République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 22 septembre 2006 à 17h
56e législature - 1re année - 11e session - 55e séance
PL 9829-A
Premier débat
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. J'interviens à nouveau dans ce dossier dans le souci de préserver les deniers publics. Nous avons affaire dans ce rapport de minorité à un porteur dont les administrateurs ne sont autres que les ceux de la régie qui gère cet immeuble acquis par la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève. C'est dire si ces personnes sont proches des événements survenus dans le cadre de ce dossier, puisque ce bien a été repris en 1998 - bien présenté aujourd'hui à notre Grand Conseil - évidement sans savoir à cette époque que la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale serait créée en 2001 pour reprendre toutes ces affaires qui concernent tant les contribuables.
Ces personnes sont donc impliquées depuis 1998 dans ces affaires et elles ont touché des commissions sur les biens déjà acquis à cette époque et ont continué à les administrer. Nous savons par ce biais qu'elles ont faussé la comptabilité de la Banque cantonale de Genève, ce qui a conduit à sa débâcle et à la découverte du pot aux roses en 2000. La Banque cantonale de Genève, qui avait commis ces actes illicites - je vous rappelle que certains de ses dirigeants sont aujourd'hui inculpés, mais, cela va de soi, ils bénéficient de la présomption d'innocence - leur a permis de signer ces acte de vente. Aujourd'hui, dans le concept du respect de la parole donnée, comme je le disais, elles ont obtenu de qu'on appelle un «mandat de vente exclusif», à tout le moins un mandat de gestion exclusive de ces biens qui pourrait être un jour invalidé pour actes illicites ou contraires à l'honneur... Ce n'est pas moi qui le dis, c'est un article du code civil.
Dans un souci de sauvegarde des intérêts publics, nous estimons au MCG qu'il n'est pas judicieux de verser des commissions à ces courtiers qui pourraient être impliqués au niveau pénal dans la débâcle de la Banque cantonale de Genève. Nous pensons qu'il faut conserver ces commissions en attendant que la chose soit jugée et nous espérons tous qu'elle le sera avant prescription. Je dis cela, car nous constatons une certaine lenteur dans les procédures pénales concernant le dossier de la Banque cantonale de Genève... Et le souci d'anticipation et de prudence devrait normalement nous pousser à conserver ces commissions en attendant force de chose jugée.
C'est la raison pour laquelle nous avons déposé un amendement. Etant donné qu'on m'a reproché de mentionner sur la place publique le nom de sociétés de gens impliqués dans cette débâcle, nous avons volontairement inscrit des initiales qui ne correspondent à rien. En revanche, le fond du texte est parfaitement juste. Vous excuserez une faute de frappe qui m'a échappé dans l'exposé des motifs, ce qui n'est pas très important dans la mesure où, comme tout le monde le sait, peu de personnes le lisent. J'en veux pour preuve le sort qui va être réservé à ce rapport de minorité dans quelques instants... Ce qui est important, c'est la teneur de l'article que j'entends modifier par cet amendement. Voilà, Mesdames et Messieurs les députés, j'en ai terminé...
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur !
M. Eric Stauffer. C'est gentil, Monsieur le président, mais vous me coupez la parole... J'ai dit: «J'en ai terminé»...
Le président. Vous avez dit: «J'en ai terminé», j'en ai déduit que vous aviez terminé ! J'ai cru...
M. Eric Stauffer. ... mais c'est une phrase ! C'est une phrase, Monsieur le président !
Le président. ... que vous seriez sensible à cette manifestation de l'attention soutenue que je vous porte en toutes circonstances. Vous dites: «J'en ai terminé»; je vous crois sur parole !
M. Eric Stauffer. Merci. Je voulais juste ajouter que j'espère que ce principe de prudence sera accepté par notre Grand Conseil. Merci, Monsieur le président.
Le président. N'en doutons pas, n'en doutons pas ! Mesdames et Messieurs les députés, la parole est encore à Mme le rapporteur de majorité.
Mme Fabienne Gautier (L), rapporteuse de majorité. Je vois, à la lecture du rapport de minorité, que le rapporteur semble avoir oublié la pratique en usage et les contrats qui lient la fondation aux anciens porteurs. La reprise de portage par la fondation implique, lorsqu'il y a vente, aliénation, que l'ancien porteur bénéficie d'un mandat d'exclusivité durant six mois. C'est un courtier. Et je pense qu'il mérite, pour avoir trouvé un acquéreur...
M. Eric Stauffer. Un porteur !
Mme Fabienne Gautier. Non ! Il n'est plus un porteur: il est devenu un courtier !
