République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 24 septembre 2004 à 17h20
55e législature - 3e année - 11e session - 68e séance
PL 9134-A
Premier débat
Le président. Monsieur le rapporteur de majorité, voulez-vous ajouter quelque chose à votre rapport ?
M. Robert Iselin (UDC), rapporteur de majorité. Je n'ai pas grand-chose à ajouter, Monsieur le président. La question qui doit être tranchée par ce parlement me semble mineure. Elle est plus psychologique qu'autre chose. Il s'agit de savoir si les assurés doivent contribuer, même symboliquement, ou pas, à leur abonnement TPG. Par tradition - la tradition qui est la mienne est un peu sévère - je pense qu'ils le doivent ! J'ai la même réaction que tout à l'heure, mais ce n'est apparemment plus compris...
Je voudrais tout de même signaler que la majorité de la commission a voté pour le maintien de cette contribution.
Le président. Merci, Monsieur le rapporteur de majorité. Madame la rapporteure de minorité... J'ai l'impression, à vous voir, que vous souhaitez vous exprimer, mais, pour cela, il faudrait que vous appuyiez sur le bouton de demande de parole. Parce que, si vous ne demandez pas la parole, je ne peux pas deviner que vous voulez vous exprimer. Vous avez la parole, Madame.
Mme Jocelyne Haller (AdG), rapporteuse de minorité. M. Iselin vient de parler de question mineure, plus psychologique qu'autre chose. Je crois que c'est surtout une question de principe.
Tout est relatif: on le sait. Mais ce sont les petits ruisseaux qui font les grandes rivières. Le projet de loi 9134 nous conte à sa manière l'histoire des petits ruisseaux.
S'agissant de l'article 17, alinéa 1, qui est le seul à avoir fait l'objet des réserves des députés de l'Alliance de gauche, il ne s'agit pas de ruisseaux, mais, plutôt, de vaisseaux capillaires, compte tenu de l'importance de la somme en jeu. Je le répète, c'est vraiment une question de principe. Parce que, finalement, cette modeste contribution représente un «coin enfoncé» dans une prestation que l'on croyait jusqu'ici inattaquable, intouchable: le revenu minimum d'aide sociale destiné aux personnes âgées, veuves, orphelins et invalides !
Une fois encore, pour que les choses soient très claires, nous ne contestons pas que, si l'Etat dépense de l'argent pour une prestation superflue, c'est un non-sens qu'il faut corriger. Nous sommes d'accord sur ce point. En revanche, c'est déplorable qu'il n'imagine pas d'autre moyen pour veiller au bien-fondé d'une prestation que de «taxer une thune» au passage ! Cela est d'autant plus discutable que le message donné se traduit ainsi: on peut retrancher 5 F par mois sur le revenu minimum cantonal d'aide sociale... Ce qui constitue, vous en conviendrez, si on peut l'abaisser encore, une notion paradoxale du minimum. Cela d'autant plus que cette modique réduction s'ajoutera à la part de cotisation d'assurance-maladie qui restera à charge des assurés, pour peu qu'ils soient affiliés à une caisse qui pratique des cotisations plus élevées que la prime moyenne cantonale parce qu'ils sont las de changer sempiternellement de caisse.
On le constate donc, ce n'est pas la première fois que l'on rogne sur les plus faibles revenus - et ce n'est malheureusement pas la dernière. Et c'est bien ça qui nous inquiète. Certaines sombres perspectives, comme l'application des normes CSIAS - normes de la Conférence suisse des institutions d'action sociale - en matière d'assistance publique en témoignent. Il s'agit donc aujourd'hui, Mesdames et Messieurs les députés, de déterminer si vous entendez faire des économies sur le dos des plus faibles ou si vous estimez que le problème des finances de l'Etat doit être considéré plus globalement sous l'angle de ses recettes, à la lumière de son organisation et en fonction de la pertinence de ses dépenses.
