République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 28 août 2008 à 14h
56e législature - 3e année - 10e session - 60e séance
PL 10155-A
Premier débat
Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse. Ce projet de loi a été déposé par l'ensemble de la commission des visiteurs. La commission... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ...des droits politiques et du règlement du Grand Conseil a étudié ce texte avec attention, elle a retenu certaines propositions et en a écarté d'autres. Parmi celles que nous avons retenues: l'assouplissement de certaines pratiques; par exemple, le fait de pouvoir auditionner des détenus qui n'en ont pas fait la demande. Egalement, la composition des délégations pour les visites: on a supprimé l'obligation que les trois représentants soient de partis différents, puisqu'on nous a expliqué que l'ambiance consensuelle de cette commission ne nécessitait plus cette exigence. Une autre des modifications que nous avons acceptées, c'est d'augmenter le nombre de lieux accessibles à commission des visiteurs en incluant les violons, les locaux de la task force ou les cellules du Palais de justice.
En revanche, d'autres éléments nous ayant semblé exagérés, nous les avons refusés. Je vous en fais une brève liste. Tout d'abord, le changement de nom de la commission. L'appellation de «commission des visiteurs officiels» est historique et nous avons préféré garder la notion de visiteurs, puisqu'elle implique de visiter des personnes plutôt que de contrôler des lieux.
La question de la confidentialité des procès-verbaux de la commission s'est également posée, ce qui avait aussi été le cas dans un précédent projet de loi rejeté. Par cohérence, nous avons refusé d'édicter des règles spéciales pour cette commission en ce qui concerne la confidentialité des procès-verbaux.
Le projet de loi réclamait aussi que la commission puisse avoir la compétence de s'octroyer les moyens d'effectuer ses tâches. Nous avons pensé que cela allait un peu trop loin et entraînait une trop grande disparité avec d'autres commissions.
Enfin, le projet de loi demandait la possibilité d'effectuer des visites inopinées, sans avertir la hiérarchie des lieux de détention. Dans le respect de la séparation des pouvoirs, nous n'avons pas non plus conservé cet élément.
Nous avons tout de même prévu quelques aménagements des activités de cette commission, mais nous ne voulions pas, en lui octroyant des compétences trop étendues, instaurer de commissions à deux vitesses.
Nous espérons que les changements apportés pourront, dans un premier temps, améliorer son fonctionnement et nous vous invitons à accepter ce projet de loi.
M. Alberto Velasco (S). C'est en qualité d'ex-président de la commission des visiteurs que je m'exprimerai, M. Gautier étant son président actuel.
D'emblée, Madame la présidente, je tiens à dire que, concrètement, ce projet de loi n'émane pas de la commission de visiteurs de cette année-ci. Parce que depuis le temps que je fais partie - et d'autres députés également - de cette commission, je puis vous garantir qu'il s'agit de travaux qui ont duré deux législatures ! Il y avait d'autres collègues, qui avaient siégé dans d'autres commissions et qui avaient d'autres observations à formuler, et ce projet-là était à chaque fois étudié et modifié. Donc, le travail a duré deux législatures !
Ce qui ressort de ce projet de loi, c'est en fonction du constat effectué sur le terrain. Quand j'ai été auditionné à la commission des finances, j'ai essayé d'être le plus objectif possible en tant que député, mais j'ai été étonné, Madame la présidente, de voir qu'on avait pratiquement balayé tout notre travail ! Avec une expertise... que je méconnais. On a balayé tout notre travail sans avoir eu l'indulgence - je dis bien «l'indulgence» - de reconvoquer la commission des visiteurs pour lui dire: «Votre projet de loi ne nous intéresse pas, nous l'avons totalement effacé.» Car ce que dit Mme la rapporteure, c'est qu'on a laissé un petit truc - je ne sais pas comment on appelle cela - parce qu'il aurait été choquant qu'un projet de loi présenté par un député ou une commission soit totalement supprimé par la commission... Alors on a dit: «Allez, on va quand même mettre un petit truc !» Et je pense que M. Jornot est suffisamment intelligent pour en avoir prévu un, comme ça, pour qu'on puisse se calmer... Or la vérité, c'est qu'on a totalement vidé le travail de la commission ! Totalement !
Je prends un exemple: le contrôle de la commission. Mais, Madame la présidente, notre parlement, en raison des prérogatives fixées par Berne, est pratiquement un parlement de contrôle ! Nous sommes un parlement de contrôle ! Que dit la commission ? Elle veut introduire le terme «contrôle» ! Dans son titre, dans sa définition ! Et on barre...
