République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 1 avril 2004 à 17h
55e législature - 3e année - 7e session - 31e séance
PL 8783-A
Premier débat
M. Gabriel Barrillier (R), rapporteur de majorité. Je dois apporter une précision au texte du projet de loi... En effet, à l'alinéa 1 de l'article 2, il faut ajouter une virgule après «suppléants». J'en ai oublié une, j'en suis désolé... Je lis: «La commission d'urbanisme est composée de treize membres titulaires, dont un désigné au sein de la commission des monuments, de la nature et des sites et de trois suppléants, - et là se place la virgule, je poursuis - tous choisis en raison de leur connaissance des problèmes...». Il faut en effet ajouter une virgule à cet endroit, car tous les membres sont choisis en raison de «leur connaissance des problèmes touchant à l'urbanisme et à l'aménagement du territoire», c'est-à-dire les treize membres titulaires et les trois suppléants.
Le président. Nous allons voter sur la prise en considération de ce projet... (Brouhaha.)Monsieur le rapporteur de minorité, la ficelle est un peu grosse ! c'est le 1er avril... Nous dirons que c'est la ficelle du poisson ! Vous avez la parole.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Mesdames et Messieurs... Mais je m'aperçois que j'avais appuyé par erereur sur le bouton destiné au vote. Excusez-moi, Monsieur le président !
Même si nous approchons des 19h, j'aimerais prendre le temps de rendre certains députés conscients de la situation dans laquelle nous nous trouvons... Je lis, depuis que M. Moutinot est au gouvernement, que le processus de construction est difficile dans notre canton et qu'il faut se battre pour obtenir l'adhésion de la population, ou d'une catégorie de la population, ou d'une catégorie de la population qui habite dans une région. Et ce dont il est question aujourd'hui, c'est que le conseiller d'Etat en charge du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, se retire purement et simplement de la présidence de la commission d'urbanisme ! Pourtant, cette commission regroupe des spécialistes du secteur urbain, des gens de qualité qui sont des constructeurs et qui sont choisis par les professionnels comme étant les meilleurs dans le domaine de l'aménagement de notre territoire. Cette décision est consternante, car le président se prive ainsi de leurs compétences, et notamment d'être alerté par l'un d'entre eux à un moment ou à un autre du processus. Je trouve cela tout à fait regrettable, car cette démarche va dans le même sens que d'autres, dont le but est de restreindre petit à petit les pouvoirs de la commission d'urbanisme et ceux de la commission des monuments, de la nature et des sites. Et l'on s'apercevra à long terme - d'ailleurs, tout le monde l'admet déjà - qu'on ne peut pas laisser reposer sur les épaules d'un seul homme la responsabilité des choix à effectuer en matière de construction et d'urbanisme.
Je le répète, je trouve regrettable - mais nous en prendrons acte si le Grand Conseil veut qu'il en soit ainsi - que le conseiller d'Etat veuille se soustraire à ce dialogue qui nous paraît nécessaire. Et quand nous parlons de dialogue, nous entendons discussion, processus d'élaboration de projet et décision finale ! C'est la signification du mot «dialogue»: il inclut les débats et leur conclusion. Le fait de se retirer de ce dialogue... (Brouhaha. Le président agite la cloche.)... c'est refuser de se plonger dans les affaires de la République, c'est se poser en juge qui peut prendre des décisions unilatérales sans s'être immergé dans un processus constructif de dialogue. Et je le déplore vivement !
Les précédents conseillers d'Etat - et il y en a eu beaucoup - ont toujours participé à cette commission d'urbanisme, et ils ne s'en sont jamais plaints, au contraire ! Ils ont toujours été satisfaits de cette collaboration qui permettait de faire remonter les préoccupations de ce qu'on appelle: «la société civile».
