République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 7 octobre 2005 à 20h30
55e législature - 4e année - 12e session - 72e séance
RD 597
M. Jean-Marc Odier (R). Madame la présidente, il y a tout juste un an, en accédant à la présidence de notre parlement, vous releviez un défi d'envergure, car mener une assemblée d'une centaine de parlementaires souvent indisciplinés n'est pas une mince affaire ! Et puis, vous succédiez à un président brillant et apprécié...
On le sait, les qualités requises pour assumer ce poste sont nombreuses et pointues: maîtrise de nos procédures de débats, assurance, éloquence, fermeté et, surtout, beaucoup de résistance. Alors qu'il faut toujours un certain nombre de séances au nouveau président pour prendre ses marques, vous avez démontré rapidement une aisance et une efficacité d'un style différent de votre prédécesseur. Il est vrai que votre habitude de la pédagogie enfantine vous a probablement aidée... (Rires.)... car cette enceinte, il faut bien l'admettre, ressemble le plus souvent à un préau d'école où gesticulent de grands gamins déchaînés...
De votre voix claire, vous avez, avec intelligence, fait parler votre expérience, c'est-à-dire la connaissance du terrain politique, de ses protagonistes et de leur sensibilité. Lors de votre discours d'entrée en fonction, vous nous avez parlé de votre philosophie politique, fondée sur l'esprit d'ouverture, le dialogue permanent et constructif et l'éthique. Votre message n'était pas de simples mots en l'air, mais une réelle conviction, dont vous avez appliqué les principes, vous permettant tout au long de l'année de vous guider sereinement dans l'organisation et la conduite de nos débats. Par cet état d'esprit, la parole de chacun a été respectée et les tensions ponctuelles désamorcées avec calme.
Cette année est donc réussie. Vous étiez déjà experte dans le domaine de la petite enfance, vous venez de passer votre maîtrise dans celui de la grande enfance !
Ce titre étant acquis, votre présidence s'achève aujourd'hui. Nous perdons une présidente appréciée et brillante, que dis-je, étincelante ! Mais la suite de votre action politique vous attend, car votre présence dans ce parlement, parmi nous, est incontournable.
Madame la présidente, félicitations ! Chère Marie-Françoise, bravo et bonne continuation ! (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). Les Verts tiennent à vous remercier, Madame la présidente, pour votre gestion de ce parlement.
Nous savons que vous avez pris cette fonction dans des conditions difficiles, fonction que vous avez remplie tout au long de l'année avec brio. Vous avez su apaiser les débats et respecter les minorités, ce dont nous vous savons gré.
Vous terminez en nous faisant partager votre rêve... Rêvons ensemble à un autre monde: c'est possible ! Il est ici, avec les mêmes !
Merci, Madame la présidente. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Michèle. Merci du fond du coeur ! Monsieur le député Gilbert Catelain, je vous donne la parole.
M. Gilbert Catelain (UDC). Le groupe UDC a eu le choix dans l'alternance entre un homme de droite et un homme de gauche... Finalement, l'UDC a choisi l'alternance entre un homme et une femme, entre un homme du centre gauche et une femme du centre droit... Force est de constater que Mme de Tassigny a fait preuve à la fois de courage et d'efficacité ! Et, sur ce dernier point, nous sommes confortés dans notre choix, qui a le mieux correspondu à l'intérêt suprême de la République et canton de Genève.
Madame de Tassigny, au nom du groupe UDC, je vous félicite pour cette année de présidence, au cours de laquelle vous avez fait preuve d'un grand esprit de tolérance. Vous avez toujours cherché des solutions constructives, dans l'intérêt de tous, même si, au sein du Bureau et des chefs de groupe, quelques tiraillements se sont parfois fait sentir. Quoi qu'il en soit, j'ai été fortement impressionné par votre capacité à rallier le plus grand nombre des chefs de groupe pour trouver des solutions ensemble, afin de faciliter le déroulement de nos débats et d'avancer notre ordre du jour pour le bien de tous.
Je vous félicite encore une fois, Madame, et je vous souhaite une poursuite heureuse de votre carrière politique. (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur Catelain. Monsieur Pierre Weiss, je vous donne la parole.
M. Pierre Weiss (L). Madame la présidente, votre vice-président a eu la gentillesse de rappeler tout à l'heure le qualificatif que je vous avais attribué un soir que vous faisiez tinter la cloche... Dans ce parlement, vous avez effectivement été une fée pour nous - malgré les circonstances, qui ont du reste été rappelées par ma collègue Michèle Künzler - mais pas seulement avec la cloche ! - puisque vous avez réussi à rassembler ce parlement, à lui donner une certaine sérénité - et non pas une sérénité certaine, n'exagérons pas, ne versons pas dans l'illusion et dans un optimisme béat. Vous avez réussi à lui redonner ce que nous attendions d'une personne telle que vous. Dès le premier soir de votre élection, Madame la présidente, à la vice-présidence, j'étais convaincu qu'en vous ayant élue nous avions fait un excellent choix, parce que je connaissais vos capacités. Vous ne nous avez non seulement pas démentis, vous avez prouvé que vous étiez à la hauteur de ces circonstances délicates. J'aimerais vous en remercier.
