République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 21 janvier 2005 à 15h
55e législature - 4e année - 4e session - 21e séance
PL 9335-A
Premier débat
Mme Morgane Gauthier (Ve). Je tiens à relever, comme indiqué en page 3 de l'excellent rapport de M. Hiltpold, que, lors des débats au sein de la commission, nous avons notamment discuté de la problématique de la signature des baux avant la présentation des projets de lois relatifs aux investissements pour l'équipement, le mobilier et le déménagement du CTI. Pour les Verts, il n'est pas question de s'opposer à ce crédit, mais de rappeler à l'ensemble de ce Grand Conseil cette problématique de la signature des baux. La signature de ces derniers ne passe pas par le parlement: c'est le DAEL qui signe les baux, et nous ne faisons ici que voter des projets de lois relatifs à des crédits d'investissement, nous n'avons aucune maîtrise sur la signature des baux. Je tiens simplement à vous rappeler que le bail qui a été signé coûtera 53 millions de francs de location pour les quinze ans à venir. Je mentionne cet élément pour que tout le monde soit au courant de ce qui se passe s'agissant de ce bâtiment.
M. Roger Deneys (S). Le groupe socialiste partage la préoccupation des Verts quant à cette façon de procéder: un bail est signé avant même la construction d'un immeuble - et pour un coût de location qui s'élève tout de même à 3,5 millions de francs par année - alors que l'on aurait pu imaginer construire un bâtiment pour le CTI dans la mesure où un bâtiment administratif pour une activité telle que l'informatique semble utilisable à moyen terme, du moins pour les administrations publiques. C'est la raison pour laquelle le groupe socialiste refusera malheureusement ce crédit - évidemment non parce qu'il s'oppose à l'équipement de ce bâtiment, mais parce qu'il juge inacceptable de prendre connaissance de la location d'un immeuble pour un tel montant plus d'une année après la signature du bail. Ce n'est tout simplement pas possible de fonctionner ainsi ! Je vous rappelle qu'il s'agit d'engagements financiers annuels, qui devraient de toute façon faire partie des budgets des plans financiers. On devrait pouvoir se baser sur la connaissance de ces éléments, notamment parce que l'on aurait pu, à un moment donné, choisir de construire plutôt que de louer un immeuble. Nous sommes donc relativement mécontents, raison pour laquelle nous nous opposerons à ce projet de loi.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pagani. Je ne sais pas ce qui s'est passé techniquement, Monsieur Pagani, mais auparavant votre nom ne figurait pas sur mon tableau.
M. Rémy Pagani (AdG). Je me montrerai tout de même un peu plus dur que mes collègues ne l'ont été lors des précédentes interventions. Mme Gauthier a justement relevé qu'avec ces 53 millions de francs, Mesdames et Messieurs les députés, nous aurions bien évidemment pu avoir un projet de loi de construction. Peut-être aurions-nous trouvé la pilule un peu amère, mais cela aurait permis à l'Etat de se trouver en ce moment dans ses murs, si j'ose dire, et nous aurions pu maîtriser l'ensemble de l'opération. Or, l'option choisie par le DAEL consiste à louer des bâtiments à une société spécialisée dans la mise à disposition de bâtiments administratifs - société qui, bien évidemment, dégage des profits. Si l'on ne saurait contester cette option, toujours est-il que ces 53 millions sont, à notre avis, relativement mal dépensés - sur le long terme du moins, même si, sur le court terme, on peut réaliser une opération visant à mettre très rapidement à disposition des locaux pour le CTI. Mais dans toute cette affaire, dans tout ce dossier, je trouve qu'il y a de quoi réfléchir, et réfléchir sérieusement. Parce qu'on nous a dit, il y a cinq ans... Même si Mme Brunschwig Graf ne m'écoute pas, on nous a dit, il y a cinq ans...
Mme Martine Brunschwig Graf. Si, je vous écoute ! Je ne permettrais pas...
