République et canton de Genève

Grand Conseil

M 1799
Proposition de motion de Mmes et MM. Christophe Aumeunier, Christiane Favre, Francis Walpen, Christophe Berdat, Alain Meylan, Edouard Cuendet, Jean-Michel Gros, Beatriz de Candolle, Gabriel Barrillier, Pierre Weiss, Michel Ducret, Patricia Läser, David Amsler, Claude Aubert, Antoine Bertschy, Frédéric Hohl, Fabienne Gautier, Olivier Jornot, Pierre Kunz, Jean-Marc Odier, Ivan Slatkine, Nathalie Fontanet, Janine Hagmann, René Desbaillets, Daniel Zaugg, Renaud Gautier, Michel Halpérin, Michèle Ducret, Sandra Borgeaud, Yves Nidegger, Olivier Wasmer, Philippe Guénat, Eric Leyvraz, Eric Ischi, Eric Bertinat, René Stalder, Guillaume Barazzone, Pascal Pétroz, Mario Cavaleri, Sébastien Brunny, Thierry Cerutti, François Gillet, Roger Golay, Henry Rappaz, Ariane Reverdin, Eric Stauffer, Guy Mettan : Révisons le plan directeur cantonal !

Débat

La présidente. Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il s'agit du dernier point que vous avez décidé de traiter en urgence. Il est en catégorie II, ce qui veut dire que trois minutes par groupe sont imparties, plus trois minutes pour l'auteur de la motion. Personne ne souhaite s'exprimer... Si ! Monsieur Aumeunier, je vous donne la parole.

M. Christophe Aumeunier (L). Merci, Madame la présidente. Mesdames et Messieurs les députés, cette motion demande la révision du plan directeur cantonal. Il faut rappeler que le canton a l'obligation d'avoir un plan directeur cantonal qui traite essentiellement de toutes les activités, qu'elles soient fédérales ou cantonales, à incidence spatiale importantes pour l'organisation de l'ensemble du territoire cantonal et de ses relations avec les régions voisines. (Brouhaha.)

Le plan directeur cantonal est donc l'instrument le plus important de notre aménagement du territoire. (Brouhaha.) Il engage les autorités... Et je vous engage, Madame la présidente, à faire en sorte d'obtenir un peu de silence ! (La présidente agite la cloche.) Merci beaucoup ! Il engage les autorités, disais-je, quant à l'organisation de notre territoire. Le premier plan directeur cantonal genevois a été adopté en 1989 tandis que quatre ans plus tard déjà, en 1993, les études sur l'actuel plan directeur cantonal ont été menées, pour durer pas moins de sept ans. Sept ans de travaux pour un plan directeur cantonal actuel qui est très consensuel, sans réelle ligne force... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

La présidente. Excusez-moi de vous interrompre, Monsieur le député, mais il y a vraiment trop de bruit ! En ce qui me concerne, je n'arrive pas à comprendre ce que vous dites. Je demande donc à vos collègues de bien vouloir faire silence... Maintenant, vous pouvez poursuivre.

M. Christophe Aumeunier. Je vous remercie, Madame la présidente. Je reprends: le plan directeur cantonal actuel a été adopté en 2000, il est très consensuel, sans réelle ligne force et sans innovation. Il a pourtant l'avantage de régler un certain nombre de problèmes, notamment le zoning de la zone urbaine et puis, singulièrement, l'intégration de très nombreuses mesures de prise en compte de la protection du patrimoine et de la nature.

Un réexamen de notre plan directeur cantonal est urgent. La loi prévoit un réexamen obligatoire tous les dix ans. Le plan directeur actuel, comme je l'ai dit tout à l'heure, a déjà sept ans tandis que les études de celui-ci ont duré sept ans. C'est dire que, si nous commençons aujourd'hui, il y a fort à parier que nous serons dans le délai des dix ans, obligatoires selon le droit fédéral. En outre, le réexamen est également nécessaire, et obligatoire, aux termes de la loi avant l'échéance des dix ans, lorsque les circonstances se sont modifiées, lorsque de nouvelles tâches se présentent et lorsqu'une meilleure solution d'ensemble aux problèmes de l'aménagement est possible.

