République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1600-A
Rapport de la commission de la santé chargée d'étudier la pétition pour des subventions garantissant les postes et les prestations, nos conditions de travail et de salaire !
Rapport de majorité de Mme Ariane Reverdin (L)
Rapport de minorité de M. Alain Charbonnier (S)

Débat

Mme Ariane Reverdin (L), rapporteuse de majorité. Sur le plan des septante-trois mesures d'économie du Conseil d'Etat, la quarante-neuvième touche directement le secteur des EMS. Cette mesure introduit en effet une subvention bloquée sur quatre ans. Or la présente pétition a été déposée au moment où le Conseil d'Etat a bloqué cette subvention. Elle est en réalité très orientée vers la défense des intérêts du personnel, vu la diminution des moyens à disposition. Ainsi, les pétitionnaires demandent un outil d'évaluation des besoins. Il s'agit de l'outil PLAISIR, qui permet de calculer la dotation en personnel. En effet, les pétitionnaires se soucient de l'augmentation de la charge de travail, de la diminution des postes et du risque de licenciement, les économies sur le dos du personnel ayant nécessairement un coût en termes de prestations.

Les pétitionnaires demandent un outil d'évaluation des besoins alors que le Conseil d'Etat demande un outil d'évaluation de la qualité. En réalité, la commission ne croit pas au bien-fondé des pétitionnaires, qui prétextent la bonne prise en charge des personnes, alors que le seul objectif de cette pétition est purement syndical, à savoir préserver le statut du personnel médical. Je ne souhaite pas entrer plus en détail dans les considérations techniques relatives à cette pétition, mais je vous demande de suivre la voix de la majorité, à savoir de déposer cette pétition sur le bureau de Grand Conseil.

M. Alain Charbonnier (S), rapporteur de minorité. D'abord, je noterai que ce rapport est étonnant, car, à aucun endroit, il ne nous donne la position des pétitionnaires... J'ai beau tourner les pages, je n'en trouve pas trace ! Rien que pour cette raison, je demanderai le renvoi de cette pétition en commission. En effet, un nouveau rapport comportant la position des pétitionnaires doit être rédigé: les pétitionnaires ont été entendus par la commission de la santé bien avant que l'on vote au sein de la commission, il est vrai, cependant, Mme Reverdin n'a pas mentionné leur audition. Je trouve cela très regrettable, et même anormal en termes d'équité.

Que demande cette pétition ? Je vous rappelle qu'elle a été déposée quelques mois avant qu'ait lieu le vote de l'initiative 125, dont il n'y a pratiquement pas trace non plus dans ce rapport. Cette initiative demande en fait exactement la même chose que la pétition. Madame Reverdin, je vous pose cette question: le peuple a-t-il voté une position syndicale lorsqu'il a accepté l'initiative 125 ?! Pas du tout ! Il a voté sur le titre de l'initiative, qui était «Pour une meilleur prise en charge des personnes âgées en EMS». Et cette pétition va exactement dans le même sens !

En 2006, le Conseil d'Etat a décidé unilatéralement - évidemment, à ce moment-là - de bloquer la subvention 2006 jusqu'en 2009, c'est-à-dire quatre années, sur la base de la subvention 2005 - moins 8% - de façon à «coller» aussi aux demandes d'économies au niveau administratif dans les EMS. Les EMS ont été les premiers bons élèves du système, finalement, puisqu'ils ont accédé à ce voeu du gouvernement; ils ont réduit leurs charges de 8% en 2006 et ont «collé» à cette subvention, calquée - elle reste donc la même - sur quatre ans.

Le problème est que la loi encore en vigueur sur les EMS, la LEMS, stipule que la subvention est donnée en fonction de l'encadrement médico-social dont ont besoin les résidents. Manifestement, un blocage de subventions sur la question des EMS n'est pas légal; d'ailleurs, le Tribunal administratif, suite à un recours de l'EMS des Charmettes contre le blocage de la subvention, a donné raison à l'EMS. On n'a toujours pas la réponse du gouvernement, on la connaîtra peut-être lors des débats sur la nouvelle loi concernant les EMS, mais pour l'instant, très clairement, la façon de bloquer cette subvention sur quatre ans est illégale d'après le Tribunal administratif.

