République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1466-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : La population défend sa police
Rapport de M. Martin-Paul Broennimann (S)
P 1518-A
Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition pour un vrai poste de police à la Pallanterie
Rapport de M. Martin-Paul Broennimann (S)

Débat

M. François Thion (S), rapporteur ad interim. J'aimerais d'abord remercier mon collègue Martin-Paul Broennimann pour son excellent et très complet rapport sur ces deux pétitions que nous avons conjointement traitées en commission. La pétition 1466 demande le maintien de l'effectif actuel du poste de police du Bourg-de-Four; elle concerne donc la Vieille-Ville. La pétition 1518 concerne le poste de police de la Pallanterie. Elle demande également un maintien de l'effectif et l'ouverture 24h/24h de ce poste de police.

La première pétition a été signée par plus de 1000 citoyens et la deuxième par plus de 3000 citoyens, ce qui démontre un réel souci de la population face à la fermeture de ces postes de police. Deux notions ont régulièrement été avancées lors des auditions: le sentiment de sécurité de la population et le terme de «police de proximité». La fermeture des postes de police en dehors des heures de bureau est ressentie par la population - je pense pouvoir parler de l'ensemble de la population à travers ces deux exemples - comme un abandon qui favorise un sentiment d'insécurité. Par exemple, les habitants de la Vieille-Ville nous ont dit qu'ils craignent que leur quartier se transforme en zone de trafique de drogue, comme autrefois à la gare. Depuis la fermeture du poste de police du Bourg-de-Four, ils disent constater une augmentation du bruit, des incivilités, du vandalisme, des tags.

On nous dit que dans la Vieille-Ville l'absence de poste est remplacée par une opération qui se nomme «Remparts», avec des patrouilles de police qui hantent la Vieille-Ville durant la nuit. Mais, d'après les pétitionnaires, le résultat est davantage une augmentation des amendes qu'une garantie de sécurité.

En auditionnant la police genevoise, on a constaté que cette dernière est en sous-effectif. Les documents que le département de justice et police nous a distribués nous montrent clairement une diminution des effectifs depuis 1975. Deux chiffres. En 1986, il y avait 29 gendarmes et policiers pour 10 000 habitants. En 2004, 23 gendarmes et policiers pour 10 000 habitants. Pourquoi n'y a-t-il pas assez de gendarmes dans notre République ? On nous a expliqué que l'attrait de la profession n'est plus aussi grand qu'autrefois. L'image des gendarmes est négative parmi la population. Les horaires sont nettement insatisfaisants, il y a beaucoup trop d'heures supplémentaires. Je pense aux pères et mères de famille à qui cela pose d'énormes problèmes au moment des vacances scolaires, par exemple. Précisons également qu'il y a eu de nombreux départs dans la police ces dernières années - notamment des policiers qui ont démissionné, parce qu'ils ont estimé que les conditions de travail étaient nettement plus intéressantes dans d'autres cantons.

Autre constatation, le peu de gendarmes qui restent à Genève sont trop souvent absorbés par des tâches administratives, par exemple les trop rares îlotiers. On nous a dit qu'il y avait deux îlotiers pour l'ensemble du quartier de la Servette - 70 000 habitants - et ils passent la moitié de leur temps devant leur ordinateur. Certains qui devraient être proches de la population ne mettent pas le nez dehors pendant une journée entière. Peut-on vraiment parler d'une police de proximité ?

Durant les auditions, les commissaires ont été favorablement impressionnés par ce qu'il se passe dans la ville de Lausanne. Nous avons auditionné une déléguée de l'Observatoire de la sécurité et un représentant de la police de la ville de Lausanne.

Tout d'abord, quelques mots sur cet Observatoire de la sécurité qui a mené une enquête intéressante sur le sentiment d'insécurité en ville de Lausanne. Ils ont fait un sondage. Les personnes sondées demandent majoritairement une plus grande présence humaine, des passages réguliers de la police dans leurs quartiers. On nous dit dans ce sondage que la présence des policiers dans les quartiers rassure la population et que - c'est d'actualité à Lausanne - la mise en place de caméras ne remplace pas cette présence policière. La présence de caméras ne donne pas un sentiment de sécurité. Où est-ce que les gens ont peur ? Dans les passages mal éclairés ou dans le bus. Il y a un très fort sentiment d'insécurité dans le bus, car on nous a expliqué - toujours dans ce sondage - que les gens enfermés dans un lieu confiné avec des personnes inconnues ne se sentent pas en sécurité. Autre chose que l'on a aussi appris dans ce sondage: après 22h - je trouve cela important - 20% des personnes ont peur de sortir et 10% n'osent pas sortir.