Eh bien, Mesdames et Messieurs les députés, les circonstances se sont modifiées, puisque les prévisions démographiques, sur lesquelles notre plan directeur cantonal a été établi, ont largement été dépassées. Vous vous en souviendrez, le plus optimiste des trois scénarios envisagés prévoyait un maximum de 2300 nouveaux habitants dans le canton, alors qu'en 1999 il y en avait plus du double, à savoir 5300.

Un retour de la croissance économique s'est également fait jour - fort heureusement - à Genève, qui nécessite de la place dans les zones industrielles. De nouvelles tâches se sont présentées, tâches qui nous incombent au regard de l'avènement du projet d'agglomération franco-valdo-genevois. Effectivement, ce projet a été partiellement déposé, ce mois de décembre, auprès des instances bernoises, puisque le plan directeur cantonal actuel ne prévoit pas de relations avec nos voisins, ce que la loi exige pourtant. Un projet de territoire suisse est aussi en cours et il faut que nous soyons en conformité avec lui.

De nouvelles solutions sur l'ensemble de l'aménagement de notre territoire sont donc absolument nécessaires et il faut impérativement lutter contre la pénurie de logements. Je rappelle que cette pénurie s'établit à 0,19% de logements vacants, qu'elle entrave le bien-être des Genevois, qu'elle péjore la paix du logement et qu'elle augmente la dette publique. Ce sont en effet 300 à 400 millions de finances publiques qui nous échappent, puisque des actifs genevois sont obligés de se loger à l'extérieur du canton. Cela atteint l'économie locale dans la mesure où le produit intérieur brut est généré par la consommation des ménages qui s'établit, pour ces actifs genevois, à l'extérieur du canton, malheureusement.

Cette meilleure solution passe par la mise à disposition de terrains à la construction, c'est absolument nécessaire, prioritairement pour des logements et pour des zones industrielles. Elle passe par la densification de la zone urbaine, la mise en concordance des plans de réseaux routiers et du zoning - j'entends par là l'affectation des zones - la mise en concordance des plans de transports collectifs et du zoning, l'identification des aménagements à réaliser dans le cadre du projet d'agglomération et du projet de territoire suisse.

Mais surtout, il est absolument nécessaire de regagner la confiance des communes: nous devons en effet agir différemment aujourd'hui. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Pendant des dizaines d'années, nous avons agi dans un sens allant du haut vers le bas, en imposant aux communes l'aménagement du territoire cantonal, eh bien, la redéfinition du plan directeur cantonal est l'occasion rêvée de donner aux communes l'opportunité de nous indiquer où elles souhaitent créer du logement, où elles souhaitent développer l'aménagement du territoire cantonal. Et rétablir cette confiance avec les communes est une mission qui nous incombe véritablement, pour pouvoir développer notre canton par voie participative.

Le but de cette motion est de favoriser la lutte contre la pénurie de logements, pour pouvoir mettre à la disposition des Genevois des logements en propriété et des logements à loyer raisonnable pour tous. Elle vise également à veiller à la prospérité du canton, en créant suffisamment de zones industrielles, le tout de manière harmonieuse.

En définitive, cette motion appelle à l'ouverture d'un large consensus, et c'est la raison pour laquelle le groupe libéral vous invite à la renvoyer à la commission d'aménagement du canton, afin qu'elle y soit étudiée. Les amendements qui vous sont proposés pourront donc être traités dans ce cadre. (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Pascal Pétroz, je vous donne la parole. Vous avez trois minutes.

M. Pascal Pétroz (PDC). Merci, Madame la présidente. M. Aumeunier, comme souvent, a parlé d'or: il a bien expliqué dans quelle situation se trouve notre canton en matière de logements. La pénurie de logements est telle que les personnes qui veulent travailler à Genève doivent trouver à se loger à l'extérieur de notre canton. C'est une situation inacceptable. Nous avons - le groupe démocrate-chrétien - cosigné cette motion, car il nous paraît absolument indispensable de nous réveiller: de construire, de construire encore, de manière à pouvoir offrir des logements aux Genevoises et aux Genevois.

Nous vous recommandons également de renvoyer cette motion à la commission d'aménagement du canton, de manière qu'elle puisse être traitée rapidement et, ensuite, être votée.

Mme Françoise Schenk-Gottret (S). Je me fais ici le relais des propos de notre collègue Alain Etienne, qui ne peut pas être avec nous ce soir. Le groupe socialiste est surpris par le ton plutôt polémiste de la motion. En effet, l'actuel plan directeur contient des lignes force, qui ne sont pas des moindres: l'ouverture sur la région et l'introduction du principe du développement durable.