Mais, Mesdames et Messieurs les députés, lorsque nous nous rendons dans ces lieux de détention, c'est simplement pour contrôler ! Il y a les normes que la Suisse a acceptées en matière de détention et de privation de liberté. Et quand des députés se rendent dans ces lieux-là, que font-ils ? Ils contrôlent ! Ils examinent si les lieux de détention correspondent aux normes que nous nous sommes engagés à respecter. C'est donc un contrôle ! (Brouhaha.) Quand on vérifie si les détenus sont correctement traités, c'est un contrôle ! Alors on nous a dit - plutôt, on ne nous l'a pas dit directement, on l'a appris par la bande. Eh bien, on nous a dit: «Oui, mais on ne veut pas que la commission s'immisce dans les questions de gestion par rapport au fonctionnement des prisons»... Mes chers députés, qu'il s'agisse de détention, et même de postes de police, la commission ne s'immisce jamais dans les questions de gestion du personnel ! D'ailleurs, on fait très attention de signifier à tous les détenus que notre commission ne peut pas entrer en matière sur deux aspects: les procédures et la gestion intrinsèque de la prison. Et lorsque nous avons reçu à Champ-Dollon le syndicat qui voulait être auditionné par notre commission, nous avons exprimé clairement que nous ne pouvions pas entrer en matière pour ce qui est de la gestion. Lors de nos travaux, nous examinons si le personnel de l'administration bénéficie de conditions de travail adéquates. Effectivement ! Mais jamais cette commission n'a prétendu avoir quelque droit sur la direction ! C'est pourquoi, Madame la présidente, il me semble y avoir un problème. Et cette commission mérite aujourd'hui, par son travail, qu'on lui accorde son titre.
Quant aux procès-verbaux, Mesdames et Messieurs les députés, Mme la rapporteure estime que cette commission veut s'attribuer des prérogatives... Mais la commission de contrôle de gestion a les mêmes ! D'abord, elle dispose d'une somme. Ensuite, elle décide elle-même si les procès-verbaux sont envoyés ou pas - même à la commission des finances nous n'envoyons pas les P.V. au Conseil d'Etat. Or il est arrivé qu'une commission traite de problèmes délicats et que, parfois, les procès-verbaux aient été diffusés là où on ne le voulait pas... Donc, on n'a pas refusé de les remettre au Conseil d'Etat. Ce n'est pas vrai ! Tout ce qu'on a dit, c'est que les procès-verbaux qui concernent directement les auditions du Conseil d'Etat ou de ses fonctionnaires lui seront envoyés. En revanche, il y a d'autres procès-verbaux dont le contenu doit rester interne à la commission, et c'est pourquoi la prérogative de cette dernière est de pouvoir décider où peuvent être adressés ces P.V.
Voilà donc quelques aspects, mais il y en a d'autres. Par exemple, concernant la somme. Elle a été refusée... Moi, je ne fais pas cas de cela ! Tout ce que je sais, c'est que tout ce qui a trait aux sommes... Eh bien, ce parlement, parfois, a des attitudes misérabilistes envers ses propres députés ! Pas forcément envers l'extérieur, mais envers ses propres députés ! On l'a vu récemment avec la question du café, maintenant on ne peut plus en prendre, on a changé la machine... D'ailleurs avec des trucs moins écolos ! Donc... Malheureusement, c'est comme ça ! (Exclamation.) Pardon ?
Une voix. Du café frappé !
M. Alberto Velasco. C'était du café frappé, maintenant c'est Nespresso... Ce que je veux dire, c'est que le travail réalisé par nos collègues a manqué, à mon avis, de pertinence - et je dis bien: «de pertinence» - parce que, pour arriver à de telles conclusions... Eh bien, je pense qu'il aurait été plus juste de convoquer ou de reconvoquer les collègues de la commission des visiteurs. Cela aurait permis de s'expliquer et de préciser les points sur lesquels il y a désaccord.
La présidente. Monsieur le député, il vous faut conclure, vous avez dépassé les sept minutes. Vous pourrez reprendre la parole ultérieurement.
M. Alberto Velasco. Je conclus, Madame la présidente. J'ai un souhait, c'est que ce projet de loi soit à nouveau renvoyé à la commission des droits politiques et que la commission des visiteurs, quitte à trouver les compromis nécessaires, puisse être entendue une deuxième fois.
La présidente. Une demande de renvoi en commission venant d'être formulée, une seule personne par groupe pourra s'exprimer, et uniquement sur ledit renvoi. S'il est refusé, nous reprendrons le débat.
Mme Esther Alder (Ve). Mesdames et Messieurs les députés, mon groupe m'enjoint de refuser le renvoi en commission... (Rires.) Mais, à titre personnel et en tant que membre de la commission des visiteurs depuis de nombreuses années, j'aimerais soutenir ce renvoi. En effet, et malgré tout mon respect pour les membres de la commission des droits politiques, je pense qu'il y a peut-être plusieurs précisions à apporter.
Personnellement, j'ai été très déçue de l'examen de certains points proposés par la commission des visiteurs. Je remercie les membres de la commission des droits politiques d'avoir accédé à une partie des requêtes de la commission des visiteurs, mais je pense qu'il y aurait encore des éléments à modifier. Ces derniers ne sont pas mineurs: ils concernent tant le titre de la commission que la possibilité pour ses membres de visiter tous les lieux de privation de liberté, et ils touchent également à la question budgétaire.
Donc, je souhaiterais que ce parlement entre en matière sur un renvoi à la commission des droits politiques. Je vous en remercie.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, le seul renvoi en commission qui permettrait d'exaucer les voeux des auteurs du projet de loi, ce serait le renvoi dans leur commission, de telle manière qu'ils puissent refaire ce projet de loi à la façon de leur propre projet, puisqu'ils n'admettent pas que d'autres puissent avoir un avis divergent sur la façon dont il faut organiser les travaux de ce Grand Conseil.
