République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 22 février 2007 à 20h30
56e législature - 2e année - 5e session - 22e séance
M 1697
Débat
La présidente. Nous sommes en catégorie II, soit trois minutes de parole par groupe. L'auteure de la motion, Mme Elisabeth Chatelain, a la parole.
Mme Elisabeth Chatelain (S). Je ne croyais plus pouvoir parler un jour de cette motion qui a été déposée au mois de juin, alors qu'il faisait beau. Par chance, le printemps est toujours là pour nous permettre de parler des deux-roues à assistance électrique. Cette motion, visant à encourager l'achat et l'utilisation de deux-roues électriques fait suite à un test grandeur nature réalisé le printemps dernier.
En effet, la section de Genève de l'Association Suisse Transports et Environnement a proposé à ses membres de tester des vélos à assistance électrique pendant une semaine, ce dont 350 personnes ont profité. Ce test, en plus de susciter l'enthousiasme des personnes qui ont utilisé ces véhicules, a soulevé de très nombreuses questions. Parmi celles-ci la question du prix est récurrente. Viennent aussi les questions du lieu d'achat pour ces véhicules. C'est facile de répondre pour les vélos à assistance électrique, mais il est difficile de trouver des vendeurs de scooters électriques, par exemple. La question de l'égalité de traitement avec les personnes qui achètent une voiture peu polluante et qui, elles, sont exonérées de taxes pendant trois ans se pose aussi. (Brouhaha.)
Ces véhicules électriques, silencieux et non polluants, peuvent participer à une mobilité plus intelligente dans notre région. J'insiste sur le fait que la majeure partie des personnes qui ont testé ces deux-roues électriques habitent l'extérieur de la ville, font entre 5 et 15 kilomètres par trajet pour aller travailler en ville et utilisent actuellement une voiture pour leurs déplacements pendulaires. Genève est évidemment moins montagneuse que Lausanne, mais sa position en cuvette fait que la plupart des trajets en direction du centre-ville comportent un dénivelé suffisamment prononcé pour décourager les cyclistes classiques: la colline du Petit-Saconnex, la rampe de Vésenaz, la rampe du Petit-Lancy ou la rampe du Grand-Lancy, la montée du Bout-du-Monde... Ceux qui font du vélo les connaissent bien. (Brouhaha.) Avec un deux-roues électriques, il est donc très agréable de pouvoir parvenir sur son lieu de travail sans être en sueur. Sans être en sueur, certes, mais tout en effectuant un exercice physique d'intensité faible à moyenne, puisque le moteur se met en marche seulement lorsque l'on actionne le pédalier. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
Du point de vue de la santé publique, le vélo électrique permet de faire de l'exercice régulièrement. Le scooter électrique, lui, n'a pas cet avantage, mais il ne pollue pas, contrairement à son cousin à moteur à essence.
Les formes de promotion de ces véhicules peuvent varier. Certaines villes comme Lausanne et Neuchâtel, par exemple, n'hésitent pas à accorder une participation financière aux personnes désireuses d'acquérir un deux-roues électriques; d'autres se contentent de faire une très large publicité à ce mode de transport. Nous sommes convaincus que le soutien à cette nouvelle classe de véhicules - vélos électriques, scooters électriques - pourrait encourager le report modal. En particulier, cela permettrait de freiner l'essor des scooters, grands pourvoyeurs de bruit et de substances cancérigènes.
La présidente. Il vous faut conclure.
Mme Elisabeth Chatelain. La conjonction de plusieurs facteurs, comme l'augmentation de l'encombrement routier, le ras-le-bol de la population face à la pollution et au bruit, les inquiétudes face au réchauffement climatique, la hausse du prix de l'essence, l'épidémie mondiale de sédentarité et le fait que ces véhicules à propulsion électrique arrivent à maturité sur le plan technologique, fait que nous vous demandons, Messieurs et Mesdames et les députées, d'accueillir favorablement cette proposition de motion, afin d'encourager une forme de mobilité silencieuse, moderne et non polluante, qui permette à toutes et tous de maintenir ou de développer une activité physique quotidienne.
Je vous propose donc, pour l'étudier, de renvoyer cette proposition de motion à la commission des transports. Je vous remercie de votre attention.
La présidente. Je rappelle que le temps de parole est de trois minutes par groupe.
M. Sébastien Brunny (MCG). La présente motion met en exergue un problème récurrent qui, avec le temps et la demande mondiale en permanente augmentation, va devenir incommensurable dans quelques années: celui de l'approvisionnement en pétrole. Les motionnaires ont décidé à juste titre d'amorcer en douceur le virage de la mobilité dite douce, plus respectueuse de l'environnement et soucieuse d'économiser les matières premières qui, il faut le relever, ne sont pas illimitées.
De ce fait, soucieux des problèmes à venir et conscient qu'il faut promouvoir les deux-roues à assistance électrique, le groupe MCG soutiendra la présente motion ainsi que son renvoi en commission. (Applaudissements.)