Alors, je ne vois pas - et ce sera ma conclusion - pourquoi on nous dit d'un côté qu'il faut mettre en place des plans d'aménagement concertés, qu'il faut aller au front et défendre des projet, et, de l'autre, qu'on ne veut plus présider une commission avec les professionnels de l'urbanisme; qu'on veut prendre de la distance et voir les choses de plus haut... Encore une fois, je trouve cela déplorable, et je le regrette !
M. Christian Grobet (AdG). J'étais déjà intervenu au moment de la préconsultation sur ce projet de loi pour regretter que le président du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement - puisque c'est ainsi que ce département s'appelle maintenant - ne participe plus et ne préside plus cette commission.
La commission de l'urbanisme est indiscutablement la commission la plus importante au niveau de ce département, puisqu'elle traite du processus d'urbanisation. Les autres commissions sont plus techniques même si la commission des monuments, de la nature et des sites, est amenée à se prononcer sur des zones protégées ou des plans de site.
L'urbanisation à Genève devient de plus en plus difficile, car le territoire est exigu et les zones qui peuvent encore être urbanisées s'amenuisent. Sans parler des conflits - on le voit dans cette enceinte - et des blocages qui sont de plus en plus fréquents et importants. A mon avis, la commission d'urbanisme peut jouer un rôle positif pour tenter, précisément, d'aboutir à des solutions sur lesquelles se mettront d'accord le plus grand nombre de parlementaires compétents ou de citoyennes et de citoyens.
J'ai l'ai déjà dit, je l'ai entendu - et je vous le répète, Monsieur Moutinot, car il me semble que vous ne l'entendez pas forcément - les milieux professionnels regrettent l'absence du département dans cette commission et la possibilité d'y dialoguer, car ils attachent beaucoup d'importance à votre présence. Bien entendu, c'est à vous de décider. Par rapport à mon expérience personnelle, je regrette que la loi soit modifiée. Le président pourrait toujours, si c'est son choix, se faire remplacer par un suppléant, mais supprimer comme cela la présidence du chef du département est, à mon avis, une grave erreur !
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Une fois n'est pas coutume, le groupe socialiste soutiendra le rapport de majorité et, donc, le projet de loi tel qu'il nous est présenté.
Certains arguments portent en effet à dire qu'il serait préférable que le président du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, ne siège pas forcément dans une commission consultative. La modification proposée dans ce projet de loi permet à la commission de délibérer de façon indépendante et, à la fois, au conseiller d'Etat de ne pas être juge et partie, puisque, en dernier ressort, il lui appartiendra de trancher en cas d'avis divergents.
En principe, le chef du département est au courant des dossiers - et de leurs enjeux - qui sont traités par les différentes commissions consultatives et, également, par la commission d'urbanisme. Et les représentants du DAEL sont aussi à disposition pour présenter certains dossiers qui parviennent à la commission.
Ce projet de loi nous paraît clarifier les rôles de chacun, et je ne vois pas en quoi ce projet compromettrait le débat sur l'urbanisme et l'aménagement du territoire dans ce canton, qui est effectivement très conflictuel. Mais, dans le cas précis, ce projet permet de clarifier les choses.
Nous vous proposons donc d'accepter ce projet de loi tel qu'issu des travaux de la commission.
M. Gabriel Barrillier (R), rapporteur de majorité. Je répondrai au rapporteur de minorité de la manière suivante. Le fait que le président du département ne préside plus cette commission - qui ne fait que préaviser, je le rappelle - va, au contraire, permettre de renforcer l'impact des préavis que donne cette commission, dans la mesure où les professionnels qui y siègent auront plus de latitude, plus de liberté et seront plus à l'aise pour donner leur avis. C'est un point de vue qui me semble défendable.
Par ailleurs, il n'est pas question d'affaiblir cette commission et les préavis qu'elle pourrait donner... Pas du tout ! Au contraire, le chef du département aura la possibilité de juger les préavis qu'elle donnera avec beaucoup plus d'indépendance !