La police municipale de Lausanne joue un rôle intéressant de police de proximité, car elle va au devant de la population. Il faut préciser que cette police municipale de Lausanne a les mêmes compétences que la police cantonale vaudoise. Je vous disais qu'il y a très peu de policiers à Genève, en ville de Lausanne, il y a 416 policiers pour 125 000 habitants.

Avant d'en arriver aux conclusions, j'ajouterai un petit détail sur le poste de la Pallanterie. On s'est aperçu que du côté du quartier de la Pallanterie, dans tout le secteur qui se trouve sur la rive gauche du lac, de Vésenaz à Hermance, comme la police n'est pas présente, les gens les plus fortunés font appel à des sociétés de gardiennage. C'est-à-dire qu'il y a une inégalité face à la sécurité, car certains citoyens peuvent payer toutes les nuits des agents de sécurité qui montent la garde et les autres, ils attendent. En plus, entre ces polices de sécurité et la gendarmerie, cela ne se passe pas toujours très bien; quand il se passe quelque chose, la gendarmerie arrive souvent trop tard.

Les commissaires vous proposent de renvoyer ces deux pétitions au Conseil d'Etat avec les recommandations présentes dans le rapport. Je ne vais pas vous les lire mais elles sont extrêmement intéressantes, et je pense que le Conseil d'Etat les regardera avec intérêt.

En conclusion, l'ouverture des postes de police rassure la population. La présence policière dans la rue rassure la population et c'est dans ce sens qu'il faut aller.

Mme Esther Alder (Ve). Je ne vais pas répéter ce que M. Thion a très bien dit. Il faut retenir de ces pétitions la volonté qu'a la population d'avoir des postes ouverts et accessibles dans les quartiers. Les habitants de ce canton veulent une police qui leur soit proche - on appelle cela une police de proximité - et non pas une police motorisée qui fonctionne un peu sous la forme de commandos. La population veut des policiers dans la rue qui soient au fait de la vie des quartiers et, surtout, des postes ouverts 24h/24h.

Avec M. Moutinot qui est à présent en charge des institutions, il y a beaucoup d'espoir dans la population de voir ces souhaits exaucés. Quand on parle d'insécurité, c'est peut-être parce qu'on ne voit pas la police et que les gens se sentent démunis, d'où un sentiment de crainte et de trouble.

Il faut renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat et on espère tous qu'il y répondra de manière que la population soit satisfaite.

Mme Janine Hagmann (L). On est tous d'accord ici pour dire qu'il n'est jamais agréable d'être cambriolé pendant la nuit - pendant son sommeil - et de se réveiller le matin en s'apercevant qu'on a dévissé la serrure de la porte d'entrée, que le sac à main a disparu avec tout son contenu - argent, carte d'identité, etc. Dans ces moments, on a besoin d'aide et quand on téléphone pour déposer plainte et réclamer un constat le plus vite possible, au poste de police de la Pallanterie, par exemple, c'est un répondeur qui vous annonce que le poste est ouvert de 15h à 18h30 - si je me souviens bien.

L'aventure m'est arrivée il y a moins d'un mois et je vous assure qu'à ce moment-là, on a un sentiment d'abandon et on se rend compte que le sujet préoccupe non seulement la population, mais aussi les policiers. Car une fois qu'ils nous reçoivent, eux-mêmes nous disent que ce n'est pas tout à fait normal. D'où les appels au secours, mais pas seulement de la région où je réside. Nous avons déjà eu dans cette enceinte des appels à l'aide d'Onex, de Versoix et, cette fois, très nettement d'Arve-Lac.

