République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 1 décembre 2005 à 17h
56e législature - 1re année - 2e session - 4e séance
GR 432-A
M. Jean-Michel Gros (L), rapporteur. Mme M. H. a trente-cinq ans. Née en Georgie, elle arrive en Suisse en juillet 2000 et demande l'asile.
En 2000, elle est condamnée pour un vol de pull-overs Lacoste au magasin Manor à quinze jours d'emprisonnement avec un sursis de trois ans et à une expulsion ferme de cinq ans.
Le 20 mars 2001, elle est condamnée à deux mois d'emprisonnement avec sursis de trois ans et à une expulsion ferme de huit ans pour tentative de vol et vol. Il s'agit cette fois de cartouches de cigarettes dans un autre magasin.
Une voix. Quelle marque ?
M. Jean-Michel Gros. C'étaient des Marlboro. (Rire.)
Le sursis accordé en 2000 est révoqué. Les demandes d'asile de Mme M. H sont rejetées ainsi que le recours qu'elle dépose à ce sujet. Son renvoi est décidé. Peu de temps après, Mme M. H. est à nouveau condamnée, le 2 avril 2004, à quatre mois d'emprisonnement ferme pour recel. Plusieurs objets venant de vols précédents ont été découverts à son domicile lors d'une perquisition. Le sursis de 2001 est également révoqué. Ce jugement a été confirmé par le tribunal de police, par la Cour de cassation et par le Tribunal fédéral, le 12 mai 2005. Il s'agissait de recours purement formels.
Mme H. envisage de recourir auprès de la Cour européenne des droits de l'homme pour ne pas avoir eu d'interprète lors de la réception de la dernière ordonnance de condamnation du Procureur général. Mais c'est un recours qui n'a pas d'effet suspensif.
En résumé, Mme H. est condamnée à une peine de six mois d'emprisonnement et de huit ans d'expulsion du territoire suisse, et elle demande la grâce pour les deux peines.
Quels sont les faits nouveaux apparus depuis les jugements ?
Le 13 janvier 2005, Mme H. épouse un Suisse et sollicite ainsi une autorisation de séjour, qui ne peut lui être octroyée tant qu'elle est condamnée à une peine d'expulsion judiciaire. Dès mars 2005, Mme H. a travaillé comme femme de chambre dans un hôtel, mais, aux dernières nouvelles, elle a été licenciée et est au chômage sans prestations, celles-ci ayant été supprimées à cause de l'expulsion judiciaire. C'est donc son mari qui assure l'entretien du ménage. Mme H. envisage de fonder une famille, et est en traitement chez un gynécologue. Selon les déclarations de son avocat, elle connaît des problèmes de santé qu'un emprisonnement serait susceptible d'aggraver.
L'avis de la commission de grâce, unanime, est de rejeter la demande de grâce de Mme H., pour plusieurs raisons: les faits qui lui sont reprochés sont graves, et la dernière condamnation ne date que d'avril 2004. Si nous accordions la grâce de toute peine à Mme H., ce serait, passez-moi l'expression, «passer comme chat sur braise» sur ses actes répréhensibles. On délivrerait le message que l'on peut donc voler et receler en toute impunité à Genève !
J'ai l'impression - et la commission aussi - que son mariage avec un Suisse tombait à pic. En janvier 2005, époque du mariage, M. H. savait forcément que sa femme était sous le coup, entre autres, d'une mesure d'expulsion. Nous suspectons donc un mariage de convenance. Vérification faite, ses problèmes de santé ne sont pas graves au point d'empêcher un séjour en prison. Les décisions prises par les autorités - renvoi par l'Office fédéral des réfugiés et peine d'expulsion par la justice genevoise - montrent bien que cette personne est indésirable dans notre pays. Une peine de prison et l'expulsion seront de bons moyens pour démontrer la solidité du mariage de M. et Mme H.
Après une année en Géorgie et sous réserve qu'il n'y aura pas de rupture de ban, je suis sûr qu'une nouvelle demande de grâce pour le solde de la peine d'expulsion aurait quelques chances d'aboutir devant le Grand Conseil, car Mme H. aura alors payé sa dette à la société. C'est pourquoi, au nom de la commission de grâce, unanime, je vous demande de rejeter le recours en grâce.
Mis aux voix, le préavis de la commission (rejet de la grâce) est adopté par 62 oui contre 3 non et 9 abstentions.
Le président. Au sujet de l'élection 1341, je vous informe qu'aucune candidature n'est parvenue à la présidence. Cette élection est donc reportée.