J'aimerais aussi vous remercier pour la capacité, la rapidité, la concision et l'efficacité, avec lesquelles vous avez mené les réunions des chefs de groupe et du Bureau. Sur ce point aussi, vous avez démontré que vous étiez une femme d'action, une femme efficace. C'est une action de l'ombre, dont certains ne se rendent pas compte lorsqu'ils regardent les débats de ce parlement - ils y voient peut-être davantage de «vibrionnisme» qu'ils ne devraient... Eh bien, au contraire, vous avez montré ce qui devait être le fait d'un président de notre parlement alors que l'agenda est très chargé - vous avez rappelé le nombre d'objets en suspens - et aussi dans ces moments où les défis qui se présentent devant nous sont si grands.
Je n'ai qu'un mot à ajouter à ce qui a été dit concernant votre futur: je vous souhaite, ainsi qu'à votre parti, Madame, que vous représentez dignement depuis qu'il a contribué à créer la Genève moderne, un plein succès ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur Weiss, de vos gentilles paroles. Monsieur Alain Charbonnier, je vous donne la parole.
M. Alain Charbonnier (S). Merci, «Madame la présidente», pour la dernière fois... Je tiens à mon tour, au nom du groupe socialiste et, spécialement, au nom de notre collègue Alain Etienne... (Rires.)... à vous remercier d'avoir présidé nos débats avec efficacité, malgré les tensions que nous avons tout au long de cette législature. Je tiens à remercier aussi, toujours au nom du groupe socialiste, le service du Grand Conseil qui a, une fois de plus, fait preuve de professionnalisme, de disponibilité et d'amabilité. Merci à tous ! (Applaudissements.)
La présidente. Je vous remercie, Monsieur Charbonnier. Je donne la parole à M. le député Patrick Schmied.
M. Patrick Schmied (PDC). Au nom du groupe démocrate-chrétien, je tiens à vous remercier pour votre excellente présidence - je le dis en toute sincérité et sans aucun sous-entendu.
Vous avez accepté courageusement de prendre cette présidence dans des conditions très difficiles, provoquées par ce parlement lui-même. Et, tout au long de l'année, ces conditions ne se sont pas améliorées...
Comme votre vaillant prédécesseur, M. Pétroz, vous avez dû faire face à des discussions très dures au sujet du budget, dans un contexte d'une dégradation continue des comportements de ce parlement. Combien de fois n'avez-vous pas été apostrophée sans aucun ménagement par l'un ou l'autre député, au mépris du plus élémentaire «respect» ? Pour employer une expression qui, apparemment, fait l'unanimité... Et combien de fois avez-vous été victime de ceux pour qui entraver les travaux du Grand Conseil, le règlement à la main, est une véritable gourmandise ? Vous avez tenu bon, avec le sourire, avec votre compétence - il faut le dire - et vous avez réussi à nous faire quand même travailler ! Vous l'avez indiqué tout à l'heure, le nombre d'objets que nous sommes arrivés à faire passer est impressionnant, malgré les apparences, grâce au soutien efficace du Bureau et du service du Grand Conseil, Mme le sautier en tête, qu'il y a lieu de remercier ici.
Alors, Madame la présidente, chère Marie-Françoise, encore merci pour tout ! Bonne élection et merci pour le vade-mecum ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci de vos propos, Monsieur Schmied. Je vais passer la parole aux différents chefs de groupe pour rendre hommage aux députés qui nous quittent. A ce propos, je dirai que ce qui est tout de même étonnant, dans ce contexte difficile de la vie parlementaire, c'est que peu de députés nous quittent - cela prouve que ce travail est intéressant et passionnant. En effet, quatorze députés seulement quittent volontairement nos rangs cette année.
Je donne tout d'abord la parole à l'UDC, avec M. Catelain... Ah, c'est M. Pagan ? Alors, Monsieur Pagan, vous avez la parole.
M. Jacques Pagan (UDC). Je m'exprime devant vous pour dire au revoir à notre camarade Yvan Galeotto, qui n'est pas porté sur la liste des candidats à une réélection simplement parce que la vie n'est pas toujours facile pour tout un chacun... Certaines professions sont en effet sinistrées, et les difficultés rencontrées par leurs titulaires ne leur permettent que de survivre... A un moment donné, entre le redémarrage - que nous espérons tous - du métier d'architecte, de la construction à Genève, et les charges que représente le travail de député - peut-être que les amis qui nous regardent à la télévision n'en sont pas tous vraiment conscients - il y a des choix à faire. D'ailleurs, certains de nos collègues l'ont fait avant Yvan Galeotto; M. Florian Barro, me semble-t-il, a été l'un des premiers à quitter cette assemblée, suivi de peu par M. René Koechlin et par M. Olivier Vaucher. C'est un peu la même aventure qui attend maintenant notre ami Yvan Galeotto, et nous espérons que les choses se passeront bien pour lui et qu'il obtiendra le succès escompté.