Une constatation s'impose. Le nombre de postes a tendance à se réduire comme peau de chagrin. Très rapidement, je vais remonter assez loin. En 1950, 35 postes fonctionnaient. En 1958, plusieurs postes disparaissent. En 1964, on en trouve encore 26. Et dès 1970, surtout à cause du manque d'effectifs, on arrive à 15 postes, mais avec un objectif bien précis du Conseil d'Etat de regroupement sous forme de postes plus importants - centralisés - étoffés en effectif et dotés des moyens techniques nécessaires. Evidemment, tout cela avec une population qui a beaucoup augmenté.

Première réflexion, le problème est récurrent et s'inscrit dans la durée. Un poste entraîne un coût qui n'est pas à négliger. Il y a aussi un manque d'attractivité pour cette profession qui empêche parfois le département de répondre à toutes les demandes de la population.

Deuxième réflexion: deux pétitions nous ont été soumises. Je n'arrive pas aux mêmes conclusions que mes préopinants, car la première pétition a, dans ses demandes très précises, le maintien de l'effectif actuel du Bourg-de-Four et l'ouverture d'un débat sur le système policier - souhaité par les citoyens - et là, je ne peux pas entrer en matière. Le Bourg-de-Four, c'est la ville de Genève.

Une politique générale a été mise en place par l'ancienne cheffe du département. Elle a déplacé le poste du Bourg-de-Four à Cornavin, mais cela reste à Genève-ville. Les gens que nous avons auditionnés à propos du Bourg-de-Four nous ont montré que le problème n'existait pas réellement.

Je vous propose donc, au nom du groupe libéral, le dépôt de la pétition 1466 sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement, car nous ne pouvons pas aller contre la mise en place d'un plan global par le département. Ce n'est pas notre rôle de députés. Nous pouvons relayer les désirs de la population mais nous ne sommes pas là non plus pour organiser la police.

Par contre, la pétition 1518 ne peut rester sans réponse. Arve-Lac est composé de communes qui ont presque toutes «frontières communes» avec la France. M. Catelain pourra confirmer la fermeture de nombreux postes douaniers, si bien qu'actuellement la région est une vraie passoire - comme nous l'ont dit les policiers. Il faudrait que le poste de la Pallanterie fonctionne 24h/24h, car cette ouverture offrirait une véritable sécurité pour les gens de la région.

L'institution doit défendre une image - vous êtes d'accord avec moi, je pense ! Elle est au service de la population, elle doit répondre à ses besoins. C'est pourquoi le département nous avait annoncé qu'il essaierait de reconsidérer la demande des habitants d'Arve-Lac.

J'espère, Monsieur Moutinot, que vous pourrez suivre la politique promise, et c'est pourquoi je vous propose, Mesdames et Messieurs, de renvoyer au Conseil d'Etat la pétition 1518 (Applaudissements.)

M. Sébastien Brunny (MCG). Comme nous pouvons le constater, la fermeture d'un poste de police suscite immanquablement une vive polémique. Nous tous voulons, Mesdames et Messieurs les députés, une police à l'écoute de ses citoyens et de ses citoyennes, une police proche de sa population, une police résolvant les problèmes de ses résidents. Malheureusement, la réalité est toute autre. Et nous avons tous une part de responsabilité dans cette situation délétère.

En effet, actuellement, nous avons le même nombre de gendarmes qu'en 1975, soit 750 unités pour une population qui a pratiquement doublé, allant de pair avec des problèmes inhérents à son expansion. De plus, les dérives de notre société ont fait que le nombre d'interventions de la police est exponentiel, et cela depuis plusieurs années, pour atteindre le chiffre faramineux de 59 000 réquisitions pour l'année 2004. Le constat est simple: faire beaucoup plus, avec moins. Telle est la devise dans notre société dite libérale.

Malgré ce constat affligeant, nous pouvons changer cet état de fait en renvoyant ces pétitions au Conseil d'Etat et en tenant compte des recommandations mentionnées dans le rapport.

Le président. Merci, Monsieur le député. Pour les raisons que j'ai indiquées tout à l'heure à l'un de vos collègues, il m'eût paru préférable que l'un de vos collègues non policier prenne la parole sur ce sujet. Ce n'est pas un cas de l'article 24 - une fois de plus - mais c'est un de ces cas où l'on est plus crédible lorsque l'on ne semble pas prêcher pour sa paroisse. La parole est à M. le député Roger Golay, avec la même remarque.

