République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 18 février 2005 à 17h
55e législature - 4e année - 5e session - 27e séance
PL 9462-A
Premier débat
M. Pierre Kunz (R), rapporteur de majorité. J'ai lu avec attention le rapport de ma collègue, et je n'en ai tiré qu'une conclusion: rien n'est pire que d'avoir une idée quand on n'a qu'une seule idée, elle devient vite un entêtement déraisonnable.
Mme Michèle Künzler (Ve), rapporteuse de minorité. Je laisse à mon préopinant les propos qu'il a émis en ce qui concerne le rapport. Quant au procès d'intention que M. Kunz dresse à la minorité, je trouve que ce n'est pas très normal, cela frise l'impolitesse.
J'aimerais tout d'abord dire que c'est la constitution genevoise qui nous oblige à nous prononcer sur chaque vente. Pour ma part, je ne me suis opposée qu'à très peu de ventes, mais il y a des moments où il faut le faire. Précédemment, nous avons voté sur quinze rapports, et je les ai tous approuvés sans problème. Il s'agit de villas, de PPE ou de terrains dans le canton de Vaud que l'Etat peut céder sans problème. Mais je ne vois pas pourquoi on céderait des immeubles au centre-ville qui rapportent de l'argent et qui pourraient servir pour du logement social.
C'est ici qu'il y a un réel problème, on refuse de réfléchir à l'acquisition de logements au centre-ville, alors qu'ils ne sont pas marqués socialement. Comme nous l'avons dit dans notre rapport, cela pourrait apporter un peu plus de souplesse dans la zone de développement, ainsi qu'une plus grande diversification des logements. C'est cela qui nous importe.
D'autre part, j'aimerais signaler que, dans ce cas, on perdra près de 9 millions. On va payer cette perte, et ne nous resteront que les yeux pour pleurer ! En plus, on laissera à quelqu'un l'immeuble maintenant bénéficiaire avec un rendement de 6% net. Où est le problème pour l'Etat ? Je ne vois pas de problème à racheter un objet qui rapporte. Nous empruntons à environ 2% - voire 3% dans l'immobilier - mais on a ici un objet qui rapporte 6% net ! Ce n'est donc vraiment pas un problème pour les finances de l'Etat.
Bien sûr, je préférerais que ce soit une fondation immobilière qui le rachète. Ce qui me choque, c'est qu'en l'occurrence on avait déjà refusé cet objet. Le Conseil d'Etat a simplement dit de le remettre sur le dessus de la pile, car de toute façon il ne l'achèterait pas. On n'a pas eu d'explication claire. Pourquoi cet objet ne pourrait pas servir au logement social ou à une acquisition pour du logement détenu par l'Etat ? On ne le sait pas. On recommence la donne et on va le vendre. Et si je suis têtue - c'est vrai - je suis très constante et j'irai jusqu'au bout, je vous l'ai promis. Chaque fois qu'il y aura des immeubles à vendre au centre-ville pouvant servir pour du logement social, je continuerai à faire des rapports de minorité parce que finalement j'aurai raison.
M. Souhail Mouhanna (AdG). D'habitude, les rapports de la commission de contrôle de la Fondation de valorisation passent sans problème au niveau du Grand Conseil, dans la mesure où il n'y a pas véritablement de conflits quand il s'agit de discuter sur des objets immobiliers proposés à la vente par la Fondation de valorisation.
Il y a moins d'une heure, nous avons voté seize projets de lois et tous l'ont été à l'unanimité. Ce n'est pas la première fois. Au moins une centaine d'objets ont été votés à l'unanimité en commission de valorisation. Depuis que je siège dans cette commission, seulement deux rapports de minorité ont été rédigés. Un premier sur un objet qui n'est pas très lointain, et un deuxième sur l'objet qui nous concerne aujourd'hui. Les minoritaires - dont je fais partie - considèrent qu'un immeuble comportant 27 logements peut parfaitement être affecté au logement social. Quand je parle de logement social, j'inclus non seulement les classes défavorisées, mais aussi les classes moyennes. Car même les classes moyennes sont en difficulté pour trouver des logements. Faire du social aujourd'hui, c'est répondre aux besoins de la grande majorité de la population actuellement en difficulté.
