République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 9949-A
Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat modifiant la loi sur les augmentations annuelles dues aux membres du personnel de l'Etat ainsi que sur la progression de la prime de fidélité (B 5 17)

Suite du premier débat

M. Christian Bavarel (Ve). Madame la présidente, Mesdames et Messieurs les députés - ceux qui ont bien voulu revenir de la pause, je vois qu'on est fort peu à cette heure-ci... - ce projet de loi est important pour nous, les Verts, dans le sens où nous considérons que lorsqu'on signe un contrat on doit le respecter. Les contrats que nous avons signés avec les employés de l'Etat prévoient des mécanismes salariaux, et nous entendons que ces contrats soient respectés. Le fait de ne pas respecter les mécanismes salariaux est une manière de punir les plus jeunes et je ne vois pas pourquoi uniquement les jeunes collaborateurs, qui viennent d'arriver, écoperaient d'une punition qui les suivrait durant toute leur carrière, et pas les autres. Le signe qui est donné est très négatif.

Le Conseil d'Etat a choisi de rétablir la confiance avec la fonction publique, d'autant plus qu'aujourd'hui nous avons vraiment besoin de cette fonction publique pour réformer l'Etat en profondeur. Nous avons une fonction publique de très haute qualité et l'objectif des Verts est assez simple: c'est de travailler avec elle et d'augmenter encore sa qualité. Notre objectif est le suivant: que les meilleurs travaillent à l'Etat ! Pour les autres, il restera de la place dans le privé.

M. Eric Bertinat (UDC). Il est toujours assez difficile de s'exprimer en défaveur d'augmentations qui touchent les mécanismes salariaux sans tomber dans le désamour de la fonction publique. C'est un peu triste de devoir le rappeler ainsi, mais je tiens quand même à le dire: pour l'UDC, le fait de s'opposer à ce projet de loi n'est en rien un rejet pur et simple de l'administration publique dans son sens général. Au vu des énormes frais que l'Etat engloutit, un redémarrage des mécanismes salariaux ne peut être envisagé, le but principal est de revenir à des budgets équilibrés et à une dette qui se situerait entre 6 et 7 milliards.

C'est un but presque ordinaire pour un parlement. Les coûts qu'engendrent ce projet de loi ne vont pas du tout dans ce sens. Au contraire, ils s'en éloignent. On pourrait faire une analogie avec un tableau qui nous a été présenté à la commission des finances, qui concerne les mesures de prestations, où l'on voyait pour chaque année la mesure et le coût ou plutôt l'économie que l'on faisait. Cette économie était reportée sur quatre ans. C'est à dire que si l'on cumulait simplement les économies engendrées par le plan de mesures, on arrivait à 200 millions. Par contre, avec un report d'économies d'une année sur l'autre, on arrivait évidemment, en quatre ans, à près de 500 millions. On peut se poser la question de savoir si ce que l'on peut faire pour des économies, on ne le pourrait pas pour des dépenses. Or si, de la même manière, on reportait chaque année, depuis disons dix ou quinze ans, les dépenses qui concernent les mécanismes salariaux, on s'apercevrait qu'ils nous ont coûté des centaines de millions.

Dernier point que je voudrais traiter: est-ce que les fonctionnaires sont moyennement payés, comme on l'a dit ? Je voudrais rappeler que le tableau paru hier ou avant-hier dans la «Tribune de Genève» n'était qu'un tableau comparatif entre fonctionnaires cantonaux. Il serait intéressant de faire un comparatif salarial avec la fonction privée. On constaterait qu'il y a des centaines de francs, parfois même un bon millier de francs de différence. Pour l'heure, nous n'accepterons pas d'accorder ce redémarrage ou ce rattrapage des mécanismes salariaux.