En ce qui concerne la commission des droits politiques, il me semble qu'elle a effectué un travail conséquent: d'abord, elle a longuement entendu l'auteur premier du projet de loi, qui a plaidé avec brio en faveur de ses diverses propositions; ensuite, elle a réalisé un travail de détail, approfondi, sachant faire le tri entre les propositions qui concernent le travail effectif de la commission - je pense à la question des auditions de détenus sur proposition de la commission; je pense aussi, par exemple, à la question de la définition des lieux de détention - mais elle a su séparer de cela les demandes qui transformaient petit à petit la commission des visiteurs en «Conseil d'administration des prisons genevoises S.A.»
Alors, Mesdames et Messieurs, je comprends parfaitement que les membres de la commission des visiteurs soient marris de ne pas devenir les administrateurs d'une régie publique supplémentaire, administrant à la place du Conseil d'Etat les prisons de la République et canton de Genève, mais je crois pouvoir dire sans trop m'avancer - et peut-être me trompé-je - que la commission des droits politiques n'a pas l'intention de suivre cette vue, puisqu'en tout cas elle l'a très clairement dit lors de l'examen du projet de loi.
Je reviendrai tout à l'heure, Madame la présidente, sur les innovations apportées par la mouture sortie de commission, respectivement sur les raisons pour lesquelles la commission n'a pas accepté les autres propositions, mais je crois qu'en l'état le simple respect des commissions les unes envers les autres, de la même manière que la commission des droits politiques a entendu le ou les auteurs du projet de loi, de la même manière il convient que le plénum fasse droit aux conclusions de la commission des droits politiques et débatte aujourd'hui du projet de loi tel qu'il est issu de ses travaux.
Mme Béatrice Hirsch (PDC). Comme vient de très bien le dire mon préopinant, la commission des droits politiques a travaillé sur ce projet de loi, et si elle n'est pas arrivée aux mêmes conclusions que la commission des visiteurs, c'est dommage. Mais il ne servirait à rien de renvoyer ce texte en commission, car le travail a déjà été fait. Par conséquent, le groupe démocrate-chrétien se prononce contre le renvoi en commission de ce projet de loi.
Mme Michèle Ducret (R). Si le texte issu des travaux de la commission des droits politiques est moins ambitieux que celui qui lui avait été renvoyé et s'il ne plaît pas tout à fait aux membres de la commission des visiteurs de prison, je le regrette, mais, en ce qui concerne le groupe radical, ce texte nous satisfait.
Par conséquent, je refuserai le renvoi en commission et vous indique également que je ne me reprononcerai pas sur ce texte, que le groupe radical acceptera certainement après le premier vote.
M. Eric Ischi (UDC). Je dois donc me prononcer sur le renvoi éventuel en commission... Vous me permettrez tout de même d'être surpris de la manière dont certaines personnes poussent l'exagération. Quand j'entends le député Jornot nous traiter de «Conseil d'administration des prisons genevoises», je trouve que c'est pour le moins déplacé et complètement faux dans l'esprit de la commission des visiteurs.
Si la demande est faite de renvoyer ce projet en commission, c'est peut-être parce que nous n'avons pas tout à fait bien compris la position de la commission des droits politiques. Et il est probable que sa position n'a pas été nécessairement bien comprise de la part des membres de la commission des visiteurs.
C'est la raison pour laquelle je crois que ce n'est pas une erreur de demander le renvoi en commission, cela nous permettra de discuter sereinement de ce projet de loi.
Mme Emilie Flamand (Ve), rapporteuse. Brièvement, quelques mots pour répondre à M. Velasco, que j'ai trouvé un peu injuste à l'égard de la commission des droits politiques. Lorsqu'il dit que nous aurions simplement donné quelques petits susucres pour compenser le refus de certaines mesures, je relève que nous avons étudié consciencieusement tous les articles et alinéas, chacun ayant fait l'objet d'un débat.
Quant au fait d'auditionner la commission des visiteurs, nous avions reçu M. Velasco, auteur du projet de loi, qui a eu l'occasion de présenter ce dernier. Ensuite, lors du débat, ou plutôt lors des questions - puisqu'il ne s'agit pas d'avoir des débats en séances en commission - quelques-unes assez critiques avaient été posées, et M. Velasco a eu l'occasion d'y répondre. Donc, les points d'achoppement de ce projet de loi étaient déjà connus !
De même que les personnes s'étant exprimées avant moi, je pense que la commission des droits politiques a bien réalisé son travail et qu'un deuxième passage de ce texte en commission n'apporterait pas de résultats différents. C'est pourquoi je vous invite à refuser le renvoi en commission.
M. Eric Stauffer (MCG). Mesdames et Messieurs les députés, étant donné que c'est la première fois que je prends la parole, je me permets de vous dire que j'espère que vous avez passé de bonnes vacances et que nous aurons de nombreux moments heureux en ce parlement !
Concernant le projet de loi qui nous occupe, le groupe MCG s'opposera à son renvoi en commission, car un consensus s'est dégagé et il serait inutile de vouloir forcer la main à certains députés qui, peut-être, n'ont pas compris les enjeux de la commission des visiteurs officiels.