Que demande la pétition ? Le retour à l'utilisation de l'outil PLAISIR qui calcule la dotation en personnel au niveau des soins. Cet outil est d'ailleurs toujours employé, puisque les assurances se calquent dessus dans les EMS pour fixer leurs tarifs... Doit-on alors penser que ce que font les assurances en employant cet outil, eh bien, le gouvernement, à Genève, n'en serait pas capable ?! Je rappelle pourtant que cet outil est en place, qu'il est employé, et qu'il ne coûte pas grand-chose au gouvernement pour fixer les subventions des EMS.

En commission, on a reçu des statistiques et des tableaux très bien conçus qui nous montrent clairement, à partir de 1987, l'évolution de la population dans les EMS. Au début, il y avait beaucoup de cas dans les classes PLAISIR numéro 1, c'est-à-dire les gens les plus autonomes. Actuellement, il y a un décalage total en direction de la classe la plus élevé, la classe 8. La classe 1 est abandonnée, maintenant la classe 2 l'est aussi, et il semblerait que la classe 3 le soit largement aujourd'hui parce que les cas sont de plus en plus lourds en EMS.

Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.

M. Alain Charbonnier. Oui, Monsieur le président, je vais terminer. Par conséquent, le taux d'encadrement a aujourd'hui fortement diminué en regard des cas qui sont en EMS. Très peu de monde dans ce parlement semble vouloir s'en rendre compte: une grande majorité de ce parlement va contre la volonté populaire, qui a été de redonner les moyens en EMS suite à la votation de l'initiative 125 en 2007. Mais cela continue...

Le président. S'il vous plaît, Monsieur le député !

M. Alain Charbonnier. Mme Reverdin nous parle seulement d'une simple pétition syndicale... Pas du tout ! Il s'agit de préserver la meilleure prise en charge possible des personnes âgées en EMS.

Le président. Merci, Monsieur le député. Nous sommes saisis d'une demande de renvoi en commission. Peuvent prendre la parole les rapporteurs... (Commentaires. Le président est interpellé.) Ce n'est pas du tout la même chose qu'une pétition, Monsieur ! Nous avons avec les pétitions la même règle qu'avec les projets de lois. Nous sommes donc saisis d'une demande de renvoi et allons procéder au vote, si personne ne veut prendre la parole. Je pense que c'est à la commission de la santé que vous voulez... (Remarque de M. Alain Charbonnier.) Vous pouvez parler, bien sûr ! Je rappelle que les deux rapporteurs peuvent prendre la parole, ainsi que le conseiller d'Etat.

M. Alain Charbonnier (S), rapporteur de minorité. J'aurais souhaité un renvoi à la commission de la santé, puisque ce rapport en vient. Malheureusement, les conseillers d'Etat jouent au ping-pong avec les EMS et aujourd'hui ces derniers se trouvent chez M. Longchamp qui s'occupe uniquement de la gestion; je ne sais pas ce que l'on va faire, car le domaine médical ne relève pas de ses prérogatives. C'est pourquoi je serais plutôt en faveur d'un renvoi à la commission de la santé - or je pense que la majorité de cet auditoire va renvoyer cette pétition aux affaires sociales... On pourra alors auditionner les pétitionnaires, de façon qu'il y ait une trace dans ce rapport qui, je le rappelle, a été bâclé.

Mme Ariane Reverdin (L), rapporteuse de majorité. On m'attaque, je dois tout de même me défendre. Le rapport est ce qu'il est, néanmoins je trouve que nous avons déjà passé de nombreuses heures sur cette pétition: nous avons auditionné les pétitionnaires, nous avons examiné cet objet de fond en comble, alors je ne vois pas pourquoi y consacrer encore plus de temps. Il y a d'autres sujets qui me semblent d'une plus grande importance.

Mis aux voix, le renvoi du rapport sur la pétition 1600 à la commission de la santé est rejeté par 36 non contre 33 oui.