M. Roger Golay (MCG). Le groupe MCG va soutenir sans grand enthousiasme ce projet de loi relatif à l'augmentation du personnel de la fonction publique. Par ailleurs, nous tenons tout de même à féliciter le Conseil d'Etat d'être parvenu à fixer un accord avec l'ensemble des représentants du personnel de la fonction publique, chose qui n'est pas évidente.

Comme je l'ai dit, cet accord, nous le soutenons sans grand enthousiasme. En effet, depuis les années 1990, il y a déjà eu environ pour 400 millions de francs de perte de pouvoir d'achat par année pour l'ensemble de la fonction publique en raison de la non-indexation des salaires, qu'il s'agisse d'indexations incomplètes ou de blocages de ce mécanisme salarial.

Concernant la prime de fidélité, il est évident que c'est une chose qui devient vraiment injuste au niveau des augmentations salariales, puisqu'aujourd'hui un grand nombre de fonctionnaires ne sont plus du tout augmentés et n'arrivent plus à 100% du salaire, il faut maintenant compter vingt-quatre ans d'activité au sein de la fonction publique pour obtenir ce que l'on pourrait comparer avec le treizième salaire du secteur privé. Comme le cite M. Weiss dans le rapport de minorité, il faut savoir que les 30% versés pour les néo-fonctionnaires restent bloqués ensuite d'une manière définitive. Il faudrait donc, un jour, vraiment penser au respect complet des mécanismes salariaux, comme le prévoit la loi, ou alors fixer un treizième salaire pour les nouveaux membres du personnel.

Lorsqu'on parle de 1,39% d'augmentation de la masse salariale, il ne faut pas oublier que cela comprend la création des postes de nouveaux fonctionnaires. Ce n'est donc pas 1,39% d'augmentation, mais bien moins, si l'on compte d'après le montant figurant sur la fiche de paie.

M. Bertinat parle du comparatif établi dans la «Tribune de Genève», relatif aux différents salaires des fonctionnaires cantonaux... C'est vrai que Genève est en neuvième position, mais cet article ne tient pas compte du pouvoir d'achat à Genève par rapport aux autres cantons. S'il y avait une étude à ce propos, on se retrouverait certainement en quinzième position, voire moins bien. Il faut donc aussi prendre le pouvoir d'achat en considération avant de faire état de ce tableau.

A mon avis, il est important et urgent d'encourager les fonctionnaires et de les motiver, par le respect des mécanismes salariaux. Cela va justement dans le sens du redressement des finances publiques, puisque, si les fonctionnaires sont motivés, on trouvera aussi les moyens dynamiques de réformer l'Etat avec l'ensemble des acteurs socio-économiques de ce canton.

Alors, nous voterons ce projet de loi, mais sans grand enthousiasme.

Mme Sandra Borgeaud (Ind.). En ayant lu attentivement ce projet de loi ainsi que les rapports, j'aimerais attirer l'attention sur certains choses, importantes à mes yeux. Il est vrai que l'Etat a décidé de diminuer en tout cas de 5% les postes de tous les fonctionnaires, notamment ceux concernant les départs à la retraite qui ne seront pas remplacés. J'aimerais quand même que, malgré tout... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)

Quant à la réputation des fonctionnaires, il est vrai que certains d'entre eux - malheureusement, il y en a - profitent un peu de rester où ils sont sans convenir à leur poste... Mais j'aimerais quand même que l'on respecte tous les autres. Par exemple, quand il des personnes manquent, il y a celles qui doivent travailler pour deux, voire trois. On leur en demande toujours plus: on leur demande la productivité; on leur demande de venir travailler avec le sourire, malgré le mobbing et tout ce qui se passe dans certains services - ce n'est pas inconnu, il faut aussi l'admettre.

