République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 12 mars 2004 à 20h45
55e législature - 3e année - 6e session - 30e séance
M 1570 et objet(s) lié(s)
Débat
M. Jean-Marc Odier (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, pourquoi cette motion ?
Je pense que tout Etat se doit d'avoir un budget. Il y a un climat d'incertitude malsain dans l'administration si l'Etat n'en a pas. L'Etat doit se pencher sur son budget et il est clair que l'on ressent, dans l'administration, faute de budget, une difficulté pour appliquer des projets prévus en 2003.
Nous avons certes renvoyé le budget, qui ne convenait pas, au Conseil d'Etat. Mais pourquoi, pourquoi celui-ci attend-il si longtemps pour présenter un nouveau budget devant ce Grand Conseil ? Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y a pratiquement 6 mois que nous avons renvoyé le budget afin que le Conseil d'Etat nous en propose un plus acceptable, qui ne présenterait pas 400 à 500 millions de déficit.
Pourquoi cette lenteur ? Il y a peut-être deux raisons. Peut-être faut-il du temps pour élaborer les mesures structurelles qui ont été demandées. Peut-être est-ce une raison purement tactique de la part du Conseil d'Etat qui voudrait que l'on étudie le budget en même temps que les comptes afin que la commission des finances n'ait que très peu de temps pour examiner ce budget.
Maintenant, j'aimerais faire une petite diversion, un petit changement, pour répondre à des reproches qui pourraient nous être faits au sujet de cette motion. Une partie de ce parlement prétend que nous avons tort de penser que les dépenses de l'Etat explosent. Ces gens prétendent également que les dépenses de l'Etat correspondent à la démographie du canton, à l'augmentation de la population genevoise. J'aimerais, à ce sujet, rappeler quelques chiffres. Par exemple, de 1982 à 2002, en vingt ans donc, nous avons connu une inflation de 50% parallèlement à une augmentation de 17% de la population. Sur la même période, les dépenses de l'Etat ont augmenté de 200%. Elles ont donc triplé en vingt ans. On ne peut donc pas dire que ces dépenses correspondent simplement à l'augmentation de la population.
En ce qui concerne les recettes, il est important de souligner que, de 1993 à 1997 - les dernières années pendant lesquelles le budget était déficitaire - les recettes n'ont augmenté que de 17 millions, alors que de 1997 à 2001, elles ont augmenté de 1,2 milliards. La période 1997 à 2001 correspond certes justement au moment où Mme Calmy-Rey était présidente du département des finances. Mais cela signifie surtout que ces recettes étaient purement conjoncturelles et qu'on en constate actuellement la diminution. L'Etat doit donc forcément trouver des solutions pour équilibrer son budget.
Comment redresser les finances publiques ? Je pense qu'il y a deux possibilités, voire trois. On pourrait simplement proposer des augmentations d'impôt. Mesdames et Messieurs les députés de la gauche, nous vous laissons le soin de faire ces propositions qui, de toute façon, comme vous vous en serez rendu compte, ne sont pas du goût de la population.
Il y a une deuxième possibilité, qui consiste simplement à diminuer les charges. Ce que veulent les radicaux - et nous avons déposé un projet de loi dans ce sens - c'est que l'Etat parvienne, sur les trois prochaines années, à l'équilibre financier. Autrement dit, la moyenne des budgets des trois prochaines années devra tendre à l'équilibre.
La troisième possibilité - qui s'envisage peut-être plus à long terme - c'est de vouloir vraiment une croissance économique. La façon dont nous débattons, session après session, montre qu'une grande partie de ce parlement ne veut pas de cette croissance. Tout à l'heure nous parlerons d'IKEA, c'est un exemple. Imaginez, Mesdames et Messieurs les députés, ce que peut représenter IKEA et imaginez que nous pourrions laisser passer cette opportunité de l'autre côté de la frontière. A mon avis, il y a un carcan législatif et une volonté politique qui ne permet pas de croissance économique. Il y aurait bien des choses à dire à propos du salon de l'auto, mais nous serions plutôt dans le domaine de la polémique... Cela montre tout de même que certains veulent nous priver d'une manne financière qui est bonne pour Genève.