Le président. Nous poursuivons donc notre discussion. La parole est à M. Forni.

M. Michel Forni (PDC). Cette pétition offre une passerelle, il faut le dire, entre aider, les revendications sociales et économiques... (Brouhaha.) ...allant de l'indexation des salaires aux charges professionnelles. Elle franchit le grand fossé du secteur d'activité en développement constant qui est celui de la vieillesse, pour rejoindre des revendications professionnelles, il est vrai, avec notamment l'outil d'évaluation et les garanties du niveau de prestations. Comme cela a été dit, elle a un degré de parenté qui se rapproche de l'initiative 125, qui elle-même demandait une meilleure prise en charge des personnes âgées en EMS.

Cette pétition a été analysée en avril 2008 par la commission de la santé dans un temps où la conjoncture et le climat social étaient moins défavorables qu'aujourd'hui. Elle est une sorte d'«exfiltration» et traduit un terrain peu miné où chaque courant campe, au moyen d'auditions, sur ses positions, en voulant noyer l'influence des uns et, à l'opposé, rassurer ses alliés. Les professionnels de la santé, cependant, sont divisés. Et l'on est en droit d'afficher un certain scepticisme face à cette pétition, les uns par rapport aux exigences de ces collaborateurs du système de santé, les autres face à des revendications jugées à droite comme parfois dispendieuses et sans vision et à gauche comme n'étant pas assez audacieuses ni ambitieuses.

Cette pétition a des accents d'un pseudo-plan de sauvetage de l'outil PLAISIR et traduit aussi une inquiétude face à des méthodes d'administration de certaines institutions de type EMS - où la politique et l'argent peuvent entretenir des relations parfois ambiguës - et surtout face à des pesanteurs du système de la santé conçues parfois pour brider des initiatives, ralentir des changements et équilibrer des pouvoirs jusqu'à une forme de paralysie incomplète, pour ensuite favoriser une réforme.

La contradiction reste cependant inévitable et la rhétorique, vertueuse des uns et volontariste des autres, ne peut que se heurter à un pragmatisme des gestionnaires politiques. Comme cela a été dit, il y a analyse des relations de travail. Celle-ci se fait par la loi sur les établissements médico-sociaux qui accueillent les personnes âgées: il y a des problèmes concernant la trésorerie, les subventions d'exploitation et cet outil PLAISIR. De plus, il y a aussi un Etat qui a pour rôle de planifier et de rationaliser l'offre des soins avec une forme de dirigisme - il est vrai - sanitaire, mais qui continue à s'occuper, comme le disaient certains journalistes, de tout et de tous, sauf des soins et des malades.

Cependant, la firme budgétaire ne peut être le seul instrument des réformes et l'établissement para-hospitalier doit être ressenti également comme une entreprise, et plus encore comme une institution qui tient compte de certaines logiques, notamment en gériatrie. C'est la raison pour laquelle, dans une crise économique qui se développe et qui balance parfois entre l'apocalypse et le funéraire, on serait plutôt en droit de se demander, puisqu'il n'y aucune dépression salariale dans ce contexte et que l'encadrement doit être optimisé par des preuves de formation, si l'on ne veut pas trop, en ces temps de crises, le beurre, l'argent du beurre et la «fille de la fermière» pour justifier, il faut le rappeler, le sort de notre population, qui se joue parfois sur des impressions populaires, mais aussi au prix d'une surveillance pour un Etat endetté tel que celui de Genève, qui se doit de garder la tête froide et de bien faire la part des choses quant aux subsides accordés dans les différentes formes de la médecine, fût-elle gériatrique ou infantile.

