République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 27 janvier 2006 à 17h
56e législature - 1re année - 4e session - 18e séance
PL 9636-A
Premier débat
M. Guy Mettan (PDC), rapporteur. Tout d'abord, j'aimerais profiter de cette occasion pour présenter mes excuses au président de la commission car j'ai fait une confusion de prénom - il s'agit bien de Jean-Marc et non pas Jean-Jacques - et pour lui dire toute l'estime que je lui porte.
Je saisis également l'occasion pour affirmer à nouveau que, pour le PDC, le soutien aux associations féminines n'est pas seulement une affaire d'hommes, mais aussi une affaire de... Pardon: pas seulement une affaire de femmes, mais aussi une affaire d'hommes ! (Rires.) Et que c'est un souci partagé par les deux sexes.
En effet, hier soir, en écoutant ma collègue Anne-Marie von Arx-Vernon s'exprimer avec fougue, j'ai eu un petit moment de doute par rapport à mon propre engagement. Elle a presque réussi à me persuader que j'avais voté, en commission, contre le soutien à la subvention au Centre de liaison des associations féminines genevoises, alors qu'en fait j'ai bel et bien voté pour et qu'elle-même n'était pas en commission ce jour-là...
Mais venons-en au fond. Si nous devons aujourd'hui soutenir intégralement cette subvention, et sans coupe, c'est pour les raisons mentionnées dans ce rapport, à savoir que l'Association F-Information ainsi que le Service de promotion pour l'égalité ont déjà beaucoup rationalisé leur fonctionnement sous la houlette de Mme Brunschwig Graf, qui nous en a d'ailleurs longuement parlé en commission au moment de l'examen de ce projet de loi. Par ailleurs, la majorité de la commission a estimé que les prestations fournies par F-Information étaient satisfaisantes et de qualité.
Autre raison: la semaine dernière, pour des motifs tout à fait différents que nous aurons l'occasion d'expliquer le moment venu, la commission des finances a diminué la subvention à une autre association féminine: Solidarité Femmes. Pour cela aussi, il me semble tout à fait inopportun et inélégant de s'attaquer aujourd'hui à la subvention allouée à F-Information. Voilà, Monsieur le président, ce que je voulais dire en préambule.
Mme Elisabeth Chatelain (S). Après une lecture attentive du rapport de la commission des finances rédigé par M. Mettan et du rapport d'activité de F-Information, je voudrais apporter quelques précisions - et j'espère que M. Mettan ne m'en tiendra pas rigueur. Je voulais tout d'abord relever l'erreur dans le prénom du président de la commission des finances; il y a une autre erreur de prénom, il s'agit de Mme «Fabienne» Bugnon - et non pas «Françoise»... Mais ce sont des anecdotes.
Par contre, il y a des modifications un peu plus importantes à effectuer sur le fond et qui nous concernent à propos du vote de ce soir. Par exemple, la liste des professions exercées à F-Information est un peu tronquée dans le rapport. En fait, l'équipe de F-Information se compose de deux juristes, de deux formatrices d'adultes, de trois bibliothécaires, d'une psychologue, d'une travailleuse sociale et de deux secrétaires, ce qui représente au total 5,2 postes répartis sur ces onze personnes. Il est d'ailleurs intéressant de rappeler que la rémunération de toutes ces personnes est la même quelle que soit leur formation de base et que le tarif est de 36 francs brut de l'heure.
Il est aussi très important de savoir que l'activité principale de F-Information, association qui existe depuis vingt-cinq ans, n'est pas seulement l'animation d'un centre de documentation consulté par les étudiants de l'Université. Ce n'est qu'un des trois axes de son travail; et encore, ce centre est ouvert à toutes et tous et pas seulement aux étudiantes et étudiants.
Les deux autres axes sont essentiels: premièrement, il y a des consultations individuelles pour des femmes ayant besoin de conseils dans les domaines juridique, professionnel et familial; deuxièmement, il y a l'animation d'activités collectives de différents groupes et ateliers s'adressant à des populations de femmes précarisées.
Pour rappel, F-Information a fourni en 2004 1500 consultations individuelles, répondu à 2000 demandes d'informations téléphoniques et animé des groupes suivis par 800 personnes. Le centre de documentation est ouvert trente heures par semaine et il y a eu plus de 2200 prêts en 2004.
Cette association répond clairement à un besoin de la population et réalise un important travail de prévention et d'intégration.
