

Le président. Si la parole n'est pas demandée, nous allons procéder au vote de cette proposition de motion... Non, la parole est demandée par Mme Favre. (Exclamations.)

Mme Christiane Favre (L). Mesdames et Messieurs les députés, notre hymne national ou nos chants patriotiques font partie de ces connaissances que l'on peut parfaitement transmettre à l'école. Elles appartiennent à notre culture. Apprendre l'hymne national est d'ailleurs inscrit dans le programme de l'école primaire. Cela dit, on peut aimer son pays sans connaître toutes les strophes de cet hymne, il ne faut pas tout mélanger. En outre, l'apprendre est une chose, mais le faire chanter deux fois par mois pendant toute la scolarité relève d'une autre volonté. Les arguments de la motion sont d'ailleurs explicites: sensibiliser les élèves à la notion de patrie et les encourager à accomplir leurs devoirs civiques. Mais pour arriver au même résultat, il y a d'autres méthodes, moins simplistes et plus intéressantes, telles que les cours d'histoire ou d'éducation civique. Pour intégrer des enfants naturalisés, il existe aussi d'autres manières de faire, et l'école tout entière est un facteur d'intégration. Et pour que les footballeurs de la «Nati» soient moins gauches lorsqu'ils chantent l'hymne suisse devant les caméras de télévision, pourquoi pas ? Mais si l'on tient à régler ce problème, il y a des solutions plus rapides que d'attendre que les joueurs de l'équipe suisse soient tous issus de l'école publique genevoise ! Je suis sûre qu'ils sont tous capables d'apprendre au moins deux couplets d'ici au prochain match, si l'ASF par exemple l'exige.

Ces arguments ne sont donc pas très convaincants. Mais si nous refusons cette motion, c'est encore pour une autre raison. C'est parce qu'elle est signée par ceux-là mêmes qui stigmatisent les frontaliers à longueur de textes parlementaires, qui veulent instaurer la ségrégation scolaire pour les élèves non francophones et qui demandent que les SDF étrangers soient parqués dans des lieux de rétention gardés par l'armée. Ces dérapages nous laissent à penser que le but de cette motion est loin d'être innocent. Par conséquent, nous la refuserons parce que nous refusons que notre hymne national soit pris en otage dans ce genre de discours. (Applaudissements.)

M. Olivier Sauty (MCG). Que de sous-entendus ! Mais passons. J'aimerais faire un petit rappel. Nous sommes en été 1841. Le lundi 22 novembre, quatre citoyens zougois entonnent ce qui allait devenir le «Cantique suisse» en présence de son compositeur, le prêtre uranais Alberik Zwyssig... Rassurez-vous, je serai bref. Deux ans plus tard, en 1843, le nouveau chant patriotique paraissait déjà dans le livret des festivités des «Zürcher Zofinger», l'association d'étudiants la plus ancienne de Suisse, à l'occasion de l'anniversaire de l'entrée de Zurich dans la Confédération. Toujours en 1843, le chant de Zwyssig était présenté à un public enthousiaste lors de la Fête fédérale de chant, également à Zurich. Très vite, les choeurs d'hommes du pays l'ajoutent à leur répertoire, et on peut l'entendre dans le cadre de fêtes à caractère patriotique. Néanmoins, le Conseil fédéral rejettera les motions qu'il reçoit entre 1894 et 1953 visant à élever le «Cantique suisse» au rang d'hymne national. En effet, il est d'avis que ce n'est pas un décret des autorités qui doit en décider, mais bien le peuple par l'utilisation régulière du chant en question. Finalement, en 1961 le Conseil fédéral décida que le chant de Zwyssig, qui avait l'avantage d'être une création purement helvétique, allait devenir l'hymne national suisse. Cela fut décrété officiellement, Mesdames et Messieurs, le 1er avril 1981, et ce n'est pas un gag ! Voilà pour le petit rappel du passé.

Maintenant, concernant les arguments qui ont été énoncés par ma préopinante, je ne vois pas de sous-entendus dans notre motion. Je pense que l'identité nationale passe par une représentation et que le chant est quelque chose de très bien. Alors si l'on peut identifier la Suisse par rapport à un chant, je ne vois pas où est le problème. Et je vois encore moins où est le problème que l'on demande à l'enseignement public de faire en sorte que les élèves fréquentant nos écoles puissent l'apprendre.

Quant à l'invite proprement dite - comme vous pouvez le constater, cette motion a été déposée le 16 mai 2008, je n'étais donc pas là et ne l'ai pas signée - je reconnais que la manière dont elle est formulée n'est pas franchement fantastique. (Remarque.) C'est pourquoi je ne peux pas vous demander de la soutenir en l'état. Mais je vous demanderai, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir la renvoyer à la commission de l'enseignement, afin qu'elle étudie un amendement qui soit plus conforme et qui contienne peut-être moins de sous-entendus.

M. Eric Bertinat (UDC). Comme la plupart d'entre vous, je suppose, je suis un peu étonné de voir cette proposition de motion émaner d'un mouvement qui prône l'indépendantisme de Genève et qui aurait dû proposer, à mon sens, le «Cé qu'è lainô» plutôt que l'hymne national. Cela étant dit, est-ce que cette motion est superfétatoire ? Est-il inutile de rappeler, principalement aux enseignants, qu'ils doivent apprendre l'hymne national aux élèves dans les écoles genevoises ? Personnellement, je ne crois pas. Et je le crois d'autant moins après avoir assisté à un match de football il y a quelques jours à la Praille, assis dans la tribune, derrière le but, et entouré d'enfants qui avaient à tout casser entre 10 et 15 ans, car je peux vous assurer qu'ils ont montré qu'ils aimaient chanter ! Alors pourquoi les enseignants n'apprennent-ils pas l'hymne national comme c'est demandé ? Cette motion soulève le problème. En dehors des arrière-pensées ou des procès d'intention que l'on peut faire au parti de M. Stauffer, cette question demeure: on n'apprend pas l'hymne national, et l'on aimerait bien savoir pourquoi.

Cette motion est aussi l'occasion de rappeler que l'hymne national peut faire partie d'un programme d'intégration. Je veux bien que l'on intègre tous les étrangers en commençant par leur donner beaucoup d'informations et par faire en sorte qu'ils se sentent vraiment bien chez nous, mais s'intégrer, c'est aussi ressentir ce que ressent la société du canton. Et l'hymne national, à mon avis, doit faire partie d'une démarche intégrative.

J'ai une dernière remarque. En discutant de cette motion avec quelques-uns d'entre vous, j'ai entendu un député me dire: «L'hymne national, c'est quand même très nationaliste !» Alors on peut utiliser les termes que l'on veut: nationaliste, patriotique, etc., mais il ne faut pas non plus pousser le bouchon trop loin.

Malgré tout, je profite de cette motion pour dire que l'on souhaite ardemment que l'hymne national soit appris et chanté, par exemple en fin d'année. Cela peut être l'occasion, pourquoi pas. Reste que cette motion, comme je l'ai dit, est superfétatoire, puisque le programme d'enseignement demande que cet hymne soit appris. Simplement, on sonne un peu les cloches ce soir en demandant qu'il soit effectivement enseigné.

Le président. Merci, Monsieur le député. Je rappelle que nous sommes en débat de catégorie II: trois minutes par groupe. La parole est à M. Garcia.

M. Pablo Garcia (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais partager avec vous une petite anecdote à laquelle cette motion m'a fait penser. J'étais avant-hier à bord d'un tram en direction de Lancy lorsque je croise un père et son fils qui se rendent au match de l'équipe nationale à la Praille. Le fils demande à son père de nouer le drapeau suisse autour de son cou. Une fois l'opération effectuée, le fils s'écrie: «Ah, je deviens suisse !» Avec un déguisement, une cape, on devient d'une certaine façon quelqu'un d'autre, un super héros. La réaction de cet enfant m'a fait penser à la réflexion du MCG contenue dans cette motion, selon laquelle on est suisse lorsqu'on porte les attributs de la nationalité: quand on tient un drapeau ou que l'on chante l'hymne national. Pourtant, Mesdames et Messieurs les députés, la nationalité et le sentiment d'appartenance ne se réduisent pas à un passeport ou à un chant.

J'aimerais continuer dans cet exemple «égocentré» en vous parlant de ma famille qui, comme vous le savez, a été naturalisée suisse, mais qui est aussi binationale. Et je vais honteusement vous avouer que ma famille ne connaît pas toutes les strophes de nos hymnes nationaux. Cela fait-il de nous de mauvais citoyens, des maladaptés ? Cela fait-il de mon père un mauvais chef d'entreprise, lui qui a fait le choix de l'embauche en période de crise ? Cela fait-il de ma mère une mauvaise citoyenne, elle qui a essayé d'élever ses enfants dans le respect de la société dans laquelle ils vivent ? Cela fait-il de votre serviteur un mauvais député, lui qui estime que l'engagement au service de la collectivité est la suite naturelle de sa naturalisation ?

Je vais vous dire ce que signifie être suisse pour ma famille, une famille qui ne connaît pas toutes les strophes de notre hymne national. C'est aimer un pays qui est fier de son multiculturalisme, de sa tradition de solidarité, de ses valeurs humanistes, de sa démocratie, surtout lorsque l'on naît sous une dictature. C'est aimer un pays où des réfugiés peuvent espérer construire une vie nouvelle et où chacune et chacun d'entre nous a les opportunités et la chance de réaliser ses rêves. Vous comprendrez pourquoi je me sens suisse; vous comprendrez pourquoi je me sens patriote; et vous comprendrez pourquoi je vous invite à rejeter cette motion.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Jacques Follonier (R). Mesdames et Messieurs les députés, je n'ai jamais vu une motion aussi restrictive ! Pourquoi chanter l'hymne national une ou deux fois par mois ? Pourquoi pas tous les jours ?

Une voix. Comme aux Etats-Unis !

M. Jacques Follonier. Pourquoi pas à genoux ?! Cela élèverait peut-être l'âme de nos élèves ! (Rires.) Pourquoi pas dans les entreprises ? On aurait l'impression d'être en Corée du Nord ! Et finalement, on peut même se poser la question... (Remarque.) ...pourquoi pas au Conseil d'Etat ?

Une voix. Au Grand Conseil !

M. Jacques Follonier. ...cela pourrait lui faire du bien ! (Remarque.) Non, ne vaut-il pas mieux avoir une larme émue qu'un rabâchage impie sur une chanson qui devrait rester la fierté de notre nation ? Mesdames et Messieurs, on peut avoir un sourire ému, mais oublions cette motion. C'est d'ailleurs ce que nous allons faire.

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. de Battista, à qui il reste quarante secondes.

M. Régis de Battista (S). Je vais essayer de m'y tenir, merci. Je voudrais brièvement souligner deux ou trois points au sujet de cette proposition. On a l'impression que c'est une blague. Et elle est inutile: on sait très bien que forcer des jeunes à apprendre l'hymne national et à le réciter ne fonctionne absolument pas. Donc ce serait vraiment dommage d'insister de cette façon.

Je voudrais encore dire ceci avant de clore. Il est vrai que les notions de patriotisme et de nationalisme, si l'on va beaucoup plus loin dans le sujet - ce qui nécessiterait bien plus de dialogue - sont des valeurs très personnelles. Elles dépendent de l'origine des personnes, de leur parcours de vie, etc. Et dans un pays démocratique comme la Suisse, ce n'est pas forcément en chantant l'hymne national que l'on est un bon patriote. On est patriote en faisant bien d'autres choses. Dans ce sens-là, je crois vraiment qu'il faut ne pas entrer en matière sur cette motion.

M. Michel Forni (PDC). Nous sommes saisis ce soir d'une invite qui est une symphonie un peu déconcertante: l'apprentissage de l'hymne national et l'obligation de s'y exercer au moins deux fois par mois. Veuillez m'excuser mais, en termes de physiologie, c'est une fonction qui est un peu restrictive. (Rires.) Alors pourquoi imposer ce genre de sport à des spécialistes de l'éducation ? Personnellement, je pense que le patriotisme est un phénomène important, mais il peut devenir un enjeu politique que je qualifierai de «politicardisant». Et s'il en fallait une preuve encore ce soir, on pourrait parler de «suissité». Cette tentative d'imposition par un coup de force à l'égard des enseignants découle d'une forme d'autohypnose très «satisfactionnelle».

D'un autre côté, on peut l'utiliser en mettant des affiches et en collant des quolibets; c'est moins porteur et la symphonie se décline plus difficilement. Mais l'attachement à la patrie et une sensibilisation à de futures responsabilités pourraient bénéficier, comme cela est dit, d'un coup de baguette magique par la répétition de notre chant national, également pour des futurs candidats à la naturalisation - thème d'ailleurs développé dans l'exposé des motifs.

Ce type de motion n'apporte rien ! Cela coûte beaucoup en temps et en deniers publics. Les directives du DIP, si vous les relisez, sont très claires. L'enseignement de l'hymne national se fait généralement à partir de la quatrième primaire et celui du «Cé qu'è lainô», qui nous est cher, à partir de la deuxième. Je n'ai pas trouvé trace du «Picoulet», vous m'en excuserez !

Cette argumentation occulte plusieurs prises de position du Conseil fédéral. Or, si depuis 1981, comme cela a été dit tout à l'heure, notre hymne national est perçu par les uns comme une splendeur, par les autres avec ses défauts, il reste très populaire, et nous en sommes fiers. Cette démarche du MCG sous-estime également des critiques qui ont été formulées. Je rappelle qu'il y a eu des amendements au niveau fédéral et que certains ont même proposé de remplacer notre hymne national par le «Roulez tambours» d'Henri-Frédéric Amiel. Si l'on va un peu plus loin, nous trouvons du zurichois. A Zurich, vous vous souvenez qu'il y a Leonhard Widmer, qui en a rédigé le texte et s'est associé à un moine uranais. Et nous retrouvons bien sûr notre source nationale.

Cette motion n'épargne rien, elle exaspère et n'apporte rien. D'autre part, elle oublie de souligner le rôle des parents, qui peuvent participer à l'étude de l'hymne national. Il est vrai que chanter un hymne national peut permettre de forger des convictions, de légitimer des aspirations. Mais souvent - et comme cela semble être le cas ce soir - cela permet de faire du show télévisé, du spectacle narcissique. C'est la dictature de l'audimat.

Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.

M. Michel Forni. Je termine, Monsieur le président. Je préférerais simplement que l'on dise, si l'on veut gagner en crédibilité: «Ecoute, retiens et crois.» Ou mieux, si vous êtes un peu plus jeune: «Vois, compare et juge», et ensuite chante. Sous le couvert d'une intervention pédagogique, le MCG nous vend un habillage «relooké» d'un patriotisme synonyme de nationalisme. Je vous invite donc à renoncer à cette proposition. (Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à Mme Hagmann. Vous avez une minute, Madame.