Aussi, parce qu'il est possible de repenser l'organisation, sans attenter à la prestation, je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à accepter l'amendement que nous avons proposé.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Vous l'aurez compris, le seul différend à propos de ce projet de loi porte sur le fait d'accorder ou non la gratuité de l'abonnement des TPG aux bénéficiaires des prestations OCPA.
On nous a bien expliqué que l'intention du DASS, en proposant cette mesure, n'était pas de renflouer les caisses publiques mais, plutôt, une volonté de responsabiliser ces bénéficiaires. A mon avis, l'amendement de l'Alliance de gauche atteint tout à fait cet objectif. Il leur permet de se responsabiliser, d'analyser leurs besoins réels et d'obtenir un abonnement TPG totalement gratuit s'ils le demandent formellement.
Nous vous suggérons d'accepter ce projet de loi avec l'amendement de l'Alliance de gauche.
M. Renaud Gautier (L). Il faut savoir de quoi l'on parle... On peut effectivement toujours voir le verre à moitié vide ou à moitié plein, mais, en l'occurrence, je ne suis pas convaincu que les transports sont gratuits... Ils ont un coût, et il faut bien que quelqu'un paie ! Comme vient de le dire mon honorable collègue d'en face, offrir un abonnement gratuit, c'est une demi-vérité ! Quelqu'un doit bien payer cette prestation ! Il faut donc déterminer si on fait participer ceux qui, dans une certaine mesure, profitent déjà d'un privilège, ou si l'on «vend», entre guillemets, l'idée que ceux-ci ont droit à une prestation gratuite, qui, en fait, n'est pas gratuite...
Il m'apparaît que la position du département et du projet de loi est juste, dans le sens que ce qui est gratuit, comme tout le monde le sait, n'a pas de valeur. Alors que le fait de demander une contribution à ces personnes, dans une mesure extraordinairement modeste - il suffit de voir quelle est la somme en question par rapport au prix réel de la prestation ! - permet de les responsabiliser. Et, à mon sens, cela n'autorise pas à prétendre qu'on diminuerait ou qu'on supprimerait la gratuité d'une prestation. Cela participe de mesures nécessaires pour que chacun d'entre nous prenne conscience, dans la mesure de ses moyens, du coût des prestations qui sont offertes par la communauté aux plus défavorisés d'entre nous.
Mme Jocelyne Haller (AdG), rapporteuse de minorité. M. Gautier parle de prestation gratuite... Il ne s'agit pas d'offrir gratuitement une prestation: il s'agit simplement, dans le cadre de prestations d'aide sociale, d'offrir la prestation TPG - qui en est une des composantes - qui était jusqu'ici totalement allouée aux bénéficiaires OCPA ! Aujourd'hui, le département se rend compte qu'un certain nombre de bénéficiaires n'ont pas besoin de cet abonnement, délivré automatiquement, et il entend corriger cette situation en demandant une contribution à ces personnes.
Nous partons du principe que cette contribution est mesquine et qu'elle donne un signal malvenu en l'occurrence. Nous convenons que si les personnes n'utilisent pas leur abonnement il est inutile que l'Etat leur en paie un, mais, en revanche, nous suggérons qu'elles puissent en faire la demande. Le simple fait d'avoir à le demander constitue, à notre avis, un frein suffisant pour que cette prestation soit allouée avec pertinence. C'est le fond de l'amendement.
Je reviens sur l'expression «prestation gratuite», utilisée par M. Gautier. Il n'y a pas de gratuité dans l'aide sociale: quand les gens ont besoin d'une aide sociale et remplissent les conditions pour la recevoir, on est dans le cadre d'une prestation de l'Etat !
Pour ce qui est de la responsabilisation, je voudrais dire ceci. Jusqu'à maintenant, les bénéficiaires ont reçu leur abonnement en raison de l'automaticité de cette mesure, mais on ne peut pas dire qu'ils se sont comportés de manière déraisonnable. Il convient de corriger cet état de fait, mais il ne s'agit pas de responsabiliser ces personnes: elles n'ont pas de lacune à ce niveau ! Il faut simplement corriger le côté automatique de cette prestation pour la rendre pertinente.