Nous le reverrons probablement un jour, je le souhaite, dans cette enceinte. Je crois savoir que, si les calculs de notre ami Yvan Galeotto se réalisent, il pourrait être candidat au conseil municipal d'ici deux ans. C'est une information que je vous livre à titre tout à fait confidentiel... (Rires.)Ne la communiquez à personne !
Pour rendre tout particulièrement hommage à notre collègue qui s'en va, je voudrais signaler que Yvan Galeotto a été l'un des premiers à faire partie de l'équipe genevoise de l'Union démocratique du centre. Depuis 1987, il n'a cessé d'être présent parmi nous, de nous assister par ses conseils et son amitié infinie. C'est un fervent patriote: vous aurez l'occasion, le 11 novembre, de le constater, parce que, fidèle à son habitude, il sera parmi nous, devant le Monument aux morts. E bien entendu qu'il participe aux célébrations de l'Escalade avec une régularité métronomique...
Yvan Galeotto est un garçon discret, un peu effacé, mais ceux qui ont eu l'occasion de le côtoyer réalisent parfaitement que c'est quelqu'un d'engagé sur le plan politique et qui a une fibre patriotique particulièrement forte. Je regrette sincèrement qu'il ne soit plus des nôtres - si l'occasion nous est donnée de nous trouver à nouveau ici dans quelque temps - dans la nouvelle équipe du Grand Conseil, de 2005 à 2009.
Nous le remercions pour tout ce qu'il a apporté au parti, en relevant qu'il a aussi fait profiter de son talent et de ses compétences notre Grand Conseil. Il a fourni un travail très utile au sein des commissions des travaux et de l'aménagement et, dans la mesure de ses possibilités, il a apporté sa contribution de citoyen au service d'une collectivité dont nous espérons que, demain, elle se portera encore mieux qu'elle n'est actuellement - elle rencontre énormément de difficultés. Mais je crois qu'une démocratie comme la nôtre est forte parce qu'elle peut compter sur l'ensemble des citoyens disponibles, prêts à consentir des efforts pour arriver à de meilleurs résultats dans l'existence.
Merci, Yvan, de ce que tu nous as apporté. Et bon vent pour la suite de ta carrière ! (Applaudissements. La présidente descend de l'estrade et remet le traditionnel stylo souvenir à M. Yvan Galeotto.)
La présidente. Je donne la parole à M. Weiss, pour le parti libéral.
M. Pierre Weiss (L). Madame la présidente, vous avez rappelé tout à l'heure le nombre de députés qui nous quittent ce soir. La moitié est libérale ! Comme si, par un effet proportionnel, nous devions représenter la moitié de ce parlement... Non, nous n'en sommes que le quart ! Quoi qu'il en soit, la moitié des députés qui démissionnent font partie du groupe libéral.
Pour moi, il est donc particulièrement délicat de rendre un hommage aussi détaillé que celui qui a été rendu à notre collègue de l'UDC. Néanmoins, permettez-moi de vous dire d'emblée que, pour l'ensemble de notre députation, non seulement j'ai le sentiment de perdre sept amis, mais j'ai aussi le sentiment de perdre - cette fois - sept compétences. Notre représentation dans ce parlement va ainsi être décapitée dans la commission sociale, car les trois députés libéraux qui en sont membres démissionnent...
Tout d'abord, Janine Berberat, qui est à mes côtés ce soir, et dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle est tenace dans ses projets. Et si certains sont des libéraux purs et durs, elle, elle est une libérale pure et souriante... Janine Berberat, tranchée aussi dans ses opinions, est une libérale précieuse, parce qu'elle sait toujours ce qu'il faut faire concrètement le moment venu. Et ce soir, au fond, avec son départ, on a l'impression, vu à l'intérieur de la députation, qu'elle a accompli un cycle. Elle est entrée en politique avec, notamment, Jacques-Simon Eggli, à l'époque de l'initiative: «L'école, notre avenir». Janine Berberat part à une époque où, de nouveau, sur cette question de l'école, nous allons vers des mutations, des adaptations aux besoins de notre société, entre autres par un projet de loi auquel elle a contribué à sa juste valeur.
Je rappellerai brièvement, la concernant, qu'elle a été deuxième vice-présidente de ce Grand Conseil en l'an 2000 et qu'elle a été présidente de plusieurs commissions: de l'énergie, des naturalisations, des affaires sociales et des visiteurs. Mais elle n'est pas la seule à nous quitter... (Vifs applaudissements.)Et je vous remercie de nous donner vos sept fois applaudissements !
M. Alberto Velasco. Elle les mérite.
M. Pierre Weiss. Elle les mérite en particulier...
Une voix. Bravo, Alberto !
