République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 18 mars 2005 à 17h
55e législature - 4e année - 6e session - 32e séance
PL 9474-A
Premier débat
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Il y a ici trois projets de lois mais, en réalité, c'est un seul et même débat qui se poursuit. C'est une bonne chose, car la question est importante. J'aimerais procéder à deux ou trois remarques.
Tout d'abord, je vous rappelle que, quand la loi instituant la Fondation a été crée, la majorité de ce Grand Conseil était une majorité de gauche et le but clairement affiché de la Fondation était de valoriser ses actifs. La droite de ce Grand Conseil avait voté la loi en précisant très clairement qu'elle le faisait à une condition: que l'on ne se dirige pas vers une forme d'étatisation du sol, que l'on ne glisse pas d'une politique de valorisation financière à une politique sociale du logement. Ce que l'Alternative est malheureusement en train de faire depuis quelques mois dans ce Grand Conseil, c'est de trahir la position qu'elle avait adoptée à l'époque du vote de cette loi pour essayer d'utiliser le patrimoine de la Fondation à des fins de politique sociale du logement. Je suis un peu déçu par ce revirement.
Je voudrais dire à M. Broennimann que son raisonnement pourrait être suivi si, en rachetant ce type d'immeuble, on pouvait créer de nouveaux logements; mais en permettant à l'Etat d'acquérir ce type de logement, on n'en crée pas un seul. Nous nous battons donc contre une forme d'étatisation rampante du sol. Monsieur Mouhanna, vous nous dites que l'on ne cause pas un franc de perte supplémentaire lorsqu'on achète un immeuble de ce type, quel que soit le prix que l'on paie. Mais, en suivant votre raisonnement, rachetons l'ensemble du parc ! Pourquoi n'étatise-t-on pas d'un coup l'ensemble des immeubles en main de la Fondation ? En vous suivant, on pourrait le faire sans que cela coûte un franc au contribuable... Vous savez bien que ce n'est pas vrai. Rien n'est gratuit, Monsieur Mouhanna !
Je voulais encore dire une chose en réponse aux propos de M. Spielmann s'agissant de débiteurs qui seraient nos amis. Ce ne sont pas nos amis. Bien souvent, nous ne savons pas qui sont ces personnes, puisqu'elles sont anonymes. Au sein de la commission de contrôle de la Fondation, nous sommes tous choqués par la façon dont les choses se sont passées. Lorsque nous voyons les crédits accordés à certains propriétaires immobiliers, nous sommes tous choqués. Nous ne cautionnons en rien ce qui s'est passé. Aujourd'hui, notre souci consiste à limiter la casse pour le contribuable - et ce n'est pas en détournant le patrimoine immobilier de la Fondation à des fins de politique sociale du logement que nous atteindrons ce but.
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse de minorité. Nous ne cherchons pas à étatiser le sol, comme le craint le rapporteur de majorité. Au vu du rythme des achats de l'Etat, cela ne risque pas d'arriver demain.
Je pense que l'on peut se fixer deux objectifs. Le premier renvoie à la valorisation - et j'y tiens. Quand nous proposons la vente d'objets, ce sont clairement des objets ciblés pouvant être utiles au logement social et / ou aux étudiants.
Nous pensons maintenir ces quelques objets particuliers dans un parc immobilier de logement social.
Il ne s'agit en rien de brader les objets, ni de ne pas les valoriser. Ce que nous demandons, c'est une réflexion un peu plus large. Quand du logement neuf coûte plus cher que du logement d'occasion, je ne vois pas pourquoi les sous du contribuable ne seraient pas mieux utilisés en achetant du logement d'occasion ! Il faut adopter une vision un peu plus large des choses - et non une vision purement contextuelle.
Venons-en à cet objet précis. Mon Dieu, je me demande ce qu'on lui reproche ! Il n'y a rien à lui reprocher: c'est un logement rénové situé au centre-ville, avec des loyers LDTR, qui a un bon rendement. Pourquoi ne pas l'acheter ? Le Conseil d'Etat nous avait promis que cet objet serait examiné, et on le retrouve ici. Je trouve dommage que l'on renonce à son acquisition. Qu'on en propose au moins l'acquisition à une fondation de droit public ! Mon objectif n'est pas que l'Etat en devienne propriétaire, mais que les fondations immobilières de droit public ou d'autres associations le deviennent. Il n'y a rien à reprocher à cet immeuble. Pas trop cher, rénové, que veut-on de plus ? Deux immeubles pour le prix d'un ?!