Enfin, j'insiste sur le signal qui est donné... Demander une contribution de 5 F, c'est prendre là où il n'y a pas beaucoup d'argent. Alors, si vous estimez qu'il faut de l'argent, allez le prendre là où il y en a ! N'allez pas le prendre là où il y en a peu, surtout au moment où on se prépare à entamer d'autres prestations sociales !
M. Gilbert Catelain (UDC). Dans le cadre de ce débat de modification de loi, je voulais demander à la rapporteuse de minorité de m'éclairer sur le montant de la prestation OCPA que reçoit un pensionné, à savoir son revenu et les «avantages», entre guillemets, non matériels que représentent l'assurance-maladie, le loyer, etc., pour avoir une idée de son revenu global. Cela nous permettrait de déterminer si cette contribution de 60 F est excessive ou pas.
M. Pierre Weiss (L). Madame Haller, ce qui distingue votre opinion de la mienne sur cette affaire, c'est probablement la modalité de la responsabilisation et non pas l'existence du principe de responsabilisation. Vous venez de nous dire - et je crois que vous avez tout à fait raison - qu'il convenait que le bénéficiaire fasse une demande formelle pour obtenir un abonnement TPG. Mais le projet de loi, tel qu'il vous est soumis, propose que cette responsabilisation soit plus forte, puisqu'il suggère de lui demander une contribution de 5 F. Ce sont deux conceptions de la responsabilisation.
Très concrètement, je vous dirai que, lorsqu'on a la possibilité de s'abonner à quelque chose de gratuit, on le fait, même si on n'en a pas besoin, uniquement parce qu'il suffit de remplir un questionnaire. Cela peut être vrai pour un journal que l'on reçoit et que l'on ne lit pas, parce qu'il ne correspond pas à nos idées, ou n'importe quelle autre raison. C'est donc tout à fait inutile.
Pour éviter qu'un abonnement TPG soit octroyé alors qu'il ne sera pas utilisé, le département propose - me semble-t-il avec un grand pragmatisme et en prenant en considération la situation financière évidemment très difficile des personnes concernées - une contribution de 5 F. On pourrait, à la limite, discuter du montant de cette contribution... Ne serait-elle que d'un franc, elle contribuerait à rendre la démarche différente de la simple demande écrite, qui est votre conception de la responsabilisation.
C'est la raison pour laquelle, Madame la députée, je crois qu'il est préférable de voter le projet de loi tel qu'issu des travaux de commission, sans l'amendement que vous proposez.
Mme Jocelyne Haller (AdG), rapporteuse de minorité. Je suis relativement étonnée... Que des personnes fassent une démarche pour obtenir quelque chose dont ils n'ont pas besoin, simplement parce que c'est gratuit et qu'il faut en profiter, c'est petit !
Cela mis à part, s'agissant des personnes âgées, veuves, orphelins et invalides, je rappelle quand même que l'Etat a pris la décision de leur allouer des prestations parce qu'il estimait qu'ils en avaient besoin, au même titre qu'il a défini des barèmes permettant de déterminer un montant correspondant à ce qu'il faut pour vivre, pour subvenir à leurs besoins vitaux et sociaux. Je souligne cette nuance à laquelle M. Unger nous a sensibilisés à maintes reprises, notamment pour faire la distinction entre prestations d'assistance et prestations d'aide sociale. Je n'ai pas sous la main les chiffres précis de ces barèmes - d'autant que le calcul OCPA est relativement complexe - mais je pense que le département ne verra aucun inconvénient à vous les remettre. Il faut vraiment retenir le principe: il s'agit d'une couverture des besoins vitaux et sociaux d'une personne. Et l'on verra, lorsqu'on comparera ces revenus, que, finalement, ils ne sont pas aussi mirobolants que la question de M. Catelain aurait pu le laisser supposer...