M. Pierre Weiss. ... et je remercie mon collègue Velasco de l'avoir rappelé ! Je disais donc que Janine Berberat n'est pas la seule à nous quitter: le deuxième à le faire est le «père Joseph» ! En effet, Jean-Rémy Roulet est pour nous un peu notre «père Joseph» à tous, notre chef de groupe - fonction qu'il a occupée avant moi pendant les premières années de cette législature. Sous sa douceur pateline de chat de sacristie, il a fait preuve d'une rare efficacité, notamment en matière fiscale. Et il a montré jusqu'au bout - jusqu'à cette dernière session - son intérêt pour les finances de l'Etat, et pour ses recettes, en contribuant à l'élaboration de différents projets de lois, y compris la taxe qui frappe les entreprises. Son orthodoxie fiscale lui a fait préférer un Etat mince plutôt qu'un Etat gras par les adorateurs du «toujours plus» grâce au porte-monnaie du voisin... Il n'a peut-être pas dit son dernier mot en politique ! Je vous le rappelle, il était président de la commission fiscale. (Applaudissements.)
Le troisième mousquetaire de la commission des affaires sociales est mon collègue et ami Blaise Matthey... Blaise Matthey est un homme aux talents polymorphes, qui ont fait de lui, en peu de temps, un membre respecté de ce parlement où il a exercé son talent oratoire fait de sobre élégance et de grande efficacité.
Dans la commission de l'agriculture, il a montré ses gènes non modifiés, puisqu'il a, pour ce domaine en particulier, un intérêt qui lui est probablement venu dès l'enfance et des discussions familiales. Il les a aussi montrés dans la commission de l'énergie, puisqu'il avait accumulé, au fil de sa carrière universitaire, des compétences particulières. Dans cette commission, où le «Vert» est chromatiquement correct, il a pu avancer ses pions avec la force d'un panzer hégélien qui connaît la dialectique et tous ses tours ! (Applaudissements.)Un mot encore... Entre deux tours, l'une de l'autre côté du Rhône et celle qui se trouve à côté de nous, Blaise Matthey saura toujours trouver le chemin le plus direct pour nous faire part de son expérience.
Deux autres collègues, qui, eux, s'étaient spécialisés en matière économique, nous quittent aussi. Le premier est Alain-Dominique Mauris. Alain-Dominique Mauris, c'est un cas particulier: c'est, au fond, un être qui combine en lui à la fois la discrétion - même vestimentaire - du banquier genevois et le côté pragmatique, parce que c'est un magistrat communal; c'est un être qui a une sensibilité sociale particulièrement affirmée, en quoi il est aussi libéral. Alain-Dominique s'est occupé de jeunes, de prisonniers. Il a aussi le sens de la fête. Et j'espère que, de Soral à Bernex, je saurai vite le retrouver pour le voir transformé en cow-boy... (Applaudissements.)
Mais il n'y a pas que les économistes dans notre députation, il y a aussi des chefs d'entreprises qui savent nous rappeler l'importance des conditions-cadres, qui savent avec des mots - qui sont presque aussi rapides que ceux de la présidente lorsqu'elle lit des projets de lois - nous dire combien il faut, à la fois, que les commerces soient accessibles, que l'emploi ne soit pas défavorisé, que la fiscalité n'écrase pas la volonté de «ranimer» Genève pour lui redonner, finalement, ce qui fait de cette ville et de ce canton un endroit où il doit faire bon vivre, où il doit être possible de manger du bon chocolat... Cet être-là, c'est Gilles Desplanches. Il a été président de la commission des transports, président de la commission de l'économie. Malheureusement, lui aussi a décidé de renoncer à la députation. Mais, probablement avec la discrétion qui le caractérise, il va continuer à nous faire part de ses conseils pour que, jamais, nous ne renoncions à faire en sorte que les petites et moyennes entreprises bénéficient de conditions un peu moins défavorables que ce n'est le cas aujourd'hui. Merci, Gilles ! (Applaudissements.)
S'il y a les affaires sociales, la fiscalité, l'économie, il y a aussi ce que l'on a aussi évoqué hier soir, qui, avant la Révolution, occupait probablement 90% d'entre nous - ou, plus exactement, de nos ancêtres: c'est l'agriculture. Jean-Claude Dessuet, c'est cet homme-là ! C'est l'homme des vaches... (Rires et exclamations.)... et aussi des chèvres ! Il a su faire part de ses préoccupations pour le monde rural et défendre les nécessités d'un développement contrôlé dans ce secteur, un développement que certains qualifieraient même de «durable» et pour lequel un équilibre doit être préservé, y compris dans la région où il habite, qui sait que la concertation y est nécessaire.
Je crois que Jean-Claude Dessuet nous a montré que l'on pouvait être à la fois à la tête d'une grande exploitation agricole dans notre canton - avec modestie - et avoir des intérêts qui s'étendent à ceux de notre société et dont s'occupe ce Grand Conseil. Merci, Jean-Claude ! (Acclamations et applaudissements.)
