République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 7 octobre 2005 à 14h
55e législature - 4e année - 12e session - 70e séance
PL 9526-A
Premier débat
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. Cet investissement est très important, il est porteur d'avenir à tous points de vue: il va permettre d'introduire de nouvelles technologies; il va donner à l'hôpital la possibilité d'être en ligne avec ce qui fait ailleurs dans le monde, au plus haut niveau dans le domaine de la chirurgie. Et puis, mettre à disposition des moyens aussi importants et nécessaires pour l'avenir de l'Hôpital cantonal est tout à notre honneur. La commission des finances a donc, à la majorité, accepté cet investissement.
Par conséquent, Mesdames et Messieurs les députés, je vous recommande de suivre sa position en votant ce crédit d'investissement.
Mme Janine Hagmann (L). Vous l'aurez remarqué le groupe libéral s'est abstenu sur ce projet, et je voudrais justifier cette position. Je serai brève, il y a trois raisons.
Premièrement, un robot semblable a été installé à la Clinique Générale-Beaulieu, et nous n'avons pas eu d'explications suffisantes sur les collaborations possibles entre le privé et le public. Notre doute à ce sujet n'a pas pu être levé et nous n'étions pas très satisfaits qu'une collaboration plus efficace ne puisse pas être envisagée et mise en place. Deuxièmement: quid de l'enseignement ? En effet, nous n'avons pas, non plus, obtenu les réponses nécessaires à propos de l'utilisation de ce robot pour l'enseignement. Troisièmement, je vais paraphraser Ambroise Paré - un célèbre chirurgien du XVIe siècle, comme vous le savez - qui, lui, connaissait ses limites. Il disait: «Je le pansai, Dieu le guérit.» Alors, je vous le demande: les médecins vont-il en arriver à dire: «Je le pansai, le robot le guérit.» ? Je vous remercie de votre attention.
M. Pierre Kunz (R). Je lisais - Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais vous le faire partager - une interview dans la «Tribune de Genève» du vendredi 9 septembre 2005. M. Bernard Gruson, directeur général des HUG, comme vous le savez, disait au sujet des HUG: «On peut encore rationaliser, notamment dans la médecine de pointe où les équipements sont coûteux, le nombre de patients faible et les spécialistes chers.»
Eh bien, Mesdames et Messieurs, comme l'a dit Mme Hagmann, il y a déjà un robot à Genève ! Il faut savoir qu'il y a deux robots de ce type en Suisse à l'heure actuelle - tout de même ! - un à Genève et l'autre à Zurich. Malheureusement, il s'avère que le robot qui est à Genève n'est pas dans les HUG mais à la Clinique Générale-Beaulieu. Et il semble - Mme Hagmann l'a également relevé - qu'il soit impossible pour les HUG de collaborer avec Beaulieu. Et c'est pour cette raison que l'on nous demande de dépenser 2 millions pour acheter un autre manipulateur, du type de celui qui existe déjà à Genève !
Je vous le dis sans que cela engage le groupe radical: j'ai voté contre. Parce que je trouve que ce n'est pas compatible avec la situation financière de Genève !
M. Gilbert Catelain (UDC). On pourrait ergoter longtemps sur le bien-fondé ou non de l'achat d'un nouveau robot manipulateur pour l'Hôpital cantonal, mais cela ne sert à rien dans la mesure où le crédit a déjà été accepté par ce Grand Conseil lors du vote du budget 2005. Finalement, en votant le budget 2005, nous avons - l'Entente et l'UDC - accepté, de fait, l'achat de ce robot. Rien que de ce point de vue, il me semble que nous ne pouvons faire autrement que d'accepter ce projet de loi. Si nous n'étions pas d'accord, nous aurions dû avoir le courage de biffer cette ligne budgétaire lorsque nous avons étudié le budget avant de le voter !
Pour le reste, on ne peut effectivement que regretter le manque de collaboration entre l'Hôpital cantonal et la Clinique Générale-Beaulieu. Il faut quand même savoir que l'acquisition d'un robot permet d'écourter la durée des opérations et d'hospitalisation et de diminuer les problèmes postopératoires. Et, en fin de compte, il est possible qu'un tel achat soit bénéfique en termes de productivité et de coût des opérations qui seront pratiquées à l'Hôpital cantonal. Le rapport n'aborde pas beaucoup cet aspect des choses, mais je suis convaincu qu'à terme les hôpitaux seront tous équipés de ce type de robot.