Je reviens maintenant à ces motions - puisque nous traitons également une motion du groupe socialiste - pour relever deux différences entre ces textes.
D'abord, dans la motion socialiste, un considérant mentionne les salaires de la fonction publique et le blocage des mécanismes salariaux. Le groupe radical ne pense pas que le blocage des mécanismes salariaux de la fonction publique soit un problème.
Ensuite, et c'est la différence la plus importante, une invite demande certes le dépôt d'un budget, mais un budget qui pourrait présenter un déficit de 450 millions. Nous disons : «Non !» (L'orateur est interpellé.)Monsieur Charbonnier, vous parlerez tout à l'heure à votre tour et j'essaierai de ne pas vous interrompre. Je pense que vous avez également signé la charte, alors je vous remercie de vous abstenir de faire des commentaires lorsque les autres parlent.
Il y a tout de même un point commun entre ces textes - qui à mon avis est le plus important - c'est la volonté que l'Etat ait un budget. Aussi, je vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de voter la motion radicale et de demander au Conseil d'Etat le dépôt d'un budget dans les plus brefs délais.
Le président. Je passe la parole à M. le député Antoine Droin, l'un des auteurs de la motion socialiste, qui va la développer.
M. Antoine Droin (S). Merci, Monsieur le président. Je ne sais pas si je vais vraiment développer notre motion, j'aimerais du moins faire quelques considérations sur les deux textes.
D'abord, je voudrais féliciter le groupe radical d'avoir, si gentiment mais un peu tardivement, déposé une motion pour demander la présentation d'un budget. Curieusement, en septembre, le groupe radical - avec la majorité de ce parlement - avait refusé d'étudier le budget qui nous était présenté... J'aimerais également féliciter le groupe radical d'avoir déposé une motion qui ressemble tout de même furieusement à celle que nous avons déposée il y a quelques mois.
Ensuite, j'aimerais relever la difficulté qu'il y a à établir un budget pour l'Etat de Genève. S'il est clair qu'on peut cerner relativement facilement quel sera le volume des dépenses de l'Etat durant une année, il est beaucoup plus difficile, avec le système actuel, de prévoir quel sera le montant des recettes. Dès lors, le parti socialiste estime qu'il y a un réel problème de recettes et non pas un problème fondamental de dépenses.
J'ajoute qu'il est normal que, dans le budget 2004 et probablement dans les budgets 2005 et 2006, les charges de fonctionnement de l'Etat de Genève augmentent. Cette augmentation - c'est une responsabilité que nous avons - correspond à celle de la population de notre canton qui s'accroît d'année en année de 5 000 à 6 000 personnes, ce qui engendre naturellement des coûts inévitables.
Ces coûts inévitables sont aussi dus, notamment, aux aspects sociaux et aux difficultés financières qu'une partie - peut-être même une grande partie, malheureusement, de la population - ressent actuellement. Je pense à tous les engagements sociaux que nous devons couvrir. Je pense aux personnes âgées, également, dont le nombre augmente, aux problèmes de santé, de formation, etc.
En ce qui nous concerne, nous trouvons fondamental que l'Etat de Genève puisse fonctionner avec un budget et non pas avec des douzièmes provisoires, comme c'est le cas actuellement, notamment par rapport aux mécanismes salariaux de la fonction publique mais aussi aux postes de travail que nous devons assurer. Je pense ici en particulier à l'enseignement. Des cycles d'orientation, dont nous avons furieusement besoin, vont être construits; ces cycles d'orientation et ces classes devront bien recevoir des professeurs qui viendront augmenter le nombre de fonctionnaires de l'Etat.
Enfin, un sujet tout aussi primordial pour nous : les questions d'investissements. Ces derniers sont notamment liés aux questions scolaires puisqu'il s'agit d'augmenter le nombre des établissements. Il y a cependant aussi une responsabilité d'investir dans un certain nombre d'autres domaines : la construction et la rénovation de notre patrimoine, dont il a été question tout à l'heure avant le repas; la rénovation de l'hôpital des enfants; la construction de l'école de pharmacie, et j'en passe...