Nous nous opposerons au renvoi en commission, de manière - aussi - à amorcer un changement par phases. D'ailleurs, nous y reviendrons peut-être dans quelques années.
Je vous rappelle que la commission des visiteurs officiels est l'une des plus anciennes, sinon la plus ancienne commission parlementaire du Grand Conseil. Et elle est, à bien des égards, nécessaire pour protéger les fonctionnaires qui travaillent dans des lieux de détention, tout comme elle est nécessaire à la protection des détenus, puisque, nous le savons, la force d'une société se mesure toujours au maillon le plus faible de sa chaîne.
Mis aux voix, le renvoi du rapport sur le projet de loi 10155 en commission est rejeté par 37 non contre 21 oui et 5 abstentions.
M. Olivier Jornot (L). Mesdames et Messieurs les députés, je crois qu'il faut être clair si l'on veut prendre la mesure des débats de la commission des droits politiques. Dans le fond, cette dernière, à un moment donné, a été tentée de refuser l'entrée en matière sur ce projet de loi. Et si elle a fait ce travail de réécriture des dispositions qui lui étaient présentées, c'est parce qu'un certain nombre des commissaires ont, après un dialogue avec le conseiller d'Etat en charge du département des institutions, estimé qu'il y avait des propositions intéressantes qui méritaient d'être reprises de ce projet de loi et conservées. Je crois qu'il faut faire attention, lorsqu'on jette l'anathème d'une commission à l'autre, sur le fait que la commission des droits politiques a précisément voulu aller dans le sens des auteurs du projet de loi.
Plusieurs orateurs ont insisté tout à l'heure sur l'importance de cette commission des visiteurs. Je le fais à mon tour, et en particulier s'agissant des libéraux, pour relever l'importance d'agir en sorte qu'un regard externe, un regard de tiers, se porte sur les conditions de détention dans notre canton. Tout est question de savoir s'il s'agit d'une activité parlementaire, qui s'exerce dans le cadre des pouvoirs usuels du parlement, ou s'il s'agit de faire quelque chose de différent.
Alors, il est vrai que la commission des droits politiques n'a pas voulu transformer la commission des visiteurs en quelque chose d'autre - et je ne dirai plus, Monsieur Ischi, de peur de vous vexer, qu'on n'a pas voulu faire de vous un établissement public autonome. Il y avait relativement peu d'ironie dans mon propos, parce que, finalement, c'est l'étape ultérieure qui suit l'autonomisation de la commission telle que vous nous l'avez proposée. C'est vrai que l'idée d'avoir une autonomie budgétaire particulière pour cette commission nous a paru saugrenue; c'est vrai que le fait de lui permettre d'effectuer des contrôles sans informer personne dans la hiérarchie des établissements concernés - non pas à l'avance, Mesdames et Messieurs, mais au moment même où le contrôle a lieu ! - nous a paru tout simplement irrespectueux des rapports entre les pouvoirs. Et c'est vrai que nous n'avons pas voulu rouvrir une xième fois la polémique relative à la question des procès-verbaux, qui avait été tranchée par notre commission des droits politiques elle-même à propos d'un autre projet de loi qui, déjà, établissait une loi sur un cas particulier parce qu'une fois un procès-verbal avait été mal utilisé.
J'aimerais revenir sur les éléments positifs de ce projet de loi, sur les avancées qu'il contient et qui, contrairement à ce que disait M. Velasco, font que le projet n'est pas vidé de sa substance mais qu'il renferme toujours des éléments extrêmement importants. J'en citerai deux. Le premier, c'est la possibilité pour la commission de proposer les auditions. Comme vous le savez, Mesdames et Messieurs, c'est une exigence d'Amnesty International que les instances de contrôle des conditions de détention puissent proposer des entretiens et ne pas attendre que les détenus eux-mêmes les demandent. Cette proposition a été jugée pertinente, elle figure dans le projet de loi, et il est certain qu'elle changera de manière importante le fonctionnement de la commission.
Le deuxième élément - cette fois-ci, je m'adresse un peu à Mme Esther Alder - c'est la définition des lieux contrôlés. Relisez votre projet, Madame la députée, vous verrez que vous parliez de contrôler les postes de police et leurs violons, mais que vous n'envisagiez précisément pas les autres lieux de détention, qui aujourd'hui sont problématiques parce qu'on ne sait pas très bien sous le contrôle de qui ils se trouvent. On pense particulièrement aux lieux de détention de la task force - qui a fait couler pas mal d'encre dans cette république - respectivement aux violons du Palais de justice. Eh bien, ces lieux, la commission a expressément voulu qu'ils tombent dans le champ de compétence de la commission des visiteurs. Et c'est la raison pour laquelle la commission a choisi la formule la plus large possible, pour qu'on ne puisse plus, ici ou là, lui dire qu'elle n'est pas compétente pour visiter tel ou tel local.
Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, je crois qu'il y a, dans ce projet de loi, de la substance ! Et que cette substance mérite d'être soutenue. Je vous remercie.