Il est évident, et c'est comme cela que j'avais intitulé mon rapport de minorité, «Finalement, qu'est-ce qu'une thune ?», qu'une thune, ce n'est pas grand-chose, si on réfléchit bien ! Mais une thune par mois, c'est 60 F par an ! Ce qui représente - on l'a vu - déjà un certain pourcentage de l'abonnement annuel: 13,5% ! C'est aussi 10% de l'indexation de la rente AVS !
Cela vous paraît peut-être minable, comme somme... Alors je vais aborder le problème par un autre bout. M. Kunz disait tout à l'heure, à propos des 10 millions de perte consentis pour les immeubles de la Fondation de valorisation, qu'il fallait arrêter de «chipoter». Et la perte pour la Banque cantonale de Genève s'élève à 2,7 milliards ! Eh bien, les personnes dont le quotidien consiste à assurer leurs besoins minimums vitaux et sociaux, chipotent, en effet, car 5 F, ce n'est pas rien ! Je chipote aussi, mais je le revendique, parce que 60 F, c'est une somme considérable par rapport à leur revenu ! Nous pourrions en parler, mais ce n'est pas l'objet aujourd'hui...
Aujourd'hui, il est question de déduire 60 F par an du revenu des bénéficiaires OCPA ! C'est un choix... Nous, nous vous proposons un amendement qui corrige l'effet néfaste de l'automatisme et qui fait en sorte que l'abonnement TPG ne soit octroyé qu'à ceux qui le demandent. Pour cela, il faut introduire la clause de la demande, mais pas celle de la contribution. Si vous acceptez de demander une contribution de 5 F à ces personnes en votant ce projet, sachez que vous donnerez un signal politique très clair: que vous êtes prêts à vous attaquer aux revenus les plus faibles ! Ce ne sera pas interprété comme étant une sombre interprétation des motivations qui pousseraient les gens à demander quelque chose dont ils n'auraient pas besoin parce que c'est gratuit... Je le répète, vous donnerez le signal politique très clair que vous vous attaquez aux revenus les plus faibles ! Il me semble que c'est un élément très important, au même titre qu'il faut comprendre que ceci est un premier signal, et qu'on peut se demander s'il n'y en aura pas d'autres !
Le président. Merci, Madame la rapporteuse de minorité. Mesdames et Messieurs les députés, le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont inscrits M. le député Souhail Mouhanna, M. le député Gilbert Catelain, Mme la députée Michèle Künzler et, bien évidemment, comme il se doit, M. le conseiller d'Etat, Pierre-François Unger, qui aura la parole en dernier. Monsieur le député, Souhail Mouhanna, vous avez la parole.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Naturellement, lorsqu'il s'agit de faire des cadeaux à ceux qui ont des millions cela ne porte pas sur 5 ou 10 F, mais sur des pourcentages importants - 12% - plus des abattements sur les capitaux, sur les grandes fortunes, etc. Le cadeau qui a été fait aux millionnaires avec l'initiative libérale représente 80 000 F au bas mot, en moyenne, par année et par personne, sur le revenu - je ne parle pas de la fortune... Et là, on trouve normal de taxer des gens qui sont au minimum vital. 5 F, c'est rien pour vous, bien sûr, mais, à la fin de l'année, cela fait 60 F ! Cela payerait à peine votre plat du jour... Je trouve inadmissible... (L'orateur est interpellé.)Inadmissible, inadmissible ! ...que vous engagiez une discussion sur un sujet pareil ! M. Pierre-François Unger a du reste indiqué que ce n'est de toute façon pas avec cette mesure qu'on allait renflouer les caisses de l'Etat... Vous, vous videz les caisses de l'Etat et, en plus, vous taxez les personnes qui sont les victimes de votre politique ! Vous ne devriez pas être fiers de ce que vous faites ce soir !
Présidence de Mme Janine Hagmann, deuxième vice-présidente
M. Gilbert Catelain (UDC). Je suis déçu de ne pas avoir de réponse, même imprécise... Il me semble en effet que le but de la loi genevoise est de tenir compte du coût de la vie à Genève. Et il semble que les rentes, sauf erreur de mémoire, sont environ 40% plus élevées que dans le reste de la Suisse. C'est un premier point.