Je pense qu'instaurer un treizième salaire, comme cela se fait dans certaines entreprises, ne serait peut-être pas une mauvaise chose. Ainsi, tout le monde serait sur pied d'égalité. Mais il y a quand même des catégories de fonctionnaires auxquels certaines indemnités sont dues: ceux qui travaillent de nuit, ceux qui mettent leur vie en jeu ou qui ont des postes difficiles. Il faut les respecter et ne pas systématiquement s'en prendre aux plus modestes. Certes qu'à l'Etat il y a des cadres supérieurs qui touchent des centaines de milliers de francs... Cependant, ce sont les personnes qui vont travailler tous les jours et qui doivent faire des heures supplémentaires qu'on a tendance à oublier. Alors, j'aimerais que l'on procède de manière équitable, que les indemnités soient octroyées de façon progressive, comme cela a été plus ou moins proposé, et que l'on ne remette en tout cas pas en cause la confiance que l'Etat a décidé d'accorder à la fonction publique. On en a besoin. Il y a plus de 35 000 fonctionnaires, on se doit de les respecter. S'en prendre systématiquement à eux, en ce qui concerne les salaires, ne me semble pas forcément être la bonne solution. Essayons donc de respecter leur travail et de leur donner les méthodes et la motivation pour pouvoir le poursuivre du mieux qu'ils peuvent.

La présidente. Monsieur Kunz, vous souhaitez reprendre la parole: il vous reste vingt secondes !

M. Pierre Kunz (R). Top ! En général, Mesdames et Messieurs les députés, M. Golay est un homme modéré. Malheureusement, il oublie parfois - probablement par manque d'expérience, et en tout cas beaucoup moins que certains de ses collègues - certaines règles de fonctionnement de ce Grand Conseil. La plus importante de ces règles consiste à s'abstenir de prendre la parole et de voter lorsqu'on est partie directement à un débat !

M. Guy Mettan (PDC), rapporteur de majorité. Je voulais tout d'abord retirer ce que j'avais dit tout à l'heure à propos du rapport de minorité que j'avais jugé comme n'étant pas assez consistant. J'ai été abusé par sa brièveté et sa concision. D'habitude M. Weiss est plus long; là, il a été très court. Je tenais à lui rendre cet hommage.

Cela dit, je voulais juste préciser quelle était la position, notamment de mon parti, concernant la rémunération et le statut de la fonction publique. Tout d'abord, nous considérons que l'accord qui a été fait par le Conseil d'Etat constitue une étape transitoire. Un progrès, mais qui n'est qu'une transition en vue de l'application du nouveau projet de loi sur le statut de la fonction publique. Dans ce sens-là, il n'y a pas du tout de contradiction entre le fait de soutenir l'application partielle des annuités pour l'année 2007 et, en même temps, le futur projet de loi sur la fonction publique.

Ce qui est important à nos yeux, et au nom de la majorité des partis de ce parlement - c'est le Conseil d'Etat qui l'a lui-même dit... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.) ... et qui a pris cet engagement - c'est de réduire progressivement la masse salariale, en l'occurrence le nombre de fonctionnaires, de 5% en quatre ans, soit de 1,25% par année, en moyenne. C'est cela, l'objectif que nous devons suivre. Pourquoi ? Parce que ce qui nous est demandé aujourd'hui, c'est d'adhérer à une méthode, celle qui nous a été présentée par le nouveau Conseil d'Etat et qui consiste à redresser les finances, à essayer de parvenir à l'équilibre et, en même temps, à restructurer en profondeur l'Etat, mais par étapes progressives.

Au fond, ce qui nous est demandé aujourd'hui, c'est d'accepter cette méthode. Alors, soit on adhère à la méthode, auquel cas on accepte de voter les annuités, soit on la rejette, et dans ce cas, effectivement, il est logique de ne pas voter ce projet de loi. Mais, en rejetant cette méthode-là, et donc ce projet de loi-là, c'est tout le mécanisme de redressement des finances et de restructuration de l'Etat qu'on met en cause. Voilà ce que je voulais préciser avant que l'on passe au vote.