Par conséquent, nous n'avons aucune raison de restreindre les crédits de l'Hôpital cantonal dans ce domaine; nous avons autre chose à faire, sur un budget de un milliard, que de discutailler à propos d'un montant de 2 millions de francs qui, de toute manière, a été voté par ce Grand Conseil en novembre de l'an dernier !
M. Antoine Droin (S). Ce robot n'est qu'un robot, mais il représente l'avenir, et je pense que l'avenir passe aussi par la robotisation. Même s'il existe un tel équipement à Beaulieu - et hormis le fait que la collaboration n'est pas facile - il est évident que des questions de planning se poseront forcément. En effet, ce robot étant utilisé par les médecins de la clinique, une organisation devrait être envisagée pour permettre aux médecins de l'Hôpital cantonal et à leurs patients de venir à Beaulieu quand l'appareil est disponible - et il est clair que nous ne pouvons pas demander à ces médecins d'intervenir la nuit...
Certes, il y a aussi un robot à Zurich, mais il n'est pas facile de faire s'y déplacer des patients. Par ailleurs, il est très important pour les personnes hospitalisées de pouvoir rester dans un environnement connu, près des membres de leur famille qui peuvent leur rendre visite et les réconforter, ce qui favorise aussi leur rétablissement.
Je partage les propos de M. Catelain sur l'aspect financier de ce projet: cet investissement permettra certainement, à terme, de réaliser des économies, ne serait-ce que parce que les interventions seront plus courtes, moins difficiles, plus sûres, et que, par conséquent, la durée des hospitalisations sera moins longue, ce qui coûtera moins cher. Ce sera donc un gain pour les assurés de ce canton que nous sommes tous !
M. Robert Iselin (UDC). Je ferai deux remarques. Premièrement, la Clinique Hirslanden, si je suis bien informé, est en train de s'employer à acquérir un de ces robots. Deuxièmement, il en est probablement de même à Bâle.
En troisième lieu, je poserai la question suivante: trouvez-vous normal que les gens qui ont les moyens de se l'offrir puissent se faire opérer à la Clinique Générale-Beaulieu, alors que les autres devraient se contenter d'aller à l'Hôpital cantonal, quelle que soit l'habileté de ses opérateurs ?
La présidente. Le Bureau vous propose de clore la liste des députés. Sont inscrits: M. Claude Aubert, M. Alberto Velasco et M. le conseiller d'Etat.
M. Claude Aubert (L). J'aimerais juste élargir un peu le débat. En effet, on parle de l'acquisition d'un robot, mais on ne mentionne pas l'élément essentiel, à savoir qu'un tel robot ne peut en aucun cas être utilisé s'il n'y a pas une équipe compétente pour l'utiliser. Par conséquent, dans le débat privé/public, qui est un débat majeur, la notion de l'équipe et la notion de l'interchangeabilité des équipes posent des problèmes. Mais nous souhaitons pouvoir les résoudre.
Deuxième remarque à propos de ce robot: pour pouvoir l'utiliser, il faut apprendre à l'utiliser. Et l'une des missions de l'Hôpital cantonal consiste à initier les nouvelles générations de médecins à son utilisation. Dans ce sens-là, l'acquisition du robot ne sert pas seulement à effectuer des opérations, elle garantit aussi que des personnes qualifiées seront capables de s'en servir dans le futur et de procéder à certains types d'interventions nécessaires à la population.
M. Alberto Velasco (S), rapporteur. J'aimerais tout d'abord rappeler à Mme Hagmann qu'en commission il nous a bien été indiqué que ce robot serait, en partie, destiné à l'enseignement. Il sera donc... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)... également utile dans ce domaine.
Le problème financier se pose - et il est tout à fait légitime de s'en inquiéter, vous avez raison, Monsieur Kunz. Notre collègue Aubert a avancé des arguments... Mais la question de la subsidiarité se pose aussi, car il est évident que c'est le privé qui doit être subsidiaire à l'Hôpital cantonal et non l'inverse ! Ce n'est pas à l'Hôpital cantonal de se plier aux disponibilités de ce robot pour pouvoir procéder à des opérations !