Deuxième point. Je rappelle que de très nombreuses personnes, qui n'ont pas droit à certaines aides et qui en auraient peut-être besoin, vont probablement voir leurs cotisations d'assurance-maladie augmenter de 4% au mois de septembre. Et elles n'auront rien de plus à la fin du mois que les bénéficiaires OCPA, elles en auront peut-être moins ! Il faudrait instaurer une sorte de solidarité de l'effort... (Rires et exclamations.)Mais, oui, bien sûr ! ...où tout le monde participerait... (Le président agite la cloche.)Que vous le vouliez ou non, on assiste à une baisse des revenus dans ce pays !
Moi, j'apprécie M. Unger, c'est quelqu'un d'intelligent, c'est un bon conseiller d'Etat, mais il aime bien dépenser l'argent qu'il n'a pas ! (Rires.)Il participe, par son action, au déficit de l'Etat. Je constate toutefois que le gouvernement a instauré une sorte de frein à l'endettement par le biais d'un programme quadriennal. Certes, 240 000 F ne vont pas changer beaucoup la donne, mais c'est une question de principe !
Je suis persuadé - et j'aimerais bien qu'on m'apporte la preuve du contraire - que la rente OCPA moyenne qui est distribuée dans ce canton est supérieure au salaire moyen d'une bonne partie de la population française... (Exclamations.)Mais bien sûr, mais bien sûr ! (Exclamations. Le président agite la cloche.)Je vous donne un exemple pratique: ma belle-mère... (L'orateur est interpellé.)Et ça vous dérange ? Ma belle-mère habite Ferney-Voltaire. Son revenu, une fois qu'elle a payé son loyer - parce qu'elle le paye... - est de 600 euros par mois, et, avec cette somme, elle doit payer son bus, son téléphone, et tout le reste. Allez voir dans un Etat, qui était socialiste il n'y a pas si longtemps, ce qu'est la solidarité et les retraites qui sont versées ! La retraite moyenne en France est d'environ 1000 euros, un point c'est tout ! (L'orateur est interpellé par Mme Wenger.)Mais on est dans une région transfrontalière...
La présidente. Madame Wenger, s'il vous plaît !
M. Gilbert Catelain. ...et on voit des choses choquantes: des gens qui travaillent ont un revenu nettement inférieur à des gens qui bénéficient d'une rente ! On va leur demander 5 F par mois, bien que leur situation soit difficile, mais, d'un autre côté, ils bénéficient d'une garantie, d'une couverture sociale, d'un logement payé, d'un abonnement téléphonique, d'un autre de bus et de toute une série d'autres avantages. Je ne suis donc pas persuadé qu'ils ne peuvent pas payer cette somme. Si vous regardiez la situation de certaines personnes autour de vous, vous verriez que des gens qui travaillent ont une situation financière qui n'est pas forcément meilleure.
Je demande donc simplement si cette participation de 5 F par mois est supportable ou non. C'est le fond de la question: portons-nous un préjudice majeur à cette catégorie de personnes en leur demandant une contribution à hauteur de 5 F par mois pour leur abonnement TPG ?
Mme Michèle Künzler (Ve). Je me demande si l'enjeu porte vraiment sur ces 5 F... Je partage l'avis de M. Catelain: beaucoup d'autres personnes à Genève sont dans une situation bien plus défavorable que les bénéficiaires OCPA ! C'est vrai et c'est malheureux.