M. Roger Golay (MCG). Lorsque j'ai pris la parole tout à l'heure, j'ai parlé au nom du groupe MCG. En ce qui nous concerne, nous les fonctionnaires du groupe, nous allons nous abstenir. Nous respecterons l'article 24. Je voulais simplement m'exprimer par rapport aux nombreux sacrifices qu'a déjà faits la fonction publique pour le redressement des finances publiques, Monsieur Kunz.

M. Pierre Weiss (L), rapporteur de minorité. Je prends note des déclarations de M. Golay. Il faut encore souligner qu'il était le seul de son groupe à être présent tout à l'heure. C'est peut-être une préfiguration de ce qui va lui arriver au MCG... En tout cas, il est tout à fait normal qu'il s'exprime au nom des absents.

J'aimerais tout d'abord rendre grâce à mon collègue Mettan pour ses remarques introductives et souligner à mon tour la qualité de son rapport et, surtout, la qualité de ses explications. Elles me permettent de mieux comprendre les voies par lesquelles le parti démocrate-chrétien va contribuer à faire évoluer la situation des finances genevoises: d'abord par une augmentation du déficit, puis par une réduction de la masse salariale grâce à son soutien qui a été réaffirmé pour le projet de loi que nous avons ensemble déposé. Pour cela, merci Monsieur Mettan !

J'aimerais ensuite dire à notre collègue Velasco, qui sera certainement présent dans les coulisses de ce parlement... (L'orateur est interpellé.) Et qui est déjà à l'Hôpital, en réalité ! J'aimerais d'abord lui dire que l'initiative libérale pour une baisse de 12% des impôts a permis une augmentation de la production fiscale, alliée - parce qu'il s'agit de ne pas faire de simples règles de trois - au dynamisme de l'économie. Nous avons vu depuis l'an 2000 combien, par centaines de millions, se sont accrues les recettes de l'Etat. C'est un point qui est insuffisamment souligné. Eh bien, je le soulignerai à chaque fois que l'initiative libérale sur la baisse des impôts sera mise en cause ! Cette baisse individuelle a permis une croissance collective des recettes fiscales de ce canton... (Brouhaha.) ... ce sera dit, ce doit être dit... (Protestations.)

M. Velasco dit qu'un patron aurait pris des mesures s'il s'était trouvé dans la situation de l'Etat de Genève... Oui, il aurait pris des mesures. Ces mesures auraient consisté précisément à éviter que la masse salariale explose ainsi, mais il ne les aurait pas prises à n'importe quel prix. Il est vrai que la paix du travail peut être mise en danger et que nous y sommes attachés, mais cette paix du travail ne s'achète pas avec des dépenses qui sont supérieures aux avantages que l'on peut en retirer. Quant à sa suggestion d'un retrait du projet de loi que je viens d'évoquer, cet excellent projet de loi de l'Entente, eh bien, certainement que nous y réfléchirons pendant les féries de Noël, mais je pense que cette réflexion nous conduira, tout bien considéré, à ne pas entrer en matière sur sa suggestion.

Je voudrais simplement, pour terminer, Madame la présidente, insister sur deux points. Bien souvent, il y a dans ce parlement certains bancs, plutôt derrière moi, qui accusent la droite d'avoir depuis des décennies contribué à augmenter les déficits. A ces voix, s'ajoute celle d'un nouveau groupement qui s'est momentanément joint à notre parlement. Eh bien, c'est vrai, mais ce n'est pas la droite... (Brouhaha.) ... qui a contribué à l'augmentation des déficits: c'est une certaine droite...

Des voix. Ah !

M. Pierre Weiss. ... culpabilisée par certains faux besoins, qui s'est laissé entraîner dans des promesses, dans des dons inconsidérés, et qui, lorsque la situation n'était plus favorable, lorsque les vaches étaient redevenues maigres, n'a pas voulu, n'a pas eu le courage de décider de la suppression de ces avantages accordés du temps des vaches grasses. (L'orateur est interpellé.) C'est contre ces dons inconsidérés, arrachés par une gauche culpabilisante... (Protestations.) ... que nous nous élevons ! C'est contre ces dons d'un autre temps, du temps où l'argent coulait à flots, que nous voulons aujourd'hui mettre le holà ! Ce n'est donc pas - inutile de le dire - la droite libérale qui procède ainsi. Au contraire, elle refuse fermement ces dons inconsidérés.

