République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 4 mai 2007 à 20h45
56e législature - 2e année - 7e session - 35e séance
M 1690
Débat
M. Sébastien Brunny (MCG). La présente proposition de motion a pour but de rétablir de manière efficiente le code 22 qui existait déjà avant 1975 et permettait de juguler les abus. De manière succincte, le code 22 permet aux enquêteurs du service des naturalisations de se rendre librement au domicile des candidats à la naturalisation. Cela afin qu'ils puissent collecter diverses informations concernant les demandeurs.
Il faut également relever que plus de 98% des fraudes sont découvertes en se rendant au domicile des requérants, en application du code 22.
De plus, il sied de préciser que le service des naturalisations est un service étatisé qui fonctionne bien. En effet, ledit service a fait une recette de plus de 1 million de francs pour l'année 2006, comprenant les frais d'émoluments pour les dossiers, pertes de cartes et frais de fonctionnement de service. Cela est dû entre autres au travail laborieux et consciencieux des fonctionnaires du service des naturalisations. De ce fait, le code 22 doit être appliqué sans aucune restriction afin de laisser une liberté de mouvement aux agents enquêteurs.
Pour les détails, Mesdames et Messieurs les députés, vous aurez tout loisir de vous référer à la proposition de motion 1690. Je vous remercie d'avance de lui réserver un bon accueil.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Mesdames et Messieurs les députés, j'ai effectivement cosigné cette proposition de motion. Elle ne prévoit pas de modifier la loi existante, mais il s'agit simplement d'une demande formelle de maintenir la loi telle qu'elle a été établie en son temps, vu qu'elle fonctionne parfaitement. Cette proposition de motion n'a pas besoin d'être renvoyée en commission, nous demandons simplement une application de la loi.
Aujourd'hui, il s'avère que les enquêteurs ne peuvent plus effectuer correctement leurs tâches, en raison d'un surcroît de bureaucratie et à cause de directives internes données par des hauts dirigeants. Il en va de la sécurité de tous, y compris celle des personnes étrangères demandant la nationalité suisse. Le travail des enquêteurs ne permet pas de repérer les abuseurs qui vivent au-dessus de leurs moyens par rapport à un citoyen et travailleur honnête qui n'arriverait pas à atteindre ce niveau. Les enquêteurs ne peuvent plus, à ce jour, répondre aux questions des conseillers municipaux concernant la naturalisation. Nous avons à coeur de faire respecter les lois existantes, surtout quand elles sont bien faites. Alors, laissons travailler nos enquêteurs dans le sens de la loi telle qu'elle a été établie.
Le respect et la sécurité de tous sans distinction nous tient à coeur à tous. La gauche a pour priorité de prendre soin des gens modestes, pauvres et dans l'insécurité. Nous ne voulons pas que des gens honnêtes paient les pots cassés pour des gens malhonnêtes et abuseurs ! La droite a pour priorité de ne pas jeter l'argent par les fenêtres. De ce fait, il est important de pouvoir faire le tri. Dans un esprit de cohésion et de démocratie, nous vous demandons donc de soutenir cette proposition de motion.
M. Eric Bertinat (UDC). L'UDC soutiendra cette proposition de motion qui soulève tout simplement une question de bon sens. Tout est dit pratiquement à l'alinéa 4 de l'exposé des motifs où il est fait mention de l'article 11 de la loi sur la nationalité genevoise (LNat) qui stipule avec beaucoup de bon sens que l'étranger qui remplit les conditions du droit fédéral peut demander la nationalité genevoise s'il a résidé deux ans sur le territoire helvétique. Le code 22 donne simplement la possibilité à l'enquêteur de se rendre au domicile du demandeur et de vérifier et contrôler ce que cet article 11 demande.
La naturalisation est un acte important, non seulement pour celui ou celle qui la demande, qui demande à devenir suisse, mais aussi pour la population tout entière qui doit pouvoir compter sur des autorités qui appliquent cette loi avec diligence.
Une voix. C'est pas deux ans, c'est douze ans !
Une autre voix. Soutien du renvoi en commission...
M. Pascal Pétroz (PDC). Le groupe démocrate-chrétien ne soutiendra pas cette proposition de motion. Je vais tenter de vous expliquer brièvement pourquoi. D'abord pour une raison bien simple, c'est qu'elle est tout simplement incompréhensible ! Prenons la première invite: il s'agit de «rétablir de manière efficiente le code 22». Avant, évidemment, on ne savait pas de quoi il s'agissait, maintenant vous nous l'avez expliqué, c'est un petit peu plus clair. On nous dit ensuite: «Cela, également dans le but d'être en adéquation avec la législation genevoise (A 4 05) [...].» Alors, s'il s'agit de déposer et de voter une motion qui demande que les lois genevoises soient respectées, à mon avis cela ne sert pas forcément à grand-chose ! La loi est en vigueur, elle est là pour être respectée et point n'est besoin d'une motion pour demander le respect de la loi. Cela va de soi.