M. Rémy Pagani. Merci, Madame ! Il y a cinq ans, on nous a dit: «Voilà, on va installer le CTI dans le bâtiment des Acacias». Or maintenant, on nous annonce: «Cela ne suffit pas, car le CTI compte 370 nouveaux collaborateurs.» Parce que, au fil des projets que nous votons ici, la structure de l'informatique de l'Etat a bien évidemment grossi - je n'ose pas dire qu'elle a grossi comme un boeuf, mais elle a grossi - et que les bâtiments prévus aux Acacias, qui devaient regrouper toutes les activités du CTI, n'ont bien évidemment pas suffi.
Je vous signale tout de même un léger problème: nous votons mois après mois un certain nombre de budgets pour le CTI, mais jamais - ou à de très rares occasions - je n'ai vu le CTI suivre les procédures AIMP de manière à permettre à l'ensemble des entreprises de l'informatique de satisfaire aux procédures AIMP. Je me suis renseigné, et l'on m'a tout d'un coup répondu: «Ah, mais le CTI fait en sorte de ne pas se soumettre aux procédures AIMP. Il se place en dessous du seuil à partir duquel l'AIMP entre en vigueur: il fait des petits paquets, de manière, précisément, à pouvoir choisir ses fournisseurs.» J'attends des explications quant à cette procédure quelque peu particulière - je ne conteste pas que cette procédure puisse parfois être justifiée, mais je dois reconnaître que je la trouve pour le moins particulière. Ceci ajouté à cela - soit au dossier que nous traitons actuellement - m'incite à me montrer un peu plus dur que mes préopinants quant aux critiques relatives à ce dossier, et je partage l'insatisfaction sur le fond exprimée par M. Deneys.
Mme Morgane Gauthier (Ve). Je souhaite peut-être apporter une précision. Mon intervention ne visait pas le fonctionnement du CTI, et il faut à cet égard rappeler un élément: le CTI est contrôlé de très près par la sous-commission informatique des finances. D'après les observations que nous avons faites, les procédures ont toujours été respectées. Même si nous avons certaines remarques à formuler quant aux options prises, ces remarques ne concernent pas le respect des procédures - du moins, pas au sein de cette sous-commission. Peut-être obtiendra-t-on des éclaircissements de la part de Mme la présidente, mais le CTI est en tout cas largement et régulièrement suivi par cette sous-commission informatique; il y a très peu de services qui sont suivis d'aussi près par une commission parlementaire. Voilà pour ma première remarque.
Deuxième remarque: avec une somme de 53 millions, l'Etat pourrait effectivement devenir le propriétaire d'un bâtiment. Peut-être M. Moutinot nous expliquera-t-il pourquoi il a fait ce choix - et je souhaite qu'il l'explique à ce parlement - mais, avec 53 millions sur quinze ans, peut-être aurait-on pu trouver des surfaces moins chères. Toute la question est de savoir quelle place on veut donner à l'informatique au sein de l'Etat. Il est vrai qu'il s'agit là d'une discussion que l'on a régulièrement, mais, actuellement, il est impératif de disposer d'outils performants pour gérer l'Etat - cela, tout le monde le reconnaît et tout le monde le demande - et l'informatique fait partie de ces outils. Dès lors, la critique que je formule ne va pas à l'encontre du CTI, bien au contraire, mais elle porte sur la question de la gérance des locaux loués par l'Etat: il s'agit de savoir quels sont les ordres de priorité, comment se déroule la gestion des bâtiments et pourquoi des locaux aussi chers ont été choisis pour loger cette structure.
Nous, les Verts, accepterons ce crédit car, le bail ayant déjà été signé, on ne peut pas le dénoncer maintenant - et, puisque ces bâtiments sont là, il faut bien les équiper ! On ne va pas payer une location et ne pas acheter les meubles qui se trouvent à l'intérieur du bâtiment ! Ce mobilier est nécessaire pour disposer de places de travail adéquates ! Il est trop tard, mais, la prochaine fois, unissons-nous en demandant fermement que la procédure ne se déroule pas de la même manière et que l'on ne se trouve pas avec deux locaux loués sans meuble à l'intérieur ! Votons le crédit d'investissement pour ces meubles mais, la prochaine fois, efforçons-nous de mener un travail plus en amont !