Pour nous, il est important qu'on puisse avoir un budget 2004 pour l'Etat de Genève le plus rapidement possible. Nous avons fait cette demande depuis longtemps et, encore une fois, nous remercions les radicaux d'aller dans notre sens et d'accepter les deux motions.
M. Renaud Gautier (L). Quel plaisir de parler dans cet hémicycle où, somme toute, tout le monde est d'accord. Nous avons vécu un grand moment d'unanimité, hier déjà, sur des problèmes qui touchaient la journée des femmes. J'ai plaisir à relever et à souligner ce soir que tout le monde ici est d'accord : il faut un budget pour l'Etat. Personne ne saurait ici s'y opposer et chacun d'entre nous souhaite effectivement que l'Etat ait les moyens de fonctionner.
Première constatation : jusqu'à maintenant l'Etat a fonctionné. Je n'ai pas vu de bus des TPG arrêtés; je n'ai pas vu de professeurs fermer leurs classes. Je conçois, j'admets et j'adhère pourtant à l'idée qu'il faille un budget pour l'Etat.
Il m'apparaît donc que la touchante unanimité que nous avons ce soir entre les bancs de l'Entente et ceux de l'Alternative pour demander un budget doit être soutenue avec la plus extrême rigueur, comme nous avons soutenu hier la parole que les femmes avaient à nous adresser.
C'est la raison pour laquelle, au nom - j'imagine - de l'ensemble du parlement, je suggère que ces motions soient renvoyées extrêmement rapidement au Conseil d'Etat qui, dans le temps qui lui est imparti, nous répondra. Pour ceux qui ont encore des inquiétudes, je redis ici - cette fois-ci avec ma casquette de président de la commission des finances - qu'il paraît que nous aurons un budget le 1er avril. J'ose espérer que chaque député membre de ce Conseil arrivera à tenir jusque-là. Ceux qui n'y arriveraient pas peuvent toujours m'appeler; au cas où...
Je suggère donc, Monsieur le président, de renvoyer ces deux motions au Conseil d'Etat qui, j'en suis sûr, en fera le meilleur usage.
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député. Je ne vous cacherai pas qu'à titre personnel je préférerais que nous votions tout de suite, cela nous permettrait de gagner un peu de temps.
Cela dit, un certain nombre d'intervenants sont inscrits et je dois respecter le temps de parole de chacun. Je m'attacherai à cette prérogative qui est la mienne. Cela étant, je n'hésiterai pas, en accord avec le Bureau, à clore la liste lorsque cela s'avérera nécessaire.
M. Pierre Kunz (R). Il ne s'agit pas d'aller vite. Il s'agit d'aller au fond des choses; une bonne fois.
Nous l'avons déjà dit : ce canton n'est plus gouverné. Il n'est qu'administré par sept départements autonomes, au coup par coup, sans politique générale. L'outil principal de nos ministres n'est plus le projecteur orienté vers l'avenir, mais le rétroviseur, qui permet de retrouver les recettes éculées. L'esprit de nos ministres, nous l'avons déjà dit aussi, n'est plus occupé par des projets et des ambitions, mais par la nostalgie, par la crainte et par les rapports d'experts.
Mesdames et Messieurs les députés, c'est bien cette faiblesse du Conseil d'Etat - il faut que ce Grand Conseil s'en persuade enfin - qui est à l'origine, aussi bien de l'absence de budget dans laquelle se trouve cette République que des résultats lamentables des comptes 2003.
Si vous voulez bien, Mesdames et Messieurs les députés, parlons d'abord des comptes 2003. On sait maintenant que le déficit sera réduit de 500 à 400 millions, grâce à quelques-uns de ces artifices comptables dont le Conseil d'Etat abuse depuis une décennie et que condamne régulièrement l'ICF. En mars 2003, Mesdames et Messieurs, nos collègues de l'UDC, soutenus par les radicaux, avaient déposé une motion qui réclamait que le Conseil d'Etat révise le budget 2003, notamment à cause du niveau des recettes budgétées qui apparaissait déjà clairement comme illusoire. Le budget, rappelons-le, avait été adopté avec réticence par la droite qui avait renoncé - le Mémorial en témoigne - à le rejeter, uniquement en raison des garanties, des engagements - en réalité des pseudo-garanties, des pseudo-engagements - du gouvernement et de Mme Calmy-Rey. (Brouhaha.)