Voilà les raisons pour lesquelles, après de longues discussions, la proposition du PDC que je vous ferai ce soir est de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Nathalie Fontanet (L). Mesdames et Messieurs les députés, ce rapport de minorité est un rapport électoraliste et syndicaliste. Electoraliste, pourquoi ? Parce que cette pétition a été déposée en 2006; que, depuis lors, de nombreux événements sont survenus; que, pendant l'étude de cette pétition, le département a répondu à l'ensemble des questions qu'elle posait; que ni la gauche ni le rapporteur n'a demandé d'autres auditions ou posé d'autres questions; que les réponses ont été obtenues et que, dans ce contexte, il convient de suivre le rapport de majorité et de renvoyer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi d'être d'un avis tout à fait opposé à celui de Mme Fontanet et de la rapporteure... (Exclamations.) Cela vous étonnera ! (Commentaires.) Si chaque fois que l'on fait un rapport de minorité, on est taxé d'électoraliste, je crois que l'on peut rendre la pareille. Certains sont très forts pour proposer des projets de lois inutiles et des motions à n'en plus finir. Donc, adressez-vous plutôt à vos partenaires de l'Entente !

Les demandes de la pétition sont, à notre avis, encore totalement d'actualité et tout à fait fondées. Cela a été dit, mais il faut apparemment le répéter: l'initiative 125 a tout de même été acceptée par 60% des citoyennes et citoyens genevois et, à l'époque, le Conseil d'Etat avait prétendu que cette initiative coûterait 60 millions, tout cela pour dissuader la population genevoise de l'accepter. Or cette initiative a été acceptée, et finalement - changement de discours - l'initiative ne coûte pas si cher... Et l'on a dû faire des pieds et des mains, plus exactement les comités d'initiative ont dû faire du lobbying afin d'obtenir cinq petits millions pour le budget 2008. C'est dire si le Conseil d'Etat foule aux pieds les droits des citoyens et des citoyennes, puisque cette initiative a été votée mais n'est toujours pas mise en oeuvre correctement. D'ailleurs, si cette initiative était vraiment appliquée, les EMS n'auraient pas de problème à faire face à l'augmentation des charges.

Je vous rappelle également que, selon la LEMS - et cela a également été mentionné dans l'excellent rapport de minorité - la subvention doit tenir compte de l'intensité et de l'encadrement médico-social. Or le plan de mesures d'économie numéro 49 prévu par le Conseil d'Etat foule aux pieds, aussi, cette loi ! Voilà le deuxième problème.

Enfin, un EMS a déposé un recours contre cette situation... (Brouhaha. Le président agite la cloche.) ...et le Tribunal administratif a statué en faveur de cet EMS. Et là encore, le Conseil d'Etat persiste et signe.

Alors vous comprendrez, Mesdames et Messieurs les députés, que nous continuons à soutenir le renvoi de cette pétition au Conseil d'Etat: il ne s'agit absolument pas d'une pétition syndicaliste ou électoraliste, il en va de la qualité de l'accueil et des soins dispensés à nos aînés en EMS ! Par conséquent, je vous demande de suivre les recommandations du rapport de minorité. (Applaudissements.)

M. Gilbert Catelain (UDC). La commission de la santé a considéré que la situation avait passablement changé depuis le dépôt de cette pétition et son traitement; elle a surtout constaté que les prévisions des auteurs de ce texte ne se sont pas réalisées. Apparemment, il n'y a pas eu d'augmentation de la charge de travail, de diminution du nombre de postes, de déqualifications, de licenciements, de développement du bénévolat, ni d'accentuation de la privatisation des secteurs hors soins - en tout cas pas plus entre 2008 et 2006; en commission de la santé, lors du traitement du projet de loi sur les EMS, le département ne nous a rien signalé à ce propos, le département de l'action sociale non plus. Et il n'y a pas forcément eu de pressions sur les horaires, puisque cet élément n'est pas, non plus, apparu lors de l'examen du PL.

Par contre, on sait qu'en comparaison suisse l'encadrement à Genève est supérieur de 25%, puisque nous avons un employé pour un résident - alors qu'en Suisse le ratio est de 0,8 employé pour un résident - et que la rémunération telle qu'elle a été calculée par le département de l'action sociale est de 15% à 30% supérieure à celle du reste de la Suisse - qui a une moyenne, sauf erreur, de 25% à 28%. Donc, Genève se distingue des autres cantons suisses par un meilleur taux d'encadrement et une meilleure rémunération.