M. Roger Deneys (S). Pour les socialistes, il est certes assez ennuyeux de refuser un tel crédit d'équipement, car nous ne sommes absolument pas fâchés avec le CTI - ni avec sa politique, ni avec son fonctionnement. Le problème, c'est que le Conseil d'Etat a signé un bail de quinze ans plus d'une année avant que ces locaux ne soient occupés. Cela pose un problème ! Mais il est vrai qu'il serait assez ennuyeux de voir cet immeuble loué par l'Etat et complètement vide...
L'une des questions sous-jacentes à ce problème, c'est de savoir s'il y aura d'autres cas similaires - et à quel prix. Parce que l'un des constats faits par la majorité de la commission des travaux - enfin, faits, je pense, par quasiment tous les commissaires - c'est que nous nous trouvons souvent au bout de la chaîne et que nous ne disposons pas d'un véritable pouvoir de revenir en arrière. Si le bâtiment est déjà construit et le bail déjà signé, il est évident qu'on ne peut pas faire grand-chose ! C'est, je pense, aussi une question de respect à l'égard de ce parlement. Or, dans le présent cas, il me semble qu'en une année et demie, il aurait été possible d'aviser les membres de la commission des travaux ou les membres de la commission des finances de la signature de ce bail. C'est la raison pour laquelle une partie d'entre nous ne refusera peut-être pas ce projet de loi, mais s'abstiendra. Il est tout de même dommage que les choses se déroulent de cette manière.
M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur. Mon intervention vise à enjoindre le groupe socialiste et l'Alliance de gauche à voter favorablement ce projet de loi. Elle vise également à rappeler que le bail est déjà signé et que, dans la mesure où ce bail est signé, notre marge de manoeuvre est malheureusement très faible. Il me semble que, pour l'intérêt général, il est pire de refuser ce projet de loi que de l'accepter. C'est là le premier point que je voulais évoquer.
Le deuxième point - et je l'ai mentionné dans mon rapport - concerne toute la problématique de la signature des baux. Il faut se poser la question d'une façon générale, à savoir comment faire pour que la signature des baux soit en adéquation avec le travail parlementaire sans pour autant que le parlement s'en trouve paralysé - car je l'imagine mal devoir se prononcer à chaque signature de bail que le Conseil d'Etat devra conclure. Il s'agit d'une problématique générale qui mérite un large débat, mais ce débat doit avoir lieu en dehors de ce projet de loi spécifique - et il ne faudrait pas que notre parlement soit pris d'un accès de mauvaise humeur contre le présent projet de loi.
Quant au choix qui a dû être fait par le Conseil d'Etat entre l'option location et l'option construction, cela va nous être exposé très clairement. Comme cela nous a été précisé en commission - non de façon directe, je vous l'accorde, mais cela nous a tout de même été signalé - l'option choisie était la plus intéressante sur le plan financier.
Mme Martine Brunschwig Graf, présidente du Conseil d'Etat. Je répondrai simplement aux habituelles questions de M. Pagani...
M. Rémy Pagani. Aux questions imbéciles !
Mme Martine Brunschwig Graf. Non, je n'utilise jamais d'adjectifs pour vous qualifier, Monsieur Pagani ! (Manifestation dans la salle.)Ceci pour une raison très simple: c'est toujours en plénière que l'on découvre des questions et des accusations auxquelles on ne peut répondre faute de disposer d'exemples ou d'avoir pu investiguer si un dérapage devait s'être très malheureusement produit. Cela me permet, à l'évidence, d'affirmer les propos suivants: à ma connaissance et comme l'a déclaré tout à l'heure Mme Gauthier, le CTI respecte les procédures AIMP, et il n'est pas question pour cet organisme de diviser de manière artificielle des lots qui ne devraient pas l'être. Le CTI ne craint pas les procédures AIMP; pourquoi les craindrait-il, d'ailleurs ? J'aimerais également souligner que, compte tenu des délais extrêmement longs au terme desquels sont votés les projets, on a tout loisir d'explorer de nombreuses sortes de procédures préliminaires. Je tiens enfin à faire remarquer que le CTI n'a jamais affirmé, à aucun moment - et je l'ai indiqué à la commission des travaux, devant laquelle j'ai été invitée à me prononcer - qu'il mettrait tout son personnel dans les locaux des Acacias, et cela pour une raison très simple: les locaux des Acacias étaient divisés en deux. Une partie était, certes, destinée au CTI, mais une très grande partie l'était pour l'Office cantonal de la statistique. Il s'agissait d'héberger l'exploitation du CTI. Or nous parlons aujourd'hui de la division développement du CTI - j'entends par là les équipes de développement du CTI. Il n'y a donc rien de surprenant au fait de disposer de locaux pour le CTI. C'est l'aboutissement d'une réforme importante.