Mme Janine Hagmann (L). Mesdames et Messieurs les députés, est-ce que vous croyez que le département de l'instruction publique a attendu le MCG pour établir le programme de chant qu'il donne à ses enseignants ? J'ai pris la peine de le rechercher et je vais vous dire exactement ce qui figure dans le programme du DIP, que chaque enseignante et enseignant reçoit et exécute fidèlement, selon les consignes qui lui sont données. (Remarque.) En deuxième primaire, la strophe 1 du «Cé qu'è lainô». En troisième primaire, les strophes 1 et 2 de cette chanson. En quatrième primaire, les strophes 1, 2 et 4 du «Cé qu'è lainô» et la strophe 1 du «Cantique suisse». En cinquième primaire, les strophes 1, 2, 3 et 4 du «Cé qu'è lainô» et les strophes 1 et 2 du «Cantique suisse». Et en sixième primaire, reprise des quatre premières strophes du «Cé qu'è lainô» et des deux premières du «Cantique suisse». Donc cette motion est absolument inutile et, comme l'a dit ma collègue, nous la refuserons. (Exclamations. Applaudissements.)

Le président. Merci, Madame la députée. La parole est à M. Golay. Vous avez dix secondes !

M. Roger Golay (MCG). Je serai très bref. L'hymne national se veut rassembleur, dans les moments de joie et de difficulté. (Commentaires.) Certains cantons ont voté ce type de texte sans se poser d'autres questions. Puisque le programme est si développé, je me pose la question suivante: pourquoi autant de jeunes ne savent-ils pas chanter l'hymne national à la sortie de la scolarité ?

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Roger Golay. Nous voulons simplement...

Le président. Vous devez terminer, Monsieur le député !

M. Roger Golay. Je termine, Monsieur le président. Nous voulons simplement lancer un signal fort, à l'intention de l'ensemble des Confédérés, de notre attachement à la Confédération et à notre patrie.

M. Pierre Losio (Ve). Je dois dire qu'il est un peu paradoxal que je prenne la parole sur ce sujet, puisqu'avec mon collègue Bavarel nous sommes ultra, archi, complètement minoritaires dans notre groupe, lequel va refuser cette motion. Néanmoins, j'ai été très attentif aux arguments développés par mon collègue de Battista. Je pense que l'attachement que l'on peut avoir à son pays est effectivement quelque chose de très particulier, une conviction intime, et qu'il peut se manifester de différentes façons. Par ailleurs, j'ai également une longue expérience de l'école primaire, ainsi que ma collègue Janine Hagmann, qui a très clairement expliqué ce qui figure au programme. Mais pour être vraiment honnête, on doit reconnaître que, dans les faits, ce programme est diversement appliqué dans les classes. Heureusement, on a créé des chorales où l'on apprend des chansons de Charles Trenet, de Boby Lapointe, etc., ce que je trouve tout à fait salutaire. J'ai moi-même dirigé, pendant je ne sais combien d'années, des chants pour les promotions, parce que personne ne voulait s'y coller. Il fallait bien le filer à quelqu'un ! Et, d'après mes constatations, je ne suis pas certain que le plan d'études - ainsi qu'il s'appelait à l'époque - soit appliqué de manière aussi concrète que vous l'avez décrit.

Ce qui me gêne dans cette motion, c'est qu'elle a une tentation totalitaire. En effet, j'ai toujours pensé que le totalitarisme, ce n'était pas d'interdire, mais d'obliger. Or cette motion vise à contraindre et à obliger. Cela dit, l'ultraminorité que nous représentons, mon collègue Bavarel et moi-même, pense qu'il y a tout de même certaines choses que l'on pourrait aussi pratiquer dans les classes. Je pense à certaines magnifiques chansons de Jaques Dalcroze. Peut-être connaissez-vous: «Oh, que nous t'aimons Genève, ton Salève au flanc rugueux, le Rhône pur et l'Arve grise, et là-haut la vieille église qui veille sur le lac joyeux.» Cela peut paraître un peu désuet, mais c'est un attachement que l'on peut avoir.

En conclusion, notre groupe va s'opposer à cette motion de manière résolue. Quant à l'ultra et l'archiminorité que nous représentons, nous allons nous abstenir. (Rires.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, nous sommes saisis d'une demande de renvoi à la commission de l'enseignement. C'est sur cette demande que nous nous prononçons en premier lieu.

Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1822 à la commission de l'enseignement, de l'éducation et de la culture est rejeté par 61 non contre 11 oui.

Mise aux voix, la proposition de motion 1822 est rejetée par 56 non contre 7 oui et 9 abstentions.

M 1872
Proposition de motion de Mmes et MM. Patricia Läser, Gabriel Barrillier, Michel Ducret, Michèle Ducret, Jacques Follonier, Claudine Gachet, Jean-Marc Odier, Patrick Saudan, Charles Selleger pour l'introduction d'un cours de « compétences au quotidien » dans le cadre de la mise en oeuvre du Plan d'Etudes Romand (PER) à Genève

Débat

Le président. Nous sommes toujours en débat de catégorie II: trois minutes par groupe plus trois minutes pour l'auteur de la proposition. La parole est à Mme Läser.

Mme Patricia Läser (R). Mesdames et Messieurs les députés, cette motion vous a certainement fait sourire... (Remarque.) ...rire ou peut-être même pleurer. Elle n'est, je l'avoue, pas très sexy. On se sent transporté dans les années septante. Pourtant, elle est tout à fait réaliste et d'actualité. Certains considérants de cette motion vous rappellent les problèmes de nos jeunes: obésité, «malbouffe», endettement, mais aussi intolérance et violence. Ces problèmes n'ont apparemment rien en commun. Et pourtant, ils découlent tous d'un manque de connaissances de base, d'un défaut d'apprentissage de règles indispensables à la vie de tous les jours. Tous les groupes présents dans cette salle ont déposé des motions suggérant des remèdes. Celle que nous vous soumettons vous propose de la prévention.

Aujourd'hui, au travers des 15% de marge de manoeuvre cantonale prévue dans le PER - plan d'études romand - cette motion vous propose de réintroduire des cours de «compétences au quotidien», appelés de façon ringarde «économie familiale». Que l'on soit fille ou garçon, on y apprend qu'un ménage est une version microscopique du monde de l'économie globale et donc qu'il y a des règles à respecter - ces règles que l'on n'apprend plus et qui, malheureusement, ne sont pas innées. Pour être progressiste et moderne, la formation doit prendre en compte les aspects individuels et communautaires de la vie de tous les jours. Les enfants et adolescents acquièrent ainsi les outils pratiques et indispensables pour la suite de leur vie. Ils seront capables de se nourrir correctement, d'être des consommateurs attentifs, de fonctionner en réseau et de gérer leur budget.

Ces cours ont été stoppés il y a des dizaines d'années à Genève, bien avant les autres cantons romands, laissant des enseignements à option ici ou là. Aujourd'hui, on se rend compte que la gestion d'un ménage contient tout ce qu'il faut afin d'être prêt pour la vie, quel que soit le futur qui nous attend. Ces compétences acquises au fil des âges et rappelées de manière régulière tout au long de la scolarité, en allant à chaque fois un peu plus loin, permettront peut-être de prévenir certains dérapages. Je vous demande donc de renvoyer cette motion à la commission de l'enseignement afin qu'elle puisse regarder sereinement la piste qu'il y a peut-être à explorer pour prévenir, au lieu de sans cesse guérir, des maux qui viennent en grande partie d'une méconnaissance des gestes de base de notre quotidien.

Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)

M. Antoine Bertschy (UDC). Comme vous le savez, le PER est encore en consultation, et voilà que le parti radical veut déjà prendre les 15% d'autonomie qui resteront au canton pour dire ce que l'on devra en faire. Et qu'est-il proposé ? Aux yeux de l'UDC, ce n'est pas vraiment ce que nous aimerions que l'on fasse de ces 15 tout petits pourcents. «Vie en société», tel est le premier chapitre. La vie en société doit-elle être apprise par l'école ou par la famille ? La question se pose... (Brouhaha.) L'essentiel de la vie en société pour un enfant doit d'abord s'apprendre au sein de la famille, et cela continue naturellement à l'école. Quant à la santé, qui constitue le deuxième chapitre, nous lisons cette phrase: «De nos jours, un enfant sur cinq souffre d'obésité.» Donc le parti radical demande par là que les enfants apprennent à se nourrir à l'école. Pourquoi pas ? Mais à notre sens, encore une fois, la cellule familiale est là pour ce genre de choses. Un enfant apprend à se nourrir... (Brouhaha.) On espère qu'il se nourrit le plus souvent possible au sein de sa famille. (Le président agite la cloche.)

Ensuite, il y a d'autres propositions, qui sont un peu plus intéressantes, par exemple les activités manuelles. Je sais que mes souvenirs d'école sont quelque peu lointains, mais il me semble néanmoins que les activités manuelles s'apprennent déjà à l'école. Y a-t-il vraiment besoin de proposer une motion pour déjà encombrer ces 15 tout petits pourcents de liberté qu'il restera au DIP pour élaborer un programme scolaire ? Aux yeux de l'UDC, ce n'est pas le cas, raison pour laquelle nous refuserons cette motion.

Mme Janine Hagmann (L). Mesdames et Messieurs les députés, nos amis radicaux fourmillent d'idées pour mettre au goût du jour l'enseignement primaire à Genève. Nous nous en réjouissons beaucoup, car je me souviens très bien du temps pas du tout lointain où le langage que vous teniez, Mesdames et Messieurs les radicaux, était beaucoup plus simple. Vous disiez que l'école était faite pour apprendre à lire, à écrire et à compter. Et lors de l'une de mes interventions où j'avais osé parler de «savoir-être» - ce qui n'est pas inclus dans votre motion - et de «savoir-faire», vous m'aviez dit que j'avais un affreux langage digne de la FAPSE ! Alors bravo, Mesdames et Messieurs, si aujourd'hui vous avez une vision beaucoup plus large de la notion de formation !

Vous demandez ainsi des compétences au quotidien dans des domaines que je peux rapidement énumérer: la société, la santé, les activités manuelles, la culture, l'écologie, l'économie. N'avez-vous pas oublié les droits de l'Homme ? Je vous rappelle simplement que l'accord HarmoS, que vous avez voté il y a peu de temps, définit avec précision les finalités de la scolarité obligatoire. Or, dans HarmoS, la formation de base comprend les langues, les mathématiques et les sciences naturelles, les sciences humaines et sociales, la musique, les arts et les activités créatrices, le mouvement et la santé. Est-ce que rien de ce que vous avez proposé ne figure dans l'un de ces chapitres ? Si ! Tout y figure, y compris «[...] le développement d'une personnalité autonome, ainsi que l'acquisition de compétences sociales et du sens des responsabilités vis-à-vis d'autrui et de l'environnement», comme le prévoit l'article 3, alinéa 3, de l'Accord intercantonal sur l'harmonisation de la scolarité obligatoire - HarmoS. Alors votre motion n'est-elle pas un doublon ? N'est-elle pas seulement un alibi en ce moment ?

Je vous rappelle tout de même qu'actuellement à l'école primaire, en plus des cours donnés, chaque enseignant a droit, pour ses élèves, à tout ceci: le brossage des dents, les cours de circulation, les pompiers, l'éducation sexuelle, la posture du dos, l'information sur les chiens dangereux, la diététique, l'apprentissage chez les petits de la manière idoine de se moucher, la préparation des cadeaux pour la fête des mères, éventuellement pour Noël... (Remarque.) ...la préparation de la fête des promotions, de l'Escalade...

Mme Fabienne Gautier. Et chanter !

Mme Janine Hagmann. Et chanter, évidemment, le «Cantique suisse» ! (Rires.) A un moment donné, nous, libéraux, disons: «Mais attendez, halte là !» Je vous rappelle l'objectif de l'école publique. L'article 4 de la loi sur l'instruction publique stipule: «L'enseignement public a pour but, dans le respect de la personnalité de chacun: a) de donner à chaque élève le moyen d'acquérir les meilleures connaissances dans la perspective de ses activités futures et de chercher à susciter chez lui le désir permanent d'apprendre et de se former;» C'est vrai qu'aujourd'hui l'enseignement ne doit pas seulement instruire, mais faire grandir. C'est bien la réflexion qu'ont menée - avant vous, Mesdames et Messieurs les radicaux - les instigateurs du PER.

Le président. Il faudra terminer, Madame la députée.

Mme Janine Hagmann. C'est pour cela que cette motion - bien que basée sur une belle réflexion, je vous en félicite - est inutile. Tout figurait dans le rapport que nous avons voté sur HarmoS. (Applaudissements.)

M. Pablo Garcia (S). Mesdames et Messieurs les députés, cette proposition de motion pose, on l'a dit, des questions louables. Comment donner aux jeunes enfants les outils nécessaires pour s'épanouir et comprendre la société qui les entoure ? Mais la réponse la plus éclatante que nous pouvons offrir à cette motion est le travail quotidien, le soutien que les enseignantes et enseignants apportent aux élèves genevois. Notre école a depuis longtemps intégré ces attentes des familles et des enfants. Elle remplit en effet largement cette mission, qui est celle de transmettre des savoirs et de former la jeunesse, mais aussi d'enseigner le «vivre ensemble», un enseignement peut-être plus important que le savoir-vivre demandé par cette motion.

Cette sensibilisation aux pratiques de santé, de culture, de responsabilité individuelle et collective se retrouve en filigrane dans les programmes de l'instruction publique. Pour s'en convaincre, comme l'a fait Mme Hagmann, il suffit de s'informer sur les ateliers organisés par les diététiciens du service de santé de la jeunesse de Genève auprès des écoles ! Le SSJ conseille les équipes éducatives sur les besoins sanitaires de l'enfant et sur le développement des jeunes. De plus, ce service du DIP donne des séances d'information sur ces thèmes auprès des parents et des familles. Sans parler, évidemment, des cours sur l'hygiène de vie, du soutien psychologique ou de la prévention sur les toxico-dépendances. Je laisse donc les motionnaires s'informer de tout cela sur le site internet de l'Etat de Genève pour tout renseignement complémentaire.

Nous avons donc ici une motion louable, mais qui n'apporte rien de nouveau, aucune proposition nouvelle; une motion louable, qui salue un travail important et nécessaire effectué par des personnes dignes d'admiration et de soutien. Alors plutôt que de dicter la matière des cours aux professeurs, faisons déjà en sorte de leur donner tout le budget nécessaire, tout le soutien budgétaire nécessaire à ces tâches supplémentaires que nous souhaitons leur donner. Parlons d'abord des moyens, Mesdames et Messieurs les députés, avant de demander aux professeurs de sauver le savoir-vivre.