Que nous a dit le département en commission, concernant les mesures prises par le Conseil d'Etat depuis le dépôt de la pétition, le 16 novembre 2006 ? Je cite, c'est à la page 10 du rapport: «Le Grand Conseil a accordé, le 14.12.2007, une enveloppe complémentaire de 5 millions de francs pour les EMS.» Nous avons également voté une enveloppe complémentaire dans le budget 2009, ce qui remplit intégralement la première invite des pétitionnaires. Sur ce plan, l'affaire peut être considérée comme réglée.

Concernant la charge de travail, que nous dit le département de l'économie et de la santé ? Voici: «La charge en soins est [...] restée très stable depuis 2006.» En effet: «Entre octobre 2006 et octobre 2007, aucun changement important n'est intervenu dans les structures des EMS des 4 cantons romands utilisateurs de cette méthode» - c'est-à-dire l'outil PLAISIR. Et je termine: «Une légère diminution du temps de soins a même été constatée dans le canton de Genève.»

Concernant la qualité des soins, un exposé a été présenté sur le nombre d'escarres qui ont été constatées dans les EMS romands et genevois et l'on a relevé que le seul canton où cette anomalie a baissé était Genève. C'est donc une bonne nouvelle, la qualité des soins y est encore meilleure que par le passé.

En ce qui concerne la charge de travail et le taux d'encadrement, on s'aperçoit que l'attribution par poste, la dotation requise, était d'environ 83,5% par rapport aux normes de l'outil PLAISIR.

Le président. Il faudra terminer, Monsieur le député.

M. Gilbert Catelain. Je vais bientôt terminer. Mais surtout, on a constaté que l'absentéisme était très important dans les EMS: 24% en considérant les congés de maternité; 12% sans les prendre en compte. C'est extrêmement élevé et c'est là que se trouve la marge de manoeuvre. Un groupe de travail a été mandaté au niveau romand pour harmoniser le calcul de l'absentéisme et dans le contrat de prestations 2009 le département a fixé un objectif à 4,5%.

Le président. Il faut terminer, Monsieur le député !

M. Gilbert Catelain. On peut donc considérer que les invites des pétitionnaires ne sont pas justifiées et qu'il convient, comme le propose la majorité, de déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil.

Mme Brigitte Schneider-Bidaux (Ve). J'ai la lourde tâche de prendre la parole en dernier alors que tout le monde à faim, je sais... Cependant, on parle ici de dotation en personnel, de qualité de prestations et de soins aux personnes âgées. Effectivement, Genève a un taux élevé d'encadrement: heureusement ! J'en suis fière. Et j'espère que les habitants de Genève sont fiers de l'existence de ces encadrements. L'outil PLAISIR existe: heureusement ! C'est celui qui est utilisé dans la plupart des cantons romands.

S'il y a plus de personnel dans les EMS de Genève, c'est simplement parce que les patients qui peuvent entrer dans ces établissements sont beaucoup plus dépendants que dans les autres cantons ! Il faut seulement le savoir, c'est une simple question mathématique... Nous avons effectivement davantage de personnel, mais c'est parce que les patients ou les clients des EMS sont des personnes dépendantes ayant besoin de soins. Si le personnel des EMS est qualifié et motivé, s'il reçoit un salaire correct, le travail sera bien fait; si le personnel n'a pas le temps d'accomplir ses tâches, s'il est suroccupé et, en plus, mal payé, cela n'ira pas ! Cette pétition demande donc que le système existant actuellement perdure et ne soit pas péjoré.

Il me semble important d'avoir une réponse du Conseil d'Etat par rapport à ce qui se fait maintenant et par rapport à la nouvelle loi qui est en discussion en commission des affaires sociales. C'est pourquoi je vous propose de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, afin que nous ayons une réponse circonstanciée de la situation actuelle dans les EMS.