M. Renaud Gautier (L). Ce sera ma journée des citations, Madame la présidente. J'ai eu le bonheur, tout à l'heure, de citer l'excellent penseur Alberto Velasco, je me réfère maintenant à cette maxime: «Seigneur, préservez-moi de mes amis; les ennemis, je m'en charge». Je ne vais pas entamer ici le débat de la compétence d'une commission sur une autre - débat un peu stérile - même si, effectivement, nous avons à réfléchir lorsqu'une commission qui a l'expérience, l'habitude, est amenée à soumettre des propositions de modifications dans le sens de sa pratique. Je comprends parfaitement - et c'est, hélas, dans la logique des choses - que le Conseil d'Etat ne soit pas forcément favorable à une augmentation des compétences d'une commission. Les choses sont ainsi faites que la position du gouvernement en tant que tel ne m'étonne pas. C'est vrai qu'à titre personnel je regrette que la commission n'ait pas compris ce qui était recherché dans ce projet de loi.
Quelques remarques. D'abord, vous le savez certainement, la commission dite «des visiteurs» est la plus ancienne, puisque c'est la première commission que ce parlement a instaurée d'une manière permanente. Deuxièmement, Genève peut s'enorgueillir de la commission des visiteurs, car aucun autre parlement cantonal n'en a une ayant les compétences de cette dernière. C'est un fait reconnu puisque, lors de l'application de certaines conventions supranationales, la Confédération est amenée à poser des questions à la commission des visiteurs, parce qu'elle lui reconnaît une certaine compétence.
Troisièmement, Mesdames et Messieurs, vous avez peut-être la mémoire un peu courte. Il n'y a pas très longtemps nous avons étudié le fameux rapport d'experts sur les émeutes de Champ-Dollon; si vous en avez fait une lecture attentive, qu'aurez-vous remarqué ? Que, de nos jours, la problématique des conditions de détention - donc dans lesquelles vivent les personnes privées de liberté - se situe dans les phases aiguës, soit entre l'arrestation et l'arrivée dans un poste de police ou dans une prison, et non pas dans les prisons. Ce qui veut dire, contrairement à ce que nous a expliqué - avec son savoir - Me Jornot, que la problématique ne se pose pas simplement en termes de contrôle des prisons et des violons, mais de privation de liberté.
Et où commence la privation de liberté, Mesdames et Messieurs ? Elle commence lorsqu'un policier ou un représentant de la force publique est amené à vous dire poliment: «Suivez-moi !» C'est là que, généralement, se passent la plupart des - entre guillemets - «dérapages» fort malheureux qui peuvent survenir. La même question se pose d'ailleurs pour les personnes qui, à un titre ou à un autre, peuvent être internées contre leur volonté dans des établissements médicaux. Par exemple, la question se posait lorsque - jusqu'il n'y a pas très longtemps, d'ailleurs - des soldats qui faisaient leur école de recrue étaient enfermés dans les prisons de la caserne des Acacias...
Ainsi, réduire le champ d'application du contrôle des conditions de détention - et non pas des causes - en en dressant une liste exhaustive et en disant: «Ce sont les postes de police et les violons», c'est simplement dommage pour le travail qu'effectue cette commission, dont ce parlement peut être fier et ne devrait, par définition, pas limiter les compétences.
Dans le même ordre d'idées, rappelons-nous que, sur le plan international, la visite non annoncée est un principe de base qu'utilisent de nombreuses organisations non gouvernementales comme le CICR et d'autres. Il faut simplement, à un moment donné, vérifier que les conditions de celui qui est privé de liberté ne sont pas modifiées par un appel à la direction de la prison quelque temps à l'avance. Nous le voyons nous-mêmes à Genève dans le cadre de la commission, lorsque nous effectuons des visites impromptues les problèmes ou les choses que nous voyons ne sont pas les mêmes que lorsque le secrétariat du Grand Conseil annonce l'arrivée de la commission tel jour à telle heure ! Il ne faut donc pas restreindre ce travail.
C'est un fait, Monsieur Jornot, la commission qui a le plus de compétences, parce que c'est la seule qui exerce un contrôle direct sur l'administration, est celle des visiteurs. Et je trouve simplement qu'on aurait dû étoffer ce qui a été réalisé, plutôt que d'avoir une attitude contradictoire en disant: «Vous en demandez trop.» Les choses sont effectivement jouées et la majorité de ce parlement semble penser que le contrôle des conditions de détention n'est pas un problème prioritaire. Je suis sûr que la commission saura revenir en temps et lieu voulus pour, que cela plaise ou non à l'exécutif, obtenir les éléments lui permettant d'effectuer son travail dans les meilleures conditions possibles.
Mme Esther Alder (Ve). Je suis d'accord avec mes préopinants, excepté avec M. Jornot à qui je dois dire ne pas pouvoir accepter, pour la commission, le qualificatif de «Conseil d'administration des lieux de privation de liberté». Il me semble que cela dénote une méconnaissance du travail de la commission.
Si je remercie la commission des droits politiques d'avoir étendu le champ des compétences en ce qui concerne tous les lieux de privation de liberté, j'aimerais quand même revenir sur certains points, notamment sur le nom de la commission.
Cela peut paraître anodin, mais, de nos jours, bien qu'elle soit la plus ancienne commission de ce parlement, on ne peut plus appeler cette dernière «commission des visiteurs officiels du canton de Genève». Pourquoi ? Parce que cela renvoie quand même à une image très... je dirais «misérabiliste» du travail de cette commission. (Remarque.) Voilà, on me souffle: «Cela fait très Zola» !