Mais je me pose une autre question d'ordre économique... Ne serait-il pas plus sage de suivre la position de Mme Haller ? Seules les personnes qui le demandent formellement pourraient bénéficier de l'abonnement TPG. Nous le savons bien en effet, beaucoup de personnes le reçoivent automatiquement et ne l'utilisent pas. Il serait donc plus judicieux, financièrement parlant, de ne plus octroyer systématiquement cet abonnement aux personnes qui ne l'utilisent pas que de le donner automatiquement et de déduire 5 F à tout le monde, surtout pour une prestation qu'elles n'ont pas forcément demandée. Soyons pragmatiques: cette solution est plus intéressante sur le plan économique ! Acceptons l'amendement de Mme Haller ! Si quelques centaines de personnes renoncent à l'abonnement dont elles n'ont pas absolument besoin, nous dépenserons peut-être moins d'argent, même si les autres bénéficient de la gratuité totale. Ce sera une meilleure solution pour le canton, sur le plan économique, car il faut aussi penser que cette déduction de 5 «balles» sur les prestations entraînera des frais administratifs. (M. Hodgers fait un commentaire.)Sans parler de la communication, comme me le souffle M. Hodgers... Les personnes concernées auront en effet l'impression que c'est une petite vexation de plus, ce qui n'est pas une bonne chose, même si nous sommes tous bien d'accord que 5 F, ce n'est franchement pas grand-chose.
Je le répète: réfléchissons de manière plus globale ! Mme Haller a eu une bonne idée: il faut que seules les personnes qui en ont réellement besoin demandent l'abonnement. C'est la démarche que nous devons suivre. Ces petites vexations sont inutiles: ce n'est pas une bonne solution que ces personnes reçoivent automatiquement leur abonnement avec 5 F de moins, et, en plus, cela engendre des frais administratifs pour rien.
Mme Jocelyne Haller (AdG), rapporteuse de minorité. Je n'ai pas vraiment pour vocation de défendre M. Unger, mais j'ai entendu tout à l'heure qu'il dépensait l'argent qu'il n'avait pas... Moi, je constate surtout que ce parlement fait des économies très sélectives: il est relativement déterminé quant aux postes sur lesquels il va supprimer des recettes et ceux sur lesquels il va effectuer des économies. De ce point de vue, je pense que le désaccord est fondamental, et c'est là que réside le problème.
J'aimerais intervenir sur la remarque que vous avez faite, Monsieur Catelain, et à laquelle je croyais avoir tordu le cou dans mon rapport de minorité... Mais, visiblement, je dois y revenir, à propos du montant des prestations qui serait élevé et plus élevé à Genève qu'ailleurs. Ce n'est pas forcément parce que Genève tient à donner plus qu'ailleurs; il se trouve simplement que la vie coûte plus cher à Genève qu'ailleurs et que Genève, dans sa clairvoyance, a adapté le montant de ses prestations à la réalité économique ! Comparer les montants alloués à Genève à ceux que touche une personne en France - dont nous ne connaissons pas la situation - me parait plutôt malvenu et largement tendancieux, Monsieur Catelain, si vous me permettez de le dire !
Vous évoquez des personnes dont les ressources seraient inférieures à ces montants d'aide sociale... C'est sans doute vrai, mais c'est une triste vérité ! Et croyez bien que le principe de sécurité sociale veut précisément aider ces personnes à s'en sortir, à subvenir à leurs besoins dignement, sans avoir besoin de l'aide de l'Etat. Plus la situation économique se détériorera, plus le dispositif légal devra se renforcer, notamment en ce qui concerne les chômeurs en fin de droit. Vous le savez, nous avons un projet à l'ordre du jour qui devrait permettre à un certain nombre de gens de bénéficier de l'aide sociale. Mais vous devez être cohérent: vous ne pouvez pas nous dire que tout un pan de la population à Genève vit avec des ressources inférieures à l'aide sociale que reçoivent les personnes à l'OCPA, tout en faisant en sorte que la situation de ces personnes se dégrade et qu'elles soient obligées de se retourner vers l'aide sociale ! De ce point de vue, il faut être clairs !