M. Hugo Zbinden (Ve). Cette motion est excellente ! Certes, on pourrait rêver mieux; on pourrait rêver que les gens se mettent tout de suite au vélo, au vrai vélo. Toutefois, il faut dire que le vélo à assistance électrique n'est pas une alternative au vélo mais au scooter et à la moto. Nous avons entendu que ça pollue beaucoup moins et que c'est beaucoup moins bruyant qu'un scooter, mais il faut souligner que c'est aussi rapide qu'un scooter ! Avec un vélo électrique, vous pouvez légalement utiliser les pistes cyclables - je sais que les scooters le font déjà... - et, légalement, vous pouvez même utiliser les contresens cyclables; vous pouvez aussi vous garer légalement sur les trottoirs et dans les zones piétonnes. Le vélo électrique est plus sûr que le scooter, d'ailleurs le port du casque n'est pas obligatoire - cela ça peut être très pratique pour les dames quand elles sortent de chez le coiffeur...
Le vélo électrique présente un grand potentiel: on sait que le nombre de scooters et de motos augmente, or la majorité des personnes qui se mettent au scooter ou à la moto ne sont pas de fans de moto; elles font ce choix, contraintes, parce qu'elles ne parviennent plus à se déplacer en voiture. Il existe donc un grand potentiel pour convaincre ces gens - qui ne sont pas en soi ravis d'avoir un moteur - d'utiliser le vélo électrique.
On peut se poser la question de savoir pourquoi, avec tous ces avantages, le vélo électrique ne s'est pas encore imposé. Je pense qu'il y a deux raisons. La première, c'est que jusqu'à maintenant on avait un problème technique avec les batteries - cela s'est nettement amélioré ces dernières années, Mme Chatelain l'a dit, les vélos récents n'ont plus ce problème. La deuxième raison, c'est tout simplement que le vélo électrique n'est pas encore assez connu, on ne sait pas encore quels sont ses avantages. C'est pourquoi cette motion attaque le problème au bon endroit en demandant un «coup de pub» pour le vélo électrique.
Donc, je vous invite à soutenir cette motion au profit de l'environnement et au profit de la santé publique.
Mme Sandra Borgeaud (Ind.). Par cette motion, il est proposé de contribuer à limiter la pollution. C'est bien, mais il y a deux choses qui me chiffonnent. Puisque les gens sont trop sédentaires et que les médecins ou le milieu médical estiment que le sport est la meilleure des choses pour rester en bonne forme et éviter de grossir... Eh bien, avec le vélo électrique, il n'est pas certain qu'on se dépense autant que sur un vrai vélo, qui, à mon avis, est meilleur pour la santé !
D'autre part, alors que l'on connaît la situation financière catastrophique de l'Etat, je ne crois pas que ce soit le bon moment pour demander une aide financière en vue d'inciter à l'achat de deux-roues électriques. De plus, installer des bornes de rechargement, des abris, plus le reste, cela aussi coûte cher. Avez-vous prévu un financement ? Comment allez-vous trouver l'argent ? Avez-vous des sponsors privés qui seraient éventuellement d'accord de lâcher quelques millions ? Parce qu'il me semble que cela ne va pas coûter deux francs cinquante...
Il y a donc encore beaucoup de choses à examiner et c'est pourquoi je soutiendrai le renvoi de cet objet en commission.
M. Michel Ducret (R). Notre canton favorise depuis plusieurs années les automobiles, parfois fort coûteuses, qui ont un rendement favorable, ceci pour des considérations environnementales. Tout en n'étant pas aussi économique en énergie non renouvelable que le vélo ordinaire, le deux-roues à assistance électrique mérite un tel appui par rapport au deux-roues à motorisation classique, lequel est fort polluant.
Vous l'aurez compris, Mesdames, Messieurs, le groupe radical est favorable au renvoi de cette proposition en commission afin d'examiner les meilleures modalités pour favoriser le vélo électrique.
M. Eric Ischi (UDC). Certains ont dit que cette motion était excellente, moi je dis déjà qu'elle est en tout cas sympathique. J'ai eu l'occasion de tester ce genre d'engin, il est vrai que c'est agréable, et j'invite toutes celles et ceux qui ne l'ont pas encore fait à essayer, cela en vaut la peine.
Par contre, vous me permettrez quelques remarques sur cette motion. L'encouragement de l'acquisition de tels véhicules par une incitation financière méritera effectivement d'être plus ou moins précisé, voire chiffré. Quand on dit qu'il faudra installer des bornes de rechargement et des abris couverts pour que ces vélos soient abrités et qu'ils puissent recharger leur batteries, c'est une proposition qui m'interpelle vraiment, parce que le petit essai que j'ai fait permettait, une fois la course effectuée, de prendre cette petite batterie soit sur son lieu de travail, soit à la maison, et de la brancher sur du 220 volts. Donc, je serais curieux de connaître les vrais arguments pour justifier des abris couverts sécurisés avec des bornes électriques.