Comme l'a par ailleurs souligné Mme Gauthier, je ne connais aucun service de l'Etat qui soit, mois après mois, suivi avec davantage d'attention par une sous-commission que le CTI. Je tiens à exprimer ma reconnaissance à cette sous-commission pour ce suivi; il s'agit d'un bon système de contrôle. Je tiens cependant également à faire savoir que je ne peux accepter que l'on lance en plénière des accusations. Je vous répéterai ce que je vous dis à chaque fois, Monsieur Pagani: si vous avez des soucis quant à certains procédés et si vous avez des exemples, vous pouvez m'en faire part en tout temps, car je fais toujours tout contrôler. Jusqu'à présent, vous n'avez pas cru bon de m'informer d'éventuels dérapages. Vous êtes invité à le faire si vous en avez connaissance ! (Applaudissements.)
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il vous a été exposé pour quelle raison le CTI avait besoin de surfaces supplémentaires. On me demande maintenant pourquoi ces surfaces ont été choisies dans cet immeuble-là, à cet endroit-là, selon l'option location et à ce prix-là. La réponse est très simple: l'élément No 1, c'est le délai. Si, au moment où la demande a été formulée, nous avions décidé de construire un immeuble - ce qui, je vous l'accorde, aurait été économiquement plus rationnel - ce dernier n'aurait jamais pu être prêt à temps pour répondre aux besoins légitimes du CTI tels que vous les définissez vous-mêmes. S'agissant du prix, il est vrai que si l'on multiplie le loyer par dix ans on parvient à un chiffre assez monstrueux. Cependant, si l'on prend en compte le prix au mètre carré en sachant qu'il s'élève à 420 F pour du neuf équipé, vous conviendrez, en vous renseignant ou en comparant les prix actuellement offerts, que ce montant a été très correctement négocié et conclu par mon département.
Plus généralement, Mesdames et Messieurs les députés, je me réjouis de discuter avec vous, à la commission des finances, de la problématique des locations de l'Etat. Si l'on veut réduire les locations de l'Etat, cela signifie forcément qu'il faut admettre la nécessité de construire un certain nombre de bâtiments. Or, la difficulté réside dans le fait que l'enveloppe des investissements est faible et que nous avons systématiquement privilégié les bâtiments scolaires et hospitaliers ainsi que les infrastructures de transports plutôt que les besoins propres de l'administration centrale. Mais il est vrai que, du point de vue économique, ce n'est pas une bonne solution - en tout cas pas à long terme - que de privilégier une location par rapport à une propriété. Je répondrai donc aux questions posées par M. le député Gautier aussi bien sur les locations que sur les droits de superficie en adressant ma réponse à la commission des finances et en priant cette dernière, si elle souhaite m'entendre à ce propos, de me convoquer à sa meilleure convenance.
En ce qui concerne l'amendement de M. Catelain - amendement que l'on me distribue pour la troisième fois, ce qui représente un léger gaspillage de papier...