M. Roger Golay (MCG). Je tiens à féliciter la commission pour son excellent travail. Il est vrai que les invites au Conseil d'Etat sont bien ciblées, ce sont des faits concrets. Simplement, je souhaite que ces invites au Conseil d'Etat n'aient pas le même sort que la motion 1296 déposée il y a quelques années, ainsi que la motion 1588 - déposée en même temps que la LPol - qui relevait plus ou moins les mêmes problèmes au sein de la police et dont aucun résultat n'a été depuis communiqué au parlement.

Le président. Le Bureau propose de clore la liste. Sont encore inscrits MM. Catelain, Kunz, Velasco, Luscher et M. le conseiller d'Etat Moutinot.

M. Gilbert Catelain (UDC). Quelques mots sur ces deux pétitions qui sont effectivement le reflet des craintes de la population, dans ce qu'elle vit, dans sa chair et dans sa tête. Une partie peut être due aux sentiments, mais il ne s'agit pas que de cela. A partir du moment où un nombre aussi important de gens manifestent leur mécontentement, nous sommes obligés de le prendre en considération.

Je tiens à féliciter le rapporteur pour l'importance du travail qu'il a réalisé, avec un nombre de données statistiques pertinentes et tout à fait intéressantes, et que nous pourrons réutiliser dans d'autres débats.

Je tiens à signaler à ce parlement qu'il faut que l'un ou l'autre soit touché par un cambriolage dans sa commune, ou qu'une pétition arrive au Grand Conseil, pour que l'on prenne le temps pendant une heure de parler de problèmes de sécurité, de ce que les gens vivent au quotidien.

On ne l'avait fait que dans le cadre du débat sur la loi sur la police, et encore partiellement car le débat était biaisé. Il y a quatre ans, mon collègue Georges Letellier avait été l'initiateur d'un projet de loi pour créer une commission de la sécurité traitant de cette problématique. A l'époque, on nous a dit que la commission judiciaire s'en occupait et, finalement, la commission judiciaire n'a pas du tout le temps de traiter de ces problèmes de sécurité qui sont tout aussi importants que les problèmes d'instruction publique ou d'économie. Il faudrait qu'une commission puisse traiter ces problèmes à part entière, et je trouve dommage que cette tâche soit revenue à la seule commission des pétitions.

Nous soutiendrons la décision de la majorité de la commission. Je doute que le Conseil d'Etat ait les moyens de donner satisfaction aux pétitionnaires, bien que le bilan soit là et qu'il y ait des manquements. Les solutions ne sont pas innombrables. On doit tout faire pour améliorer la situation, notamment par de meilleures synergies entre les services et les polices municipales.

Je vous rappelle que le chef de la police avait déjà abordé cette question en disant qu'une police de proximité nécessitait un doublement des effectifs de la police genevoise. Nous devrons repenser les priorités et les fonctions de notre police qui devra peut-être se concentrer davantage sur des tâches plus répressives. Pour le reste, je rends attentif ce parlement au fait que la situation ne devrait pas évoluer favorablement ces prochaines années. Il suffit de constater ce qu'il se passe depuis les premières semaines de cette année en matière de cambriolage et de criminalité, pour dire que, finalement, les inquiétudes des pétitionnaires sont justifiées et qu'elles le seront encore demain. Nous avons du pain sur la planche.

M. Pierre Kunz (R). Je crains fort que généralement - dans cette enceinte, et même les policiers qui se sont exprimés - nous ayons une vision un peu passéiste de l'organisation d'une police moderne. L'avenir de la police et de la sécurité n'est certainement pas de fourguer les policiers dans les postes de police et de les couvrir de travaux administratifs, comme c'est le cas actuellement. L'avenir de la police et de la sécurité est dans une mobilité renforcée, dans une visibilité plus grande et dans des moyens de communication plus performants entre les policiers qui sont sur le terrain, notamment ceux qui se trouvent dans leur voiture.

Il se trouve aussi probablement dans un changement culturel, car on peut se demander s'il est toujours intelligent d'avoir deux policiers par voiture alors qu'ils seraient doublement présents s'ils n'étaient qu'un par véhicule... (Remarques.) ...avec des moyens d'intervention modernes, comme par exemple ceux qui leur permettraient de se rendre à plusieurs voitures dans un lieu qui requiert leur présence et leur action.