Le contrat de prestation qui a été demandé, avec raison, par l'Etat à cette association a fait l'objet d'un long et rigoureux travail. Ce projet de loi est une formalisation de ce contrat de prestation, comme indiqué d'ailleurs très justement dans le rapport de M. Mettan.
Je vous invite donc, Mesdames et Messieurs, à le voter ce soir avec le montant initial de 515 000 F, comme accepté en commission. (Applaudissements.)
M. Pierre Weiss (L). Comme chacun d'entre nous aura pu le constater à la lecture du rapport tout à fait précis - à un prénom près - de M. Mettan, l'ensemble de la commission n'a nullement mis en cause le fondement même de la subvention qui est demandée ici, puisque personne ne s'y est opposé. En revanche, une proposition d'amendement a été déposée, et c'est notamment à ce propos que je pensais intervenir, pour rappeler trois points.
Tout d'abord, la question de la vue d'ensemble sur les subventions versées aux associations féminines... Il a été à peine rappelé par M. Mettan que nous avons eu à en traiter récemment, que nous aurons à en traiter prochainement, et que nous sommes en train d'en traiter ce soir. Il est donc malheureux - pour permettre précisément de comprendre l'importance du soutien apporté par la collectivité genevoise aux très nombreuses associations féminines qui émargent au budget de l'Etat - qu'une présentation collective ne soit pas possible et qu'il n'y ait pas, au fond, une consolidation qui accompagne les rapports à tout le moins lorsque l'une de ces associations est au bénéfice d'une subvention et qu'elle demande une augmentation, comme cela a été le cas hier soir...
Deuxième point. On peut constater, dans le projet qui nous occupe, que l'association en question supplée en quelque sorte à des carences de l'Etat. On nous dit, par exemple, que l'association reçoit de nombreuses personnes qui lui sont envoyées par les CASS, ces derniers ne pouvant pas apporter l'efficace qu'apparemment l'association en question, par ses ressources nombreuses en personnel, est en mesure de fournir. Il ne s'agit évidemment pas seulement d'une aide en personnel mais aussi d'une aide intellectuelle, puisqu'une bibliothèque est ouverte pour les étudiants et les étudiantes de l'Université.
On ne s'étendra pas quant à savoir si les coûts de fonctionnement sont inférieurs à ce qu'ils avaient pu être avant un rapatriement... On relèvera toutefois - et ce sera mon troisième point - que les coûts de fonctionnement ont fortement augmenté. C'est ainsi que si l'on se penche sur le compte de résultat au 31 décembre 2004 tel qu'il ressort du rapport qui a été présenté à la commission, la charge des locaux a passé de 61 000 F à 155 000 F. Evidemment, l'association bénéficie d'un local de 400 m2 pour... Monsieur le rapporteur, combien de personnes y travaillent ? Cinq personnes... (Exclamations.) Donc, 400 m2 pour cinq personnes ! (Brouhaha.) Et puis, les charges administratives ont passé de 88 000 F à 110 000 F d'une année à l'autre et, enfin, les charges de personnel elles-mêmes ont passé de 330 000 F à 453 000 F.
On comprendra, effectivement, qu'il est nécessaire - et c'est dans ce sens qu'il n'y a eu aucune opposition dans notre commission - pour les personnes qui ne trouvent pas auprès des CASS l'attention requise et, aussi, pour les étudiants qui ne trouvent pas à l'Université les documents qui sont indispensables à leur formation, d'augmenter les coûts de fonctionnement de cette association. Toutefois, l'on peut considérer que cette augmentation - le total des charges passe de 879 000 F à 913 000 F d'une année à l'autre - est un peu forte, toutes choses égales par ailleurs. Et c'est pour cette raison - je conclurai ainsi, Monsieur le président - qu'il a été demandé en séance de commission de procéder à une diminution raisonnable de la subvention, soit de la porter à 450 000 F: pour tenir compte, d'une part, des charges de loyer manifestement excessives, mais, aussi, des charges de fonctionnement qui sembleraient pouvoir être réduites.
Compte tenu des efforts demandés à l'administration - et parfois, ce n'est pas facile... (Rires et commentaires.) - il serait étonnant qu'on ne le demande pas, aussi, à une association qui dispose, je le rappelle, de 400 m2 pour cinq personnes ! (Exclamations. Applaudissements.)