Mon dernier point, c'est sur la confiance. Ce terme a souvent été évoqué depuis le début de cette législature. J'aimerais dire aujourd'hui, Monsieur le chef du département des finances, que la confiance s'érode. Je n'en suis pas encore, comme dans la pièce de Molière, à dire...

La présidente. Il va falloir conclure, Monsieur le député.

M. Pierre Weiss. ... que le crédit est mort, que la confiance est morte... Je dirai simplement aujourd'hui, Monsieur le chef du département, que la confiance est malade. Elle est malade, et en refusant ce projet de loi nous contribuerions à sa guérison.

M. David Hiler, conseiller d'Etat. En deux mots, si vous prenez le calculateur en ligne qui a été présenté hier et que vous regardez quels sont les résultats pour les salaires du privé - puisque la base de données est fondée sur le privé - vous vous apercevrez malgré tout qu'il y a quand même, en principe, une différence en fonction des années d'expérience. Dans le système de l'Etat, cette réalité est marquée par le système dit «des annuités». C'est la raison pour laquelle, d'une façon ou d'une autre, il faut les payer. Elles sont prévues dans la loi, et chaque fois que nous entendons ne pas les payer, les payer partiellement ou les décaler, comme nous le faisons, nous passons par une loi qui déroge à une loi générale.

Par ailleurs, certains l'ont dit: ce système n'est sans doute plus très bon, et c'est la conviction de l'ensemble du Conseil d'Etat. Il n'est pas bon, parce qu'il surpondère l'expérience par rapport à d'autres facteurs. Le système d'évaluation des fonctions n'est pas très bon non plus, parce qu'il surpondère la formation initiale par rapport à l'expérience professionnelle et qu'il surpondère la formation initiale par rapport à l'impact de la fonction. Nous devons donc changer les deux. Bien !

La première chose, à l'horizon 2008 cette fois, c'est d'avoir des annuités moins lourdes sur la durée, c'est d'avoir un treizième salaire et d'abolir la prime de fidélité, la première mesure étant financée par la seconde. C'est la proposition que nous sommes en train de discuter - assez difficilement, à vrai dire - avec les organisations représentatives du personnel. Le principe de la double neutralité est acquis, mais il faudra encore arriver au but. Cela dit, c'est important, parce que, très clairement, la situation actuelle n'est pas satisfaisante en termes de surpondération du facteur expérience dans la rémunération.

Refuser de verser les annuités aujourd'hui, c'est, pour l'essentiel de la somme, se donner des dépenses demain. Malgré tout, il y a un nombre d'annuités et au fond, quand on ne les paie pas cette année-là - sauf pour les personnes qui arriveront à la retraite avant qu'elles puissent se rattraper, et elles sont une minorité - il faudra payer plus tard. C'est la raison pour laquelle ce ne sont pas des mesures structurelles et qu'elles ne sont pas bonnes.

La progression de la prime de fidélité, nous ne la payons que pour une toute petite partie du personnel, parce que nous estimons que le système est carrément mauvais. Comme nous entendons en sortir définitivement, pour la prime de fidélité, il n'y a pas lieu d'augmenter ce montant. L'indexation est donc le seul endroit où l'on peut faire quelque chose de structurel. C'est la raison pour laquelle nous ne payons cette année que les deux tiers de l'indexation, après avoir payé le tiers en 2006.