Demander aujourd'hui la révision du plan directeur est un leurre. Les auteurs veulent faire croire que le problème vient du plan directeur lui-même, alors qu'il est dans son application. Il ne suffit pas d'avoir un plan directeur: il faut une volonté politique de l'appliquer. En effet, il ne suffit pas de déclasser des terrains, il faut aussi construire en utilisant au maximum les potentiels à bâtir. Et là, nous nous trouvons confrontés aux recours déposés, comme à la Chapelle-les Sciers, les Vergers, les Communaux d'Ambilly. Le protocole d'accord sur le logement a été conclu après que l'on a réuni les partenaires concernés autour d'une table. Faisons de même pour l'application du plan directeur actuel !

Déposer une motion faussement alarmiste est inutile. Est-ce l'invalidation de l'initiative: «15 000 logements pour sortir de la crise», qui vous a fâchés ?

Passons aux zones industrielles. Nous avons eu en commission de l'aménagement des exposés très intéressants qui montrent que l'administration sait parfaitement où elle va, et nous pouvons être rassurés. Quant à la traversée du lac, elle est annoncée par le Conseil d'Etat dans son projet d'agglomération.

Le Conseil d'Etat a présenté toute une série de nouvelles fiches, ajoutées au plan directeur, et a annoncé le masterplan Praille-Acacias-Vernets. L'actuel plan directeur date de 2001, et le Conseil d'Etat sait pertinemment quand il devra entamer les études de base pour sa révision.

Le groupe socialiste est soucieux de trouver des solutions à la crise du logement. Aussi, il invite le Conseil d'Etat à poursuivre ses efforts dans l'application du plan directeur actuel, et refusera cette motion qu'il considère comme inutile. (Applaudissements.)

Mme Michèle Künzler (Ve). Cette motion est-elle bien nécessaire ? Et, surtout, ses prémisses se vérifient-elles ? Non, absolument pas !

En réalité, le plan directeur vient d'être adopté; il vient d'être révisé; les surfaces d'assolement viennent d'être revues; un projet d'agglomération vient d'être proposé, et je crois que l'immense majorité de cette assemblée ne l'a même pas lu. Je peux le comprendre, car il représente plusieurs milliers de pages, mais essayons au moins de lire le résumé qui compte 150 pages ! Tout est en route: on est en chantier perpétuel ! Les prochains projets pour le nouveau plan directeur sont prévus pour 2015-2030... Apparemment, ce soir, on fait - nous serons peut-être mort d'ici-là - des projets futuristes, puisqu'on parle de 2040... Pourquoi pas 2100 ou 2150 ? Nous ne serons probablement plus là pour le voir, mais, je le répète, tout est en route.

Je vous propose donc, par gain de paix, de faire d'abord un bilan. En effet, on nous dit qu'il n'y a plus de terrains, alors que l'on n'a même pas encore commencé à déclasser ceux qui étaient prévus de l'être dans le plan directeur actuel ! Et on n'a même pas commencé à construire sur les terrains que nous avons déclassés ! Alors, avant de faire cette course-poursuite, commençons par faire un bilan et vérifions les prémisses ! Parce que tout, dans l'ancien plan directeur, n'est pas à jeter !

Nous devons construire ensemble. Nous avons le résumé de ce plan directeur: la région y figure, le plan de circulation, etc., aussi ! En fait, il faudrait juste faire un bilan. C'est ce que demande notre amendement: de présenter un bilan et, le cas échéant, de tenir compte des problématiques mal résolues, parce que, quand on fait de la prospective, toutes les pistes possibles ne peuvent pas être évaluées de façon précise. On nous dit que le plan directeur n'avait pas prévu l'afflux de population... En effet, il ne l'a prévu que partiellement, mais en réalité le pic maximal prévoit 560 000 à 570 000 habitants en 2015... Nous n'y sommes pas encore, et de loin ! Donc, je pense que nous sommes dans la cible. Je le répète, il faut tout d'abord établir un bilan, ensuite nous verrons bien ce que devrons envisager.