Aujourd'hui la commission effectue avec professionnalisme un contrôle des conditions de privation de liberté et, afin de se mettre à niveau avec la législation européenne en matière de droits de la personne, je pense qu'il importe d'avoir un titre qui corresponde exactement à la compétence de la commission. En cela, je dépose un amendement pour qu'on puisse se mettre d'accord sur le titre.
Concernant la confidentialité des procès-verbaux, il est vrai que le travail de la commission des visiteurs est particulier. Effectivement, Monsieur Jornot, il aurait été peut-être plus juste que chaque commission, qui connaît le champ de ses activités, puisse légiférer en matière de compétences. On doit malheureusement passer par la commission des droits politiques, or je pense que c'est une erreur: la compétence doit être accordée à ceux qui connaissent le travail.
Pour ce qui est de la confidentialité des travaux de la commission, il est important que nous puissions, nous, décider à qui sont transmis les P.V. Parce que, je vous le rappelle, on a eu un certain nombre de dossiers très «chauds», et des fuites ont eu lieu ! Alors, ce n'est pas que le cas de la commission des visiteurs, et je déplore ces fuites. Toutefois, je pense que la transmission des procès-verbaux ne posait pas de problème majeur, d'autant moins qu'on ne souhaitait pas la rétention d'information dans l'ensemble des situations que nous traitons.
Maintenant concernant le budget. Il est vrai qu'à chaque déplacement on doit présenter une demande. D'ailleurs, on nous reproche assez souvent ces déplacements ! Je rappelle à ce parlement que tous les déplacements de la commission des visiteurs ont eu pour objet d'améliorer les conditions de détention en général: je me réfère à ce que nous avons réalisé en faveur des mineurs et, également, en matière de détentions qui tombaient sous le coup de l'ancien article 43 et faisaient l'objet de mesures figurant maintenant dans un autre article du nouveau code pénal des adultes.
J'aimerais encore dire que si l'on pouvait, il y a une vingtaine d'années, se targuer à Genève d'être en avance en matière de détention et de réinsertion, eh bien, de nos jours, nous sommes loin de pratiques qui sont meilleures dans d'autres pays ! Or il est important qu'une commission parlementaire telle que celle des visiteurs puisse oeuvrer dans le sens de la modernisation des conditions de détention.
Je ne sais pas si l'amendement a pu vous être remis, mais je souhaite vraiment que le parlement entre en matière sur ce dernier. Je vous remercie.
La présidente. Merci, Madame la députée. Concernant cet amendement, je vous demanderai, le moment venu, d'apporter quelques précisions, à savoir si vous souhaitez qu'on reprenne le terme tel qu'il avait été proposé par les signataires du projet de loi ou le terme que vous employez dans votre amendement. Pour l'heure, je donne la parole à M. Moutinot, président du Conseil d'Etat... (Remarque.) C'est vrai ! Excusez-moi, Monsieur le président, je devais auparavant céder la parole à M. Velasco... (Commentaires.) ... pour autant que son micro fonctionne.
M. Alberto Velasco (S). Merci, Madame la présidente, et permettez-moi de m'adresser à mon collègue Jornot, car sa remarque est pertinente: est-ce une mission parlementaire que celle de la commission des visiteurs ? Effectivement, en théorie, votre interrogation est tout à fait légitime, mes chers collègues ! Mais, voyez-vous, lors de notre visite dans un pays du Sud, visite d'ailleurs critiquée dans ce parlement, il a été répondu ceci à une question que nous avions posée: «Les détenus sont privés de liberté, mais ils ont tous les autres droits - tous les autres droits ! - soit celui de l'information, celui de la formation, celui de l'hygiène, etc.» Eh bien, notre parlement, ici, à part légiférer, a également un devoir: celui de veiller à ce que les droits des citoyens et citoyennes de ce canton soient garantis. C'est implicite, mais c'est comme ça !
Alors, par rapport à votre interrogation, oui, cette commission est pertinente. Aussi, je tiens à saluer les députés qui, il y a bien des années, avaient institué cette commission. Ils avaient fait preuve de clairvoyance ! D'autant plus que nous, le parlement genevois, avons reçu à maintes reprises des félicitations de la part d'autres parlements et d'autres entités qui disent que c'est incroyable qu'un parlement dispose d'une commission s'intéressant aux conditions de détention. Par exemple, chez les Valaisans, il n'y en a pas, c'est la commission judiciaire qui s'intéresse aux questions de détention. Or c'est elle qui vote les budgets relatifs aux travaux concernant les lieux de détention. Donc, leur commission judiciaire a des prérogatives que la commission judiciaire de Genève n'a pas !
Ce que je voulais dire, Monsieur Jornot, c'est que nous sommes loin de nous instituer en conseil d'administration, loin de là. Je crois que dans ce canton il y a un Conseil d'Etat qui gouverne, qui est à même de pratiquer une certaine gouvernance, et c'est à lui qu'on doit s'adresser. Mais pour s'adresser à ce «conseil d'administration» qui, en réalité, est le Conseil d'Etat, il faut bien que nous nous allions sur place pour contrôler si les lieux de détention sont adéquats. Peut-être y a-t-il eu une confusion dans l'interprétation des termes, mais ce point me paraît important.