L'exercice a toutefois ses limites, le tableau comparatif intercantonal des rémunérations le démontre. Si vous aviez pris le même tableau comparatif en 1990, nous aurions sans doute été deuxièmes derrière Zoug. Aujourd'hui, nous reculons et, malheureusement - regardez les autres cantons qui sont derrière nous - aucun d'entre eux n'a le niveau des loyers genevois; aucun d'entre eux n'a l'assurance-maladie genevoise... De sorte que ce qui est le plus intéressant, c'est, je crois, de voir l'écart avec le canton de Vaud, puisque dans le privé, dans le canton de Vaud, les salaires sont inférieurs à ceux de Genève. Ils le sont aussi, mais dans une marge assez comparable, dans le domaine public.

Nous arrivons au moment du retour dans le rang. La riche Genève des années 1980, de non-indexation en non-indexation, commence à offrir des salaires comparables à ceux du reste de la Suisse pour la fonction publique. C'est le même processus que ce que l'on a observé dans l'instruction publique. Au fond, en 1990, les effectifs par classe étaient bien moindres que ceux du reste de la Suisse. Aujourd'hui, on est simplement dans le wagon du milieu du train, si je puis m'exprimer ainsi.

Il y a donc des limites, et c'est la raison pour laquelle nous privilégions plutôt une démarche qui est fondée sur l'efficience et une rémunération correcte des collaborateurs, en changeant dans la législature le système de rémunération et le système d'évaluation des fonctions. C'est notre intention. Cependant, il y a des obstacles sur la route. Par ailleurs, en ce qui concerne le premier point, le système de rémunération, vous en jugerez, puisqu'il faut des modifications légales.

En ce qui concerne les réévaluations collectives, un mot sur le désordre dans lequel on a accordé certaines réévaluations, «importantes» ! Ces réévaluations ont été accordées pour deux catégories de personnel: les infirmières - ce dont, à vrai dire, je me réjouis toujours, malgré le désordre que cela donne - et les assistants sociaux. Ensuite, hop, on a fait tomber la barrière et les enseignants du primaire n'ont pas pu entrer dans le train ! Cela, je pense que ce n'est pas correct et c'est la raison pour laquelle - même si cela me contrarie profondément, comme conseiller d'Etat chargé des finances - je crois qu'il fallait faire ce geste pour un minimum d'égalité de traitement. Surtout au coût finalement assez modique de la mesure, par ailleurs provisionnée pour l'essentiel, le rattrapage CIA. Cela me paraissait normal et juste.

Pour le reste, que vous dire ? Nous ne verserons pas l'intégralité de l'indexation et des mécanismes salariaux aussi longtemps que nous ne serons pas revenus à l'équilibre. C'est une première chose. Nous l'avons dit et redit au cartel. Ce que je constate simplement, c'est que les efforts que nous demandons aujourd'hui à la fonction publique en termes d'adaptation - et pas seulement aux cadres - sont importants. Introduire une conduite de l'Etat par objectifs, comme vous l'appelez de vos voeux, fixer des indicateurs, responsabiliser les collaborateurs, ce sont des modifications dans certains secteurs.

D'aucuns, j'ai eu l'occasion de le dire, l'accueillent comme une libération, c'est ce qu'ils attendaient depuis un certain temps. D'autres s'adaptent plus difficilement à toutes ces nouvelles demandes qui leur sont faites et à tous ces cadrages de plus en plus forts.

C'est finalement la raison pour laquelle je trouve qu'en passant cet accord, qui a un coût, nous garantissons une possibilité de faire une réforme de l'Etat dans de bonnes conditions et de ne pas nous heurter à des murs qui sont vite levés. Il y avait paraît-il 250 personnes dans la rue hier pour manifester contre certains aspects de la politique du Conseil d'Etat. Etant présent à la fin de cette manifestation pendant que mon collègue Charles Beer parlait, je n'en ai compté personnellement que 80 ! Individuellement, c'est plus que les 40, mais cela montre aussi que - malgré l'ampleur des changements que les gens doivent vivre au quotidien, qui vous semblent très peu mais qui sont pour eux beaucoup - les gens sentent quelque part que l'accord est équilibré. Sinon, nous aurions retrouvé les 10 000 personnes du bon vieux temps.