En fait, vos applaudissements à cet ancien membre du Bureau de ce Grand Conseil montrent combien vous vous comportez de la même façon que le peuple... Les agriculteurs ne représentent que 0,4 ou 0,5% de la population, mais les applaudissements pour les agriculteurs sont inversement proportionnels ! (Applaudissements.)
Et puis, il y a celui qui nous fait naître - celui qui nous fait naître lorsque les conditions sont particulièrement délicates - notre gynécologue, notre Blaise Bourrit ! (Rires et exclamations.)Vous avez remarqué que lorsqu'on s'adresse à lui, il reste imperturbable. Il est l'homme qui ne fait pas un geste déplacé - je pense que, dans sa profession, c'est particulièrement adéquat... (Rires.)Blaise Bourrit est également une personne qui ne dit jamais un mot de trop, mais qui sait juger chez les autres de la qualité de leur prestation; il sait notamment nous dire si leur prestation a été faite avec un sens de la modération. Il représente, dans notre parti, la tradition libérale dans ce qu'elle peut avoir de meilleur.
A ce titre, j'aimerais lui dire ceci: Blaise, tu es un esprit curieux. Nous connaissons tes intérêts pour l'aide aux pays en développement et nous espérons que le fait que tu ne sois plus parmi nous te permettra de te consacrer à tes idéaux avec la même conviction que tu as développée en faveur de la médecine, de la santé, de la Suisse et de Genève. Merci ! (Vifs applaudissements. La présidente descend de l'estrade et remettre le traditionnel stylo souvenir à Mme Janine Berberat et à MM. Jean-Rémy Roulet, Blaise Matthey, Alain-Dominique Mauris, Gilles Desplanches, Jean-Claude Dessuet et Blaise Bourrit.)
M. Patrick Schmied (PDC). Le groupe démocrate-chrétien se trouve dans une situation un peu particulière... C'est la raison pour laquelle Mme Ruegsegger et moi allons nous partager le travail de ce soir ! Mais je vais commencer, parce que c'est moi le chef en ce moment ! (Rires.)
C'est une politicienne chevronnée qui quitte ce Grand Conseil, précoce aussi, puisque Stéphanie Ruegsegger a été secrétaire générale du PDC de 1993 à 1998, après avoir été conseillère municipale à Meyrin... Alors, pour ceux qui sont en train d'essayer de faire des calculs, cela remonte probablement à ses débuts, à l'école primaire ! (Rires.)
Elue au Grand Conseil en 1997, réélue en 2001, elle a siégé à la commission de l'économie, à la commission de contrôle de la Fondation de valorisation des actifs de la Banque cantonale de Genève, à la commission fiscale, à la commission des transport, à la commission de contrôle de gestion et à la commission de la santé.
Elle a également présidé plusieurs commissions, celle de l'économie en 2001, celle de la BCGe - pour faire court - en 2002, la commission fiscale en 2004 et la commission des transports en 2005. Et elle a aussi été chef du groupe PDC pendant la première moitié de cette législature, période durant laquelle je lui étais soumis... (Rires et exclamations.)
Au travers de tous ses mandats, elle a imposé sa finesse d'analyse - ses explications sont toujours limpides - son bon sens, son sens aigu de l'équité, son humour, mais aussi sa pugnacité. Ceux qui ont essayé de lui marcher sur les pieds doivent s'en souvenir encore maintenant ! (Rires.)Elle a de la suite dans les idées: lors de la dernière campagne électorale, elle avait déclaré vouloir lutter pour que Genève garde son statut de grande ville et lutter contre le chômage et l'exclusion. C'est une ligne qu'elle a tenu sans fléchir tout au long de la législature.
Stéphanie n'aime pas trop mes discours féministes, mais je dirai quand même que la politique genevoise a besoin de plus de femmes de cette trempe. Nul doute que nos travaux avanceraient beaucoup mieux, à la grande satisfaction des citoyens genevois. Et puis, plus de femmes, cela veut aussi dire moins de parlotte. A cet égard, Stéphanie est exemplaire: ses interventions ne sont jamais plus longues que nécessaire !
Quant à moi, notre parcours politique commun, qui a commencé quand je poussais timidement la porte de son bureau de secrétaire générale, a été une belle aventure au cours de laquelle une amitié a grandi... (Exclamations.)... et qui continuera bien après. C'est cela le plus important !
Au nom de la députation démocrate-chrétienne, je dis: merci, Stéphanie ! Bon vent pour la suite de ton parcours, que l'on devine déjà brillant, et merci pour le chocolat !».
(Applaudissements. M. Patrick Schmied remet des fleurs à Mme Stéphanie Ruegsegger.)
La présidente. Je donne la parole à Mme Stéphanie Ruegsegger.
Mme Stéphanie Ruegsegger (PDC). Je vous remercie, Madame la présidente, et j'essayerai d'être brève, puisque, paraît-il, mes interventions ne sont jamais très longues...