Mme Catherine Baud (Ve). Nous avons bien entendu l'opinion de M. Pierre Weiss, qui considère que l'augmentation des charges est «un peu forte», que l'on peut procéder à une «diminution raisonnable»... Ces termes sont un peu flous ! Il s'agit en l'occurrence d'une subvention cantonale qui a été fixée à 515 000 F, et elle ne l'a pas été au hasard ! La diminuer pour la porter à 450 000 F ne rime à rien !
Nous avons voté une loi sur les subventions, il y a peu de temps, qui prévoyait un cadre bien précis, dont l'exigence d'un contrat de prestation. En l'espèce, ce contrat de prestations existe. Là, c'est une question de principe: il me semble tout à fait anormal de punir un bon élève. Cette association répond à un besoin avéré, présente des rapports tout à fait normaux et bénéficie du soutien du Conseil d'Etat, et malgré tout cela on voudrait lui refuser la même subvention que précédemment !
C'est la raison pour laquelle le groupe des Verts soutiendra le projet de loi 9636 en l'état et refusera l'amendement qui vient d'être proposé.
M. Eric Bertinat (UDC). Je voudrais revenir sur plusieurs questions posées par M. David Hiler en commission des finances... C'est une espèce de message que le Conseil d'Etat veut faire passer, et je pense que la plupart d'entre nous le suivrons, nonobstant un certain favoritisme vis-à-vis de quelques associations, de certains groupements...
M. Hiler se demandait quelles sont les missions que l'Etat doit fondamentalement assurer pour la population: quel rôle est le sien et quels services il doit fournir à la population, en fonction des moyens qui sont les siens. Ces services ne doivent être ni luxueux ni, non plus, trop misérables... En quelque sorte, l'Etat doit offrir ses services au meilleur coût.
Cette réflexion induit d'elle-même un ordre de priorités. Et dans cet ordre de priorités, cette avalanche de subventions qui nous tombe dessus - et pas seulement des milieux féministes - doit nous interpeller ! Or elle le doit aujourd'hui, peut-être plus spécialement qu'à l'accoutumée. Je me permettrai d'attirer votre attention sur un article de la «Tribune de Genève» de ce jour, extrêmement pertinent, qui s'adresse aux jeunes adultes qui rencontrent de plus en plus de problèmes dans notre société. En lisant cet article, on ne peut que se rendre compte qu'il va falloir apporter une aide à cette détresse et que cette aide aura un coût.
On en revient donc à la remarque que je faisais auparavant quant à l'ordre de priorités que nous devons déterminer...
Les représentants d'une kyrielle d'associations féminines viennent nous expliquer la valeur de leur engagement, tout le potentiel qu'elles peuvent développer, tous les services qu'elles peuvent rendre; eh bien, l'UDC estime qu'il n'y a pas véritablement une plus-value telle qu'elle est décrite et qui correspond réellement aux besoins financiers exprimés.
Si je prends le cas de F-Information qui nous est soumis aujourd'hui, je relève que l'on parle d'un centre de documentation et de consultations juridiques... Je ne suis pas certain qu'un centre de documentation soit absolument nécessaire aujourd'hui, non seulement par rapport à l'état actuel de nos finances mais aussi de la population... On le voit de manière assez pointue, les chiffres sont plus qu'angoissants dans le secteur psychiatrique; il faudra bien soutenir financièrement ce secteur, et nous ne pourrons pas distribuer de l'argent à tout le monde !
Pour ce qui est des consultations juridiques, vous me permettrez quand même de poser la question suivante: dans la mesure où nous avons déjà beaucoup de juristes à l'Etat; pourquoi n'aideraient-ils pas bénévolement les personnes qui en auraient besoin, ce qui nous permettrait sans doute de faire quelques économies ?
Enfin, pour terminer, je rappellerai que l'Association Solidarité Femmes vient également frapper à notre porte pour demander une subvention de 600 000 F... Afin de faire la part des choses, nous restons, comme l'a évoqué M. Weiss, dans l'attente d'une vision consolidée de toutes ces associations. Nous l'avons dit hier soir et nous le répétons aujourd'hui.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, sont encore inscrits Mme Anne-Marie von Arx-Vernon, Mme Michèle Ducret, Mme Elisabeth Chatelain, M. Roger Deneys et le conseiller d'Etat Moutinot. Le Bureau clôt la liste des intervenants et lève la séance.
Nous reprendrons nos travaux à 20h30 avec la suite de ce débat.
Fin du débat: Session 04 (janvier 2006) - Séance 19 du 27.01.2006