Mesdames et Messieurs, les socialistes reconnaissent ce travail. Nous savons à quel point ces compétences du quotidien sont d'ores et déjà transmises de génération en génération, car nous n'oublions pas que l'école n'est pas uniquement un lieu de savoir, mais aussi un lieu majeur d'apprentissage de la sociabilisation et du «vivre ensemble». Cette motion ne fait que reconnaître ce que l'instruction fait déjà, mais sans apporter de propositions nouvelles. Voilà pourquoi nous n'entrerons pas en matière.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je pense que cette motion est très bien ! (Exclamations. Rires.) Elle confirme justement tout ce qui existe déjà au DIP. Ainsi, c'est un hommage à notre école publique, qui a besoin d'être revalorisée. Donc c'est précisément l'occasion de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat pour montrer que le département de l'instruction publique a déjà tout fait pour répondre à ces préoccupations. Je crois que la population a besoin d'être rassurée; et elle verra par une réponse circonstanciée du Conseil d'Etat que nos chères petites têtes blondes n'ont pas de souci à se faire, parce que tous ces domaines sont pris en compte, que les enfants sont en de bonnes mains et que, avec l'accord intercantonal, on va encore renforcer ces actions. Nous avons par conséquent tout pour nous réjouir.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je suis bien évidemment contre cette motion. (Brouhaha.) J'estime que ce n'est pas à l'Etat d'éduquer les enfants, mais bien aux parents. Quand on veut être parent, on doit l'assumer avec tout ce que cela implique. On n'a pas de leçon à recevoir et chacun est libre d'éduquer son enfant comme il l'entend. D'ailleurs, quand on refuse d'informer les jeunes sur les violences, car tout est déjà fait selon vous, je trouve plutôt mal placé de vouloir jouer les moralisateurs envers les parents au sujet de l'éducation. Je suis d'accord que certains adultes ont seulement été nourris et sont mal élevés. (Brouhaha.) Mais je ne crois pas que vous soyez en mesure de vous prendre pour les rois de l'éducation. L'Etat instruit au travers de l'école et les parents éduquent: c'est leur rôle. Je vous enjoins donc, Mesdames et Messieurs, de refuser cette motion, car l'éducation de nos enfants est libre et regarde les parents.

M. François Gillet (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, au nom du groupe démocrate-chrétien, j'aimerais dire que, parfois, nos amis radicaux nous inquiètent. (Commentaires. Rires.) Ils ont déposé une initiative sur l'accueil continu des élèves qui entre dans d'infinis détails. Et là, ils nous proposent d'ores et déjà de décider comment nous utiliserons les 15% de marge que nous laisse le plan d'études romand pour introduire toute une série de domaines qui, à nos yeux, sont pour la plupart de la responsabilité des familles. Ces dernières devraient conserver - mais peut-être cela échappe-t-il aux radicaux - une certaine marge de manoeuvre et d'autonomie dans l'éducation de leurs enfants. Parfois, nous avons l'impression que, pour les radicaux, ce serait à l'Etat d'éduquer les enfants, et non plus aux familles. Nous avons donc quelques inquiétudes par rapport à cette façon de voir les choses...

Maintenant, au sujet du plan d'études romand - soyons sérieux ! - nous venons à peine de terminer la procédure de consultation. Il n'a même pas encore été présenté à la commission de l'enseignement. D'après ce que j'ai pu en lire, j'aimerais préciser que de nombreux aspects que vous énumérez dans votre motion sont déjà intégrés à des domaines d'enseignement qui figureront dans le plan d'études romand dans le cadre d'un certain nombre de disciplines. Je pense par exemple aux activités manuelles, que vous citez, à l'écologie, à l'économie... Ce sont des aspects qui sont intégrés - et je pense que c'est une bonne chose - à des domaines d'enseignement dans des cours qui ne se focaliseront pas que sur ces aspects, même s'ils sont importants.

Ensuite, il y a effectivement des compétences, Mesdames et Messieurs les députés, qui ne s'acquièrent pas à l'école ! Il y a les compétences qui s'acquièrent par la pratique, par le vécu que l'on peut avoir dans sa famille, dans le monde associatif, à l'extérieur de l'école. Tout ne doit pas être appris à l'école dans un cadre forcément structuré. Beaucoup de choses s'apprennent en marge de l'école, et c'est très bien. Que cela continue ainsi.

En conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, même si les objectifs de cette motion sont louables, il est prématuré d'imaginer affecter maintenant déjà les 15% de marge qui nous restent à ce type de domaines. Et à nos yeux, il est important qu'il reste une latitude aux familles et à tout le tissu parascolaire et périscolaire pour amener les enfants à acquérir ces compétences, aussi importantes soient-elles.

M. Jacques Follonier (R). Mesdames et Messieurs les députés, il faudrait quand même regarder les choses en face. J'entends des gens, comme Mme Hagmann, dire que l'accord HarmoS règle ces problèmes. Ce n'est pas vrai. Quant au PER - je vous entends tous en parler - je n'ose pas demander qui d'entre vous a lu ce PER, les deux cents pages de ce magnifique classeur blanc. M. Gillet et moi, en tout cas, les avons lues. (Remarque.) Certainement M. Beer aussi, effectivement. Je donne raison à M. Gillet: une partie de ces points sont traités. Néanmoins, cela nous laisse le temps de réfléchir sur ce que nous pourrions faire.

Je vais vous donner un exemple. Il y a six mois, dans une ZEP - une zone d'éducation prioritaire - une classe française a été choisie, alors qu'elle ne connaissait absolument rien à la cuisine ni au service, pour préparer un repas à la ministre de l'enseignement, Mme Valérie Pécresse, et au ministre de la santé. Les élèves ont mis trois mois, sous la férule de Cyril Lignac, à préparer ce repas magnifique pour lequel ils tremblaient tous. Lorsque ce repas a été servi, il a été somptueux et a fait réfléchir d'une manière importante la ministre française de l'enseignement.

Eh bien cette petite motion a exactement le même but, d'une manière beaucoup plus courte: faire réfléchir notre ministre de l'éducation sur le bien-fondé ou la possibilité éventuelle d'utiliser ces fameux 15%, que nous pourrions d'ores et déjà imaginer, construire et préparer. Dès lors, je pense que l'on peut, sans que cela pose grand problème, renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.

Le président. Merci, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'une demande de renvoi de cette proposition de motion 1872 à la commission de l'enseignement... (Remarque.) Madame Läser, vous demandez la parole ? Il vous reste trente secondes. (Exclamations.)

Mme Patricia Läser (R). Je retire ma demande de renvoi en commission et rejoins mes collègues pour un renvoi au Conseil d'Etat.

Une voix. Bravo ! (Exclamations. Commentaires.)

Le président. Voilà une bonne nouvelle ! Merci, Madame la députée. Nous allons donc nous prononcer sur cette proposition de motion 1872.

Mise aux voix, la proposition de motion 1872 est rejetée par 41 non contre 11 oui et 5 abstentions.

P 1543-A
Rapport de la commission de l'enseignement supérieur chargée d'étudier la pétition pour le soutien de l'Institut d'Architecture de l'Université de Genève
Rapport de majorité de M. Guy Mettan (PDC)
Rapport de minorité de Mme Virginie Keller (S)

Débat

Le président. Nous sommes en débat de catégorie II: quatre minutes par groupe et pour les rapporteurs.

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. J'attends que Virginie veuille bien me rejoindre à la table des rapporteurs... (Exclamations.) Mais oui ! Je ne parlerai pas trop longtemps, parce que je vais lui laisser la parole. J'aimerais seulement vous dire que la commission a pris son temps pour traiter cette pétition. Je l'ai dit, il y a eu cinq présidentes et présidents qui se sont succédé pour l'examiner. (Brouhaha.) Mais je voudrais rappeler que, si elle a pris son temps, c'est parce que dans l'intervalle elle a dû se préoccuper de quatre projets de lois qui ont été déposés et qui sont venus perturber l'examen de cette pétition... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)

Le président. Une petite seconde, Monsieur le député. Mesdames et Messieurs, un peu de silence, s'il vous plaît... (Brouhaha.) S'il vous plaît ! Merci.

M. Guy Mettan. Il y a d'abord eu un projet de loi déposé par Mme Leuenberger sur une faculté de l'environnement et un autre projet sur un institut de l'environnement. Et dans le cadre de l'examen de ces objets, nous avons eu l'occasion d'auditionner les milieux qui représentaient l'Institut d'architecture. Donc il n'est pas tout à fait exact de dire qu'on ne les a pas auditionnés. On l'a fait, mais dans le cadre de l'examen d'autres projets de lois.

Ensuite, le Conseil d'Etat a déposé un projet de loi qui refondait totalement l'Université de Genève, et la commission a jugé prioritaire d'examiner d'abord cette nouvelle loi sur l'université et de la voter. Et c'est vrai que cela a perturbé l'examen de cette pétition. Mais je voulais tout de même rappeler que la commission de l'enseignement supérieur a reçu à plusieurs reprises les milieux représentant l'Institut d'architecture et qu'elle s'est plusieurs fois alarmée du sort de cet institut, et notamment de son secteur d'urbanisme. Je reconnais que, de ce point de vue là, on peut avoir le sentiment d'un certain gâchis, parce que cela a pris du temps et que l'urbanisme, en tout cas le rôle de l'urbanisme à Genève, n'a au fond pas été tout à fait reconnu comme il aurait dû l'être. Mais comme maintenant cet institut n'existe plus depuis plusieurs années, la majorité de la commission a estimé que cette pétition n'avait plus de raison d'être.

Mme Virginie Keller (S), rapporteuse de minorité. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité, de reconnaître que ce dossier est un vrai gâchis. C'est pour cela que le parti socialiste a souhaité faire un rapport de minorité. Nous savons bien que l'institut est aujourd'hui fermé; toutefois, il ne l'est pas depuis plusieurs années, comme le dit le rapporteur de majorité, mais depuis l'été 2008. Donc ce n'est pas si lointain que cela. Nous étions alors encore en train de discuter des différents projets qui occupaient la commission, notamment du projet d'institut ou de faculté de l'environnement.

Ce qui a dérangé le parti socialiste dans cette affaire... Enfin, le parti socialiste a été dérangé tout au long de cette affaire ! Car nous avons estimé que l'Institut d'architecture n'avait pas été considéré comme un vrai partenaire dans l'étude, la conception ou la réalisation de ce que l'on nomme aujourd'hui l'Institut des sciences de l'environnement, et l'on n'a pas reçu beaucoup de clarifications sur ce qui aujourd'hui existe et est proposé dans le cadre de l'Université de Genève. Non seulement l'Institut d'architecture n'a pas été considéré comme un véritable partenaire, mais en plus le parti socialiste a estimé qu'il y avait un certain flou autour de toute la question des professeurs et des postes. Des nominations ont été effectuées au sein de l'université pour le futur Institut des sciences de l'environnement alors même que le Grand Conseil n'avait pas voté les projets et que nous étions encore en discussion à l'époque.

Lorsqu'en commission on en est arrivé à étudier la fin de toute cette histoire, le parti socialiste a demandé une ultime audition afin de pouvoir tout simplement prendre acte de la façon dont cela s'était terminé, c'est-à-dire savoir quels professeurs ont pu être réaffectés à de nouveaux postes dans le cadre de l'institut, comment la transition allait se faire pour les étudiants encore en cours de formation, et surtout, Mesdames et Messieurs les députés, ce que l'on allait faire des budgets et des locaux. Sur cette question, en effet, on n'en a pas su beaucoup plus, finalement, que le fait que le budget de l'institut allait coulisser dans le futur Institut des sciences de l'environnement.

Donc nous avions tout simplement demandé à la commission d'attendre que le président du département, Charles Beer, nous donne des explications - car ce jour-là, il était malheureusement absent, ce qui arrive - et de pouvoir auditionner la direction de l'Institut d'architecture de manière à clore ce débat proprement, en respectant les travailleuses et travailleurs de cet institut, les étudiants et tout le corps intermédiaire.

Voilà pourquoi nous avons décidé de faire un rapport de minorité. J'espère que vous allez le voter et renvoyer ce dossier au Conseil d'Etat pour que nous puissions savoir comment cela s'est terminé et pour que les personnes qui ont travaillé longtemps dans cet Institut d'architecture et qui ont beaucoup donné à Genève puissent tout simplement avoir un minimum de considération de la part de ce parlement. J'espère donc que vous serez d'accord de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.

De plus, je pense qu'il est important que ce parlement se rende compte que nous sommes dans un canton qui bouge. Nous avons besoin de bons urbanistes et de bonnes urbanistes, de personnes qualifiées dans la question de l'aménagement du territoire et du paysage. Actuellement, la formation à Genève n'existe plus vraiment, ou elle existe un peu, de façon partielle. Nous avons perdu des enseignements, ce qui est toujours à déplorer dans une région. Mais nous espérons que, comme il avait été promis et prévu par le Conseil d'Etat, un certain nombre de ces compétences en aménagement du territoire, en urbanisme et en paysage seront fortement représentées dans le programme de l'institut.

Voilà ce que le groupe socialiste voulait dire ce soir à ce parlement. Je vous demande de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, pour que nous puissions avoir un rapport en bonne et due forme et terminer dans le respect cette malheureuse affaire.

M. Alain Etienne (S). Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais effectivement prendre la parole après la rapporteure de minorité, bien que nous soyons du même parti et qu'elle ait déjà dit beaucoup de choses. Pour le parti socialiste, cette pétition est un véritable crève-coeur, un déchirement. Comme vous l'avez rappelé, Monsieur Mettan, la commission a pris beaucoup de temps pour la traiter, mais le but d'une pétition est d'essayer de faire véritablement pression et de porter le plus loin possible une préoccupation de la population. Les pétitionnaires étaient venus à l'époque, en 2005, pour dire qu'il fallait s'occuper de cet institut, qui était en train d'être démantelé. Une sorte de rouleau compresseur arrivait et il fallait vraiment agir. Aussi, dire que l'on a pris du temps parce que l'on attendait le vote de la loi sur l'université n'était pas très respectueux des préoccupations des pétitionnaires.

Je profite de cette occasion pour rappeler les spécificités de cette formation postgrade. Il s'agissait notamment de valoriser les particularités de la Genève internationale, avec lesquelles elle doit pouvoir vivre. Il y a effectivement le projet d'agglomération... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) Mme Keller l'a rappelé, beaucoup de choses se passent actuellement au niveau de l'aménagement du territoire, en relation avec le projet d'agglomération et la région transfrontalière qui est en train de se faire.