Je voudrais rendre hommage à notre chef de groupe vénéré, Patrick Schmied. Patrick est un homme qui aime la vitesse... Vous avez certainement déjà eu l'occasion de le voir au volant d'une voiture de sport, qu'il ne pousse - je vous rassure - que sur circuit... Il roule très raisonnablement sur les routes genevoises ! Mais il n'y a pas qu'au volant d'un bolide que Patrick est rapide: il l'est également dans tout ce qu'il entreprend. A peine avait-il adhéré au PDC qu'il se mettait déjà à la disposition du parti, pour lui donner un coup de main dans le cadre de la commission électorale. Et c'est ainsi que ses talents ont immédiatement été remarqués, et, quelques années après, il accédait déjà à la présidence du parti, qu'il assuma avec brio, comme de bien entendu.
Sur sa lancée, Patrick se présenta également au Grand Conseil en 2001, où il fut brillamment élu, et, à peine deux ans plus tard, il prit la présidence du groupe qu'il assume encore aujourd'hui avec beaucoup d'intelligence, de compétence et d'amitié. Je crois qu'il a réussi à rassembler le groupe davantage encore. Bref, cela a été un réel plaisir pour nous !
Patrick est donc un homme rapide, mais il l'est sans doute trop aujourd'hui à notre goût, puisque, après seulement une législature et pour des raisons personnelles, il a décidé de passer la main. Nous espérons que cette absence ne sera que provisoire et qu'il reviendra très bientôt siéger sur ces bancs.
Pour le groupe comme, j'en suis sûre, pour l'ensemble de cette députation, Patrick, tu auras marqué ton passage par ton sens du dialogue, ton esprit constructif et rassembleur, ton pragmatisme et ton dynamisme. Tu représentes la parfaite synthèse entre la réflexion et l'action. Avec toi, on pose les problèmes, on discute, puis on agit sans tergiverser.
Ton parcours personnel et professionnel, qui t'a conduit à beaucoup voyager et à vivre notamment dans d'autres pays, te permet également d'avoir une expérience et une ouverture d'esprit vraiment peu communes dans ce parlement. Tu es d'ailleurs l'un des rares députés, si ce n'est le seul, à faire le lien avec la Genève internationale, qui est pourtant si capitale au développement de Genève et à son rayonnement.
Au cours de cette législature... (L'oratrice est interpellée.)Nous avons de la chance, effectivement, nous en avons deux dans le groupe ! Au cours de cette législature, ton engagement au sein de la commission sociale, de la commission de l'enseignement et de l'éducation, de celle de l'enseignement supérieur, et de la commission ad hoc du personnel de l'Etat aura, à l'évidence, contribué à la recherche de solutions constructives.
Cher Patrick, pour tes collègues, ton départ de la députation équivaut au départ d'un parlementaire brillant, d'un homme de dialogue et d'action, mais, aussi et surtout, d'un ami. Je suis certaine que tu vas beaucoup leur manquer. Quant à moi je me console en me disant que nous pourrons consacrer quelques-unes de nos soirées désormais libres... (Rires.)... autour d'un bon repas ! Merci, Patrick ! (Applaudissements. La présidente descend de l'estrade et remet le traditionnel stylo souvenir à Mme Stéphanie Ruegsegger et à M. Patrick Schmied.)
M. Jean-Marc Odier (R). Tous deux élus en 1993, ils sont si différents... Et, pourtant, ils ont un point commun: ils innovent tous deux dans leur profession respective !
Dynamique, positif, optimiste, persévérant, presque entêté, Pierre Froidevaux est un personnage avec un grand P, au caractère bien trempé. Dans sa réflexion, il ne se tourne que vers l'avenir. Il regarde loin devant lui: les avancées technologiques, le progrès, et ne s'embarrasse pas de vieilleries - dixit CGN, tour Baudet...
Véritable mercenaire politique, il est allé où son groupe avait besoin de lui. Il s'est adapté, en s'investissant à sa manière, passionnée ! Ce fut le cas dans trois présidences notamment: à la commission fiscales, avec la fameuse LIPP, à la commission des visiteurs officiels - lorsque les prisons connaissaient pas mal de troubles avec le fameux rapport de Mme Ruchat - et à la commission de contrôle de gestion et son travail, avec notre regrettée collègue Alexandra Gobet Winiger.
Dans ce parlement comme au dehors, avoir raison tout seul ne lui fait pas peur... Il se bat comme un lion ! Il déplacerait des montagnes à lui tout seul ! Il ne cesse d'interpeller le Conseil d'Etat, mais toujours avec la même question sur les coûts de la santé ! Le Conseil d'Etat répond toujours, mais toujours à côté de la question ! (Rires.)
Dans ses idées, Jean-Marc Odier n'est pas un homme de compromis. Pourtant, dans les travaux parlementaires, il sait rechercher les consensus qui créent une majorité. Ne vous y trompez pas, sa vision politique, sa tactique, sa stratégie et son esprit d'analyse sont excellents: il ne se trompe jamais sur ses pronostics ! (Commentaires.)