Et, pour conclure, je ne vois vraiment pas ce que nous ferions en commission d'une motion qui invite le Conseil d'Etat à faire une étude ! Nous n'allons tout de même pas lui dire ce qu'il doit écrire dans cette étude ! C'est à lui de le faire et de nous dire, ensuite, ce qu'il en retire ! Renvoyons cette motion directement au Conseil d'Etat, avec les amendements que nous proposons ! Au moins, nous aurons un rapport correct ! (Applaudissements.)

M. Pierre Kunz (R). Je crois qu'il n'est guère utile de disserter longuement sur l'opportunité de repenser notre plan directeur cantonal !

C'est pour cela que j'en viendrai directement à l'amendement qui est proposé par nos collègues, pour dire qu'il n'est pas nécessaire non plus de faire un bilan... Le bilan, il est établi dans les chiffres ! Le plan directeur cantonal actuel est un échec total ! (Exclamations.) Un échec total, qui se concrétise par la construction de 1200 logements par année, alors que nous en avons besoin de 3 à 5000 ! (Commentaires.) Donc, manifestement, l'échec du plan actuel est patent !

Mesdames et Messieurs, le plan actuel est un échec: pourquoi ? Peut-être pour des raisons techniques, sur lesquelles il n'est pas non plus besoin de s'attarder longuement... Ce n'est pas la peine: on sait que c'est un échec ! Ce qui est sûr, c'est qu'il s'agit d'un plan qui n'est pas conforme aux besoins actuels en matière de logements à Genève.

Le renvoi en commission a été demandé, Mesdames et Messieurs, mais peut-être vaudrait-il mieux, tout simplement, renvoyer cette motion directement au Conseil d'Etat ! (Brouhaha.) C'est en tout ce que proposent les radicaux ! A quoi sert-il de renvoyer ce projet de motion en commission ? Voilà ! Nous proposons donc de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat, qui en fera certainement un bon usage, surtout étant donné que le Tribunal fédéral a déclaré invalide une initiative, qui a eu au moins le mérite de montrer, elle aussi, que notre plan directeur cantonal était totalement inadapté aux besoins du canton.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Aumeunier, je vous donne la parole: il vous reste trente secondes.

M. Christophe Aumeunier (L). Merci, Madame la présidente. Je trouve effectivement le discours de la gauche absolument affligeant. Celle-ci se complaît, depuis cinq ans, dans une situation désastreuse en matière de logements, puisque le taux de vacance est inférieur à 0,20%. La gauche se complaît dans la pénurie de logements et elle ne propose aucune solution ! Les périmètres de grande taille pour les déclassements importants sont épuisés. Que l'on me cite ici, dans le plan directeur actuel, les grands périmètres à déclasser qui ne le sont pas !

La présidente. Merci, Monsieur le député. Monsieur Ducret, il vous reste une minute.

M. Michel Ducret (R). Je serai très bref, Madame la présidente. Je voudrais juste rappeler que le plan directeur cantonal actuel a deux défauts rédhibitoires: le premier, c'est qu'il est réputé représenter le plus mauvais choix en matière de desserte par les infrastructures de transports publics; le deuxième, c'est qu'il se caractérise surtout par l'addition des égoïsmes des uns et des autres, plutôt que par une réelle volonté de dessiner un projet d'avenir pour Genève.

Je crois qu'aujourd'hui il vaut la peine d'accélérer la révision de ce plan directeur, qui ne répond pas aux besoins réels de notre canton.

La présidente. Merci, Monsieur le député. Mme Fehlmann Rielle, vous avez une minute.

Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Merci, Madame la présidente. Vous trouvez que la position de la gauche est affligeante... A mon tour de vous dire que votre motion n'est qu'une simple et pitoyable gesticulation ! Vous relevez dans votre motion l'inadéquation du plan avec le développement du canton, alors qu'en fait - en tout cas, en ce qui concerne la démographie - cela fait déjà quinze ans qu'il y a eu un saut démographique important, et il en a été tenu compte en partie dans le plan directeur de 2001.

Mais ce n'est pas cela l'important... Ceux qui maintenant se font les chantres de la construction de logements, de la densification, sont les mêmes - notamment vous, sur les bancs de la droite - qui ont tout fait pour freiner ces déclassements, à l'époque où nous voulions justement déclasser pour pouvoir densifier et où certains déclassements ont été réalisés ! Et je vous rappelle à ce propos ce qui s'est passé pour La Tulette... (Rires.) Vous n'avez jamais rien fait pour que les communes réticentes à construire du logement social ou à introduire une certaine mixité sociale changent de position ! Vous ne les avez jamais incitées à déclasser davantage, vous n'avez pas soutenu le Conseil d'Etat dans ses démarches !