Dans la deuxième invite, il s'agit de «laisser transmettre librement aux enquêteurs attribués au service de la naturalisation la synthèse de leurs informations, aux communes qui en feraient la demande.» Très honnêtement, peut-être que j'ai quelques difficultés avec la grammaire française, mais je n'ai pas encore tout à fait compris de qui il s'agissait quand il est dit «leurs informations» !
S'il s'agit de voter une proposition de motion, peut-être faudrait-il qu'elle soit rédigée de manière claire et intelligible, de façon que nous puissions savoir de quelles informations il est question et d'où elles proviennent ! En l'occurrence, tout cela est totalement incompréhensible et voter quelque chose d'incompréhensible serait une grave erreur.
Ensuite, il s'agit dans la troisième invite de «laisser une liberté de déplacement aux enquêteurs assermentés du service des naturalisations afin qu'ils puissent faire leurs travaux d'investigations.» Mais vous croyez quoi ? Vous croyez que dans la loi sur la naturalisation, il y a un article 1 qui dit que l'inspecteur du service des naturalisations est cantonné dans son bureau ? Vous croyez que ça se passe comment ? Le service des naturalisations a une mission d'investigation et, encore une fois, point n'est besoin d'une motion pour demander aux enquêteurs du service des naturalisations de faire tout simplement leur travail ! Ces gens-là ne sont pas cantonnés dans leurs bureaux. Ils doivent procéder de par la loi à un certain nombre d'investigations. Eh bien, qu'ils les fassent ! C'est aussi clair que cela.
Cela étant, pour nuancer quelque peu mon propos, il doit être dit que votre proposition de motion a tout de même un mérite qu'il convient de relever.
La présidente. Il va falloir conclure !
M. Pascal Pétroz. Je parle de cela en relation avec les inscriptions de l'office cantonal de la population, qui y sont indirectement liées. Il est vrai qu'un certain nombre d'inscriptions que nous pouvons voir ne sont parfois pas à jour et il faudrait faire quelque chose à ce propos. Alors, merci de nous avoir permis d'en débattre mais, dans sa teneur actuelle, cette proposition de motion est incompréhensible !
Mme Carole-Anne Kast (S). J'aimerais m'inscrire dans la ligne de ce que vient de dire mon collègue Pétroz par rapport à ce que l'on peut comprendre de ce texte. Effectivement, si on s'attache au texte, je suis assez d'accord avec ses conclusions. Demander le vote d'une proposition de motion pour que la loi soit appliquée, ça n'a pas de sens ! J'espère bien que les enquêteurs font leur travail comme il faut. Je ne vois donc pas l'intérêt de cette proposition de motion.
Par contre, ce que moi j'ai compris, c'est que vous avez des soupçons de fraude, des soupçons de dissimulation, à propos d'une catégorie de la population et je constate encore une fois que, pour le moment, le seul groupe qui a trouvé que cette idée saugrenue était une bonne idée est un autre groupe habitué de la discrimination.
Je m'inquiète sérieusement d'entendre un tel discours de la part de votre groupe, qui évolue de l'anti-frontalier à l'anti-candidat à la naturalisation - qui réside pourtant dans le canton de Genève ! J'aimerais rappeler que jusqu'à preuve du contraire la commission de réexamen en matière de «natu» a plutôt tendance à passer par-dessus certains préjugés qu'on peut retrouver dans les préavis communaux. Il vaut la peine de le rappeler. Je ne crois pas que ce soit parce que les enquêteurs ne peuvent pas faire correctement leur travail que les préavis communaux sont parfois erronés, mais au contraire parce que les conseillers municipaux n'ont pas toujours le temps ni les compétences nécessaires pour bien comprendre les documents qui leur sont remis.
Par conséquent, il s'agit à mon sens de ne pas se tromper de cible, de ne pas instaurer un système de suspicion autour des candidats à la naturalisation. Ce sont des personnes qui ont une démarche d'intégration, une démarche de citoyenneté. Je pense qu'on peut avoir une approche plus positive à l'égard de cette démarche. Par conséquent, le groupe socialiste vous invite à refuser cette proposition de motion.
Des voix. Bravo !
M. Roger Golay (MCG). Tout d'abord, on ne veut pas doubler la loi par rapport à ce qui existe aujourd'hui, puisque nous savons de source informelle qu'il y a une directive du Conseil d'Etat par rapport au service des naturalisations de ne plus appliquer ce code 22. C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cette proposition de motion. Quand j'entends M. Pétroz nous reprocher de vouloir doubler une loi par un nouveau texte, laissez-moi sourire ! Je me rappelle que vous avez déposé un projet de loi qui était un «copier coller» d'une ordonnance fédérale par rapport aux zones 30km/h. (Brouhaha. Rires.) Donc, si vous voulez nous donner des leçons, réfléchissez d'abord, avant de nous faire la morale !
Des voix. Bravo !