Bien qu'il n'ait pas toujours convaincu le groupe, Pierre a travaillé avec force et sincérité pour les autres, pour le groupe, pour la famille radicale, pour la famille radicale élargie. S'il a une grande ouverture d'esprit, Pierre est aussi un homme de principes, notamment à l'égard de la famille, à laquelle il attache une grande importance.
Aujourd'hui, Pierre, ton activité de député se termine. Je sais, connaissant ta passion, que tu le regrettes... Nous aussi ! Mais je sais également que tu es content de pouvoir donner encore plus aux tiens: à Jasmina et à vos enfants.
Bravo, Pierre, et merci pour tout ! (Vifs applaudissements. Claquements de pupitres.)
Thomas Büchi... Comme je le disais, ils sont si différents ! Thomas, on pourrait l'appeler le «Dédé» du parti radical... (Rires.)Sans aucun parallèle avec un Dédé siégeant sur d'autres bancs. Notre Dédé mesure 1,80 m et il a fait partie de l'équipe suisse de judo; on ne peut donc pas les confondre !
«DD» pour développement durable... Thomas a été, avec nos anciens collègues, Roger Beer et Hervé Dessimoz, le promoteur du développement durable au sein du groupe. Et je peux te dire, Thomas, que le concept est désormais, grâce à toi, bien ancré au sein du parti, et nous saurons poursuivre ton action.
Thomas, c'est aussi une sensibilité particulière dans le domaine des droits de l'Homme, de l'écoute et du soutien aux associations de défense des libertés humaines. Rapporteur de la commission des Droits de l'Homme, il prenait appui dans la réflexion de la commission, dans cette citation de M. Viera de Melo: «Promouvoir une vision globale des droits de l'homme n'est possible que si aucune distinction artificielle n'est faite entre les droits individuels et les droits collectifs. Les deux vont de pair dans toute société démocratique.»
Autre moment intense: malgré l'importance du sujet - le budget 2002 - Thomas avait rétorqué, avec un humour cinglant, à un autre député... En effet, n'a-t-il pas dit: «Monsieur le député, si nous avions pu vous acheter au prix que vous valez et vous revendre au prix que vous pensez valoir, nous aurions depuis longtemps remboursé la dette de l'Etat !». (Rires et exclamations.)
Mais Thomas c'est également notre chef de groupe depuis le début de la législature et il a contribué à réamorcer l'excellente dynamique que nous connaissons actuellement.
En revanche, comme je le disais, il est très différent de Pierre Froidevaux. Pierre, lui, est toujours à l'heure... Cela a valu à Thomas le dépôt, par ses collègues radicaux, le 25 janvier 2002, d'une motion visant à offrir un réveil aux chefs de groupe ! Alors, Thomas, je te remets tout de même l'original, parce que, finalement, le secrétariat du Grand Conseil a trouvé une autre solution. Mais c'était pour la petite histoire...
Aujourd'hui, Thomas, à peine ton mandat de député terminé, tu t'engages bénévolement pour la collectivité en reprenant une présidence importante dans le monde du handicap. Assoiffé de nouveaux défis, tu atteindras des sommets... Mais je crois que c'est déjà fait ! Car ton dernier défi, tu l'as réalisé. En effet, tu voulais gravir le Cervin avant tes 50 ans, ce que tu as fait le 5 septembre de cette année !
Mais après, Thomas, quel sera ton nouveau défi ? Je crois le savoir. Mais, en attendant de te revoir, je te dis simplement: merci pour tout ! (Applaudissements. La présidente descend de l'estrade et remet le traditionnel stylo souvenir ainsi que des fleurs à M. Pierre Froidevaux et à M. Thomas Büchi.)
M. Alain Charbonnier (S). Sur dix-neuf députées et députés, le groupe socialiste se représente presque au complet aux élections de dimanche. C'est une grande satisfaction de voir ses collègues aussi motivés pour continuer l'aventure. «Presque», car, à mon regret, ma voisine, Marie-Louise Thorel, est la seule à ne pas se représenter... Aurais-je été si désagréable et envahissant, chère Marie-Lou, pour ne pas avoir réussi à te motiver pour continuer ?
Marie-Lou s'est très vite mise au travail dans les commissions où elle a siégé. Pourtant la fiscalité et l'énergie n'étaient pas forcément ses domaines de prédilection, à l'inverse de l'enseignement où elle a pu apporter toute son expérience. Une intégration - sa spécialité, il faut le dire - parfaite et rapide au sein du groupe nous fait regretter aujourd'hui sa décision. Ma seule satisfaction, c'est que, comme nous habitons dans le même chemin, elle restera ma voisine malgré sa décision... Chère voisine, bonne continuation ! (Vifs applaudissements. La présidente descend de l'estrade et remet le traditionnel stylo souvenir ainsi qu'une gerbe de fleurs à Mme Marie-Louise Thorel.)
La présidente. Nous ferons parvenir le traditionnel stylo souvenir à M. André Hediger qui est excusé ce soir. Je vais encore donner la parole à M. Pierre Froidevaux qui l'a demandée, puis je vous convierai au verre de l'amitié.