M. Kunz reproche à Mme Künzler et moi-même - comme vous pouvez le lire dans le rapport, il y avait deux votes contre cette opération - de nous exprimer en commission de la Fondation de valorisation en faveur de l'acquisition par l'Etat de cet objet. Il a parfaitement le droit de ne pas être d'accord avec nous, puisqu'il y a un vote majoritaire. D'ailleurs, on aurait pu très rapidement voter ici, sans débat ni polémique. Mais M. Kunz ne peut pas s'en tenir là. Il se sert de n'importe quoi pour en faire une espèce d'étape dans sa croisade contre la gauche et contre tout ce qui ne correspond pas à ses idées - que je ne qualifierais pas de néolibérales, car le néolibéralisme passerait parfois pour de la gauche aux yeux de M. Kunz.
En ce qui concerne le logement social, M. Kunz prétend que les minoritaires se permettent d'intervenir en commission sur des objets qui regarderaient plutôt une autre commission. Monsieur Kunz, que faisons-nous ici et maintenant ? Le projet de loi est soumis à la plénière du Grand Conseil, et le Grand Conseil discute. Les commissions sont des émanations du Grand Conseil; avant d'être membre d'une commission, on est député ! Si le DAEL ne veut pas acquérir un objet comme celui-là, il appartient aux députés de donner au DAEL leur accord ou pas.
Cela ne se joue pas seulement au niveau de la commission, mais aussi maintenant dans ce parlement. Nous sommes en train de dire publiquement, devant la population, que nous aurions souhaité que le Conseil d'Etat acquiert cet immeuble pour l'affecter au logement social, parce qu'il y a véritablement une crise aiguë du logement à Genève et tout le monde le sait. Voilà pour ma première remarque.
Deuxième remarque. Vous tirez sur tout ce qui bouge. Sur les députés qui ne sont pas d'accord avec vous... Sur le chef du DAEL... Et même - par rapport à M. Moutinot - permettez-moi de citer vos propos : «Incohérence de ceux qui sont représentés au DAEL par un magistrat issu de leurs rangs, de ceux qui condamnent sa politique en matière de logement social». Non, Monsieur, non ! Nous n'avons pas condamné sa politique en matière de logement social ! Non! Ce que nous n'acceptons pas, c'est que l'Etat n'essaie pas d'acquérir cet immeuble. Vous privez l'Etat des moyens financiers pour acquérir du logement.
Nous disons simplement que nous aurions souhaité que l'Etat acquière cet immeuble. Nous n'avons pas dit, Monsieur Kunz, que nous sommes contre la politique de M. Moutinot en matière de logement social; et puis c'est à M. Moutinot de se défendre, c'est un grand monsieur. Vous faites un amalgame de tout, vous prêtez aux autres des choses qui ne sont pas correctes pour pouvoir les critiquer. Vous êtes dans l'erreur, Monsieur Kunz, lorsque vous écrivez ceci dans votre rapport : «Populisme de ceux qui, alors majoritaires au Grand Conseil, ont voté unanimement la loi du 19 mai 2000 instituant la Fondation de valorisation et entérinant la provision de 2,7 milliards destinés à couvrir les pertes à venir, mais qui tentent aujourd'hui de profiter lamentablement de chaque projet de loi issu des opérations de la Fondation de valorisation pour accroire au sein de la population l'idée que les pertes effectivement comptabilisées mois après mois par l'Etat seraient inattendues, scandaleuses, inacceptables et qu'elles refléteraient le mauvais travail de la Fondation de valorisation.» Ce sont des élucubrations.
Tout d'abord, Monsieur Kunz, qu'est-ce qui a causé cette perte de 2,7 milliards ? Vous le savez, ce n'est pas... (L'orateur est interpellé.)Non, non, vous aussi vous avez voté... Ce qui a été voté, c'est justement pour éviter la catastrophe due à cette mauvaise gestion de la banque cantonale et aux opérations de manipulation des comptes et autres, je n'irai pas plus loin dans ma description. Oui, les pertes sont inacceptables et scandaleuses, nous ne le dirons jamais assez et chaque fois que nous aurons l'occasion de le dire nous le dirons et ce n'est pas vous qui allez nous en empêcher. Vous ne parlez pas des responsabilités dans ces pertes, Monsieur Kunz, mais vous savez qui sont les responsables. Nous dénonçons tout ce qui a conduit la banque cantonale dans cette situation et qui fait que maintenant, c'est à l'Etat - et par conséquent à l'ensemble de la population, aux services publics et à la qualité des prestations à la population - d'en subir les conséquences. A cause de cette gestion scandaleuse de la banque cantonale, ces conséquences sont dramatiques dans certains secteurs, comme nous l'avons vu dans les votes du budget.