Par ailleurs, il s'agit d'un problème de procédure. Le chef du département a la compétence de trancher, de prendre des décisions. Or, dans les autres départements, les commissions qui doivent donner des préavis ne sont, la plupart du temps, pas présidées par le chef du département qui doit ensuite se prononcer.
Pour tous ces motifs, je pense que la majorité de la commission a eu raison de suivre la proposition du Conseil d'Etat... Et puis, cher Monsieur Pagani, les chefs de département du DAEL ou du DTP, pour ce que j'en sais, ne se sont jamais comportés comme des despotes éclairés, n'est-il pas vrai !
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Je ne veux pas donner d'exemples, parce que je ne veux pas blesser des personnes qui ont été à la tête de ce département... (Rires et exclamations.)En ce qui concerne les allégations de mon collègue... (L'orateur est interpellé.)Je parle d'autres personnes qui ne sont plus en ces lieux, mais qui pourraient en prendre ombrage ! (Exclamations.)
Mesdames et Messieurs les députés, je trouve les arguments avancés par M. Barrillier tout à fait déplorables. Il nous dit qu'une certaine indépendance est nécessaire... Du reste, de nombreux députés de ce parlement sont aux affaires, et, bien souvent, ils sont responsables d'une entreprise. Conscients de leurs responsabilités ils savent que lorsqu'on est aux manettes, si vous me permettez cette expression, on doit aussi savoir ce qui se passe dans la soute, y compris dans les moindres détails. Nous, nous plaidons pour cela !
Or, on nous propose ici que le chef du gouvernement, responsable de ce département, reste aux manettes sans se rendre compte de ce qui se passe, parce qu'il n'aura plus de lien organique avec une commission consultative. Comme l'a dit M. Barrillier très simplement - et, en définitive, très justement, parce que c'est ce que nous allons voter - la commission d'urbanisme fera connaître ses positions - pourquoi pas outrancières - et le département tranchera, sans avoir la moelle - la substantifique moelle ! - de la réflexion de cette commission, ce qui lui aurait peut-être permis de faire d'autres choix.
Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, que la commission d'urbanisme est une commission importante. Elle s'occupe de projets de planification directrice, de plans de modification de zone, de plans localisés de quartier, de plans de site, des projets soumis à l'étude d'impact conformément au règlement d'application de l'Ordonnance fédérale, ainsi que des requêtes en autorisation de construire qui lui sont soumises par le département.
Nous critiquons non seulement le fait que la direction se mette en retrait mais, encore pire - car je ne sais pas si vous vous en êtes rendu compte, Monsieur Barrillier ! - que la totalité du département s'extraie de cette commission.
Alors, je vous invite à voter l'amendement que nous avons présenté, au moins pour sauver les meubles - si j'ose dire - même s'ils sont dans la soute... Nous souhaitons en effet que le département nomme une personne, le délégué du département, qui fasse partie de cette commission d'urbanisme, pour qu'au moins cette personne puisse rapporter au chef du département les discussions qui ont lieu et tirer la sonnette d'alarme, cas échéant. Je trouverais déplorable de supprimer la présidence du chef du département et que, en plus, aucun collaborateur de ce département ne soit partie prenante de cette commission. Car, contrairement à ce que vous dites, Monsieur Barrillier, cette commission est importante, dans la mesure où elle mène une réflexion globale sur notre cadre de vie et celui des générations futures, même si elle ne prend pas les décisions.
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, il faut distinguer deux choses: l'importance évidente de la commission d'urbanisme et le fait que le chef du département soit appelé à la présider ou non.
Premier élément, Monsieur Pagani, le département est présent à la commission d'urbanisme. Il est forcément présent pour la simple et bonne raison que les dossiers ne tombent pas du ciel, puisque c'est le département qui les présente !