M. Gilbert Catelain. C'est un autre amendement !
M. Laurent Moutinot. C'est un autre amendement ?! Vous l'avez déjà déposé, cet amendement, Monsieur Catelain ! Selon la mesure proposée par cet amendement, le financement de ce crédit n'entraînera aucun emprunt supplémentaire, ce financement étant simplement assuré dans le volume des investissements «nets-nets». Mais l'on ne peut déterminer aujourd'hui quel est l'emprunt nécessaire en fonction du degré d'autofinancement des investissements. L'argent étant parfaitement fongible, on ne peut en outre pas déterminer projet par projet quels sont, le cas échéant, ceux qui sont financés par la capacité d'autofinancement propre à l'Etat et ceux financés par un emprunt extérieur. Je ne pense donc pas qu'un tel amendement puisse avoir le moindre sens ni l'impact que vous souhaitez. Cet impact consiste en gros, si j'ai bien compris, à ne pas investir tant que l'Etat n'est pas en autofinancement. Voilà la mesure que vous tentez d'instaurer ! Voilà ce que veut M. Catelain. Mais cette mesure signifie purement et simplement la fin des investissements - ou leur réduction dans des proportions telles que qu'elle n'est pas soutenable - et, surtout, elle n'est pas conforme au plan financier quadriennal !
Mise aux voix, la loi 9335 est adoptée en premier débat par 53 oui contre 4 non et 4 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que les articles 1 et 2.
La présidente. Nous sommes saisis, à l'article 3, d'un amendement qui a été déposé sur vos tables. Monsieur Catelain, souhaitez-vous ajouter un commentaire à votre amendement ?
M. Gilbert Catelain (UDC). Le groupe UDC ne s'est pas encore prononcé sur le fond de ce projet de loi. Contrairement à ce qui a été dit dans cette enceinte, le groupe UDC ne conteste pas le bien-fondé de ce projet de loi. Compte tenu des choix et des besoins de l'administration - notamment de ceux du CTI - le prix de location est certes relativement élevé, puisque l'Etat doit avoir les moyens de se payer des locaux à 420 F par mois. Je vous signale par exemple que l'administration fédérale ne louerait pas de telles surfaces sur la place de Genève, puisqu'elle refuse de louer des locaux pour un montant supérieur à 300 F par mois: elle se débrouille pour trouver des locaux dont la location se monte entre 200 F et 290 F par mois...
Une voix. Par mètre carré !
M. Gilbert Catelain. Par mètre carré, pardon ! Je reconnais néanmoins que la surface louée est raisonnable par rapport au nombre de places de travail qui seront équipées puisque l'on arrive, grosso modo, à 25 mètres carrés par place de travail - ce qui ne me paraît pas excessif. L'équipement de ces places de travail ne me semble pas excessif non plus: 3 000 F par place de travail, mobilier neuf, cela me paraît raisonnable.
Ce qui nous dérange - et, sur ce point, je suis en désaccord avec M. Moutinot - c'est la question du financement. A chaque fois que l'on dépose cet amendement, on nous répond: «De toute manière, on y arrivera grosso modo dans le cadre du budget annuel de l'Etat». Mais lorsqu'on nous présente les comptes l'année suivante, eh bien, on s'aperçoit que l'on se trouve à côté de la cible puisque, dans le cadre de l'exercice 2003, on a connu un sacré dépassement au niveau des investissements ! (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)Il me semble que pour des projets de cette importance - il ne s'agit ni de la traversée de la Rade ni de la traversée de Vésenaz, mais d'un projet de petite envergure - on devrait disposer de la ressource financière nécessaire dans le cadre du budget de l'Etat sans devoir prévoir un éventuel recours à l'emprunt pour le financement.
Au vu du vote, hier, par les partis de l'Entente d'une motion prévoyant que l'Etat nous présente un budget 2006 conforme au plan quadriennal, au vu de psychodrame que l'on a vécu lors des deux dernières années, au vu de la volonté des partis de l'Entente d'assainir les finances de l'Etat et d'en réduire la dette, il me semble que, pour ce type de projet, c'est la simple logique que de voter cet amendement. Je suis convaincu que, même si vous votez cet amendement, le CTI se fera, car le Conseil d'Etat fixera des priorités et trouvera les ressources financières nécessaires dans le cadre du budget des investissements qui lui a été alloué par notre parlement l'an dernier.