En outre, la sauvegarde du patrimoine moderne était enseignée à Genève. Alors la question que le parti socialiste souhaite poser au Conseil d'Etat est de savoir où, maintenant, se fait cet enseignement. En fait, quelle place est donnée aux enseignements ayant fait la renommée de l'Institut d'architecture ? Sont-ils repris dans le projet du nouvel institut ? Où en est le projet de ce nouvel Institut des sciences de l'environnement et du développement durable ? Et enfin, Mme Keller l'a demandé, comment ont été réglés les départs des personnes qui travaillaient à l'Institut d'architecture ? Le but du renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat est donc bien d'obtenir des réponses de sa part.

En conclusion, le parti socialiste est extrêmement déçu par la fin de l'histoire de cet institut; il s'agit effectivement d'un énorme gâchis, c'est pourquoi les socialistes vous invitent à voter le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

Le président. Merci, Monsieur le député... (Brouhaha.) Un peu de silence, s'il vous plaît ! La parole est à M. Weiss.

M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, il est évidemment triste d'intervenir sur le sort des morts. Et au fond, c'est ce à quoi nous amène cette pétition. Elle nous amène à parler de quelque chose d'un temps qui n'est plus, qui ne reviendra pas et dont on peut avoir une certaine nostalgie... (Remarque.) «Qu'ils n'ont jamais connu...», dit mon ami Gautier. Mais elle nous pousse aussi à réfléchir sur au moins trois questions fondamentales.

La première concerne la collaboration lémanique en matière de formation dans le domaine de l'architecture. Certains ont oublié qu'il existe à Genève une excellente école d'architecture dans le cadre de la HES. J'aimerais ici en louer les capacités, les compétences de ses diplômés et leurs possibilités d'intégration dans le marché du travail, ces derniers étant très fortement recherchés par les employeurs potentiels. En outre, il y a aussi la formation des architectes et des urbanistes à l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, dont on sait la renommée, qui dépasse la Versoix, et parfois même le Jura ! Par conséquent, s'agissant de cette école, l'on devrait se rendre compte qu'il est parfois nécessaire d'unir nos forces plutôt que de vouloir maintenir des souvenirs du passé, certes excellent, mais probablement obsolètes.

La deuxième réflexion porte sur l'université en tant que telle: il s'agit de savoir quel doit être son propre développement. Doit-elle se vouloir comme une université qui déploie ses activités dans tous les domaines de la connaissance et de la formation universitaire ? Doit-elle se spécialiser dans certains d'entre eux ? Ou bien doit-elle faire presque tout, mais pas tout à fait tout ? C'est ce qu'a décidé le Conseil de l'Université lorsque, bien avant 2008, Madame Keller Lopez... (Remarque.) Pardon ?

Une voix. C'est Mme Keller !

M. Pierre Weiss. Madame Keller ex-Lopez, veuillez m'excuser... (Exclamations.) Avant 2008, l'université a décidé de ne plus ouvrir la possibilité de former des architectes à Genève, la dernière volée ayant fini en 2008. J'allais dire: la fin de la dernière volée. Vous nous direz certainement plus précisément quel a été le coût de formation des derniers étudiants de la dernière volée après une dizaine d'années de présence à l'université, lorsqu'ils sont enfin sortis de cette école d'architecture.

La troisième réflexion de fond, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, concerne l'autonomie de l'université. Ici, l'on a eu affaire à une décision interne de l'université. Et nous, députés, devrions être amenés à nous prononcer sur ce que devrait et ne devrait pas offrir l'université comme voies de formation. A nouveau, ce débat est dépassé, puisqu'avec la nouvelle loi nous avons tout simplement reconnu à l'université la capacité d'être autonome dans ce que doit être son offre de formation. Au fond, un député socialiste l'a dit de façon tout à fait transparente, le débat sur cette pétition en cache un autre...

Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.

M. Pierre Weiss. Je conclus, Monsieur le président. Ce débat en cache un autre: celui concernant l'institut ou la faculté de l'environnement. On a voulu, finalement, comme dans l'Inde traditionnelle, essayer de passer d'un corps à un autre, de donner une nouvelle vie sous un autre nom. Eh bien, on a échoué, il faut savoir l'admettre. Il y a un moment où il faut savoir tourner la page et terminer une intervention. Merci, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous allons donc nous prononcer sur cette pétition 1543... Monsieur Etienne ? Il vous reste vingt secondes.

M. Alain Etienne (S). La stratégie de M. Weiss est d'intervenir toujours en dernier pour essayer d'emballer tout cela... (Commentaires.) «Cela a été châtré !» Quelle expression ! Je voulais seulement dire - ce que vous n'avez pas compris, Monsieur Weiss - que le parti socialiste attend des réponses du Conseil d'Etat. Et tout l'intérêt du renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat est précisément d'avoir des réponses, de clore le sujet et de savoir ce qui s'est véritablement passé, pour enfin avoir la conscience tranquille et pouvoir faire «le deuil» de l'Institut d'architecture.

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, ce débat n'est effectivement pas très frais du point de vue de l'actualité. Il représente néanmoins une page que nous devons savoir tourner correctement par ce débat parlementaire, d'où l'importance pour moi de dire quelques mots à ce sujet.

Lorsqu'une formation s'arrête, c'est toujours une page qui se tourne avec une perte. Cependant, je me dois de rétablir un certain nombre d'éléments sur le plan simplement historique... (Brouhaha.)

Le président. Un instant, Monsieur le conseiller d'Etat. Un peu de silence, s'il vous plaît, un peu de politesse ! Merci.

M. Charles Beer. ...pour expliquer que, dans les faits, l'Institut d'architecture à Genève est mort il y a pratiquement quinze ans. C'est effectivement en 1994 qu'est entré en force un accord prévoyant que le premier cycle de la formation devait s'effectuer par l'ensemble des étudiants genevois à l'EPFL, ce qui veut dire que, par la suite, aucun de ces étudiants n'est revenu. Cela a amené l'Institut d'architecture à faire, pour son deuxième cycle, du recrutement extérieur, avec des particularités qui l'ont fait reconnaître dans plusieurs compétences qu'il convient de relever: probablement pas directement dans la construction, mais beaucoup plus dans l'urbanisme et, d'une manière générale, la critique - dans le bon sens du terme - du développement de la ville.

Je tiens à le dire parce que quinze ans d'histoire ont montré que cet institut, dans les faits, avait déjà disparu. Et à un certain moment, il fallait se décider, malheureusement, à mettre de l'ordre. En effet, quand il est difficile de tourner une page, on a tendance à vouloir garder le livre ouvert et en même temps à accepter quelquefois certains dysfonctionnements. Parmi les dysfonctionnements, j'aimerais relever que pratiquement 40% des étudiants de l'Institut d'architecture se trouvaient au-delà du parcours normal d'études et pouvaient cumuler jusqu'au double de semestres tolérés à l'université. Ce fait est évidemment regrettable.

Maintenant, lorsque les rectorats Hurst, puis Weber et enfin Vassalli ont décidé de tourner la page, il convenait tout de même de remarquer qu'il y avait des gens qui travaillaient bien, avec compétence; or, dans plusieurs cas, il a fallu les réorienter ou qu'ils prennent congé, avec tout ce que cela implique de difficile.

Si je prends la parole ce soir, c'est pour dire avec M. le député Weiss que tout n'a pas disparu de Genève, puisque la HES Genève, particulièrement l'Ecole d'ingénieurs, qui vient comme vous le savez de se marier avec l'Ecole d'ingénieurs de Lullier pour créer la HEPIA - la Haute école du paysage, d'ingénierie et d'architecture - offre effectivement une nouvelle possibilité à saisir, notamment par la mise en synergie de ce qu'amènent l'architecture traditionnelle et l'architecture du paysage. Je tiens à dire que, dans le domaine de ce que prévoit cette nouvelle école, la HEPIA, il y a également de véritables zones nouvelles à explorer en ce qui concerne l'aménagement, notamment de la ville. Je souhaite que l'esprit critique qui accompagne très souvent l'Institut d'architecture se développe également à l'aune de cette nouvelle école, en donnant une dynamique qui nous permette de concilier l'architecture et la construction, mais aussi le développement durable, de même que le prévoient plusieurs centres de compétences à l'Université de Genève.

Je crois profondément, Mesdames et Messieurs les députés, que si l'on avait à un certain moment accepté d'établir des synergies entre l'université et les HES, on aurait probablement pu tourner la page de façon moins douloureuse. Il est dommage qu'il ait fallu attendre aussi longtemps pour finalement y arriver. Mais, aujourd'hui, je suis en mesure de dire que l'Université de Genève, avec les HES Genève, déploie de véritables centres de compétences interinstitutionnels, qui promettent des développements importants pour Genève, pour son avenir, pour l'architecture, l'urbanisme et le paysage.

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons nous prononcer sur la proposition du rapport de majorité concernant cette pétition, c'est-à-dire le dépôt sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission de l'enseignement supérieur (dépôt de la pétition 1543 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 44 oui contre 11 non et 12 abstentions.

P 1659-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour une formation des enseignants et enseignantes à l'égalité entre filles et garçons
Rapport de majorité de Mme Janine Hagmann (L)
Rapport de minorité de Mme Lydia Schneider Hausser (S)

Débat

Le président. Je rappelle que nous sommes en débat de catégorie III: sept minutes; peuvent s'exprimer un représentant par groupe et les rapporteurs.

Mme Janine Hagmann (L), rapporteuse de majorité. Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, en préambule, je tiens à relever avec bonheur le long combat mené par les femmes. C'est très important, parce que nous ne sommes plus, heureusement, au temps du fameux projet de loi que le Jacobin Sylvain Maréchal avait proposé en 1801. Estimant à juste titre que l'instruction est le premier pas vers l'émancipation, il avait proposé un «projet de loi portant défense d'apprendre à lire aux femmes». Quant au code civil de Napoléon, il ira beaucoup plus loin encore pour établir la perpétuelle et obligatoire résignation des femmes, faisant d'elles des incapables civiles et des mineures leur vie durant. Alors, cette pétition est-elle un combat de plus sur un sujet qui, je vous le rappelle, est très récurrent dans cette enceinte ? J'ai même retrouvé une pétition datant de quinze ans qui traitait pratiquement du même sujet, et le Conseil d'Etat avait déjà donné des réponses de façon très rigoureuse. Ici, la majorité de la commission a refusé d'en faire un débat sexiste. Elle réfute d'ailleurs l'affirmation selon laquelle les enseignants accordent en classe beaucoup plus d'attention aux garçons qu'aux filles.

Que demande la pétition ? D'introduire dans la formation initiale du corps enseignant un cours de deux heures hebdomadaires sur l'éducation des garçons et des filles. C'est là que le bât blesse. Nous avons voté, Mesdames et Messieurs - et avons été très largement suivis par la population - une nouvelle loi sur l'université, qui donne à cette dernière une autonomie. Non, nous ne pouvons pas nous-mêmes établir les programmes universitaires, nous n'y sommes pas habilités. En outre, la convention d'objectifs qui a été liée à la loi stipule qu'il faut promouvoir l'égalité des chances et contribuer au développement et au renforcement de la formation et de la recherche sur la question du genre. Et M. Beer, dans ses treize priorités, indique une politique volontaire en faveur de l'égalité. La majorité de la commission fait donc confiance au chef du département de l'instruction publique, qui a d'ailleurs donné des garanties aux pétitionnaires. C'est pourquoi la majorité vous propose de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.

Mme Lydia Schneider Hausser (S), rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs, notre rapport de minorité ne remet en cause ni les actions et les travaux du conseiller d'Etat M. Charles Beer, ni les efforts réalisés en l'occurrence à l'université, à la FAPSE, et par son doyen M. Schneuwly. Bien au contraire ! Demander le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat - l'une des issues pour une pétition - est pour nous une marque d'encouragement à continuer les efforts pour que les enseignants, dès leur formation de base, suivent des cours liés à l'égalité entre garçons et filles, à la non-discrimination entre genres face aux études et aux formations, voire - de manière plus large - dans la vie. Lors des auditions, nous avons vu que des mesures étaient mises en place dans la formation des enseignantes et enseignants du secondaire. Il manque donc une intégration de cette formation pour les enseignants du primaire.

Il est vrai que les pétitionnaires qui ont présenté la pétition sont des personnalités connues pour les luttes visant l'amélioration de la situation des femmes au moins depuis 1991, date de la création du Collectif du 14 juin, signataire de cette pétition. Ces militantes, que nous tenons comme Mme Hagmann à remercier, sont effectivement la pointe de l'iceberg. Elles ont amené des évolutions qui ont en tout cas promu des changements de mentalité sur les valeurs et la place des femmes à Genève et dans la société.

Rappelons que, lorsqu'on parle d'égalité entre hommes et femmes - ou entre femmes et hommes - on ne parle pas de groupes minoritaires. Il s'agit bien d'un rapport entre 234 643 femmes et 218 598 hommes résidant sur le territoire de notre canton en février 2009 - soit tout dernièrement. Ainsi, on est vraiment dans un rapport important, où les femmes sont d'ailleurs encore plus nombreuses que les hommes... (Brouhaha.)

Le président. S'il vous plaît, Messieurs Barrillier et Bertschy... Merci.

Mme Lydia Schneider Hausser. La pétition signée par 759 personnes nous indique une carence dans notre système d'éducation de base. Mais la majorité de la commission, au lieu d'en référer à l'instance appropriée, propose un dépôt sur le bureau du Grand Conseil. C'est une façon gentille d'étouffer la mise en évidence de cette amélioration possible de notre école, et en particulier de l'école primaire, en ce qui concerne le rapport entre genres. Enfin, cette pétition coûtera, si l'on en suit les demandes et les invites, un poste d'enseignant supplémentaire à l'université, eh oui ! Donc nous vous demandons de voter le renvoi au Conseil d'Etat.

Le président. Merci, Madame la députée. Monsieur Bertschy, vous pouvez maintenant assouvir votre besoin de parler !

M. Antoine Bertschy (UDC). Merci, Monsieur le président ! Mesdames et Messieurs les députés, les pétitions sont souvent un outil démocratique nécessaire. Néanmoins, elles mettent parfois en avant des problèmes qui n'en sont pas vraiment. En fait, elles peuvent parfois en créer. En l'occurrence, celle-ci en fait partie. Y a-t-il une forme de discrimination vis-à-vis des femmes ? A l'école, je ne le pense pas. (Exclamations.) Très franchement ! Au niveau plus global, au niveau de l'économie, certainement. On sait que les femmes touchent un salaire inférieur de 20% pour un poste égal: c'est absolument inacceptable ! Mais à l'école, je ne crois pas que cela existe. Je ne pense pas qu'il y ait un problème dans l'enseignement, que ce soit au niveau primaire, secondaire ou au-delà, à l'université, puisque c'est là que les pétitionnaires veulent introduire une formation à l'égalité entre filles et garçons pour les futurs enseignants. Pourquoi je ne le pense pas ? Parce que les femmes - ou les filles, à cet âge-là, car ce ne sont peut-être encore que des filles ! - sont souvent beaucoup plus studieuses que les garçons. (Brouhaha.)