Vous proposez, Monsieur Pagani, dans votre amendement qu'un fonctionnaire soit membre de cette commission. Cela revient à dire que vous voulez que le collaborateur de mon département qui présentera un projet vote ensuite ! (M. Pagani montre son désaccord en secouant la tête.)Mais si, parce que les membres de la commission doivent voter !
Ce qui est important, et vous le relevez à juste titre, c'est que le département soit présent. Inutile de vous dire que je prends connaissance non seulement des ordres du jour, mais également des procès-verbaux de la commission.
De plus, le fait de ne pas présider cette commission ne signifie pas que je ne m'y rendrai pas. La meilleure preuve est que je vais justement aller à la prochaine séance de la commission, qui souhaite discuter de la problématique du logement des requérants d'asile.
En revanche, présider un organe consultatif qui délivre des préavis à mon intention serait une confusion des rôles. Ce n'est pas compatible. En effet, je ne vois pas comment je pourrais m'envoyer à moi-même un préavis que j'écarterais ensuite ! Et, à supposer que j'obtienne de la commission le préavis que je souhaite, je serais forcément soupçonné d'avoir largement fait pression sur elle pour l'obtenir.
Quel que soit le cas de figure, je me trouve dans une fausse situation, ce qui ne veut pas dire pour autant que ni le département ni moi, à titre personnel, nous nous désintéressions de ce qui se passe à la commission d'urbanisme ou que nous l'abandonnions !
Je pense effectivement qu'il s'agit purement et simplement d'un problème institutionnel, et ce projet clarifie les rôles. De ce point de vue - et cela ne remet en aucune manière en cause l'importance de la commission d'urbanisme - il n'est pas sain que le chef du département préside un organe consultatif qui lui délivre des préavis. Et le rôle de la commission d'urbanisme s'en trouvera-il peut-être même renforcé.
Le président. Merci, Monsieur le conseiller d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, je vous soumets la prise en considération de ce projet de loi. Le vote électronique est lancé.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 70 oui contre 11 non et 2 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement présenté par M. le rapporteur de minorité à l'article 2, alinéa 1, que vous pouvez trouver en page 7 du rapport. Il consiste à ajouter «dont un membre», ce qui donne: «La commission d'urbanisme est composée de 13 membres titulaires, dont 1 désigné par le département, 1 désigné au sein de la commission...». Je vous soumets cet amendement, toujours au moyen du vote électronique. Le vote est lancé.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 70 non contre 10 oui et 3 abstentions.
Le président. Je vais maintenant vous soumettre cet article... Monsieur le rapporteur de majorité, vous voulez... Oui, rappelez-moi où est la virgule !
M. Gabriel Barrillier (R), rapporteur de majorité. Monsieur le président, il faut l'ajouter après «3 suppléants».
Le président. D'accord ! Mesdames et Messieurs les députés, il est donc proposé d'ajouter une virgule après «3 suppléants»... C'est merveilleux ! Je vous propose de voter à main levée. (Protestations.)
Alors, je vous soumets cet amendement au moyen du vote électronique ! (Exclamations.)Je vois que vous demandez l'appel nominal. Cette demande est-elle soutenue ? Elle l'est ! Nous procédons donc à l'appel nominal (Appuyé.)Le vote est lancé.
Mis aux voix à l'appel nominal, cet amendement est adopté par 38 oui contre 20 non et 13 abstentions. (Applaudissements à l'annonce du résultat.)
Le président. Quelle journée merveilleuse que celle du 1er avril, Mesdames et Messieurs les députés, la virgule a été acceptée par 38 oui contre 20 non et 13 abstentions ! (Rires et exclamations.)
Mis aux voix, l'alinéa 1 de l'article 2 ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'alinéa 2 de l'article 2 est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté.
Mis aux voix, l'article 2 (souligné) est adopté.
Troisième débat
La loi 8783 est adoptée article par article en troisième débat.
Mise aux voix, la loi 8783 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 66 oui contre 11 non et 2 abstentions.