M. Eric Stauffer. D'accord !
Mme Fabienne Gautier. Je ne parle pas de ce qui s'est passé avant la création de la Fondation... (M. Eric Stauffer interpelle l'oratrice.) Laissez-moi parler ! Je vous ai écouté, Monsieur le rapporteur de minorité, alors ayez au moins l'obligeance de me laisser parler ! (Brouhaha.) Je reprends. Il s'agit d'un mandat de courtage. La propriétaire - qui est actuellement la Fondation - a un contrat qui la lie à l'ancien porteur devenu courtier, pendant six mois, à partir du moment où l'objet est mis en vente. En l'occurrence, cette vente s'est réalisée durant ce laps de temps. Et il faut la saluer, puisque la perte ne se monte qu'à 23,63%, ce qui est très honorable.
M. Eric Stauffer. Quelques millions !
Mme Fabienne Gautier. Il ne s'agit pas de quelques millions, mais de 1,3 million ! Ce ne sont donc pas quelques millions ! On reste toujours aux alentours d'un million.
Tout travail mérite salaire. Vous dites dans votre rapport que cette perte ne va pas être à la charge du débiteur... Ce n'est pas vrai ! Absolument pas ! La Fondation a valorisé ce bien. Que vaut-il mieux perdre, Monsieur Stauffer ? Pour ma part, je pense qu'il vaut mieux perdre seulement 23,63% que plus de 100% d'un bien ! (L'oratrice est interpellée par M. Eric Stauffer.) Si, car parfois l'on perd un peu plus !
Voilà pourquoi je ne pourrai pas prendre votre amendement en considération - ni le voter, bien sûr !
Mesdames et Messieurs les députés, je vous prie de voter ce projet de loi tel qu'il a été accepté par la majorité de la commission.
Le président. Monsieur le député Stauffer, vous avez redemandé la parole ? Je vous la donne, mais sachez que nous sommes très attentifs. Nous vous avons entendu répéter tout le temps les mêmes choses depuis que vous avez commencé à faire des rapports de minorité sur ces malheureuses affaires. Nous sommes par conséquent en mesure de répéter par coeur, chacun d'entre nous, tout ce que vous nous dites ! De sorte que la répétition pourrait même entamer la confiance que vous portent vos électeurs... Vous avez la parole.
M. Eric Stauffer (MCG), rapporteur de minorité. Monsieur le président, c'est vrai, il y a beaucoup de répétitions: c'est la preuve que je suis écouté, mais pas entendu... (Rires.) Parce que ce Grand Conseil n'est pas soucieux des deniers publics, Monsieur le président ! (Exclamations.) Ecoutez, c'est la vérité, avec tout le respect que je vous porte, Mesdames et Messieurs les députés ! Lorsque nous proposons un projet ou un amendement pour économiser 150 000 F, vous dites que ce n'est rien... Nous avons entendu la rapporteuse de majorité dire que la perte dans ce dossier n'était que de 1,3 million... Excusez-moi, Madame la députée, mais, au Mouvement Citoyens Genevois, nous n'avons pas les mêmes valeurs ! Pour nous, c'est une fortune ! Que la plupart de nos concitoyens n'osent même pas espérer gagner dans leur vie !
Alors quand vous venez expliquer qu'un porteur, qui s'est rendu complice en plombant les comptes et en falsifiant les bilans de la BCG, a fait perdre 1,3 million et qu'en plus il va toucher une commission pour service rendu, nous ne pouvons que nous insurger ! Le MCG estime que ce n'est pas tolérable ! C'est pourquoi nous n'avons pas les mêmes valeurs ! Et c'est peut-être aussi pour cela, Madame la députée, qu'aujourd'hui le Mouvement Citoyens Genevois siège dans cette enceinte ! Voilà ! Monsieur le président, j'en ai terminé.
Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de soutenir l'amendement que le Mouvement Citoyens Genevois a déposé.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur. Bonne note est prise de votre insurrection.
Mis aux voix, le projet de loi 9829 est adopté en premier débat par 54 oui contre 4 non et 2 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que l'article 1.
Le président. Nous sommes saisis d'une demande d'amendement à l'article 2. Il s'agit d'un article 2 (nouvelle teneur), «Paiement de commission de courtage» (nouveau). Le voici: «Le paiement d'une commission de courtage et tout autre paiement n'est pas autorisé par la fondation à toutes entités considérées comme société dite de portage et/ou à d'autres sociétés de gérance immobilière ou les dirigeants et/ou administrateurs sont les mêmes personnes physiques siégeant au conseil d'administration des sociétés dites de portage.». Cet amendement est signé par MM. les députés Claude Jeanneret, Roger Golay, Thierry Cerutti, Sébastien Brunny, Mme Sandra Borgeaud, MM. Henry Rappaz et Eric Stauffer.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 55 non contre 8 oui.
Mis aux voix, l'article 2 est adopté, de même que l'article 3.
Troisième débat
La loi 9829 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9829 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 54 oui contre 8 non et 2 abstentions.