Dernier point: il est indiqué dans cette motion que les villes de Lausanne, Zurich, Sierre et Neuchâtel ont effectivement misé sur cette stratégie... C'est très bien, mais la question qu'on va devoir se poser, c'est de savoir si cela ne devrait pas être aux communes de s'occuper de ce problème plutôt qu'au Grand Conseil.
Toutes ces questions font que nous allons soutenir le renvoi à la commission des transports.
M. François Gillet (PDC). Le groupe démocrate-chrétien accueille favorablement cette motion et soutiendra son renvoi en commission des transports. D'une façon générale, le groupe démocrate-chrétien est favorable aux mesures incitatives en vue de développer la complémentarité des moyens de transports et, surtout, en vue de favoriser le développement des véhicules peu ou non polluants. Nous pensons qu'il est effectivement important de favoriser ce genre de moyens de transport à Genève et nous sommes tout à fait acquis à une discussion en commission.
Nous avons d'ailleurs déposé une motion qui va un peu dans le même sens et qui vise à favoriser par des mesures favorables les véhicules peu polluants en ce qui concerne les possibilités de parcage. Nous sommes tout à fait acquis à la discussion mais nous pensons que tout n'est pas réglé, notamment en ce qui concerne les bornes d'alimentation, et je crois qu'il faudra en parler, surtout à propos du type d'électricité qui devrait alimenter ces véhicules. Si nous voulons être cohérents d'un point de vue environnemental, il serait souhaitable que cette électricité soit propre et locale.
Nous aurons à en discuter en commission et nous nous réjouissons d'avance de travailler à ce projet.
M. Alain Meylan (L). Le groupe libéral soutient le renvoi de la motion 1697 à la commission des transports. Il est vrai qu'il s'agit là d'un mode de déplacement fort sympathique, comme cela a déjà été dit. Privilégier ou faire en sorte que ce mode de transport soit aussi soutenu peut être une bonne idée.
Les remarques du groupe libéral concernent les mesures d'incitation. Effectivement, les signaux d'alarme commencent à clignoter et il faudra être attentif à ce que veut dire «incitation financière». Cela peut aller si l'idée est d'offrir la gratuité du coût de la plaque, qui s'élève à quelques francs, pour un certain nombre de deux-roues qu'on pourrait voir circuler à Genève - et tant mieux s'il y en a plus. Mais, s'il s'agit d'accorder des subventions à l'achat de vélos, je pense que nous serons peut-être un peu moins d'accord.
La troisième invite est, elle aussi, peut-être sujette à discussion, en tout cas à controverse, dans la mesure où ces vélos sont destinés à des déplacements relativement courts, de quelques kilomètres, compte tenu de la configuration de notre canton et des exigences de la rapidité de déplacement, cela a été dit. Si je suis bien renseigné, ces vélos ont une autonomie de quelques dizaines de kilomètres, ce qui, depuis le lieu de domicile permet d'aller à un endroit et d'en revenir, cela sans avoir besoin d'équiper la ville et les communes de bornes publiques pour la recharge en courant électrique.
La troisième et dernière remarque concerne - d'après ce que j'ai entendu - le fait que certaines personnes voient dans ce mode de transport le moyen de limiter le développement d'autres transports. Là aussi, nous ne pourrons pas entrer en matière. Il ne s'agit pas d'opposer ce mode de transport à d'autres moyens, comme les scooters ou la marche; en favorisant ces vélos électriques, il s'agit bien de favoriser la complémentarité, mais aussi les autres modes de transports.
Nous parlerons donc de tout ça en commission des transports.
La présidente. La parole est à M. Gilbert Catelain à qui il reste une minute et quatorze secondes.
M. Gilbert Catelain (UDC). Indépendamment du fait que la plupart de ces vélos sont fabriqués en Chine, qu'ils ont parcouru plusieurs milliers de kilomètres avant d'arriver chez nous et qu'ils sont produits avec des énergies fossiles, j'invite la commission à se pencher sur un vrai plan de déplacement pour ce canton et à ne plus travailler sur de simples motions, au coup par coup.
J'invite aussi cette dernière à observer ce qui a été réalisé par la Ville de Lyon qui a mis en place tout un concept de déplacement deux-roues à proximité des arrêts de bus et des bouches de métro. Ce concept rencontre un énorme succès. Malgré le fait que ce service soit payant - on peut utiliser ces vélos avec un abonnement de transports publics ou de manière individuelle - je crois que cette solution a le mérite de répondre à des vrais besoins. Il ne s'agit pas simplement de promouvoir un seul mode de transport qui, finalement, ne résoudra pas forcément les problèmes de ce canton.
Nous soutiendrons donc le renvoi en commission, comme l'a dit mon collègue, et j'invite formellement la cette dernières à se rendre à Lyon pour tester ce système.
Mis aux voix, le renvoi de la proposition de motion 1697 à la commission des transports est adopté par 60 oui et 2 abstentions.