M. Pierre Weiss (L). Je ne souhaite pas me prononcer sur le fond de l'amendement de notre collègue Catelain, mais sur la procédure. Je trouve étonnant que l'on dépose des amendements dans un débat dit d'extraits. Il aurait été préférable que le représentant de l'UDC fût présent en commission et que sa proposition d'amendement fût enregistrée à ce moment. A consulter le rapport parfaitement établi par notre collègue Hiltpold, l'absence de l'UDC est attestée. Je considère par conséquent que, même si l'on partage l'avis de l'auteur de cet amendement, on peut au mieux s'abstenir et que, pour les autres, ils pourront s'y opposer.
M. Roger Deneys (S). Nous refuserons bien entendu cet amendement, notamment pour la raison évoquée par M. Weiss - avec lequel, une fois n'est pas coutume, je suis d'accord. Il n'est pas possible de proposer des amendements pareils et de discuter en plénière des conséquences, sur le fonctionnement général des finances publiques, du financement des crédits d'investissement dans les investissements «nets-nets» plutôt que par le recours à l'emprunt ! Ce n'est pas ici que de telles décisions doivent être prises, mais en commission. Et pour prendre de telles décisions, cela mériterait peut-être des auditions spécifiques ! Ce n'est guère sérieux, Monsieur Catelain !
M. Rémy Pagani (AdG). M. Catelain introduit un débat qui n'est pas inintéressant. Ce débat aurait cependant dû avoir lieu en commission - cela a été le cas à la commission des travaux. Etant donné la nature du débat, j'en profite pour apporter ma pierre, car j'estime que cette question mérite une discussion sérieuse - comme à la commission des travaux. Au niveau des investissements, il existe effectivement un problème, mais ce dernier est radicalement différent de celui évoqué par M. Catelain: il réside dans le fait que notre République n'investit malheureusement pas suffisamment dans la construction. Le «socle» d'investissements est resté quasiment stable durant ces vingt dernières années et, vous le savez comme moi, l'inflation a bien évidemment entamé ces investissements. De fait, les investissements ont donc diminué. Il s'agit d'une grave erreur, car ce qui fonde encore de manière générale le budget de l'Etat, la fortune de l'Etat, ce sont bien les infrastructures ! Et si l'Etat n'entretient pas son infrastructure, les déficits s'accroîtront de manière très importante, puisqu'ils ne seront pas consolidés dans une infrastructure ayant encore de la valeur. Alors, à l'inverse de M. Catelain, je pense, tout comme les autres membres de la commission des travaux, que nous devrions fournir un sérieux effort en matière d'investissements, notamment pour rénover et pour entretenir, de manière régulière et à raison de 3 %, l'ensemble des biens de l'Etat afin de pouvoir les valoriser. Or ce que nous propose M. Catelain, c'est de mettre à ces investissements un frein encore plus grand que ne le fait l'inflation... C'est complètement anti-économique ! Excusez-moi de vous le dire, Monsieur Catelain, mais vous avez une vision assez étriquée de ce qu'est l'Etat, des investissements nécessaires pour entretenir son patrimoine notamment et pour faire tourner un minimum l'économie de ce canton !
M. Bernard Lescaze (R). Même si l'on se trouve dans les extraits, la question soulevée par M. le député Catelain mérite que l'on s'y arrête un moment, car il s'agit d'un point fort important. C'est une question sur laquelle, alors que le Grand Conseil aurait par exemple pu en discuter plus longuement fin décembre, au moment du vote du budget d'investissement, nous sommes malheureusement passés comme chat sur braise: il n'y a pas eu de discussion sur les investissements. De ce point de vue, je ne peux absolument pas être d'accord avec le préopinant socialiste.
Une double question se pose. D'une part, il s'agit de savoir si, dans le cas particulier, les affirmations de M. Catelain sont exactes car, en réalité, en votant des investissements, nous votons une enveloppe et, si cela se trouve toujours dans le cadre de l'enveloppe, il appartient bel et bien au Conseil d'Etat de procéder aux arbitrages nécessaires. Dès lors, nous pouvons voter le projet de loi tel quel parce que, votre souci, le Conseil d'Etat y répondra.