Concernant les procès-verbaux, Monsieur Jornot, on peut en discuter. C'est une question délicate.
Quant au budget, lorsque j'ai été auditionné, j'ai bien dit que la somme - et il ne s'agissait pas de 100 000 F - était à étudier et que, de toute façon, les dépenses étaient sous contrôle du Bureau, c'est-à-dire que la commission ne pouvait pas engager une dépense. La seule raison pertinente de relever ce point était le fait de pouvoir prévoir un budget et que, lorsque le Grand Conseil présente son budget à la commission des finances, des prévisions aient été effectuées. D'ailleurs, pour la commission de contrôle de gestion, cela s'est passé ainsi. Et cela ne me gêne pas que le secrétariat du Grand Conseil budgète, par commission, 10 000, 15 000 ou 20 000 F, et que ces sommes ne soient jamais utilisée... Budgéter une somme dans une commission, Mesdames et Messieurs les députés, cela ne veut pas dire qu'elle sera dépensée ! D'abord, elle ne le sera que s'il y a pertinence et, ensuite, si le Bureau du Grand Conseil le décide.
Par conséquent, il n'y a pas lieu de croire que nous allons nous octroyer des prérogatives qui outrepassent l'esprit de ce parlement. Voilà, Madame la présidente, ce que je tenais à éclaircir.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Je trouve assez lassant de passer des heures sur un projet comme celui-ci. Déjà, vouloir changer le titre... Cette commission s'est toujours appelée «commission des visiteurs officiels», cela indique bien de quoi il s'agit: ceux qui sont nommés dans cette commission sont là pour aller visiter des lieux ! Et vous n'êtes pas là pour semer votre grain de sel et donner des ordres, vous êtes là pour faire un constat des lieux tels qu'ils sont - je suis désolée de devoir vous le rappeler.
Alors, laissez cette commission telle qu'elle est ! Vous pouvez modifier tous les noms que vous voulez, cela ne changera rien au travail que vous devez effectuer. Il existe des institutions publiques, et vous n'avez pas été élus pour faire leur travail. Nous, nous sommes là pour rédiger des lois, les abroger, les modifier, mais en aucun cas pour réaliser le travail de ces institutions. Cessons ce bavardage et votons ce projet de loi, nous avons d'autres choses à faire ! (Applaudissements.)
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez tous insisté à juste titre sur l'importance de la commission des visiteurs officiels, sur son ancienneté, et j'y ajouterai, sa grande pertinence dans le contrôle de la situation des personnes privées de liberté. Parce que, mieux que des experts, mieux que des cercles divers et variés, les représentants du peuple sont certainement les meilleurs gardiens des libertés et des droits de ceux auxquels on y touche pour des raisons justifiées par les tribunaux. Donc, c'est dire tout d'abord l'importance de cette commission.
En deuxième lieu, si nous n'étions que dans un débat d'organisation des travaux de votre Grand Conseil, le Conseil d'Etat s'imposerait une forte retenue. Mais il est vrai que le projet qui vous est soumis est problématique à plus d'un titre et que, fort heureusement, la commission des droits politiques, sur un projet qui sortait du cadre des institutions, a fait une proposition à laquelle le Conseil d'Etat se rallie, parce qu'elle améliore objectivement les possibilités de la commission des visiteurs officiels notamment - ce qui est un progrès considérable - par cette capacité d'auditionner des détenus qui ne l'ont pas demandé. Et, de ce point de vue là, nous ne pouvons qu'y souscrire.
Le nom de la commission a une importance: la commission des visiteurs officiels, comme son nom l'indique, visite ! Elle a un rapport avec les personnes détenues. Quant à une «commission de contrôle des conditions de privation de liberté», je ne suis d'ailleurs pas sûr que ce soit très possible, car les conditions de privation de liberté sont fixées par le juge. Et cela, vous ne pouvez en tout cas pas y toucher. Donc, les mots ont de l'importance; le titre a de l'importance. Et le titre actuel, outre son caractère historique, montre bien que c'est un rapport entre le peuple, les élus du peuple que vous êtes, et les personnes privées de liberté, et que c'est là que se situe votre mission, pas ailleurs.
L'autre raison pour laquelle le Conseil d'Etat intervient aussi clairement dans ce débat est que c'est votre Grand Conseil qui est le pouvoir législatif ! Et vous ne pouvez pas, sauf à raison de vous priver de votre propre prérogative, autonomiser vos propres commissions. En termes budgétaires, par exemple, ça n'est pas dans la logique du système genevois. On verra ce que la Constituante décidera. Mais, en l'occurrence, vous ne pouvez pas autonomiser une commission, parce que vous allez avoir la commission de la santé ou la commission des travaux, ou telle ou telle commission, qui va dire: «Mais notre mission, aussi noble et importante, justifie que nous ayons la capacité de nous organiser tout seuls...». Ce n'est pas raisonnable !
Votre commission des droits politiques a fait un tri remarquablement pertinent entre les propositions qui permettent d'améliorer le travail de votre commission des visiteurs officiels et les propositions qui sortaient du cadre constitutionnel d'aujourd'hui. Raison pour laquelle je vous invite à suivre le rapport de la commission des droits politiques et du règlement et à rejeter les amendements qui vous sont proposés.