Enfin, il est complètement faux de prétendre que le montant moyen versé par l'OCPA serait égal ou supérieur à un salaire moyen ! C'est faux, Monsieur, et vous le savez ! Une personne seule, sans entrer dans le détail, reçoit - je le répète, parce que c'est le principe voulu par le canton, par les autorités genevoises - le minimum qui sert à couvrir ses besoins vitaux et sociaux. Alors n'allez pas prétendre une telle chose ! Ou alors, vous êtes en train de nous dire que les salaires moyens ne servent qu'à couvrir ces besoins: si tel est le cas, c'est dramatique pour le canton de Genève ! Il faut également être clairs sur ce point !
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Je suis étonné qu'un projet aussi modeste puisse prendre des dimensions stratosphériques sur l'organisation générale de la société...
Nous sommes partis d'une constatation de l'ICF; elle nous avait en effet rendu attentifs au fait que la prise en charge de l'abonnement TPG, des lunettes et des frais de pédicure, était totalement illégale ! C'est ce vide législatif qui a motivé ce projet de loi.
Nous avons pensé qu'il fallait ancrer ces prestations dans la loi, leur donner une base légale, pour qu'on ne puisse plus nous le reprocher ni supprimer ces prestations à la sauvette, d'un coup de crayon, prestations, qui - comme vous l'avez dit, Madame - existent depuis des années et auxquelles la population est attachée. Au passage, nous avons relevé cette chose un peu saugrenue: l'abonnement des TPG était octroyé de manière automatique, sans avoir aucune certitude qu'il intéressait le bénéficiaire. Et, là, il vous est proposé de faire payer 5 F par mois aux bénéficiaires OCPA pour qu'ils marquent leur intérêt pour cet abonnement qui vaut tout de même plus de 450 F. C'est la voie qui vous est proposée et qui a été admise par la quasi-unanimité de la commission. Les élections s'approcheraient-elles ? Je n'en sais rien, mais je trouve le revirement des groupes écologiste et socialiste un peu singulier... Ce projet avait été voté avec une seule restriction, celle de l'Alliance de gauche. Et Mme Haller - je lui rends hommage ici - avait annoncé d'emblée qu'elle ne s'opposerait pas du tout au projet de loi dans son ensemble, mais seulement à cette mesure sur laquelle nous divergeons.
Le revenu minimum a été évoqué... Il est évident que ce qui se passe à ce niveau à Genève et en France n'est pas comparable ! On ne sait pas ce qui se passe en France, et, d'ailleurs, on ne sait pas non plus ce qui se passe dans les autres cantons - sauf pour ce qui est des prestations complémentaires. Mais qui aide qui et comment: on ne le sait pas.
C'est d'ailleurs bien dommage, parce que, si on faisait une analyse, on pourrait mettre bien des bémols aux reproches qui sont faits à Genève. On sait, par exemple, qu'une participation communale est demandée pour les prestations complémentaires, et ce, dans vingt-trois cantons suisses. Alors qu'une modeste proposition du Conseil d'Etat aux communes a soulevé un tollé... (Rires.)J'ai bien compris que ce n'était pas le débat actuel; nous l'aurons plus tard. (Exclamations.)Je ne vais pas à mon tour monter dans des strates trop élevées, qui nous conduiraient peut-être à nous disputer...
Votons ce projet ! Monsieur Catelain, je vous dirai que les montants en question ne sont pas indécents, mais ils ne sont pas trop élevés lorsqu'on vit en ville et seul. Il faudra trouver des solutions d'une autre nature et ne pas se contenter d'augmenter les montants de ces prestations, car - vous le savez bien - la vraie misère, quand bien même la vie est économiquement difficile pour ces personnes, c'est la solitude, la solitude liée à la rupture du lien de solidarité des réseaux informels. Et nous toutes et nous tous, sur tous les bancs, nous pourrions y penser au quotidien pour restaurer ces réseaux et arrêter de trouver des alibis et de penser qu'il y a trop d'argent ou qu'il en manque !