Aujourd'hui, nous devons aller de l'avant sur tous ces chantiers. Tous, nous ne les réussirons pas, parce que ce n'est pas comme cela que marche la vie, mais la politique sur cet accord vise bel et bien - il faut le rappeler - à obtenir une modification fondamentale. Il s'agit de dire qu'il ne faut pas avoir tué père et mère pour être exclu de la fonction publique. Les citoyens sont en droit d'attendre que les prestations publiques soient correctement données. Une insuffisance de prestations est donc, ici comme ailleurs, un motif de licenciement, avec toutes les protections contre l'arbitraire qu'un Etat de droit se doit de donner.

Le fait d'avoir pu arriver à cette réforme, de vous la proposer - et je sais que vous l'accepterez - indique tout de même un progrès considérable dans les relations sociales. Ce n'est pas précisément par le fait qu'on a une annuité - cela aurait pu être un peu plus ou un peu moins - mais parce que nous avons été de l'avant sur les réévaluations collectives, sur le paiement dans la classe de fonction à l'entrée promis depuis plus de dix ans par différents gouvernements, que nous avons réussi à garder un climat convenable au moins pour un an. Il est fragile, comme l'est la majorité de ce parlement dans son soutien au budget, mais il est important.

Je conclurai en disant à M. Kunz et à quelques autres que l'engagement du Conseil d'Etat est de ne pas augmenter les charges de plus de 1% par année. Il est nécessaire à cette fin, pour faire face aux besoins nouveaux, de supprimer des besoins anciens, qui ne sont plus des besoins. En conséquence, c'est bien le 1% qui fait foi, les 5% étant un moyen de l'atteindre. J'ai le privilège dans le département des finances de pouvoir atteindre cet objectif qui, en termes de suppressions, est plus élevé que 5%, puisqu'il faut quand même créer quelques postes nouveaux aussi au département des finances. Et il a toujours été prévu dans l'esprit du Conseil d'Etat que des postes dont on peut se passer puissent être affectés à des postes dont on ne peut se passer.

Je signale au passage que cela va permettre la prison pour les courtes peines de Champ-Dollon, cette suppression-là. Si nous arrivions à Genève dans une situation où les gens condamnés à des courtes peines ne purgeaient pas leur peine par manque de place, cette ambition tellement difficile à porter qu'est la restauration de l'autorité de l'Etat serait réduite à néant.

Une voix. Bravo !

M. David Hiler. Ce que nous cherchons à faire, c'est à affecter le plus rationnellement possible, et les 5% c'est un moyen d'arriver au 1%. Vous ne le vérifierez jamais selon la méthode Kunz. Vous devez nous juger, Monsieur Kunz, vous et tous vos collègues, sur la «méthode Conseil d'Etat» et pas sur la lecture brillante, originale et innovante que vous faites du paragraphe concernant ces mesures dans le projet de plan de mesures rappelé dans l'exposé des motifs de ce budget !

Je vous remercie donc de soutenir l'accord passé avec la fonction publique, en vous rappelant toutefois que si d'aventure vous refusiez ce projet de loi, nous devrions verser l'intégralité de l'annuité supplémentaire... (L'orateur est interpellé.) Si, si ! Il vaudrait donc mieux procéder par amendement.

Des voix. Vote nominal !

La présidente. Est-ce que vous êtes appuyés pour ce vote nominal ? Vous l'êtes.

Mis aux voix à l'appel nominal, le projet de loi 9949 est adopté en premier débat par 33 oui contre 24 non et 11 abstentions.

Appel nominal

La loi 9949 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.

Mise aux voix, la loi 9949 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 33 oui contre 23 non et 11 abstentions.

Loi 9949