M. Alain Charbonnier (S), rapporteur de minorité. Seulement deux mots pour expliquer le plus vite et le plus simplement possible ce qu'est PLAISIR: c'est un outil qui permet de calculer le taux moyen de soins requis - c'est-à-dire pas le grand luxe, pas le cinq étoiles, comme certains voudraient le faire passer ici... A Genève, dans les EMS, ce n'est pas le cas. De plus, on n'a pas utilisé continuellement les 100% de l'outil PLAISIR, mais environ 85%-86%. Le taux était descendu à 83,5% au moment où le dernier calcul est parvenu au département de l'économie et de la santé et lors du dépôt de la pétition. Depuis, ce taux a forcément diminué. De quelle ampleur ? On ne le sait pas, puisque le département ne s'intéresse plus à cet outil. Mais ce taux a fortement diminué pour une raison bien simple - et les statistiques qui nous ont été présentées le montrent très bien, Monsieur Catelain: la moyenne d'âge continue d'augmenter ! Par conséquent, la perte de mobilité des personnes âgées et la demande de soins ont aussi fortement progressé. Ainsi, le travail a augmenté, mais avec le même encadrement qu'en 2005, je vous le rappelle. Nous sommes en 2009, cela fait donc plus de quatre ans... Comme je le disais, la charge de travail a augmenté, et des licenciements, oui, Monsieur Catelain, il y en a déjà eu dans les EMS, sans attendre que la situation économique devienne catastrophique !

Concernant les comparaisons intercantonales - Mme Schneider-Bidaux l'a dit, de même que M. Longchamp lors des travaux de commission - il ne sert à rien de comparer des pommes et des poires ! D'après un exemple donné par M. le conseiller d'Etat, une résidence pour personnes âgées sise dans le Haut-Valais n'a rien à voir avec un EMS médicalisé - je dirai: «presque à outrance» - chez nous, car la population qui y réside n'est pas du tout la même. Alors, procéder à de pareilles comparaisons est inutile et même insultant pour les personnes travaillant et résidant à Genève !

Concernant les 5 millions, je vous rappelle quand même qu'il a fallu arracher cette somme supplémentaire pour l'enveloppe de la subvention EMS. Elle a été allouée en 2008, puis reconduite en 2009 - évidemment, elle était intégrée au budget - mais rien de plus n'a été accordé. Nous sommes donc très loin des 60 millions promis par M. Unger lors du débat sur l'initiative 125. Je vous rappelle que c'est ce qui figure dans la brochure de votation de cette dernière, et ces 60 millions constituent l'argument du Conseil d'Etat pour rejeter cette initiative.

Ainsi, cette pétition a tout à fait lieu d'être: elle est encore plus actuelle aujourd'hui, puisque la situation relative à la subvention est bloquée depuis 2005 ! Cette pétition a toute sa valeur maintenant et accompagne l'initiative 125, et on peut traiter les deux objets ensemble. Il faut absolument davantage de ressources pour les EMS, même si l'on nous annonce encore d'énormes économies à effectuer dans ce domaine au cours des prochaines années avec la nouvelle loi proposée par M. Longchamp. D'ailleurs, elle n'est pas encore adoptée, on n'a même pas voté l'entrée en matière.

Je terminerai tout de même par dire ceci: les responsables de la gestion des EMS ne sont, et de loin, pas tous des «sauvages», comme on a pu l'entendre de la bouche de M. Stauffer. Tout à l'heure, M. Longchamp a dit qu'il ne fallait pas mettre tous les EMS dans le même panier. Mais non seulement cela, car ce sont même les EMS dans leur écrasante majorité qui ne sont pas gérés par des sauvages... Il y a quelques moutons noirs, comme partout ! Comme il y en a aussi, selon certains rapports de l'ICF, dans d'autres institutions que l'on compare souvent avec les EMS.

Mises aux voix, les conclusions de la majorité de la commission de la santé (dépôt de la pétition 1600 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées par 54 oui contre 30 non.

Le président. Je vous demande encore quelques secondes d'attention. A 20h45, nous reprendrons nos travaux en traitant de la dernière urgence de l'ordre du jour. Il s'agit du point 157: proposition de résolution 578 visant à soutenir les médecins de premier recours dans leurs efforts de maintien d'une activité médicale de qualité et de proximité.

Je lève la séance. Bon appétit !