M. Pierre Froidevaux (R). Merci, Madame la présidente. Chers collègues, je suis ému de prendre la parole une dernière fois dans ce parlement... (Bruit de larsen. L'orateur est interpellé.)Ce n'est pas mon téléphone: il est éteint ! Par contre, quelqu'un émet des ondes négatives ! (Rires.)
Je tiens à vous faire part de mon émotion de vous parler une dernière fois, dans ce parlement où j'ai été fier d'avoir été élu sous la bannière radicale pour servir Genève avec notre devise: «Liberté humaine, justice sociale». Le privilège d'être élu, accordé par le peuple, permet aussi de réaliser un rêve personnel: «Si j'étais élu, vous verriez comme les choses changeraient...». Je l'ai été, mais ai-je réalisé mes rêves ? Non ! Moi, jamais tout seul. Mais avec vous, oui ! Ou du moins avec la majorité d'entre vous !
Avec vous, chers collègues et Mesdames et Messieurs les conseillers d'Etat, nous avons fait des choses extraordinaires ! Je vais prendre un exemple parmi les quinze mille points qui ont défilé dans nos différents ordres du jour pendant douze ans, mais celui-ci me tient particulièrement à coeur. De par ma profession, j'approche chaque jour les citoyens les plus faibles... Parmi ceux-ci se trouvent ceux qui, sans aucune route personnelle, recherchent les paradis artificiels. Lorsque je suis arrivé dans ce parlement, ils étaient jetés en prison ou culpabilisés par des programmes d'abstinence. La société d'alors leur accordait un espace de liberté très restreint que l'on appelait alors «scène ouverte». Je les retrouvais dans des endroits sordides; adolescentes, adolescents, jeunes femmes et jeunes hommes, morts avant d'avoir vécu...
Lors de ma première législature, nous avons eu le courage de changer les choses. Ensemble, nous avions voté un programme de soutien aux addictifs. Souvenez-vous: le monde entier était contre nous ! L'OMS avait dénoncé cette politique genevoise, jugée alors irresponsable. Aujourd'hui, cette même organisation en fait la référence mondiale. Notre parlement avait osé une chose pourtant toute simple: prendre en compte leurs souffrances sans aucune complaisance pour les dealers. Nous avions intégré ces citoyens dans la communauté. Leur violence apaisée, ces hommes et ces femmes sont devenus plus libres. Vous aviez alors tous adopté la même devise que la mienne: «Liberté humaine et justice sociale».
Nous avons souvent bien travaillé, et je resterai fier d'avoir été l'un des vôtres pendant ces douze années. La politique doit sans cesse définir les règles de l'éthique sociale. Le dossier que je viens de citer, je l'ai vu naître, grandir et réussir. Mais d'autres votes, d'autres intentions doivent encore se concrétiser dans la durée.
Je garde toute ma confiance dans le parlement de Genève pour faire évoluer nos liens sociaux vers toujours plus d'harmonie et de paix. J'en veux pour preuve le vote de la dernière session parlementaire, définissant de nouvelles limites à la violence domestique. Protéger l'individu, et en particulier les enfants, contre toute cruauté d'où qu'elle vienne rend l'humanité plus libre et plus juste.
Mais les succès côtoient aussi les échecs, et vous me les avez régulièrement rappelés... Il m'est arrivé d'essayer de vous expliquer quelque chose sans arriver à me faire comprendre... Le doute m'assaillait: suis-je vraiment dans la lune ? Est-ce que je m'exprime en latin ? Un jour, l'un des nôtres, Michel Balestra, est venu me voir pour faire ma thérapie... (Rires.)«Mais, Pierre, me dit-il, nonante-neuf députés jouent du Mozart, et toi tu joues tout seul du Chopin: personne ne peut t'entendre !» Alors, parfois, j'ai continué à jouer du Chopin en me disant qu'un jour un des chefs d'orchestre changerait peut-être de partition et mettrait du Chopin sur tous vos pupitres... Mon violon est prêt; il a tant répété, il a tant pleuré... Mais, aujourd'hui, je dois quitter mon pupitre et laisser d'autres acteurs faire et dire ce que je me suis efforcé, pendant douze ans, de vous affirmer tous les jours: non, en tant que médecin privé, je ne suis pas responsable des coûts de la santé !» (Rires.)Je me réjouis donc du prochain concert que vous ferez à ce sujet, car les notes de musique que j'entends ces jours-ci me remplissent d'espérance.
Denis de Rougemont disait: «La liberté de penser n'est réelle que chez l'homme qui a reconnu et qui accepte le danger de penser.» Avant d'arriver au milieu de vous, j'ignorais à quel point il était dangereux et difficile d'être un homme libre. Cette libre pensée m'a valu de nombreux adversaires politiques. J'espère que maintenant, en m'asseyant, je n'aurai plus que des amis ! (Vifs applaudissements.)