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vais vous soumettre la prise en considération de ce projet de loi, au moyen du vote électronique... Monsieur Charbonnier, vous avez demandé la parole alors que la liste était close... (L'orateur est interpellé.)Non ! Monsieur Charbonnier, je ne vais quand même pas vous expliquer la règle ! La liste était close ! Vous savez bien que vous pourrez demander la parole et vous exprimer lorsque nous serons en deuxième débat ! Il ne faut donc pas vous exciter ! Tout va bien. Voilà ! Madame le sautier, je vous prie de bien vouloir effacer M. Charbonnier de notre liste des orateurs. Merci infiniment ! Après le vote sur la prise en considération de ce projet, Monsieur Charbonnier, vous pourrez vous défouler, lorsque j'en serai à l'article sur lequel l'amendement a été demandé. Bien, Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la prise en considération de ce projet de loi, au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 74 oui (unanimité des votants).
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Mis aux voix, l'article 2, alinéa 1, lettre b (nouvelle teneur) est adopté, de même que l'article 3, alinéa 5 (nouveau, l'alinéa 5 devenant l'alinéa 6).
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement proposé à l'article 17, alinéa 1. Monsieur Charbonnier, vous avez la parole.
M. Alain Charbonnier (S). Monsieur le président, je ne me défoulerai pas maintenant, mais demain après-midi, lors du match de football...
Je voulais simplement rectifier ce qu'a dit M. le président Unger tout à l'heure... Il ne s'agit pas d'un revirement du parti socialiste - d'ailleurs nous avons pris ce projet en considération, et nous le voterons. Je tiens juste à signaler que nous avons exprimé plusieurs fois notre inquiétude par rapport à cette proposition consistant à demander une contribution de 5 F sur l'abonnement des TPG: une première fois par le biais d'une interpellation urgente et une deuxième fois en commission. En effet, le groupe socialiste a voté l'amendement proposant que le bénéficiaire OCPA fasse la demande de l'abonnement TPG. Il ne s'agit pas d'un revirement - le parti socialiste est fidèle à ses positions, et il votera ce projet de loi.
Le président. Merci, Monsieur le député. Je vous remercie d'avoir fait allusion au match de football de demain... Vous auriez pu aller jusqu'au bout et annoncer de quel match il s'agit... Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe qu'un match de football opposera demain la droite et la gauche à 17h, à Veyrier... Et nous espérons que de nombreux députés seront là pour soutenir les joueurs des groupes respectifs. Monsieur le conseiller d'Etat, Pierre-François Unger, vous avez la parole.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Je serai très bref... Sans doute avais-je mal compris le sens des interventions, lorsque je me suis exprimé. Vous avez soutenu l'amendement présenté par Mme Haller en commission, c'est vrai, mais j'ai cru comprendre dans les interventions précédentes que vous entendiez vous opposer au projet de loi... Ça n'a pas l'air d'être le cas. Je vous prie donc de bien vouloir m'excuser de vous avoir mal compris !
Le président. Finalement, tout s'arrange ! Mesdames et Messieurs les députés, nous sommes saisis d'un amendement présenté par Mme la rapporteure Jocelyne Haller à l'article 17, alinéa 1. Cet amendement a fait l'objet d'une longue discussion. Je vous propose de voter sur cet amendement au moyen du vote électronique, amendement dont la teneur est la suivante: «Les bénéficiaires de prestations versées par l'office ont la possibilité de recevoir sur demande un abonnement annuel UNIRESO des Transports publics genevois, valable sur le territoire du canton.»
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 41 non contre 38 oui et 1 abstention.
Mis aux voix, l'article 17 (nouvelle teneur, sans modification de la note) est adopté, de même que l'article 41 (nouvelle teneur, sans modification de la note).
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Troisième débat
La loi 9134 est adoptée article par article en troisième débat.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets maintenant l'ensemble de ce projet de loi au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mise aux voix, la loi 9134 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 68 oui contre 9 non et 1 abstention.
Le président. Bien, Mesdames et Messieurs les députés, nous allons prendre le deuxième point que nous devons traiter en urgence, comme vous l'avez décidé hier. Nous allons le commencer, mais, eu égard à l'heure, je ne sais pas si nous pourrons le terminer. Il s'agit du point 81 de notre ordre du jour.