La présidente. Il faudra terminer, Monsieur Mouhanna.
M. Souhail Mouhanna. Je termine en deux minutes. Par conséquent, Monsieur Kunz, votre manière de rédiger vos rapports va nous inciter à nous comporter autrement quand il s'agira de décider de quelle manière on rédige les rapports. Alors que ces rapports devraient être techniques, vous en faites chaque fois des rapports politiques pour stigmatiser les gens qui ne sont pas d'accord et qui se sont permis l'immense crime de dire non ! On veut que l'Etat acquière ce logement, alors on va se comporter autrement désormais. On ne va plus vous laisser le champ aussi libre que vous ne l'avez actuellement.
M. Rémy Pagani (AdG). Depuis quelques jours, de la part des milieux de l'Entente et de l'UDC - enfin, je ne sais pas si l'UDC est associée - on assiste à l'élaboration d'un écran de fumée gigantesque. C'est-à-dire que la droite, majoritaire dans ce parlement, est consciente des difficultés à trouver un logement. En lançant une initiative pour déclasser des terrains agricoles, elle érige un écran de fumée pour cacher l'incohérence de certains quant à l'objectif - qui figure dans le plan directeur cantonal - de satisfaire aux besoins prépondérants de la population en logements sociaux. Et quand je dis cela, j'inclus les logements à loyer bon marché.
En l'occurrence, Monsieur Kunz, vous démontrez à quel point vous faites fi de ce besoin. La population genevoise n'a pas simplement besoin de logement pouvant être situé n'importe où et y compris dans la zone agricole. Elle a besoin de logements qui correspondent au revenu des gens, c'est-à-dire entre 18% et 25% de leur revenu. Il s'agit donc de loyers modérés. Malheureusement, ce n'est pas le cas avec les logements que vous nous proposez. Il n'y a qu'à voir maintenant: vous refusez d'acquérir cet immeuble qui a un rapport intéressant pour l'Etat, car il ferait rentrer de l'argent à terme dans ses caisses.
En refusant d'acquérir cet immeuble, vous démontrez que ce qui vous intéresse, ce n'est même pas la classe moyenne - car aujourd'hui elle n'y a pas accès, notamment à la PPE - mais des contribuables fiscalement très intéressants, qui ont des revenus au-delà de 300 000 F par année. C'est bien de cela dont il est question. Aujourd'hui, nous défendons, comme nous avons défendu... (L'orateur est interpellé.)Oui, je parle de 300 000 F. Quand on cumule deux salaires à 150 000 F, on arrive à ce type de revenu. Vous riez, Monsieur Kunz, mais il s'agit de cette catégorie de la population. Vous défendez une minorité sous prétexte de «défendre la classe moyenne», mais vous savez très bien que les classes moyennes n'ont pas ces revenus.
Par conséquent, nous estimons que pour mener une véritable politique sociale du logement, on doit se préoccuper de l'acquisition de terrains bons marchés où l'on peut construire et mettre à disposition des logements à loyer modéré. Mais ce n'est malheureusement pas le cas dans ce parlement, car la majorité ne le veut pas. Effectivement, comme le dit M. Mouhanna, nous allons prendre des mesures, et d'ailleurs nous en avons déjà prises. Je vous signale que la Fondation de valorisation de ce Grand Conseil a refusé d'acheter l'hôtel Carlton et la population - non pas au niveau de la Ville de Genève, mais du canton, ce qui vous a surpris mais pas nous - a voté contre cette décision et a imposé au gouvernement de racheter cet immeuble. J'espère que M. Moutinot, dans sa déclaration à venir, nous donnera des explications quant à l'avenir de l'hôtel Carlton.
Il ne faut pas se faire d'illusions. Une fois de plus, votre majorité ne va pas refuser ce projet de loi. Le mois passé nous avons refusé d'acheter un objet qui avait des logements bon marché et qui aurait pu être mis à disposition de la population. Malheureusement, la majorité actuelle de ce parlement ne mettra pas en place une politique sociale du logement. Nous devons nous donner les moyens de lancer un référendum - peut-être pas sur cet objet, mais sur un autre - pour vous démontrer que la population veut que, comme pour le Carlton, l'Etat se donne les moyens de mettre à disposition des logements bons marchés qui correspondent aux besoins de la majorité de notre collectivité, comme cela est d'ailleurs prévu dans la constitution.