Dire qu'il y a un problème de discrimination au niveau de l'enseignement, c'est à mon sens une erreur. En revanche, que nous agissions par la suite au niveau économique pour que les grilles de salaires soient respectées et que les femmes puissent accéder aux postes à responsabilité, l'UDC y est totalement favorable. Mais cette pétition ne nous semble pas avoir de raison d'être, raison pour laquelle nous vous proposons de suivre le rapport de majorité.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Je serai plus pragmatique qu'historienne ou philosophe, parce que j'ai eu l'occasion de rencontrer les pétitionnaires il y a moins d'une semaine. Elles sont entièrement satisfaites et pensent qu'il n'y a plus aucune raison de soutenir cette pétition, car elles ont obtenu un poste de chargé de cours à l'université, en sciences de l'éducation, qui va s'occuper de l'égalité entre filles et garçons. Elles en sont très heureuses et nous pouvons donc voter le dépôt de cette pétition en toute bonne conscience. Pour cette raison, nous voterons nous aussi le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Régis de Battista (S). Je suis très heureux d'entendre cette nouvelle. Malgré tout, les socialistes pensent que cette pétition doit être renvoyée au Conseil d'Etat. Pourquoi ? Parce que, même si elle peut paraître obsolète, la question de l'égalité des sexes est pourtant toujours d'actualité. L'histoire humaine fait en sorte que le débat entre hommes et femmes aura toujours lieu; c'est une nécessité. Même si ce poste vient d'être créé, je pense que renvoyer cette pétition directement au Conseil d'Etat, c'est faire en sorte que ce dernier soit attentif à ce message qu'on essaie de lui transmettre. Et même si la loi sur l'université est en application - et je comprends ce que Mme Hagmann dit - le Grand Conseil peut malgré tout, non pas donner un avertissement, mais dire au Conseil d'Etat d'être attentif à cette situation.

La vie que nous vivons ici à Genève fait que nous sommes influencés par la télévision et bien des choses. Et l'égalité des sexes doit toujours être revue. C'est pourquoi je pense que, si des cours sont donnés d'une manière ou d'une autre, cela ne peut être qu'une bonne chose. Je salue donc l'ouverture du poste d'enseignement, mais il est tout de même important de renvoyer la pétition au Conseil d'Etat afin de marquer le coup et de soutenir ces pétitionnaires.

Mme Christiane Favre (L). Les affirmations de la pétition concernant les discriminations de genre ne correspondent apparemment plus à la réalité. C'est en tout cas ce qui ressort du rapport de majorité. D'ailleurs, quand on lit dans le rapport de minorité qu'il existe des inégalités d'accès à certaines disciplines d'études, il est plus fait référence à un sentiment ou à un ressenti d'inégalité qu'à de réelles inégalités. Le manque de confiance en mathématiques, par exemple, conduirait les filles à se détourner des filières scientifiques. A l'inverse, les garçons ont le sentiment qu'ils ne sont pas bons en lecture, ce qui les porterait plutôt vers les sciences.

Ces observations ont certainement de l'intérêt. Mais on peut se poser cette question: le but de l'exercice est-il de donner aux filles et aux garçons les mêmes chances de réussite dans leurs études et dans la vie ? Ou est-ce que le but est de parvenir à la parité des sexes à l'Ecole d'ingénieurs, en prenant cela pour seule preuve convaincante d'égalité ? J'espère bien que c'est toujours le premier but qui reste le nôtre. Parce que si nous choisissons le second, j'ai peur que nous vivions éternellement dans un ressenti d'inégalité. Mais si c'est le premier, à savoir de garantir à chaque élève, quel que soit son sexe, la même attention et le même traitement, alors - comme l'a souligné Mme Hagmann - il est temps de faire confiance au département, qui paraît extrêmement soucieux de cette problématique, et depuis longtemps. Il est aussi temps de faire confiance aux enseignants, et surtout aux enseignantes, puisque la profession est extrêmement féminisée, pour transmettre un savoir débarrassé de tout sexisme et de tout stéréotype d'un autre âge.

Enfin, je crois qu'il est vraiment temps de faire confiance à ces nouvelles générations de filles - elles sont parfaitement capables de trouver leur voie dans notre système scolaire - faute de quoi on risque de les victimiser définitivement et de créer dans la foulée des inégalités au détriment des garçons. On voit bien que ce risque n'est pas à banaliser en lisant le rapport de majorité. C'est un excellent rapport, et nous vous recommandons donc d'en suivre les conclusions.

Mme Béatrice Hirsch (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, les démocrates-chrétiens soutiendront le rapport de majorité et déposeront donc cette pétition sur le bureau du Grand Conseil. En effet, la première considération était que le parlement a de la peine à s'immiscer dans la programmation des heures de cours de l'université. Par contre, nous aimerions relever un point. Dans le rapport de majorité, on peut lire que la pétition a un goût passéiste. Soit ! Bien des efforts et des progrès ont été faits ces dernières années pour corriger les inégalités qui existent dans la prise en charge des garçons et des filles à l'école primaire mais, aujourd'hui, je pense que chacun d'entre nous peut s'interroger sur les aprioris et les différentes attentes que nous avons vis-à-vis des filles et des garçons, que ce soit à l'école ou en ce qui concerne nos propres enfants. Il n'est donc certainement pas négatif de proposer aux enseignants un cours qui puisse simplement les faire réfléchir aux attentes différentes qu'ils ont vis-à-vis des filles et des garçons et au rôle primordial qu'aura sur la suite des études de ces enfants la manière dont ils les abordent. (Brouhaha.) Si les enseignants peuvent identifier cette problématique et travailler autour... (Brouhaha.)

Le président. Une petite seconde, Madame la députée. Il y a vraiment beaucoup de bruit ! S'il vous plaît, un peu de silence. Merci.

Mme Béatrice Hirsch. Je vous remercie, Monsieur le président. Si nous permettons à ces enseignants de réfléchir autour de ces problématiques - et ce que Mme Leuenberger vient de nous dire nous ravit - je pense que tout le monde, à commencer par les enfants, y gagnera. Nous faisons entièrement confiance au département de l'instruction publique, qui nous a dit lors des auditions prendre au sérieux les préoccupations de ces pétitionnaires. Par conséquent, je pense qu'il ne vaut plus la peine de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, et nous la déposerons donc sur le bureau du Grand Conseil.

M. Frédéric Hohl (R). Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition avait quelque chose d'attendrissant quand nous avons auditionné ces gens. C'était charmant: on était à la limite de parler des filles qui naissaient dans les roses, des garçons dans les choux, etc. (Exclamations.) C'était très joli. Dans les années nonante, en Angleterre, on a même parlé de séparer les garçons des filles dans les écoles, tellement les garçons étaient mauvais par rapport aux filles. Alors c'est vrai, faisons attention.

J'ai été extrêmement rassuré par notre collègue Verte, qui nous a expliqué que la demande des pétitionnaires était exaucée depuis une semaine...

Une voix. On en a parlé il y a une semaine ! (Remarque.)

M. Frédéric Hohl. Nous sommes donc vraiment rassurés. Par conséquent, nous allons suivre bien évidemment le rapport de majorité et déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je ne soutiens pas cette pétition et ne la renverrai nulle part, car je reste fidèle à mes convictions. J'estime que l'Etat doit instruire, je le répète, et non pas éduquer. Je crois qu'il appartient aux parents d'éduquer leurs enfants, de leur expliquer les différences entre les filles et les garçons... (Brouhaha.) ...et que les professeurs ne sont pas là pour avoir des sensibilités particulières envers les filles ou les garçons. Ils sont là pour donner une instruction uniquement. Et les élèves sont assez grands pour savoir où ils se trouvent. De plus, je pense que cette pétition fait du féminisme pur et dur, ce qui dessert totalement la femme, parce qu'à trop vouloir en faire, on finit par donner une mauvaise image. Encore une fois, je pense que l'éducation n'est pas le rôle de l'Etat.

M. Olivier Sauty (MCG). Seulement deux mots, Mesdames et Messieurs les députés, pour vous dire que le groupe MCG soutient le rapport de majorité et déposera la pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Claude Aubert (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais simplement vous rappeler qu'il y a la liberté, l'égalité et la fraternité. Il y a la liberté d'être garçon... (Exclamations. Brouhaha.) ...et la liberté d'être fille. On a l'égalité entre les filles et les garçons. Et je vous prie de ne pas oublier la fraternité entre les filles et les garçons.

Le président. Merci, Monsieur le député ! La parole est à Mme Schneider Hausser... Non, c'est Mme Keller qui désire s'exprimer.

Mme Virginie Keller (S). L'intervention de Mme Borgeaud me fait réagir en tant que féministe socialiste, et fière de l'être. Je relèverai deux faits dans l'actualité d'aujourd'hui. La loi sur la famille au Pakistan vient de changer: elle interdit aux femmes de sortir du domicile conjugal sans l'autorisation de leur mari et de refuser les rapports sexuels avec ce dernier. En outre, la prostitution est en augmentation chez les jeunes étudiantes en Europe. Voilà deux éléments parmi tant d'autres de l'actualité d'aujourd'hui. (Commentaires.)

L'égalité homme-femme est chaque jour à défendre et à promouvoir, ici et ailleurs. Peut-être que dans ce parlement on y est presque - et encore - mais il y a beaucoup d'endroits dans le monde. Or ces gens-là viennent aussi à Genève vivre chez nous et fréquenter nos écoles. Je pense donc que cette éducation est à défendre, que c'est une lutte magnifique, et j'espère que tous ici ont envie de continuer à la défendre, même si ce soir vous déposez cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

M. Charles Beer, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais mentionner un certain nombre de points. Tout d'abord, si les principales revendications de cette pétition sont satisfaites aujourd'hui - et je m'en félicite - c'est parce que l'université, notamment, a prêté une oreille attentive à la plupart des messages qui provenaient des milieux féministes qui les ont formulés, et tout particulièrement du Collectif du 14 juin.

Je dois également dire - et à cet égard, Madame Hagmann, je suis pour une fois modestement obligé de corriger quelque peu votre propos - que c'est aussi sur intervention du Conseil d'Etat. Pourquoi sur intervention du Conseil d'Etat ? Non pas qu'il faille remettre en cause - heureusement - l'autonomie de l'université, mais parce que l'Institut universitaire de formation des enseignants correspond très exactement à une délégation, à un centre interfacultaire universitaire dont la mission est de former les enseignants et dont le contenu doit être tout de même fixé en lien avec les autorités. Ainsi, nous ne sommes pas dans le domaine des unités principales d'enseignement et de recherche, qui relèvent de la stricte et seule compétence de l'université, en fonction de la liberté académique et de l'autonomie de gestion. Nous sommes bien ici dans une tâche déléguée, où nous demandons à l'université de bien vouloir formuler une offre qui daigne nous satisfaire. C'est important, parce que si, par exemple, nous n'avions pas satisfaction - et vous savez que c'est la tentation de quelques-uns et quelques-unes - nous pourrions nous tourner vers d'autres instituts de formation. Dans le débat actuel, certains souhaitent, comme vous le savez, que ce soit une HEP. J'espère que le Grand Conseil ne fera pas ce choix.

Cela dit, l'Institut universitaire de formation des enseignants intègre une vision où l'égalité ne fait pas partie des éléments accessoires, que l'on rajoute en option, mais constitue une dimension que j'estime indispensable et incontournable de la formation des enseignants, et ce pour une raison très simple. Si nous sommes sortis aujourd'hui de quelques problèmes qui ont trait à l'inégalité de traitement, nous ne sommes pas - et de loin - arrivés au port. En effet, tous les clichés demeurent - vous pouvez le remarquer aisément - dans le choix des jeunes filles et des jeunes garçons en ce qui concerne les professions. Et si nous pouvons dire aujourd'hui que nous sommes en mesure de satisfaire les pétitionnaires, le chemin de l'égalité est encore long. Il faudra probablement plus d'une pétition, d'une motion ou d'un projet de loi pour que l'égalité permette librement à chaque jeune fille, à chaque jeune garçon, à tous les jeunes gens, de faire un choix loin des stéréotypes, avec des visions et une connaissance approfondie non seulement de la littérature - des auteurs masculins et féminins - mais aussi des pionnières; tout cela fait partie d'un combat régulier et pratiquement constant du département de l'instruction publique pour que la nouvelle culture qui doit se dégager devienne réalité.

J'aimerais dire que c'est un sujet de préoccupation du Conseil d'Etat sur lequel nous avons eu l'occasion d'échanger et qui m'amènera à revenir devant vous avec un plan plus systématique de mise en action des priorités concernant l'égalité entre jeunes filles et garçons.

Une voix. Excellent ! Bravo !

Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Nous allons donc nous prononcer sur la proposition du rapport de majorité: le dépôt de cette pétition 1659 sur le bureau du Grand Conseil.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission des pétitions (dépôt de la pétition 1659 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 49 oui contre 14 non et 1 abstention.

P 1665-A
Rapport de la commission de l'enseignement, de l'éducation et de la culture chargée d'étudier la pétition pour une pleine compensation des subventions, pour préserver la CCT du secteur d'éducation spécialisée
Rapport de Mme Nelly Guichard (PDC)

Débat

Mme Nelly Guichard (PDC), rapporteuse. Mesdames et Messieurs les députés, on peut comprendre le souci du personnel qui craignait en juillet 2008, au moment du dépôt de la pétition, une non-indexation de son salaire et une diminution des prestations offertes. A cela, il faut ajouter de longues, de très longues discussions entre l'Etat et les employeurs pour que ces derniers acceptent les contrats de prestations liés à la LIAF. Finalement, les employeurs les ont signés. (Brouhaha.)

Ce que l'on peut dire en général, c'est que les responsables et les comités d'institutions saluent l'établissement de contrats de prestations, qui clarifient les mandats. Mais tous ont émis lors des auditions le regret que ces contrats n'aient pas vraiment donné lieu à des négociations. En quelque sorte, ils étaient à prendre ou à laisser. (Brouhaha.) Par contre, la plupart ont aussi estimé...

Le président. S'il vous plaît, un peu de silence ! Franchement, on ne s'entend plus ! Vous pouvez continuer, Madame Guichard.

Mme Nelly Guichard. Merci, Monsieur le président. La plupart des comités ont estimé qu'il s'agissait là d'un premier exercice, tant pour les institutions et leurs comités que pour l'Etat. Et ils sont persuadés que, lors d'un prochain exercice, des négociations pourront être engagées dans un esprit de partenariat constructif. (Brouhaha.)