Alors, je trouve plutôt déplacé que vous vous permettiez de nous faire la morale avec cette motion, qui n'est que du bouillon pour les morts ! Laissons travailler le Conseil d'Etat et, surtout, continuons à aller dans le sens des projets qui sont déjà en route !

Quoi qu'il en soit, je vous recommande de refuser cette motion. (Applaudissements.)

La présidente. Merci, Madame la députée. Madame Künzler, il vous reste vingt secondes.

Mme Michèle Künzler (Ve). Merci, Madame la présidente. Nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à voter la motion, mais seulement avec les amendements, car cela ne sert à rien de la renvoyer en commission. Je rappelle simplement que bien des projets ont été bloqués par des communes de droite. Et, de plus, sur le dernier déclassement qui a été effectué, la commune de Chêne-Bourg a exigé des immeubles de 13,50 mètres de hauteur ! C'est exactement cela qu'il faut revoir...

La présidente. Madame la députée, s'il vous plaît, vous devez conclure !

Mme Michèle Künzler. ...dans le plan directeur et en faisant un bilan: c'est le seul moyen de ne plus «nous engueuler» ici, car nous pourrons nous baser sur des chiffres. Parce que, Monsieur Kunz, pour l'instant, je n'ai vu aucun chiffre ! (Brouhaha.) Et ce n'est pas le plan directeur qui réalise les constructions: pour construire, il faut déclasser, il faut faire des projets !

La présidente. Madame la députée, vous devez conclure, je suis désolée.

Mme Michèle Künzler. Je le répète, cette motion pour la révision du plan directeur ne sert à rien sans bilan ! (Exclamations.) Merci, Madame la présidente !

La présidente. Je vous en prie. La parole est à M. le conseiller d'Etat, Robert Cramer.

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Commençons par un propos polémique... Il y a une forme d'injustice dans la loi portant règlement du Grand Conseil: chacun des groupes a droit à trois minutes pour s'exprimer, ce qui fait vingt et une minutes, mais le Conseil d'Etat n'a droit qu'à trois minutes pour lui, ce qui est extrêmement peu, étant donné la qualité de vos interventions... (Rires. Exclamations.) ...qui portent chacune sur des points extrêmement divers et qui méritent chacune une réponse quelque peu approfondie... J'implore dès lors d'avance, Madame la présidente, votre clémence, que je sais grande.

Et, au fond, ma tâche est relativement facile: je suis d'accord avec toutes et tous. Vous avez tous raison: oui, il est indispensable de réviser notre plan directeur; oui, le projet d'agglomération a fourni les prémices de cette révision et il comporte un élément extrêmement factuel, mais, malheureusement, je crains que bon nombre d'entre vous qui s'expriment ici fassent preuve d'un peu de paresse lorsqu'il s'agit de lire les cartes.

Que nous disent-elles ? Le projet d'agglomération franco-valdo-genevois indique que, dans une quinzaine d'années, 200 000 personnes de plus vivront dans notre agglomération. Aujourd'hui, le bassin de la population représente environ 800 000 personnes; nous serons bientôt un million ! Et sur cette augmentation de 200 000 personnes, la moitié, soit 100 000 personnes, vivront sur le territoire du canton de Genève.

Ce projet nous précise aussi qu'il y aura 100 000 emplois de plus dans notre agglomération et que 70% de ces emplois seront sur le territoire du canton de Genève. Et, si vous lisez les cartes, vous constatez que, déjà aujourd'hui, la région où ces 100 000 personnes vont vivre est déterminée. Donc, si vous vous donniez simplement la peine de lire les documents qui vous ont été présentés, vous sauriez d'ores et déjà à peu près quelle est la région qui va être urbanisée sur le territoire du canton de Genève et qui pourra accueillir ces 100 000 personnes. Voilà, pour aller dans le sens de ce que disait M. Aumeunier.