En revanche, s'il s'agit d'une augmentation de l'enveloppe votée, eh bien, la question mérite d'être posée, et ce d'autant plus que - et je ne suis, sur ce point, pas tout à fait d'accord avec le préopinant de l'Alliance de gauche - notre Etat doit bien évidemment continuer à investir, mais le volume des investissements doit rester en adéquation avec les charges financières actuellement générées par ces investissements.
Je rappellerai aux députés qui ont la mémoire courte que c'est précisément parce que l'Etat de Genève a trop investi dans les années 80 que, la mauvaise conjoncture aidant, il s'est trouvé dans une impasse financière dans les années 90. Alors, même s'il faut continuer à investir, ne venez pas nous reprocher d'être prudents de manière à éviter que, dans quelques années, le trou se recreuse comme dans les années 93 à 98 ! Le canton de Genève compte 430 000 habitants; or, à l'heure actuelle, le budget d'investissement de l'Etat de Genève est égal à celui de Zurich, qui compte plus d'un million d'habitants ! Même si la répartition des charges entre cantons et communes n'est pas toujours exactement la même, je ne pense pas que le canton de Zurich, ce soit la brousse et que l'on y vive beaucoup plus mal qu'à Genève... Il y a un juste équilibre à respecter, équilibre auquel il faut se montrer très attentif. De ce point de vue, l'interrogation de M. Catelain est parfaitement légitime.
En conclusion et sans ironie, je me réjouis de voir - ou, plutôt, d'entendre - le Conseil d'Etat confirmer que les craintes de M. Catelain sont vaines et que ces crédits s'inscrivent bel et bien dans l'enveloppe accordée au Conseil d'Etat au mois de décembre dernier !
La présidente. Le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants sur cet amendement. Sont encore inscrits M. le rapporteur Hiltpold ainsi que M. le conseiller d'Etat Moutinot.
M. Hugues Hiltpold (R), rapporteur. S'agissant de la forme, je m'associe à mes préopinants pour déplorer le dépôt en plénière de cet amendement - ou de ces amendements, puisqu'il s'agit d'un même texte, mais concernant d'autres projets du même type. Quand bien même la question a tout son intérêt, je trouve dommage que ce débat ait lieu en plénière et que ce point n'ait jamais été directement soulevé en commission.
Quant au fond, je demande simplement que nous en restions à la formulation de l'article tel qu'il ressort des travaux de la commission - ce qui n'empêchera pas, pour un autre objet, de débattre du fond de cette question en commission.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Je vous confirme, au nom du Conseil d'Etat, que ce crédit d'investissement entre dans l'enveloppe des investissements «nets-nets» telle qu'elle a été votée par votre Grand Conseil et que, le cas échéant, il appartiendra au Conseil d'Etat, en fonction du nombre d'objets votés, de déterminer ceux qui peuvent être lancés à tel ou tel moment, de manière que cette enveloppe soit respectée. J'attire une fois encore votre attention sur le fait que l'amendement de M. Catelain met à néant la procédure budgétaire et le plan financier quadriennal en ne faisant dépendre le montant des investissements que de la capacité d'autofinancement. Il s'agit d'une philosophie totalement différente de celle que nous avons suivie jusqu'à présent, et je ne pense pas que cela soit raisonnable si l'on veut un peu de cohérence et de rationalité dans les investissements de l'Etat ! (Applaudissements.)
La présidente. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Je vous rappelle que nous sommes en deuxième débat. Je mets aux voix l'amendement de M. Catelain. Il consiste à modifier comme suit l'article 3: «Le financement de ce crédit n'impliquera aucun emprunt supplémentaire et est assuré dans le cadre du volume d'investissements «nets-nets» fixé par le Conseil d'Etat, dont les charges financières en intérêts et amortissement sont couvertes par les recettes fiscales prévues au budget».
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 47 non contre 7 oui et 3 abstentions.
Mis aux voix, l'article 3 est adopté, de même que les articles 4 et 5.
Troisième débat
La loi 9335 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 9335 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 40 oui contre 3 non et 19 abstentions.