Je vous conseille de refuser cette vente et de réfléchir encore une fois à cette acquisition, qui figure aussi sur la liste des syndicats.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Tout d'abord, un mot à l'attention de M. Kunz. Si l'on regarde le Mémorial du Grand Conseil, on constate que votre parti a voté cette loi du 19 mai 2000... Oui ! La grande majorité de ce Grand Conseil a voté cette loi, Monsieur Kunz, alors ne mettez pas toujours le vote de cette loi sur une seule partie de ce parlement ! C'est l'ensemble du Grand Conseil qui l'a votée - à part quelques abstentions libérales car, d'après ce que j'ai lu, certains libéraux voulaient que la Banque soit complètement détruite pour que les banques privées prennent le relais. Dès lors, Monsieur Kunz, ne confondez pas les responsables ! Les responsables, ce sont ceux qui ont mené la Banque cantonale à cette situation - et vous attaquez ceux qui ont essayé de limiter les dégâts ! C'est votre responsabilité et votre droit de tenir les propos que vous voulez, mais ce que vous dites est complètement faux. Je dirais même qu'il s'agit de propos totalement cyniques et inacceptables dans la mesure où ils sont mensongers.
Concernant l'objet en question, comme Mme Künzler vient de le dire, le rendement est supérieur à 5%. Il existe un certain nombre de besoins dans cette collectivité, mais on nous dit que cela ne crée aucun nouveau logement. Nous avons toujours été favorables à ce que l'Etat réalise des logements sociaux - et même des logements moins sociaux - pour répondre aux besoins de la population. Vous savez bien que nous demandons à l'Etat de créer des logements de toutes catégories. Mais nous avons bien sûr toujours essentiellement soutenu l'action en matière de logement social.
A propos de l'«étatisation du sol» - comme dit M. Muller - je trouve absolument scandaleux que des dizaines de milliers de familles vivent dans des conditions difficiles. Certaines ne trouvent pas de logement et vivent dans des endroits exigus alors que, dans le même temps, des gens disposent de villas de centaines de mètres carrés, avec des parcs de plusieurs milliers de mètres carrés. Alors, Monsieur Muller, c'est effectivement scandaleux et il faut combattre cela !
Il faut plus de justice et il faut répondre aux besoins essentiels de la population. Je suis contre les inégalités et, si cela doit passer par une étatisation du sol, je serai disposé à cela.
La présidente. Je vous propose de clore la liste des intervenants. Sont encore inscrits MM. Broennimann, Kunz et Muller.
M. Martin-Paul Broennimann (S). Pour répondre rapidement à M. Muller, il ne s'agit absolument pas de trahir une intention. On a tous très bien compris la motivation originelle. Il s'agit simplement de se montrer suffisamment intelligent pour saisir une opportunité efficace qui offre plus de logements pour le même argent, plus rapidement, et de manière moins onéreuse. Il s'agit, de plus, de logements correspondant exactement à un besoin. C'est à cette réflexion que l'on vous invite, Monsieur Muller.
M. Pierre Kunz (R). Deux choses. D'abord, je suis ravi de voir que, sur un point au moins, M. Mouhanna partage les mêmes ambitions que moi, à savoir que nous voulons tous deux construire des logements pour toutes les catégories de la population. Je suis ravi de savoir que vous pourrez ainsi signer l'initiative qui vient d'être lancée, car c'est exactement ce que cette initiative demande.
D'autre part, Monsieur Mouhanna, je ne vous demande qu'une seule chose : arrêtez de nous accuser de brader les objets, c'est tout ! Vous avez commencé ainsi, et c'est ce qui a suscité ma réaction.
Dernier point. Vous nous dites que la BCGe a été gérée comme une triste maison et vous nous mettez cela sur le dos. J'aimerais cependant vous rappeler que, parmi les membres du conseil d'administration de l'époque, il y avait une conseillère d'Etat - devenue conseillère fédérale - qui ne faisait pas partie des rangs libéraux, ni radicaux, ni PDC, ni UDC.
Mis aux voix, ce projet de loi est adopté en premier débat par 44 oui contre 31 non et 1 abstention.
La loi 9474 est adoptée article par article en deuxième débat et en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9474 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 41 oui contre 31 non et 1 abstention.