Une voix. C'est un projet de loi !
M. Roger Golay. D'autre part, je veux répondre à Mme Kast que le MCG est favorable aux naturalisations facilitées. Il est totalement faux de nous coller cette étiquette d'opposants aux naturalisations. Je crois que, jusqu'à maintenant, même s'ils sont à bulletin secret, nos votes ne vont pas forcément dans le sens que vous imaginez. Je vous invite donc à soutenir cette proposition de motion, simplement pour que la loi soit appliquée. (Applaudissements.)
M. Pierre Weiss (L). Madame la présidente, en matière de naturalisation, il s'agit, chacun le comprend, du rapport que nous avons avec ceux qui viennent s'établir dans notre canton, du rapport que nous avons à l'autre, mais il s'agit également de la confiance que nous avons dans nos institutions, de la confiance que nous avons dans ceux qui les dirigent. En l'occurrence, le groupe libéral a confiance dans la façon dont le Conseil d'Etat a décidé d'appliquer les procédures de naturalisations, raison pour laquelle il ne soutiendra pas cette proposition de motion.
La présidente. La parole est à M. le député Eric Stauffer à qui il reste 1 minute 40.
M. Eric Stauffer (MCG). Simplement pour que les choses soient parfaitement claires: le MCG n'est pas du tout pour renier les candidats à la naturalisation. Le MCG veut simplement que les règles soient respectées et quand M. Weiss vient dire qu'il a confiance en nos institutions... Oui, dans le fonctionnement bien sûr, Monsieur le député ! Toutefois, il y a parfois quelques dérapages. La BCGe en est un exemple frappant. (Brouhaha et commentaires.) Donc, si vous permettez, cette proposition de motion n'a que pour but d'envoyer un message au Conseil d'Etat pour lui rappeler qu'il existe des règles, mais que le service des naturalisations ne peut pas les appliquer. Les gens qui nous écoutent se reconnaîtront. Peut-être qu'une certaine volonté politique pour que la loi soit appliquée stricto «senso» serait une bonne chose.
Une voix. «Sensu» !
M. Eric Stauffer. Oui, si vous voulez: «sensu» ! A votre bon vouloir ! (Rires.) Madame la présidente, je conclurai simplement en disant à M. Weiss que nous connaissions la loi B 5 05 sur le domicile des fonctionnaires. Cette loi n'a pas été respectée pendant plus de dix ans. Nous l'avons régularisée !
La présidente. Il vous faut conclure, Monsieur le député.
M. Eric Stauffer. Je n'aimerais pas que, dans dix ans, on se dise de nouveau qu'on aurait effectivement dû appliquer la loi avec plus de vigueur. Raison pour laquelle je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à voter pour cette proposition de motion.
M. David Hiler, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, chacun a ses défauts et le mien est d'être un peu distrait parce que la question principale que je me pose, c'est de savoir ce que peut bien faire ce point dans les objets du département des finances. (Rires.) Ça, je dois dire...
Je peux tout de même vous donner un certain nombre d'explications sur les codes. Les codes sont une manière d'inscrire des motifs d'absences dans le système informatique de l'Etat employeur. Ainsi, si vous devez aller à une visite médicale - je n'invente rien - vous entrez le code 33 ! (Rires.) Si, en revanche, Mesdames et Messieurs les députés, vous êtes en mission ou en voyage de service, c'est-à-dire ailleurs qu'à votre bureau, mais supposément en train de travailler, vous entrez le code 22 ! (Brouhaha.)
Une voix. V'là les flics !
M. David Hiler. Ceci pour ceux qui n'auraient pas bien suivi, ni le texte de la proposition de motion, ni l'ensemble du débat. Alors, je suis au regret de vous dire que sur le plan des compétences, ce sont les chefs de service qui accordent ou n'accordent pas les codes 22, en fonction de la conduite qu'ils entendent donner à leur service.
Pour cette raison, le Conseil d'Etat n'entend à vrai dire pas organiser les services puis les sous-services de son propre chef en ce qui concerne les codes pour la pointeuse. Si vous deviez accepter cette proposition de motion, il vous sera simplement répondu en toute courtoisie ce que je vous ai indiqué, avec une nuance, toutefois. Ceci en vaudrait d'ailleurs peut-être la peine car vous auriez ainsi à votre disposition la liste complète des codes. (Rires.) Vous pouvez sinon aussi vous référer au règlement d'application concernant l'horaire variable avec enregistrement mécanique des temps de travail dans lequel figurent tous les codes et une explication.
En outre, je dois encore vous donner cette intéressante précision qu'avec l'introduction du SIRH (système d'information des ressources humaines), il est vraisemblable que nous soyons amenés à changer les numéros de code actuels. (Exclamations.) Ce qui est bien triste et montre que le progrès n'amène pas que des avantages ! (Rires. Applaudissements.)
Mise aux voix, la proposition de motion 1690 est rejetée par 61 non contre 14 oui et 2 abstentions.