C'est pourquoi nous estimons que vous faites erreur. Vous dressez un écran de fumée de bonnes intentions en disant : «On va déclasser la zone agricole et on va vous offrir tant et plus»... Enfin, pour résumer vos propos : «Demain, on rase gratis». Mais vous êtes incapables, tant au niveau des déclassements que lorsqu'il s'agit d'acheter des objets pouvant immédiatement correspondre à la politique sociale du logement que nous souhaitons. Vous refusez de mettre la main à la pâte, et nous le déplorons.
La présidente. Je vous propose de clore la liste. Sont encore inscrits: MM. Deneys, Broennimann, Hiler et M. le conseiller d'Etat Moutinot.
M. Roger Deneys (S). Juste pour dire à M. Kunz que des gens ont envie d'habiter en ville et pas forcément dans des zones agricoles déclassées. C'est une occasion de créer du logement en ville et c'est important.
Pour le reste, j'aimerais revenir sur votre rapport. Je le trouve absolument scandaleux. Vous ne faites qu'énumérer un certain nombre de critiques, ce n'est pas un rapport factuel. Vous n'énumérez pas les travaux de la commission, vous faites part de vos opinions au sujet de l'Alternative, opinions qui ne sont d'ailleurs pas étayées. C'est un catalogue - pas très drôle - de propos, malheureusement pas comme une liste à la Prévert, mais plutôt à la Pauwels. C'est franchement navrant de voir un rapport pareil. Il n'y a aucun fait, il n'y a rien du tout.
M. Martin-Paul Broennimann (S). Nous constatons que M. Kunz a le sens de la mission, ou plutôt le sens de l'obstination. Mais on sait ce qui est arrivé, par le passé, aux gens qui n'avaient que le sens de la mission. Alors, Monsieur Kunz, nous vous invitons à enlever vos oeillères, pour voir un peu plus loin autour de vous et être conscient que, dans ce parlement, on ne cherche pas uniquement à satisfaire une seule mission mais plusieurs. Et pourquoi pas, si on peut réaliser plusieurs missions à la fois, en toute intelligence, s'ouvrir à cette entreprise. C'est la raison pour laquelle nous pensons que l'intervention de Mme Künzler est tout à fait justifiée et nous la soutenons. Les fondations immobilières ont d'ailleurs acquis un certain nombre d'immeubles en ville, et pour cause, ce sont des logements particulièrement prisés et adaptés aux locataires que nous avons. Pourquoi ? Car ils sont proches des transports publics et des équipements. Ce sont des gens qui n'ont pas forcément besoin d'avoir tout de suite une ou deux voitures, car ils vivent en ville. Ce sont donc des objets particulièrement intéressants. Alors, je vous invite à ouvrir la réflexion, à entrer en matière sur la proposition de Mme Künzler et à refuser ce projet de loi.
M. David Hiler (Ve). Au fond, c'est un problème de politique du logement que nous traitons ici, et il est bien normal que nous le traitions comme nous traiterions la vente de n'importe quel immeuble. A plusieurs reprises, notre groupe a accepté la vente de parcelles dont nous pensions qu'elles ne servaient à rien dans le cadre de la politique du logement social, et que le Conseil d'Etat souhaitait vendre.
En revanche, sur cet objet comme sur certains autres, nous observons qu'il y a une contradiction manifeste entre la volonté affichée par le Conseil d'Etat de mettre sur pied une politique de logements sociaux pérenne et ce qui se passe effectivement concernant un certain nombre d'objets. C'est la raison pour laquelle nous essaierons à chaque occasion d'avoir ce débat. Pourquoi ? Parce qu'il est de plus en plus admis, dans des cercles de plus en plus larges, que la seule politique que nous puissions avoir est celle de logements demeurant aux mains de constructeurs d'utilité publique, qu'il s'agisse de communes, de coopératives ou de fondations immobilières de droit public.
Mais, si cette politique doit s'opérer uniquement par une intervention sur le neuf, elle sera très longue à réaliser et ruineuse pour l'Etat. Pourquoi ? Parce qu'un immeuble neuf est cher et que, pour le rendre social dans une première phase, il faut payer la différence entre le coût et ce que le locataire - que l'on souhaite favoriser - peut payer.
Le système HLM traditionnel est aujourd'hui inadapté à la société actuelle, nous avons donc besoin de faire des acquisitions de logements existants dont nous pouvons garantir à peu de frais, à long terme, un loyer bas qui aille dans le sens de la politique que nous souhaitons développer.