La présidente. Merci, Monsieur le président du Conseil d'Etat. Je vais soumettre à cette assemblée la prise en considération de ce projet de loi.
Mis aux voix, le projet de loi 10155 est adopté en premier débat par 60 oui et 1 abstention.
Deuxième débat
Mis aux voix le titre et le préambule sont adoptés.
La présidente. Monsieur Velasco, vous avez demandé la parole ? (Commentaires.)
M. Alberto Velasco (S). Excusez-moi de vous interrompre, Madame la présidente, mais il y a un amendement sur les titre et préambule...
La présidente. Il y a un amendement, mais c'est plus loin.
M. Alberto Velasco. Excusez-moi, Madame la présidente.
La présidente. Je vous en prie. Je poursuis. C'est à la section 17 que nous sommes saisis d'un amendement présenté par Mme Esther Alder. Elle demande à remplacer le titre «commission des visiteurs officiels du Grand Conseil» par «commission de contrôle des conditions de privation de liberté».
Avant de vous donner la parole, Madame la députée, afin que vous expliquiez votre amendement, j'ai juste une question. Dans le projet initial, les signataires - que vous êtes, d'ailleurs - du projet de loi proposaient: «commission de contrôle des lieux de privation de liberté». Maintenez-vous votre proposition visant à remplacer «commission de contrôle des conditions de privation de liberté» ou reprenez-vous le titre initialement proposé par les auteurs de ce projet ?
Mme Esther Alder (Ve). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés, vous faites bien de souligner ce changement de formulation, or j'ai lu attentivement le rapport de la commission des droits politiques, notamment l'argumentaire de M. le conseiller d'Etat Moutinot en ce qui concerne la formulation «commission de contrôle des lieux de privation de liberté». M. Moutinot soulignait à juste titre que ce terme était trop restrictif puisqu'il s'en tenait aux lieux. Raison pour laquelle j'ai proposé un amendement qui visait à ce que la commission s'appelle «commission de contrôle des conditions de privation de liberté». Mais, quelle que soit la formulation, j'ai l'impression qu'on va toujours trouver des arguments juridiques pour dire que ce n'est pas tout à fait ça.
Ce que j'aimerais dire sur le fond, c'est que de nos jours, et contrairement à ce que certaines personnes pensent, les termes ont toute leur importance. La commission des visiteurs ne se borne pas, et heureusement, à simplement visiter les détenus; son travail est bien plus important que cela. C'est effectivement une commission qui contrôle les conditions de privation de liberté. Par cela, j'entends tout espace où la personne se trouve réprimée dans ses mouvements. C'est donc très important, et c'est la raison pour laquelle je proposais cette formulation. Je l'ai dit précédemment, le titre de «commission des visiteurs officiels» me paraît obsolète et ne correspond pas à l'évolution des commissions qu'on constate au niveau européen, notamment à la Commission européenne.
Voilà pourquoi j'aimerais qu'on réfléchisse à cela et qu'on ne balaie pas d'un coup cet amendement. Mais je suis sûre que M. Jornot, qui est expert, va trouver la formulation la plus exacte sur laquelle ce parlement tombera d'accord.
La présidente. Je vous remercie, Madame la députée. Je rappelle que la proposition d'amendement est également signée par le président actuel de la commission des visiteurs, M. Renaud Gautier, de même que par son ancien président, M. Alberto Velasco. Monsieur Velasco, vous avez demandé la parole: je vous la donne. (Protestations.)
M. Alberto Velasco (S). Comment «non»... Pourquoi ? (Brouhaha.)
Une voix. On vote !
La présidente. Si M. Velasco veut encore parler, il le peut, c'est son droit ! (Commentaires.)
M. Alberto Velasco. Madame la présidente, puisque certains collègues trouvent que le titre de cette commission pose problème, je voulais juste dire que celui d'aujourd'hui, de «visiteurs officiels»... Mais «officiels» de quoi et «visiteurs» de quoi, n'est-ce pas ? En ce qui me concerne, ce titre ne me dit absolument rien !
Le terme «contrôle» vous gêne peut-être, mais il faut quand même qu'on sache qu'il s'agit des visiteurs officiels des lieux de privation de liberté. Car «visiteurs officiels», c'est vraiment un titre bateau... Personne ne s'y retrouve. Aussi, Madame la présidente, la proposition qui nous est faite aujourd'hui me semble tout à fait pertinente.
La présidente. La parole n'étant plus demandée, je vais mettre aux voix cet amendement, soit le titre de «commission de contrôle des conditions de privation des libertés». (Commentaires.) Non ! Pas «des lieux», justement pas !
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 40 non contre 29 oui et 2 absentions.
Mis aux voix, l'article 227, al. 2 et 4 (nouvelle teneur), est adopté, de même que les articles 228, al. 1 (nouvelle teneur) à 228B, al. 3 (nouvelle teneur).
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Troisième débat
La loi 10155 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 10155 (nouvel intitulé: suppression de «Commission de contrôle des lieux de privation de liberté») est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 67 oui et 3 abstentions.