Or, cette motion, malgré sa pertinence, malgré l'évidence de ses considérants a été rejetée par le Grand Conseil, une fois de plus, à la suite d'une intervention du Conseil d'Etat, de Mme Brunschwig Graf en l'occurrence. Très sûre d'elle - un peu comme hier soir lorsqu'elle s'en est prise à la majorité de ce parlement (Brouhaha.)- Mme Brunschwig Graf avait expliqué, je cite en substance, que «le Conseil d'Etat n'était pas stupide et ne se sentait pas obligé de dépenser toutes les lignes budgétaires ouvertes si les recettes ne suivaient pas».
Mesdames et Messieurs, nous savons aujourd'hui la légèreté de cette affirmation, sa présomption même; affirmation d'autant plus condamnable qu'elle s'est accompagnée semble-t-il d'une incapacité du gouvernement à rester dans le cadre des dépenses fixé pour 2003.
Venons-en maintenant au budget 2004, ou plutôt à l'absence de budget. La situation dans laquelle se trouve ce canton est due non pas à la droite majoritaire au Grand Conseil qui, elle, a pris ses responsabilités... (Brouhaha.)Cette situation découle exclusivement de la faiblesse du Conseil d'Etat, de l'exercice stupéfiant, Mesdames et Messieurs, auquel il a, sans vergogne, tenté de se livrer en nous proposant un déficit supérieur à un demi-milliard. Cet exercice est d'autant moins compréhensible que le Conseil d'Etat sait pouvoir disposer, dans ce parlement, d'une majorité fermement décidée à assainir les finances publiques en réduisant les dépenses de l'Etat.
Des voix. Lesquelles ?
M. Pierre Kunz. Cette détermination a même fait l'objet d'une plate-forme de législature entre les trois partis de l'Entente...
M. Claude Blanc. Les deux !
M. Pierre Kunz. Les trois, Monsieur Blanc. Un accord appuyé par l'UDC. Il n'empêche, Mme Brunschwig Graf, libérale et ministre des finances d'un gouvernement dont la majorité est issue des partis de droite, a prétendu faire passer son budget avec ce commentaire définitif, que je cite encore une fois en substance : «Désolée, Mesdames et Messieurs les députés, nous ne pouvons pas faire mieux et ceux qui prétendent le contraire sont des rêveurs.» Tout cela figure au Mémorial.
Mesdames et Messieurs les députés, les radicaux n'acceptent pas davantage aujourd'hui qu'hier cette absence de volontarisme, ce défaitisme indigne et - pour parler comme Bernard Pivot - les radicaux condamnent la mollesse d'un gouvernement... (Brouhaha.)...qui attend les coquecigrues pour le sauver et qui prend les Genevois pour un peuple de clampins et de béjaunes en le berçant de carabistouilles et de billevesées.
Les radicaux en ont assez, Mesdames et Messieurs, des discours lénifiants ou donneur de leçons de l'Exécutif. Ils en ont assez des manipulations comptables et des expédients. Ils exigent une fois de plus que le Conseil d'Etat prenne enfin ses responsabilités et qu'il présente à ce Grand Conseil les réformes législatives imposées par la situation financière du canton, ceci dans le cadre d'une politique clairement définie à long terme et d'un plan financier durable qui débute en 2004. (Applaudissements. Brouhaha. Le président agite la cloche.)
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, essayez de vous calmer un petit peu. C'est vrai que l'ambiance est électrique, mais nous allons essayer de poursuivre nos débats dans de bonnes conditions. La parole est à M. le député Robert Iselin.
M. Robert Iselin (UDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai toujours pensé que, dans le fond, M. Kunz était plus un UDC qu'un radical. (Vives exclamations. Applaudissements. Commentaires.)Comme j'ai beaucoup d'amitié pour M. Kunz, j'ajouterai simplement que j'espère que je ne l'ai pas choqué en disant cela.