Ainsi, pour revenir à l'audition des pétitionnaires, les syndicats ont reconnu au mois de novembre, quand nous les avons reçus, que les mécanismes salariaux étaient assurés entre-temps. De plus, ils nous ont expliqué que la CCT signée est calquée sur les conditions de l'Etat, qui figurent dans la loi B 5 05. Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs les députés, à suivre le préavis de la majorité de la commission et à voter le dépôt de cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Sylvia Leuenberger (Ve). Les propos de Mme Guichard sont certes tout à fait exacts. Toutefois, les Verts soutiendront le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat. Pourquoi ? Parce que la marge de manoeuvre financière pour ces institutions est faible. En effet, la majeure partie de leurs revenus proviennent en fait de subventions, des revenus des pensions, voire de quelques dons, et les salaires représentent l'essentiel de leurs charges. Donc des réductions de subventions peuvent mettre à mal leur possibilité d'assumer les mécanismes salariaux, et même remettre en cause les conventions collectives de travail.

Il est vrai que l'on a obtenu des réponses satisfaisantes en commission et que les institutions sont contentes d'avoir un contrat de prestations et des budgets pluriannuels. Mais tout n'est pas forcément résolu par ces contrats de prestations. Et c'est pour montrer notre soutien au maintien de la qualité des prestations, laquelle est importante dans ces institutions qui s'occupent de populations fragiles et complexes, ce qui n'est pas toujours simple à gérer au niveau professionnel, que nous voterons quand même le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat.

M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition, pour qui est attaché au développement de relations harmonieuses entre les partenaires sociaux, est importante. Elle pose des questions auxquelles il convient de répondre, mais probablement avec un accent différent de celui qui vient d'être utilisé par notre collègue du parti des Verts. (Remarque.)

D'abord, faut-il ou ne faut-il pas, dans ce domaine, qu'il y ait une égalité de traitement entre les différentes catégories concernées dans le secteur de l'éducation spécialisée ? Voilà le premier considérant sur lequel se penche cette pétition. Elle part, si j'ose dire, d'une pétition de principe selon laquelle l'inégalité de traitement est inacceptable. Mais la chose n'est pas démontrée. Au fond, c'est une affirmation apodictique que l'on trouve ici et sur laquelle nous devrions, je crois, réfléchir davantage.

Ensuite, il est dit que la grande mobilité nécessite des références communes pour les conditions de travail et salariales. Là aussi, il faut savoir si, en réalité, une égalité des conditions salariales est à même de favoriser la mobilité, ou au contraire si une différence - je n'ose pas dire «inégalité» - des conditions salariales favorise davantage la mobilité. Si l'on regarde les choses en tant qu'économiste du marché du travail, je crois que l'on est forcé de reconnaître qu'une différence des conditions salariales favorise davantage la mobilité que ce n'est le cas de l'égalité. Pourquoi ? Pour une raison bien simple. S'il y a égalité des conditions salariales et des conditions de travail au sens large, il n'y a aucune incitation à vouloir être mobile, au contraire ! Il y a plutôt tendance à rester, je n'ose pas dire «assis dans son poste», mais en tout cas satisfait, ou insatisfait, des conditions que l'on a. De toute façon, on n'est pas incité, il n'y a pas devant soi comme une carotte qui amènerait à vouloir rechercher une meilleure situation. (Rires. Remarque.) Oui, une carotte, si vous me permettez, Monsieur Barrillier !

Par ailleurs, dire que la majorité des organismes du secteur est membre d'une association - l'AGOER, etc. - n'est pas non plus un considérant à même de nous convaincre. Pourquoi ? Parce qu'il ne suffit pas que la majorité des personnes soit d'un avis pour que cet avis soit raisonnable en soi. (Brouhaha.) Vous savez, c'est un exemple de démonstration selon lequel la vox populi serait la vox dei. Eh bien non ! Dans le domaine des relations du travail, il est tout à fait possible que des opinions minoritaires soient les meilleures. Et d'ailleurs, souvent l'on entend des syndicats - minoritaires ! - nous dire que leur opinion est d'une qualité supérieure et doit être davantage prise en considération, précisément parce qu'elle n'a pas été adoptée par la majorité. Donc, de ce point de vue là, ce considérant ne me semble pas non plus en mesure d'emporter notre conviction... (Brouhaha.) Je ne suis qu'à la première partie de mon intervention... (Rires.) ...et me réserve le droit de revenir sur cette question dans une deuxième intervention.

Une voix. Bravo !

M. Pierre Weiss. Je continue, calmement, avec les considérants. On se réfère ici à un arrêté du Conseil d'Etat du 2 avril 2008, qui précise que ce n'est que dès 2010 que la part de la subvention cantonale pourra être adaptée pour les mécanismes salariaux. Ce considérant fait fi des possibilités réelles de l'Etat ! Lorsque la pétition a été déposée, qui pouvait imaginer que les recettes fiscales de notre canton connaîtraient l'évolution qu'elles connaissent aujourd'hui ? Evidemment, je ne suis pas là pour dévoiler le détail précis des chiffres fournis à la commission des finances - surtout de ceux qui n'ont pas été encore fournis ! - et des estimations qui sont à ce jour imprécises. (Brouhaha. Rires.) Je peux néanmoins vous dire, Mesdames et Messieurs les députés, Monsieur le président, que dans sa dernière séance la commission des finances a eu à connaître des résultats qui ne laissaient pas de l'inquiéter. Et s'agissant des recettes fiscales, lors de la prochaine estimation - c'est-à-dire celle de fin avril pour fin mars, puisqu'à fin mars nous avons eu affaire aux résultats de fin février, j'espère que vous me suivez ! - les résultats de fin avril pour fin mars devraient nous montrer une diminution sensible des recettes fiscales. Donc utiliser ce considérant-là pour justifier une égalité des conditions salariales me semble pour le moins prématuré. C'est la raison pour laquelle dénoncer les économies - alléguées - dans le domaine de l'éducation spécialisée ne nous semble à ce stade... (Brouhaha.) Si vous permettez, vous pouvez parler mais, je vous en prie, je parle aussi ! (Rires.) Cette dénonciation...

Le président. Monsieur Weiss, il vous reste trente secondes.

M. Pierre Weiss. Je terminerai dans les trente secondes. Mais étant donné les conditions du débat, je me réserve, comme je vous l'ai annoncé, Monsieur le président, le droit de revenir sur la suite des considérants dans une deuxième intervention. (Exclamations.) Je disais simplement que, compte tenu de ce que j'indiquais tout à l'heure sur l'égalité, qui était en fait une incitation à l'immobilité et non à la mobilité, la première partie des considérants sur lesquels je viens rapidement de me pencher m'amène à penser que cette pétition dans le domaine de l'éducation spécialisée mérite que nous réfléchissions plus avant sur le sort que nous allons lui réserver. Pour ma part, je vous indiquerai la position du groupe libéral dans la suite de nos débats.

Une voix. Bravo ! (Exclamations. Applaudissements.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Le Bureau décide de clore la liste. Vont encore s'exprimer M. Charbonnier, M. Follonier et M. Gautier.

M. Alain Charbonnier (S). Monsieur le président, vous transmettrez à M. Weiss que j'apprécie quand il fait l'allégorie de la réduction des rentrées fiscales ! C'est en effet ce qu'il prône avec son groupe. Mais qu'il s'en prenne ensuite aux employés de l'éducation spécialisée, je trouve quand même un peu fort de café ! M. Weiss a lu quelques passages de cette pétition, effectivement, mais seulement quelques passages: comme à son habitude, il ne va pas jusqu'au bout des phrases qu'il reprend chez les autres. (Remarque.) Il a parlé de l'arrêté du Conseil d'Etat du 2 avril 2008 qui, disent les pétitionnaires, «précise que les subventions des établissements seront ajustées aux mécanismes salariaux dès 2010...» C'est bien vrai, c'est écrit cela. Mais il y a un complément: «seulement et pour la part de la subvention cantonale uniquement, ce qui est insuffisant», écrivent les pétitionnaires.

Voilà ce dont le groupe socialiste s'inquiète depuis l'introduction de la LIAF: la limitation de la subvention de l'Etat lorsque les mécanismes salariaux, les mêmes que l'Etat, s'appliquent uniquement au prorata de la subvention, ce qui pose de gros problèmes à ces associations. Car nous pouvons le voir dans le projet de loi inhérent à ces associations, elles sont pratiquement toutes déficitaires. Cependant, il a pu passer ainsi à la commission des finances. Je me demande d'ailleurs par quel hasard la commission des finances, d'habitude si prompte à refuser des contrats de prestations au budget prévisionnel pour les quatre années déficitaire, s'est laissé berner de cette façon par le chef du DIP.

Il est vrai que les avantages de la LIAF sont relevés par les pétitionnaires, Madame la rapporteure. Seulement, ils se dépêchent tout de même de dénoncer le gros problème qu'ils rencontrent: le problème budgétaire. Et si les employés étaient inquiets, ils le sont encore aujourd'hui, Madame la rapporteure ! En effet, la subvention ne couvre pas les mécanismes salariaux. Quant à l'égalité de traitement entre personnes de la même profession, Monsieur Weiss, qui êtes le roi de la mobilité, il s'agit de travailleurs sociaux. On n'a pas affaire à des personnes de l'économie... (Commentaires.)

Le président. Silence, Monsieur Weiss ! Merci.

M. Alain Charbonnier. Mais laissez parler les autres, Monsieur Weiss ! Vous critiquez quand on vous coupe la parole, alors laissez parler les autres ! (Commentaires.) Les éducateurs spécialisés - car il s'agit d'eux en grande partie dans cette pétition - sont aussi représentés, par exemple au sein du service médico-pédagogique. On pourrait le mettre comme un miroir en regard du problème des EMS... (Brouhaha.)

Le président. Monsieur Weiss, je ne peux pas entendre M. Charbonnier ! S'il vous plaît, Monsieur Weiss... (Brouhaha.) Monsieur Weiss, c'est pour vous ! Je n'entends pas M. Charbonnier. S'il vous plaît... Merci.

Des voix. Dehors ! (Commentaires. Brouhaha.)

M. Alain Charbonnier. M. Weiss prône, également pour le personnel des EMS, une plus grande mobilité. Ce serait formidable, ces personnes pourraient bouger, aller chercher une carotte, dit-il ! Cela fait penser à d'autres gens qui mettent des carottes sur les photos... Chercher des carottes ? Mais quelles carottes, Monsieur Weiss ?! (Remarque. Brouhaha.) C'est tout le contraire que vous voulez. Ce n'est pas d'aller chercher plus de salaire, mais moins de salaire, de diminuer les salaires, parce que c'est la seule possibilité que vous avez de faire fonctionner cette loi, qui devient inique pour les associations, revenant à bloquer les subventions et à leur dire: «Débrouillez-vous pour les salaires ! Nous, nous ne voulons rien savoir. Vous n'avez qu'à supprimer les conventions collectives !» Très souvent, on entend M. Longchamp, qui est votre cousin ou futur... (Brouhaha.) - je ne sais pas comment on dit chez vous - prôner les conventions collectives. Il faut des conventions collectives. Mais vous êtes en train de démanteler ces conventions collectives, dans les EMS, dans l'éducation spécialisée, à l'AGOER. C'est un véritable scandale !

L'AGOER, je vous le rappelle, a dénoncé la convention collective, certainement avec raison. En tant que patron, d'ailleurs, vous devriez être content, Monsieur Weiss. Vous lui transmettrez, Monsieur le président ! Je pense que M. Weiss est très content de cette dénonciation, puisqu'il n'y aura peut-être plus de convention collective au mois de juin entre l'AGOER et les représentants des travailleurs de ces associations.

Pour conclure, nous demandons instamment que cette pétition soit renvoyée au Conseil d'Etat et que la problématique liée à la LIAF et aux mécanismes salariaux soit réétudiée, de façon qu'il n'y ait pas d'inégalités dans les mêmes professions régies par l'Etat, que ce soit par subventions ou par salaires directs au sein des services de l'Etat.

M. Pierre Weiss. J'ai été mis en cause !

M. Alain Charbonnier. Pas du tout ! Il n'a pas été mis en cause ! (Brouhaha.)

Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Follonier.

M. Jacques Follonier (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, cette pétition est l'exemple même d'une mauvaise défense syndicale. On arrive dans des dérives qui sont complètement incompréhensibles pour la plupart des gens, à mon avis, dans ce département et dans cet hémicycle, sauf à entendre M. Charbonnier, qui se fait le chantre de l'apologie du syndicat. Mais si vous réfléchissez, qu'est-il arrivé dans le fond ? Les employeurs ont dû prendre une décision douloureuse et dramatique: suspendre - et non pas annuler, ce que M. Charbonnier oublie de préciser - pour six mois... (Remarque.) Dénoncer pour six mois, si vous voulez, cela revient exactement au même; ce n'est pas une dénonciation absolue, elle est temporaire. Pourquoi ? Parce qu'ils avaient besoin d'avoir une certaine sécurité sur leur avenir, ce qui est tout à fait louable et qui est le propre d'un employeur, je crois.

Finalement, après avoir reçu les contrats LIAF, les avoir lus et les avoir tous acceptés - car ils ont tous signé, nous les avons tous reçus à la commission de l'enseignement - il y a bien une question à se poser. S'ils ont signé, c'est que, d'une façon ou d'une autre, cela leur convenait et qu'ils ont trouvé un modus vivendi avec ce système. Et la raison de cette acceptation, c'est que, plutôt que de vivre année par année avec une épée de Damoclès, ils avaient la possibilité de vivre quatre ans avec une certaine sécurité.

Ce que M. Charbonnier oublie de nous dire, c'est qu'il y a tout de même eu des compromis de part et d'autre. Et c'est bien cela qui pose problème. Qu'est-ce que le Conseil d'Etat a fait ? Il a coupé la poire en deux, puisqu'il a quand même dit qu'à partir des années 2010 il réaliserait la mise en place des mécanismes salariaux, et c'est ce qui va se faire. Que se passe-t-il en plus ? Le Conseil d'Etat a demandé - et accepté - que le treizième salaire soit pris en charge dès sa mise en place. Quand on tient compte de ces bénéfices en faveur des employés pour les années suivantes, on peut très bien admettre qu'il y ait une certaine obligation de faire aussi la part des choses pour les années 2008 et 2009, où effectivement on a demandé aux associations de faire un effort - considérable, je le reconnais - mais qui est tout de même pour l'essentiel compensé par la deuxième partie de ces contrats LIAF.

Donc il n'y a pas besoin de sauter et de crier au loup. Je crois qu'eux-mêmes ont compris, et c'est presque un peu dommage que des députés en viennent à se déchirer, à donner ainsi des explications, alors que la situation est en train de se régler tranquillement...