En refusant ces acquisitions, en acceptant de vendre de tels immeubles à des investisseurs privés, nous nous compliquons la vie dans le domaine du logement social. Nous ne savons pas profiter des opportunités. M. Broennimann a raison, les fondations immobilières de droit public ont acheté un certain nombre d'immeubles anciens, mais ce n'est pas assez. Il y a toujours une tendance idéologico-culturelle qui favorise la construction. A un moment donné, il va falloir faire des calculs. Une politique du logement social pérenne, construite sur l'acquisition d'un certain nombre d'immeubles à rénover ou simplement à exploiter, est moins chère qu'une politique uniquement conçue sur la zone de développement. C'est facile à démontrer et c'est pour cela que je me permets d'intervenir dans ce débat. Nous avons ici une opportunité de - semble-t-il - pérenniser sans aucun problème des logements au centre-ville. Ceci a son importance, car cela permet d'obtenir ce fameux résultat que nous souhaitons tous, c'est-à-dire une certaine mixité sociale à l'échelle des quartiers.
Je vous invite donc à rejeter ce projet de loi, non pas pour embêter la Fondation de valorisation, ni pour faire le procès de qui que ce soit, ni pour faire de la polémique avec M. Kunz, car ce n'est pas du tout cela. Le débat dérape sur ce qui n'est pas important. L'important est de savoir quelle politique sociale du logement nous souhaitons construire ces prochaines années. (Applaudissements.)
La présidente. Monsieur Pagani, vous avez un amendement à nous proposer ?
M. Rémy Pagani (AdG). Je vais le lire avant de vous le transmettre. Mais d'abord - avant que j'oublie - nous demanderons le vote nominal sur cet objet. J'espère qu'il sera appuyé.
J'ai vu un sourire se dessiner chez M. Gros quand on parlait de logement. Il semblait se moquer et dire qu'il y a des logements aujourd'hui, qu'il n'y a pas de problème et que cela va continuer à être des logements. Enfin, il laissait supposer que c'était des logements et qu'on n'allait pas changer. Alors...
La présidente. Veuillez vous exprimer sur l'amendement.
M. Rémy Pagani. Justement, j'y viens Madame la présidente. Je tiens à expliquer que cet immeuble a fait l'objet d'une spéculation pendant les années 80 et que le propriétaire de cet immeuble l'a transformé en PPE - en propriété par étage - pour profiter des congés-vente et de la crise du logement. Il a été impossible de le vendre en PPE car nous avons justement fait passer un projet de loi, soumis au peuple, pour empêcher la vente au petit bonheur la chance et le départ des locataires afin d'en faire un objet spéculatif.
Aujourd'hui, il nous est proposé de laisser cet immeuble en PPE. S'il est acheté par un propriétaire, les locataires risquent d'être expulsés et l'immeuble sera véritablement en PPE. Le caractère populaire de cet immeuble va donc - à terme, si on en permet la vente - disparaître pour laisser la place à des personnes à haut revenu, dans ce quartier qui reste encore populaire. Nous estimons que c'est de cela dont il est question, Monsieur Gros. Nous nous battons pour faire en sorte que cet immeuble reste à loyer abordable. Nous avons tout intérêt à racheter cet immeuble ou à le faire racheter par une fondation ou par l'Etat. C'est en ce sens que je propose cet amendement à l'article 1 «Un crédit de 4 500 000 F est accordé au Conseil d'Etat pour acquérir les feuillets PPE 6455 n° 1 à 27 de la parcelle de base 6455, plan 65 de la commune de Genève, section Cité.»
La présidente. Je demande si l'appel nominal est soutenu ? Il l'est. Je passe la parole à M. le conseiller d'Etat Moutinot.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Les immeubles que la Fondation de valorisation met en vente font aujourd'hui l'objet d'un examen extrêmement attentif de la part du département et des fondations immobilières de droit public, avec l'intervention de la FPLC. Vous savez qu'au début c'était un peu moins organisé que cela. Il y a eu quelques difficultés à trouver une vitesse de croisière dans la transmission des informations, mais, aujourd'hui, je peux vous assurer que l'examen est fait de manière extrêmement rigoureuse.