Mesdames et Messieurs, j'entends des ricanements...

Le président. Ceux que la sécurité n'intéresse pas peuvent aller boire un verre.

M. Pierre Kunz. J'entends des ricanements car certains ont de la peine à imaginer leur vie et la vie de leurs concitoyens autrement que comme celle dans laquelle ils ont toujours baigné. Mais il y a des moments où il faut changer. Et le moment est venu pour la police de changer, comme cela s'est fait dans d'autres pays qui, en matière de sécurité, ont des problèmes autrement plus importants que les nôtres.

La population veut voir sa police intervenir et réagir rapidement lorsque c'est nécessaire. Elle ne demande pas qu'il y ait des endroits où il est écrit «Poste de police de Blandonnex, Vandoeuvres, Carouge ou les Pâquis»; elle veut que les policiers soient là où la population en a besoin. Peut-être que ce sera l'occasion pour le Conseil d'Etat de réfléchir à ces options, indépendamment de celles qui figurent dans les deux pétitions que les radicaux sont, bien entendu, d'accord de renvoyer au Conseil d'Etat.

M. Alberto Velasco (S). Je constate que des groupes tiennent un discours à la commission des finances puis - je l'avais déjà dit dans d'autres domaines - changent de discours quand il s'agit ensuite de parler de ces prestations parce que la population nous écoute... J'ai été effaré d'entendre M. Catelain dire qu'il fallait augmenter les effectifs de la police. Je suis d'accord avec lui, mais, contrairement à lui, je vote le budget. Je vote des éléments financiers pour que le Conseil d'Etat puisse répondre à ces recommandations. Tandis que vous, le groupe UDC, ce que vous faites, c'est voter des coupes et vous demandez en même temps d'augmenter les effectifs de la police. C'est une équation vraiment difficile que vous nous proposez. (Remarques.) Oui, il y a une possibilité, c'est une police bénévole...

Dans des villes comme Barcelone - que j'ai visitée dernièrement - ou Paris, la police circule de plus en plus à deux dans la rue et cela donne une impression de sécurité au citoyen. Malheureusement, à Genève, cela ne se voit pas - dans le quartier de Plainpalais, par exemple, on voit très peu la police circuler. Peut-être que dans d'autres quartiers c'est le cas, mais à Plainpalais c'est vraiment rare et c'est dommage.

Chaque fois que je me rends dans un poste de police avec des collègues de la commission des visiteurs, à minuit, ou même l'après-midi, ces postes sont fermés et nous devons parfois attendre dix à quinze minutes, voire une demi-heure, pour que la police arrive. Et s'ils arrivent si tard, c'est parce qu'ils sont occupés ailleurs. Ces gendarmes nous ont expliqué qu'ils ne pouvaient pas rester dans le poste, car ils ont tellement à faire qu'ils circulent et qu'ils ne viennent au poste que quand on les appelle. Voilà la situation.

Pire encore. Dans ces postes de police, il y a des violons. Et j'ai appris que les gendarmes essaient de ne pas mettre au violon des personnes, car cela les obligerait à rester au poste. Ils sont donc obligés de rapatrier des gens à Cornavin. Je ne sais pas si je me trompe, mais, enfin, ce sont des constats que l'on nous a donnés. Voilà la situation de la police genevoise. C'est grave.

J'espère que l'on pourra augmenter les effectifs et que l'on aura une police de proximité. J'espère aussi que lors de l'élaboration du prochain budget - où l'on aura à augmenter ce nombre de postes - Monsieur Catelain - vous êtes chef de groupe - vous donnerez les consignes à vos commissaires des finances pour qu'ils puissent voter ces augmentations de postes. Je vous attendrai.