L'intervention de l'UDC sera brève. Sans vouloir rappeler que nous sommes le seul parti qui a refusé les comptes en 2002 et le budget en 2003, nous pensons comprendre de ce que Mme Brunschwig Graf nous a dit en commission des finances que nous recevrons bientôt les comptes d'une part - car la présidente du département dit fort justement qu'il faut d'abord avoir les comptes pour faire ensuite le budget - et d'autre part, une semaine plus tard, le budget. Un peu de patience ! Nous avons tous attendu longtemps ce budget !
Pour le surplus, j'ai deux remarques à faire. Premièrement, dorénavant, les budgets - et les comptes ensuite, évidemment - doivent être établis d'après les moyens à disposition et selon le principe de l'adaptation des dépenses à ces moyens et non pas l'inverse. Deuxièmement... Excusez-moi, j'ai un trou de mémoire... Voilà, ça me revient. Deuxièmement, c'est très bien de dire qu'il y a plus de monde à Genève et qu'il faut donc dépenser plus. Il ne faudrait pourtant pas oublier que plus d'habitants à Genève, cela signifie aussi plus de recettes fiscales. J'ai là un petit tableau fort intéressant qui indique que les dépenses par habitant ont augmenté d'environ 1500 F par année, en francs constants.
Je serai heureux, l'UDC sera heureuse et certainement M. Kunz sera-t-il très heureux, si le gouvernement emploie, dans la fabrication du budget et dans la manière de présenter les comptes, les vieilles traditions qui ont fait la force de ce pays pendant 300 ou 400 ans.
Le président. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. le député David Hiler.
M. David Hiler (Ve). Il semble que ça vous amuse beaucoup, Monsieur le président...
D'abord, je voudrais rendre hommage à un groupe qui ne s'est pas encore exprimé, c'est-à-dire l'Alliance de gauche. Si l'on veut un budget, le plus simple était, après tout, de faire un projet de loi qui soit renvoyé en commission. A ma connaissance, c'est le cas grâce au projet de loi déposé par l'Alliance de gauche.
On pourrait donc, Monsieur le président, admettre que ce débat est plus ou moins inutile puisque la commission des finances est saisie d'un projet de budget. C'est une première bonne nouvelle !
J'aimerais également admirer, si vous permettez, Monsieur le président, la manière dont les radicaux créent l'événement. Si j'ai bien compris, ils ont refusé le budget pour signifier au Conseil d'Etat qu'il était nul, ensuite, ils ont voté les douzièmes provisoires pour dire que le Conseil d'Etat était nul et enfin, ils ont déposé une motion urgente, pour dire une troisième fois que le Conseil d'Etat était nul.
M. Pierre Kunz. C'est assez vrai.
M. David Hiler. Voilà. Evidemment, ce genre de débat a un grand avantage : rien n'en sortira. Cela permet de s'amuser un petit moment et comme nous n'avons pas grand-chose de mieux à faire, pourquoi pas...
Je dois vous dire quand même que nous accepterons les deux motions, mais, comme l'a dit M. Gautier, nous les voterons avec le sourire et en disant que les gens qui déposent ces motions sont charmants, parlent bien, mais ne sont pas très sérieux, au reste.
M. Souhail Mouhanna (AdG). S'il y a quelque chose qui n'est pas très sérieux, c'est que notre parlement se trouve, en ce mois de mars, en train de demander qu'un projet budget de l'Etat soit déposé. Cela signifie que ce qui aurait dû être fait ne l'a pas été.
Ce qui a été fait, c'est que le projet de budget déposé en son temps a été renvoyé au Conseil d'Etat par une majorité de ce Grand Conseil dont le groupe radical fait partie. Cela n'empêche pas ce groupe de venir aujourd'hui exiger le dépôt immédiat d'un projet de budget. La position radicale est d'ailleurs curieuse : autant j'ai apprécié l'intervention de M. Odier, autant je suis étonné d'entendre M. Kunz tout de suite après. Je me suis demandé s'ils étaient vraiment membre du même parti et la réponse est venue de M. Iselin que je remercie d'avoir clarifié les choses. (Applaudissements.)