Monsieur Kunz, Beaulieu peut fermer n'importe quand, personne ne peut rien contre cela, mais ce n'est pas le cas pour l'Hôpital cantonal ! Et celui-ci doit veiller à maintenir un certain savoir-faire dans les domaines de pointe et il doit bénéficier d'un équipement à la hauteur. Il y est obligé ! Je suis donc tout à fait heureux que les chirurgiens et le Conseil d'Etat aient une même vision d'avenir dans ce domaine en voulant procéder à cet investissement. Donc, je vous invite à nouveau à voter ce crédit.
La présidente. Merci, Monsieur le rapporteur... Non, la liste est close, Madame Leuenberger ! Je demande que l'on supprime le nom de Mme Leuenberger de la liste et je donne la parole à M. le conseiller d'Etat Pierre-François Unger.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Le bref débat que nous avons aujourd'hui pose tout de même la question fondamentale du soutien de ce parlement à notre hôpital universitaire. Genève est un petit canton peu peuplé: quatre cent trente mille habitants seulement ! Et notre ambition, j'espère qu'elle est partagée par votre parlement, est de garder un hôpital universitaire, parce que cela permet, de la même manière, de garder une faculté de médecine, ce qui, par effet domino, permet de garder la faculté des sciences... Alors, oui, c'est vrai, cela a un coût !
Je n'insisterai pas sur les bienfaits cliniques de l'acquisition du robot, ils ont été bien détaillés, mais je vous donne tout de même quelques exemples extrêmement pratiques. L'ablation de la prostate - pour ne prendre que cet exemple - se pratique à l'heure actuelle par certaines voies... C'est une intervention qui ressemble à de la chirurgie de guerre - et encore, je mesure mes paroles ! Eh bien, grâce à l'acquisition du robot, elle pourra se faire avec une telle précision que l'ensemble de l'innervation - les nerfs de la région concernée - pourra être épargné ! Vous aurez sans doute compris à demi-mot l'intérêt que cela représente pour la qualité de vie de ceux qui peuvent bénéficier de l'ensemble des nerfs et, respectivement, éviter de se les voir couper... (Brouhaha.)
Une voix. On n'a pas bien compris !
M. Pierre-François Unger. Je vous l'expliquerai plus en détail, Monsieur le député ! (Exclamations.)Par ailleurs, Mesdames et Messieurs les députés... (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)... qui dit: «Hôpital universitaire» dit: «recherche, enseignement et développement». J'ai beaucoup insisté auprès de l'Hôpital, avant de déposer ce projet de loi, pour que ce robot ne soit pas un gadget de technique de pointe, mais pour qu'il soit un outil d'enseignement pour les futurs chirurgiens qui, à n'en pas douter - M. Catelain l'a évoqué - devront maîtriser cette technique dans les cinq à dix ans à venir.
Et que ce soit également l'occasion de développer les techniques de l'optique ! Vous le savez, l'EPFL est l'une des écoles polytechniques d'Europe les plus avancées dans le domaine de l'optique, et il y a des relais dans les PME locales pour mettre en pratique les développements éventuels. Il en va de même de la microtechnique où nos horlogers, je crois, ont fait la preuve de ce qu'ils savent faire en termes de micromécanique et qui pourront, à l'évidence, eux aussi servir le développement d'une telle technique.
En d'autres termes, et je le répète: au-delà du confort clinique - qui est sans doute le plus important dans l'immédiat pour les citoyennes et les citoyens de ce canton - il en va de la persistance d'un pôle universitaire capable de rechercher, de développer, d'enseigner et, donc, de nourrir le tissu industriel local, dont il n'est pas nécessaire de vous préciser qu'à Genève il ne consistera plus jamais à construire des locomotives... Au contraire, il sera plutôt tourné vers ce genre de technologies !
C'est la raison pour laquelle, Mesdames et Messieurs les députés, je vous encourage vivement à voter ce projet de loi.
Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 49 oui contre 1 non et 3 abstentions.
La loi 9526 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9526 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 46 oui contre 1 non et 3 abstentions.