M. Christian Luscher (L). Je serai relativement bref, mais j'aimerais me faire le porte-parole d'un malaise que nous avons pu ressentir ce soir lors de deux débats - je le dis sans aucun ressentiment pour aucune des personnes qui se sont exprimées, mais visiblement nous connaissons un certain problème. Lorsque j'entends M. Sidler s'exprimer pour le monopole des SI - c'est-à-dire pour défendre le bout de gras de son employeur - alors que MM. Brunier, Plojoux et Marcet ont eux la délicatesse de ne pas s'exprimer et de ne pas voter sur ce sujet. Quand je vous entends, Monsieur Golay - vous savez que j'ai beaucoup de respect pour vous - et vous Monsieur Brunny - que je connais beaucoup moins - vous exprimer sur des sujets qui touchent directement votre employeur, eh bien, je pense que nous avons un problème et je vous annonce que - sous réserve de consultation de nos groupes respectifs - M. Pascal Pétroz et moi-même allons présenter une modification de l'article 24 de notre loi portant règlement du Grand Conseil pour que nous ne nous trouvions plus confrontés à ce genre de problèmes (Applaudissements.)

M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Permettez-moi tout d'abord de relever avec satisfaction que, dans les deux pétitions dont nous parlons, les pétitionnaires manifestent leur attachement à la police genevoise. C'est à relever, car dans un certain nombre de cas, nous recevons des courriers ou des demandes qui comportent des critiques pour l'essentiel infondées. Par conséquent, nous avons là un soutien de la population à l'action de la police, et je m'en réjouis.

Votre commission a élaboré un certain nombre de recommandations et de conclusions qui, pour l'essentiel, me paraissent tout à fait acceptables. Elles vont dans le sens du souhaitable. Il faut bien entendu apporter quelques nuances. Par exemple, quand on dit que l'on doit renforcer la notion de proximité de la police plutôt que celle de la police d'intervention, cela me paraît singulièrement théorique dans la mesure où l'on sait que, l'an dernier, il y a eu 72 000 réquisitions - et non pas 59 000 - à en croire le chef d'état-major.

Vous pouvez difficilement imaginer que l'on réponde au citoyen qui téléphone: «On est désolé, mais nous avons privilégié la proximité, on ne peut donc pas vous répondre tout de suite.» Mais c'est déjà ce que l'on doit faire, car toutes les réquisitions trouvent réponse - évidemment, dans un délai qui varie en fonction de l'urgence de la demande. Les violences contre des personnes sont traitées en priorité, et, pour d'autres choses au demeurant désagréables telles que le bruit, cela vient en dernier lieu des disponibilités. Opposer la police de proximité et la police d'intervention n'est pas si exact ni si simple.

La question de l'ouverture des postes de police, de leur nombre et de leur localisation pose un problème de même nature. L'existence d'un poste de police ouvert, et de surcroît 24h/24h, contribue sans doute à renforcer le sentiment de sécurité de la population, car elle voit une vitrine allumée, des gendarmes à l'intérieur, et elle se dit qu'elle peut s'y précipiter si besoin est. Mais il faut savoir que la gestion d'un poste ouvert 24h/24h nécessite forcément un personnel important et ce personnel ne peut dès lors pas être employé à d'autres tâches, telles que de patrouiller à pied, en voiture, de répondre à des réquisitions, de faire du travail d'îlotage ou que sais-je encore.

Il y a un équilibre à trouver entre l'importance du sentiment de sécurité que peut procurer le fait d'avoir plus de postes ouverts, et plus longtemps, et la réalité des effectifs de la police genevoise. Comme toujours dans ce genre de débat, nous sommes tous favorables à l'idéal, mais le prix à payer pour cet idéal est plus compliqué. Il faudra bien entendu trouver l'équilibre qui nous permette de nous rapprocher de l'idéal dans des conditions de dépenses supportables pour les finances de la République.

Il est demandé dans les conclusions et recommandations que l'on précise le concept de police de proximité. Cela sera fait dans la réponse qui devrait vous parvenir dans des délais rapides. Je vous remercie pour ce débat sur la police genevoise qui a été - j'allais dire «pour une fois», mais je me retiendrai - serein.

Le président. Nous sommes saisis de deux pétitions. La commission propose de renvoyer au Conseil d'Etat la pétition 1466. Mme Hagmann a proposé de la déposer sur le bureau du Grand Conseil. Je vais donc mettre aux voix ces deux propositions. Avec une majorité de oui, cette pétition sera renvoyée au Conseil d'Etat. Avec une majorité de non, elle sera déposée sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 1466 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 63 oui contre 9 non et 5 abstentions.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition 1518 au Conseil d'Etat) sont adoptées par 76 oui et 2 abstentions.