Le problème politique général dont nous discutons est celui-ci : lorsque l'on examine l'immeuble, on s'aperçoit qu'avec le prix que la Fondation a obtenu on n'arrive pas à le faire entrer dans une catégorie de logement social, parce que ce prix est trop élevé. Cette réalité est connue. Monsieur Hiler, vous avez déposé un projet de loi, et c'est une des solutions qui pourrait permettre de régler ce problème. Pourquoi ? Parce qu'il y a une partie «prix acceptable» pour que cet immeuble puisse raisonnablement être acheté par une entité du secteur du logement social. Il y a une partie «perte» qui est de tout façon couverte par les 2,7 milliards de provision. Mais on ne peut faire supporter la partie qui représente en quelque sorte le surprix ni à la Fondation - elle violerait son but - ni à l'entité de logement qui l'acquiert, car elle n'arrive pas à le faire tourner. Par conséquent, si l'on choisit de sauver un certain nombre de ces immeubles, la seule solution est d'avoir un financement ad hoc. Le projet de loi qui existe à ce sujet n'est à mon sens pas forcément la meilleure solution. Mais il faut impérativement que ce débat ait lieu et de manière approfondie à la commission du logement.
Pourquoi est-ce que le Conseil d'Etat dépose ce projet de loi aujourd'hui et vous invite à l'accepter ? Parce que, précisément, entre le prix auquel on pourrait faire tourner cet immeuble dans une entité de logement social et le prix que les efforts de la Fondation ont permis de trouver auprès de l'extérieur, il existe un «gap» que l'on n'arrive pas à résoudre. Certains ont dit que c'est dommage car il s'agit de logements bon marché - moins chers, avez-vous dit, Monsieur Hiler - que ce qui se construit. Mais pas dans ce cas précis, ce qui fait que j'ai bonne conscience. Car, dans ce cas précis, le loyer est à 4 183 F la pièce par année, alors que nous sortons en neuf, en HBM, à 4 200 F. On est donc pratiquement au niveau du neuf. Nous ne sommes pas dans la situation où il conviendrait absolument de sauver un immeuble où les loyers seraient par hypothèse inférieurs au loyer - par exemple - LDTR.
Nous sommes dans un cas où le loyer lui-même ne justifie pas les nombreux qualificatifs de loyers très avantageux et très sociaux qui ont été évoqués. Si tel avait été le cas, il est probable que nous aurions poursuivi un certain nombre de discussions et essayé de trouver une formule de financement. Mais aujourd'hui, étant dans l'incapacité de faire passer cet immeuble dans la structure de logement social en raison du «gap» sur le prix d'achat et considérant que le prix à la pièce est trop élevé, le Conseil d'Etat vous prie de bien vouloir voter ce projet de loi.
En réponse à M. Pagani sur la question de l'hôtel Carlton: ce dossier délicat fait l'objet des meilleurs efforts. Il est suivi actuellement par la Fondation de valorisation et le Conseil d'Etat. Je ne peux pas encore vous exposer de solution, mais soyez assuré que de nombreux contacts et rencontres ont eu lieu, ainsi que des examens sur ce dossier.
Quant à votre amendement qui en réalité n'est pas amendement mais une demande d'achat de l'immeuble, cela me paraît tout de même un peu difficile de l'accepter dans ces conditions !
Mis aux voix à l'appel nominal, ce projet de loi est adopté en premier débat par 41 oui contre 28 non et 7 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
La présidente. Avant de voter l'amendement de M. Pagani, je passe la parole à M. Gros.
M. Jean-Michel Gros (L). Mesdames et Messieurs les députés, je vous demande de refuser cet amendement pour la simple et bonne raison que la couverture financière n'est pas prévue et nous ne savons pas du tout où nous allons chercher ces 4,5 millions.
M. Rémy Pagani (AdG). J'attendais cette remarque de M. Gros. Toujours est-il que si cet amendement venait à être voté - mais j'imagine que vu la composition actuelle de ce parlement... - bien évidemment, nous trouverions la couverture financière comme il se doit. (Huées.)Je ne veux pas revenir sur le débat budgétaire que nous avons eu en décembre. Nous avons eu l'occasion - mon groupe et notamment les députés Spielmann et Mouhanna - de montrer à quel point nous pouvions trouver les couvertures financières nécessaires. Nous reviendrons sur cet objet si ce parlement décide d'entrer en matière sur notre amendement.
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est rejeté par 41 non contre 34 oui.
Mis aux voix, l'article 1 est adopté, de même que les articles 2 et 3.
Troisième débat
La loi 9462 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix à l'appel nominal, la loi 9462 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 40 oui contre 34 non et 2 abstentions.