M. Pierre Weiss. Je défends mon honneur !

M. Jacques Follonier. Absolument, mais ce n'est pas très compliqué. (Commentaires.) Dans ce cadre-là, on peut simplement souligner un point. Les conventions collectives ne sont pas du ressort du Conseil d'Etat ! Elles relèvent de négociations entre les employeurs et les employés, et tout le monde le sait. Mais il est remarquable de voir comme la gauche revient toujours sur ce système, en voulant faire en sorte que l'Etat s'immisce d'une manière presque surnaturelle dans ces conventions collectives. Pourtant, il faudrait que les employeurs et les employés s'entendent eux-mêmes entre eux sans avoir besoin de l'arbitrage de l'Etat, qui peut éventuellement donner son avis. Dans ces conditions, vous pouvez donc très bien comprendre que cette pétition n'a pas de sens. Elle peut seulement être déposée sur le bureau du Grand Conseil, tout juste pour information, puisque le Conseil d'Etat est largement informé.

Le président. Merci, Monsieur le député. (Remarque.) Le débat était libre, sans catégorie particulière. J'ai clos la liste des orateurs pour ne pas qu'il dure trop longtemps. Dites-moi merci !

Une voix. Il a été mis en cause !

Le président. La parole est à M. Gautier.

M. Renaud Gautier (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, les interventions de Mme la députée Verte et de M. Charbonnier sont beaucoup plus intéressantes qu'il n'y paraît, parce que l'on vient évoquer ici une problématique dont il a été largement discuté à la commission des finances. La mise en place de la LIAF, comme vous le savez, est une opération douloureuse pour toutes les parties, à savoir aussi bien le Conseil d'Etat et l'administration que la commission des finances. Il s'est très vite posé la question de l'analogie qui pouvait ou qui devait exister entre le personnel des institutions subventionnées d'une part, et l'Etat de l'autre. Après quelques propositions de certains consistant à dire qu'il faut lier la situation des uns avec celle des autres, nous nous sommes rendu compte que le tissu des relations entre les subventionnés et l'Etat varie en fonction de l'historique des relations qu'il y a entre ces parties. Ainsi donc, un certain nombre d'institutions ont une analogie quasiment parfaite avec les mécanismes financiers de l'Etat, ce qui veut dire par exemple que, s'il y a une indexation du salaire ou l'introduction du treizième salaire, alors, toutes choses étant égales par ailleurs, cette mesure est appliquée aussi aux entités subventionnées. D'autres entités subventionnées n'ont pas un statut similaire et assimilable à celui de l'Etat. C'est objectivement le cas des institutions concernées dans cette pétition.

Nous avons déjà de nombreuses fois parlé à la commission des finances de cette différence de situation. M. le ministre des finances, actuellement absent, nous a expliqué qu'il était extraordinairement difficile d'arriver à tailler une cote commune pour toutes les institutions, selon un statut soit parallèle à celui de l'Etat - à la loi B 5 05 - soit totalement différent. Et manifestement, les explications qu'il a fournies n'ont pas su satisfaire ou rassasier le besoin de savoir des uns et des autres. (Commentaires.)

Il m'apparaît donc nécessaire, sur la base de cette pétition et des précédentes interventions, que cette pétition 1665 soit renvoyée à la commission des finances, pour que celle-ci puisse de fait reprendre la question de l'indexation des entités dont le statut est analogue à celui de l'Etat et de celles dont le statut ne l'est pas. Manifestement, M. Charbonnier, qui est un membre des plus éminents de la commission des finances, semble ne pas adhérer à la cote mal taillée qui avait été définie à la commission des finances. C'est la raison pour laquelle, Monsieur le président, je vous demande formellement que cette pétition soit renvoyée à la commission des finances, pour que celle-ci puisse étudier les différences de traitement, qui semblent heurter plus particulièrement certains d'entre nous.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi à la commission des finances. Seuls la rapporteure et le Conseil d'Etat peuvent s'exprimer. Voulez-vous prendre la parole ? Puisque ce n'est pas le cas, nous nous prononçons sur cette demande.

Mis aux voix, le renvoi du rapport de commission sur la pétition 1665 à la commission des finances est adopté par 39 oui contre 14 non et 4 abstentions.

PL 9683-A
Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de Mme et MM. Jean-Marc Odier, Gabriel Barrillier, Thomas Büchi, Marie-Françoise de Tassigny, Michel Ducret, Jacques Follonier, Jacques Jeannerat, Hugues Hiltpold, Pierre Kunz modifiant la loi portant règlement du Grand Conseil de la République et canton de Genève (B 1 01) (Projet de loi visant à alléger la liste des objets parlementaires en suspens)
Rapport de majorité de M. Francis Walpen (L)
Rapport de minorité de M. Charles Selleger (R)

Premier débat

M. Francis Walpen (L), rapporteur de majorité. Mes chers collègues, vous me connaissez d'habitude comme un homme d'ouverture et de conciliation. Et je n'ai pas l'habitude de dilapider mon stock de missiles pour m'attaquer au moustique qui m'agace ! (Rires.) Mais ce soir, je pense que ce projet est l'exemple d'un point qui n'aurait jamais - jamais ! - dû figurer à notre ordre du jour, puisqu'il a été rejeté en commission par 11 voix contre 2 petites voix. (Exclamations.) Mais rassurez-vous, chers amis radicaux ! Je ne suis pas loin de partager la frustration du rapporteur de minorité qui, par fidélité aux signataires de ce projet de loi, s'est cru obligé de rédiger un rapport de minorité.

Le projet de loi dont nous parlons ce soir a été déposé le 6 octobre 2005 et traité quatre ans après. Entre-temps, nous avons traité le PL 9560, déposé en mai 2005 et adopté le 12 octobre 2006. Nous avons ensuite eu le PL 9800, qui a connu un sort moins heureux, lui, puisque la commission des droits politiques a refusé son entrée en matière. Puis nous avons étudié l'excellent - le très excellent ! - projet libéral, le PL 9923, destiné à améliorer le travail des commissions, adopté par 55 oui le 27 juin 2008. Et depuis, toute une pléthore de nouveaux projets de lois ont surgi. Je ne ferai pas l'insulte à mes collègues et amis Verts de mettre dans le même sac leur projet concernant les horaires, puisqu'il s'agit de tout à fait autre chose - et j'en conviens, chers collègues. Mais tout de même, nous avons eu le PL 10213, concernant les rapports divers, le PL 10215, au sujet de la modification de l'ordre du jour, et le PL 10216, qui a pour objet le renvoi en commission et l'ajournement. Il me semble quand même qu'il serait logique, avant de continuer à vouloir mettre des emplâtres sur une jambe de bois, d'observer le résultat et la pertinence de l'excellent projet libéral, le PL 9923, qui commence à porter ses fruits.

Je reprendrai la parole tout à l'heure mais, à ce stade, que voulez-vous que je vous dise ?! (Rires.) La seule chose à faire est de voter maintenant et de liquider cette affaire. Ce projet de loi nous occupe beaucoup trop. Nous perdons du temps pour essayer de trouver un moyen d'en gagner ! (Brouhaha.)

Une voix. Excellent ! Bravo !

M. Charles Selleger (R), rapporteur de minorité. A entendre M. Walpen, il y a plusieurs catégories de députés. Il y a par exemple les moustiques. Lui, probablement, se range plutôt dans la catégorie des taons, voire des bourdons. Il y en a qui ont une petite voix, d'autres une grosse... Bref, de quoi s'agit-il avec ce PL 9683 ? C'est un projet qui s'inscrit dans le souci qu'a le parti radical - comme d'autres partis, on vient de l'entendre - de fluidifier, d'accélérer et de rendre plus intéressant le travail parlementaire qui s'effectue ici au Grand Conseil. Certes, je ne pense pas qu'un seul projet de loi, qu'une seule réponse puisse apporter la solution à tous les problèmes, Monsieur Walpen. Il faudra probablement remettre l'ouvrage sur le métier, concevoir plusieurs projets de lois... Et c'est précisément ce qu'ont fait les radicaux en présentant, comme vous l'avez fait remarquer, toute une pléthore de projets de lois, qui ont connu des fortunes diverses. Alors qu'en est-il de celui-ci, qui a été déposé il y a fort longtemps et qui traitait du passage entre la 55e et la 56e - l'actuelle - législature ?

On pourrait se demander pourquoi nous n'avons pas simplement retiré ce projet de loi, puisqu'il arrive un peu tard. (Remarque.) Si nous ne l'avons pas retiré, c'est parce que nous pensons que, même s'il n'a pas encore été accepté, son dépôt a produit des effets, a secoué un peu les commissions et le Grand Conseil, de telle sorte que le nombre d'objets en retard s'est, semble-t-il, considérablement réduit. Nous avons donc pensé, nous radicaux, que si ce projet de loi avait pu accélérer les travaux et réduire le retard dans le passage entre la 55e et la 56e législature, il pourrait peut-être le faire pour les législatures suivantes. Telle était la raison de maintenir sa discussion en commission: non plus pour réduire ce projet de loi à un passage précis de législature, mais pour le rendre pérenne et pouvoir compter dessus afin de réduire le retard. Car le retard, bien sûr, s'accumule. A ce propos, je vous rappelle que l'on a discuté, il y a un mois à peine, d'un projet de loi qui avait été déposé en 1992. Et on l'a voté, finalement, dix-sept ans plus tard !

Je m'arrêterai ici en disant que le groupe radical propose de renvoyer ce projet de loi à la commission des droits politiques pour en discuter, l'amender, l'améliorer, le pérenniser, et pour que nous puissions compter dessus afin d'éviter des retards qui s'accumuleraient à chaque législature.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi de ce projet de loi à la commission des droits politiques. Peuvent s'exprimer les rapporteurs et le Conseil d'Etat. Puisque personne ne désire prendre la parole, nous procédons au vote. Le vote est lancé. (Quelques instants s'écoulent.) En l'absence de l'opératrice, nous procédons au vote à main levée.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 9683 à la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil est rejeté.

Le président. Le résultat étant clair, je crois qu'il était inutile de compter les voix ! La parole est à M. Gautier...

Une voix. Non, c'est à Mme Gautier ! (Rires.)

Le président. Veuillez m'excuser, Fabienne, j'ai mal lu...

Mme Fabienne Gautier (L). On a beaucoup parlé d'égalité des sexes ce soir... Monsieur le président, vous êtes tout excusé, mais je ne suis pas encore un homme ! (Commentaires. Rires.)

Ce projet de loi, Mesdames et Messieurs les députés, vise à tout bazarder d'un seul coup, si l'on peut dire, à vider l'ordre du jour en une seule fois à la fin d'une législature. En quelque sorte, un parti disparaît et tous les projets de lois, motions et résolutions émanant de ce parti disparaissent avec lui. Cependant, les libéraux sont contre une solution où tous les vieux objets sont mis au fatras. Les libéraux ne veulent pas se doter d'une règle qui ne marche qu'une seule fois. Surtout, ce projet de loi est totalement antidémocratique: c'est un non-respect de la démocratie, qui vise à supprimer tous les projets de lois et autres objets qui ont été déposés par des députés qui ne siègent plus dans ce Grand Conseil. Or ce n'est absolument pas acceptable vis-à-vis des personnes qui ont siégé pendant des années dans ce parlement et qui ont déposé des projets de lois ou des motions. En fait, on pourrait dire que c'était peut-être un coup de gueule à la fin de la dernière législature par rapport à l'Alliance de gauche, qui ne siège plus dans ce Grand Conseil.

Actuellement, grâce au projet de loi qui a été déposé par les libéraux et voté par ce Grand Conseil, les motions dont les rapports ne sont pas déposés dans les deux ans doivent être présentées de nouveau au Grand Conseil. Nous avons voté ce projet de loi l'été passé, et nous pensons que cela va beaucoup améliorer nos travaux. D'ailleurs, on a pu s'en rendre compte: le parlement a déjà éliminé pas mal d'anciennes motions et le Conseil d'Etat a rendu beaucoup de rapports. Ainsi, tout le monde a fait un grand travail, tant du côté du Conseil d'Etat que des députés, des parlementaires. Nous pensons donc que ce projet de loi, tel qu'il est présenté, n'a pas lieu d'être. C'est une perte de temps, comme l'a dit le rapporteur de majorité, mais également d'argent, argent que nous perdons en ce moment à discuter d'un projet de loi qui n'a vraiment pas de raison d'être. Voilà pourquoi les libéraux refuseront l'entrée en matière de ce projet de loi.

Le président. Merci, Madame la députée. Le Bureau décide de clore la liste des intervenants. Doivent encore prendre la parole Mmes et MM. Garcia, Guénat, Baud, Weiss, de Battista, Follonier et Hirsch, ainsi que les deux rapporteurs et le Conseil d'Etat, s'il le désire.

M. Pablo Garcia (S). Mesdames et Messieurs les députés, en préambule, j'aimerais tout de même rendre hommage - une fois n'est pas coutume - aux députés radicaux, qui ont déposé plusieurs projets portant justement sur les éléments de réforme du fonctionnement de notre parlement. Je tenais à ce que ce soit salué. Certains de ces projets de lois se sont heurtés à des majorités motivées par des sentiments divers, mais ayant une constante, à savoir que ces projets ne répondent malheureusement pas correctement aux bonnes questions qu'ils posent.

Ce projet de loi, Monsieur Selleger, en fait partie, car il ressemble, comme l'a dit le rapporteur de majorité, à un pansement sur une jambe de bois. Il arrive devant nous alors que notre parlement a déjà apporté des pistes de réflexion et pris des décisions allant dans le sens de l'allégement des objets en commission, les objets parlementaires devant désormais être présentés au Grand Conseil deux ans après leur renvoi en commission.

L'amendement présenté par M. Selleger, qui consiste notamment à demander de retirer les objets non traités par une commission avant la fin d'une législature, ne résout en rien ce problème, car la continuité du travail parlementaire ne peut être tributaire d'une nouvelle législature ou de nouvelles élections. Ce n'est pas parce que des objets sont retirés automatiquement que les problématiques qu'ils traitent disparaissent. Par conséquent, il n'est nul besoin de s'arrêter plus longuement, je crois, sur ce projet de loi, dont les propositions sont désormais obsolètes. Voilà pourquoi les socialistes ne peuvent pas y souscrire.

M. Philippe Guénat (UDC). Que dire quand il n'y a pas grand-chose à dire ? Alors, je ne dirai rien ! Voilà ! (Rires. Commentaires.) Tout à fait. Au vu de toutes les mesures qui ont été prises durant cette législature pour résoudre ce problème, ce mauvais projet de loi radical, bâclé, n'a pas lieu d'être. Voilà pourquoi le groupe UDC le refusera. Et à notre sens, la seule raison pour laquelle il y a eu un rapport de minorité a peut-être été un souci pécuniaire, ce que nous regrettons.

Le président. Merci, Monsieur le député. (Brouhaha.) Mesdames et Messieurs, un peu de silence, s'il vous plaît ! La parole est à Mme Baud.