Dans le même temps - et pour aller dans le sens d'un certain nombre d'autres interventions - je peux vous dire très clairement, Monsieur Kunz, que l'on sait parfaitement, dans le cadre du plan directeur, quels sont les prochains périmètres qu'il est indispensable de déclasser: c'est dans la plaine de l'Aire et à Vessy. Cela figure dans le plan directeur. Mais, avant de déclasser des terrains dans ces secteurs, et comme le relevait Mme Künzler, il faut déjà déclasser et construire dans les autres endroits qui sont prévus dans le plan directeur et où les projets sont prêts. Or, nous le savons bien, les blocages se produisent dans les communes dont les exécutifs sont à 100% tenus par l'Entente, et les recours viennent toujours de propriétaires immobiliers, c'est-à-dire de propriétaires de villas. C'est donc dire que la droite est à peu près à 100% responsable des blocages dans ce canton actuellement ! (Applaudissements.)

Mais c'est précisément un sujet dont je comptais m'entretenir avec vous en commission, lors d'une séance qui est d'ores et déjà agendée, je crois, pour le 4 avril. Mme Künzler a aussi parfaitement raison: il est totalement inutile de renvoyer ce projet de motion en commission. Ayons de l'audace, comme le dit régulièrement mon collègue M. François Longchamp ! Soyons audacieux: renvoyons cet objet au Conseil d'Etat ! (Exclamations.) Renvoyons cet objet au Conseil d'Etat, puisqu'il souhaite précisément initier - comme il le fait déjà depuis douze mois - les études préalables du plan directeur.

Alors, Mesdames et Messieurs les députés, quelles que soient vos décisions sur les amendements proposés par Mme Künzler, le Conseil d'Etat, bien sûr, présentera un bilan sur la mise en oeuvre du plan directeur; le Conseil d'Etat, bien sûr, s'inspirera de ce bilan, et quels que soient vos votes, pour proposer un nouveau plan directeur; et le Conseil d'Etat, bien sûr, pense que c'est sa tâche que de vous proposer un nouveau plan directeur et non pas une réflexion d'une commission quelconque.

Refusez donc le renvoi de cette motion en commission, contrairement à ce qui vous a été proposé par ceux qui l'ont déposée, et renvoyez-la immédiatement - je l'espère, à une large majorité - au Conseil d'Etat, qui vous annonce d'ores et déjà qu'il entend mettre en oeuvre les études nécessaires pour un nouveau plan directeur défini, évidemment, sur la base d'un bilan, comme l'a dit Mme Künzler.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais maintenant vous soumettre... (La présidente est interpellée.) Il y a une demande de parole ? Monsieur Pétroz, je ne sais pas s'il va vous rester beaucoup de temps.

M. Pascal Pétroz (PDC). Je serai extrêmement bref... J'ai cru comprendre que M. Aumeunier, sans le dire clairement, retirait sa demande de renvoi en commission. En ce qui nous concerne, nous ne la formulons pas. Alors, votons directement sur le renvoi de cette motion au Conseil d'Etat.

Une voix. Non, sur l'amendement ! (Commentaires.)

La présidente. Monsieur Aumeunier, retirez-vous votre proposition ?

M. Christophe Aumeunier (L). Etant donné l'enthousiasme inattendu du Conseiller d'Etat, je retire ma proposition de renvoi en commission.

La présidente. Dans ce cas, je vais soumettre l'amendement proposé par Mme Künzler... (Remarque.) Monsieur le conseiller d'Etat, vous désirez reprendre la parole ?

M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Madame la présidente, juste un mot. On connaît les rapports de force dans ce Grand Conseil, mais le bon sens appelle le vote de cet amendement. De toute façon, revoir le plan directeur implique un bilan. Ce dernier va certainement faire extrêmement plaisir à un certain nombre d'entre vous, puisqu'il ne pourra qu'aboutir au constat que, ma foi, il aurait peut-être fallu faire certaines choses différemment. Au-delà de cela, essayons de dire tous ensemble que nous voulons une révision de ce plan directeur, quelles qu'en soient les modalités. Cet amendement, quel que soit le vote, sera reçu par le Conseil d'Etat, alors autant le voter.

La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets tout d'abord l'amendement que vous avez sous les yeux... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) Je ne pense pas que vous ayez tous compris ce que je suis en train de dire, puisque tout le monde parle ! Je répète: je vous soumets tout d'abord l'amendement tel que vous l'avez sous les yeux.

Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 48 non contre 27 oui et 6 abstentions.

Mise aux voix, la motion 1799 est adoptée et renvoyée au Conseil d'Etat par 55 oui contre 28 non.

Motion 1799