Mme Catherine Baud (Ve). Je serai brève, puisque beaucoup de choses ont déjà été dites. Effectivement, cette dernière législature a vu se succéder un certain nombre de textes portant sur la réorganisation de notre Grand Conseil. Certains ont abouti, d'autres pas. Et il est vrai que celui-ci est pour le moins curieux, puisqu'il consiste à oublier tout ce qui a été fait à la précédente législature pour repartir à zéro. On constate que c'est comme si l'on oubliait, assez curieusement, le travail qui avait été accompli auparavant. Je trouve que c'est tout à fait excessif, même si des députés ne sont plus présents.

Pour toutes ces raisons, les Verts n'entreront pas en matière sur ce projet de loi. Je pense en effet qu'il est judicieux de ne pas entrer en matière, étant donné que l'on peut tout à fait - et l'on s'en est aperçu - modifier nos travaux et les améliorer avec des mesures qui ne sont pas automatiques, dont on peut donc discuter et qui correspondent au respect du travail des députés.

M. Pierre Weiss (L). Mesdames et Messieurs les députés, j'en reviens tout d'abord aux insectes et aux problèmes extrêmement fondamentaux auxquels se référait M. Selleger au début de son intervention. Y a-t-il des taons ou des moustiques ? On pourrait se demander si cette année il y a des hannetons... Y a-t-il des cloportes ? Non, je ne crois pas que ce soit ainsi qu'il faille nous décrire nous-mêmes. Il faut au contraire voir des paradoxes.

Il faut voir un paradoxe dans ce projet de loi, notamment lorsque l'on observe l'effet qu'il a sur notre comportement quand on considère son titre: «Projet de loi visant à alléger la liste des objets parlementaires en suspens». Tout à l'heure, un député de l'UDC s'est demandé: «Que faut-il en dire ?» Eh bien, nous sommes au moins huit, sinon dix députés, à nous demander non seulement ce qu'il faut en dire, mais à le dire ! Et nous l'exprimons, ma foi, avec les mots qui nous viennent. Or ces mots ne sont pas nécessairement les plus mauvais. Ils me conduiraient dans un premier temps - peut-être parce que ce projet de loi est radical - à penser qu'il est excellent. (Exclamations.) Et je vais essayer de vous expliquer comment j'ai quasiment réussi à me convaincre qu'il était bon. Mais, finalement, à l'issue d'un caucus interne, dont je vous prends à témoins avec ma collègue Gautier, je suis arrivé à la conclusion qu'il fallait quand même suivre la discipline de mon groupe.

Alors pourquoi ce projet serait-il bon ? Il est bon, non pas parce qu'il voudrait éliminer les projets de l'Alliance de gauche - ce qui serait en soi une excellente idée... Non, il est bon parce qu'il met en évidence une faiblesse de ce parlement, à savoir la lenteur - dont nous sommes coupables - à traiter certains objets. De ce point de vue là, nous en fournissons ce soir une démonstration à laquelle, modestement, j'essaie de contribuer, Monsieur le président ! (Brouhaha.) Mais cette lenteur à traiter certains objets a un grand avantage. Elle permet d'éviter d'adopter des objets dont on se rendrait compte - par la suite - que l'adoption aurait été inutile voire néfaste. En d'autres termes, la technique chère à Mme Nothomb de manger des objets pourris, ou en tout cas de conserver des objets, des fruits, des légumes, pour essayer d'en faire son quotidien alimentaire, comme elle l'a expliqué, est probablement la meilleure... En effet, elle permet de discerner le bon grain de l'ivraie. Laissant ainsi les ans passer, on peut se rendre compte, comme on l'a fait tout à l'heure avec certains objets de notre ordre du jour, qu'il convient au fond de les envoyer à la corbeille, là où, comme le disait Marx - permettez-moi de citer un illustre ancêtre ! - il y a la critique rongeuse des rats qui vient à bout des projets les plus mauvais !

Cela étant dit, et ayant fait l'hommage que ce projet méritait, il convient aussi d'avoir un petit regard empirique sur notre ordre du jour. Actuellement, nous avons 137 points à notre ordre du jour. De ces 137 points, il n'y en a en réalité que 35 qui sont importants, 35 projets de lois. Les autres sont des motions, des résolutions, des pétitions, dans lesquelles certains partis se spécialisent. Pas les libéraux, je dois le dire ! A ce propos, j'aimerais que l'hommage que j'ai rendu aux radicaux me soit rendu par ces derniers dans une intervention ultérieure qu'ils pourraient faire, à savoir que les libéraux ne présentent pas des objets qu'ils considèrent eux-mêmes comme superflus. (Brouhaha.) Et nous essayons, nous libéraux, de ne présenter que des projets de lois, et je dirai même des projets de lois essentiels.

On compte 12 projets de lois sous les anciens objets, 23 sous les nouveaux objets. Voilà l'essentiel de notre ordre du jour. De ce point de vue là, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je suis à même de prétendre deux choses. La première est que notre ordre du jour n'est nullement encombré et que ceux qui se risquent dans cette interprétation ne lisent pas en profondeur l'ordre du jour. (Rires. Brouhaha.) La deuxième conclusion que je voudrais porter à votre attention... (Brouhaha.)

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Monsieur Weiss, vous avez encore droit à une minute de parole.

M. Pierre Weiss. ...est que, face à cet ordre du jour qui n'est pas encombré, ce projet de loi radical aurait peut-être été nécessaire si véritablement nous avions eu 137 projets de lois de l'Alliance de gauche. Comme ce n'est pas le cas, il ne doit pas, au fond, mériter de soutien. Il mérite peut-être quelques abstentions de sympathie. Mais je conseille à nos amis radicaux de prendre en considération que les oppositions qui leur seraient faites seraient, en réalité, des oppositions totalement empiriques, et pas du tout idéologiques. Voilà la raison qui me fait conclure que l'ordre libéral-radical pourrait nous permettre d'alléger cet ordre du jour. Je vous remercie, Monsieur le président.

Le président. Merci, Monsieur le député. Monsieur de Battista, la parole est à vous.

M. Régis de Battista (S). Je serai particulièrement bref après cette longue intervention, qui n'est peut-être pas inutile - avec tout le respect que j'ai pour M. Weiss. Même si cela a déjà été dit, je voulais souligner qu'il faut respecter les anciens députés, qui ont déposé pas mal de projets. De plus, il est tout à fait normal de considérer leur histoire et de constater avec le temps que leurs réflexions demeurent. On ne peut pas simplement les effacer. C'est exactement ce que Mme Gautier a dit. (Brouhaha.)

Je voulais aussi relever que, dans cette affaire, le plus simple est carrément de refuser ce projet, il me semble, afin qu'elle ne dure pas plus longtemps... (Brouhaha.)

Le président. Un peu de silence, s'il vous plaît ! Il reste un quart d'heure. Merci.

M. Régis de Battista. Enfin, on peut saluer l'effort que représente le dépôt de cette proposition, ainsi que de la suivante. Au moins, un parti réfléchit et cherche des solutions pour alléger la charge du parlement. J'appelle tous les députés ici présents à trouver des remèdes dans ce sens. Je crois que la commission des droits politiques n'a pas encore trouvé la méthode, elle cherche encore. On a eu une proposition des Verts il y a quelque temps qui va soulever bien des débats, je pense prochainement, mais il n'empêche qu'il faut continuer à songer à une méthode qui permettra d'être plus efficace.

M. Jacques Follonier (R). Mesdames et Messieurs les députés, bien que nos bancs soient très clairsemés ce soir... Je ne sais pas comment exprimer cela, mais j'ai envie de dire: quelle hypocrisie ! Quelle hypocrisie ! J'ai été touché par le mea culpa de M. Weiss, qui finalement nous a bien montré à quel point il souhaitait occuper l'ordre du jour ce soir pour ne pas arriver plus loin et pour finir nos travaux dans un temps qui se morfond, mais qui fait plaisir en tout cas aux libéraux. Finalement, pourquoi ces libéraux - M. Walpen, en fait - sont-ils si acharnés contre ce projet de loi ? Voilà ce qui me touche. Je pense qu'il serait piquant d'aller regarder quels sont ces projets de lois si anciens et ces motions si anciennes, parce que je suis persuadé que le parti libéral, qui était à l'époque très prolifique, a dû déposer un nombre de projets de lois et de motions qui sont maintenant anciens et dont il ne veut certainement pas le retrait. Alors que les radicaux, vous l'avez entendu en début de séance hier, ont retiré sans sourciller six points de l'ordre du jour, ce que beaucoup de groupes ici n'ont pas fait. On peut donc se poser cette question.

Cependant, le Bureau est bien conscient de notre problème. Il a écrit à tous les présidents de commission - et j'en suis un. Nous avons reçu l'«ordre», le souhait le plus fervent - et je comprends, Monsieur le président - que l'on arrive à épurer notre ordre du jour. Parce que si M. Weiss nous parle de nos fameux 137 points à l'ordre du jour actuellement, il oublie de mentionner les dizaines de dizaines de points qui traînent en commission et qui ne figurent pas à cet ordre du jour. (Commentaires.) Oui, aux finances !

Le président. Veuillez s'il vous plaît laisser parler l'orateur ! Madame Gautier... Merci.

M. Jacques Follonier. Cela étant, il reste quand même le fait que nous nous trouvons devant un constat lamentable: même si les commissions travaillent énormément, nous sommes submergés de vieux projets qui n'ont plus aucun sens, des casse-têtes chinois pour les commissions. (Remarque.) Vous en êtes tous membres, alors cessez de le dire ! Vous comprenez tous, puisque tous nous avons ces mêmes problèmes: des projets de lois qui n'ont plus de sens, de cohérence, qui ne sont plus à jour, qu'il faut étudier même quand de nouvelles lois ont déjà été votées. (Brouhaha.) M. Weiss aussi, qui est quelqu'un de très précautionneux des sous de l'Etat, a, en tant que président de la commission de l'économie, suspendu le traitement des travaux de cette commission pendant plusieurs semaines pour réaliser des économies. Aujourd'hui, on se rend compte qu'il y a quelque chose qui ne marche pas, et je le regrette. (Brouhaha.) Je me demande combien de temps ce parlement pourra continuer ainsi.

Effectivement, on peut critiquer ce projet de loi, lui trouver tout ce que l'on veut. On dit bien: «Qui veut noyer son chien l'accuse de la rage.» C'est peut-être le slogan des libéraux. Mais nous pensons que ce parlement doit avancer. Peut-être avons-nous beaucoup travaillé... Je vous rappelle que c'est suite à un projet de loi radical que nous renvoyons les projets de lois sans débat, et vous en êtes aujourd'hui tous contents, parce que nous gagnons du temps. Vous verrez que le projet que l'on a déposé et qui demande de renvoyer les propositions de motions sans débat, on y arrivera aussi, parce que c'est tout simplement obligatoire. Et ce n'est pas parce que nous avons une vision un peu novatrice qu'il faut que certains n'aient pas la même vision que nous. Finalement, on peut très bien y arriver, le but étant que notre parlement puisse travailler sereinement, ce qui est à mon avis le souhait non seulement du parlement, mais aussi de son président.

Une voix. Bravo ! (Applaudissements.)

Mme Béatrice Hirsch (PDC). Mesdames et Messieurs les députés, je serai très brève afin de ne pas, comme l'a souligné le rapporteur de majorité, perdre plus de temps à parler d'un projet de loi qui cherche à la base à en gagner. Pour toutes les raisons invoquées précédemment concernant l'inutilité de ce projet de loi, et particulièrement en attendant les effets de la loi 9923, les démocrates-chrétiens refuseront l'entrée en matière de ce projet de loi.

M. Charles Selleger (R), rapporteur de minorité. J'aimerais répondre à deux ou trois interventions. D'abord, Mme Gautier considère le cas particulier des groupes qui disparaissent. Il est vrai que, d'une législature à l'autre, parfois - pas toujours - un groupe, en général pas plus, disparaît. Mais c'est le cas particulier, l'exception. Donc le projet de loi n'est pas centré sur ces disparitions-là. Alors je ne sais pas quel est le souci de Mme Gautier... Peut-être le parti libéral est-il menacé de disparaître, qui sait ?!

Quant aux propos de M. Guénat, je dirai que je les ai ressentis quasiment comme une injure. Et je vous remercie, Monsieur Guénat, de cette intervention. Elle me permet en effet de vous répondre que, au moment où je me suis annoncé comme rapporteur de minorité - c'était mon premier rapport - ma jeunesse dans ce parlement faisait que je ne savais même pas que les rapports de minorité étaient rétribués.

Enfin, j'aimerais encore répondre ceci aux propos de M. Weiss. Ses préopinants nous accusent de traiter sous la jambe des objets déposés par des groupes qui ont disparu. Mais alors, que dire de sa constatation ? Il n'y a finalement qu'à attendre un peu pour que les objets déposés pourrissent d'eux-mêmes ?! C'est aussi une manière de les traiter sous la jambe.

M. Francis Walpen (L), rapporteur de majorité. Mes chers collègues, je n'ai absolument rien, quoi qu'en pense M. Follonier, contre ce projet de loi. Ce qui m'irrite, en revanche, c'est de savoir que nous attendons encore un rapport de M. Follonier sur une pétition concernant un problème du commerce qui doit dater de 2001 ou 2002. M. Follonier voudra bien faire les recherches idoines et peut-être déposer son rapport ! (Commentaires.)

Le président. S'il vous plaît, laissez parler l'orateur ! Monsieur Walpen, avez-vous terminé ?

M. Francis Walpen. Non, Monsieur le président.

Le président. Alors veuillez poursuivre.

M. Francis Walpen. Pour le reste, Monsieur le président, j'étais tout à fait disposé à pardonner beaucoup de choses au rapporteur de minorité, mon excellent ami. Mais je suis tout de même obligé de lui dire que, si se tromper est tout à fait humain, persévérer est diabolique ! N'entrons pas en matière et rejetons ce projet de loi ! Cela sent le soufre ! (Brouhaha.)

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous allons donc nous prononcer sur la prise en considération de ce projet de loi 9683.

Mis aux voix, le projet de loi 9683 est rejeté en premier débat par 49 non contre 11 oui.

Le président. Mesdames et Messieurs, je vous demande encore trente secondes d'attention, s'il vous plaît. Vous voulez tous accélérer le travail de ce parlement, j'en suis persuadé. Alors je vous rappelle que le Bureau a écrit à tous les députés qui avaient du retard dans la remise de leurs rapports - et j'en suis - en leur demandant de profiter de vacances de Pâques studieuses pour rédiger ces derniers et pouvoir les rendre. Nous pourrons ainsi avancer dans nos travaux. Je vous souhaite de bonnes fêtes de Pâques et vous donne rendez-vous le 14 mai. Bonne rentrée !

La séance est levée à 22h50.