M. Odier a effectivement demandé le dépôt d'un projet de budget et la motion radicale porte, comme invite, la mention suivante : «invite le Conseil d'Etat à déposer le plus vite possible un nouveau projet de budget pour l'année 2004.» Ce texte ne précise donc pas un montant maximum pour le déficit.
Notre proposition de motion, quant à elle, fixe une limite à 450 millions pour le déficit budgété. Je suppose que les radicaux, en déposant leur proposition de motion, n'ont pas imaginé un déficit d'un milliard. Par conséquent, ils pourraient parfaitement voter notre texte qui demande de ne pas dépasser 450 millions de déficit; la possibilité est en effet ouverte d'un boni de 750 millions. On ne sait jamais... Je ne vois pas ce qui pourrait vous empêcher, Mesdames et Messieurs les radicaux, de voter notre proposition de motion.
Revenons maintenant sur le fond du problème. Je rappelle que, pour notre part, nous avons déposé une proposition de résolution qui a été rejetée par la majorité de ce parlement. Je comprends tout à fait que la majorité de ce Grand Conseil rejette cette proposition de résolution. Pourquoi ? Tout simplement parce que cette majorité-là ne veut pas reconnaître sa responsabilité dans la situation actuelle. Ce sont des forces politiques qui jouent véritablement aux apprentis sorciers, qui jouent aux pompiers-pyromanes. Que font-ils ? Ils diminuent les recettes de l'Etat, ils votent à tour de bras des baisses d'impôt. Quand ils le font, ils disent à la population de ne pas s'inquiéter, qu'il n'y aura pas de coupes, que les prestations seront assurées, qu'il n'y aura aucun problème, que les millionnaires et les gens très aisés viendront en masse et rempliront les caisses, que l'activité économique sera relancée, que ce sera formidable et qu'il n'y a absolument rien à craindre, car tout le monde est gagnant. Qu'est-ce qu'on voit après ?
Evidemment, au moment de la présentation du projet de budget 2003, eh bien, il y avait des prévisions. Au moment d'examiner les comptes, certains députés disaient que les chiffres positifs présentés - dont certains étaient d'ailleurs très élevés pendant les trois ou quatre dernières années - étaient l'effet de la conjoncture. Ces députés ne disaient pas que ces chiffres étaient dus à l'habileté de Mme Calmy-Rey, à l'organisation du département des finances ou à un certain nombre d'autres choses.
En parlant exactement des mêmes années, maintenant qu'on dit qu'il y a un déficit, on ne parle plus de la conjoncture qui a été mauvaise. On ne dit pas que c'est la baisse d'impôts qui est à l'origine de ces déficits. Non, on dit que c'est Mme Calmy-Rey qui n'a pas donné les éléments corrects. J'espère que vos collègues radicaux au niveau fédéral diront la même chose au Conseil fédéral. J'espère que vos collègues radicaux du canton de Vaud diront la même chose au Conseil d'Etat et au conseiller d'Etat radical responsable des finances. Dans ces cas également, les prévisions n'ont nullement été atteintes et il y a un décalage énorme entre le budget et les comptes. Dans le canton de Vaud, les déficits sont très importants, les millionnaires qui désertaient Genève pour aller dans le canton de Vaud n'ont pas non plus rempli les caisses de ce canton.
Arrêtez de nous raconter n'importe quoi, Mesdames et Messieurs ! Vous l'avez dit très clairement, Monsieur Kunz, et je vous rends hommage pour l'avoir dit; vous, au moins, vous dites ce que vous voulez. Vous avez dit : «Le seul moyen d'amener l'Etat à couper de manière massive dans les prestations que Genève distribue excessivement à la population, c'est d'assécher les caisses de l'Etat, c'est de diminuer ses recettes.» C'est d'ailleurs ce que vous avez fait en déposant un certain nombre de projets de lois, en soutenant les initiatives de baisse d'impôt. J'ai été étonné tout à l'heure d'entendre M. Odier prétendre que ce que veulent les radicaux, c'est un équilibre sur trois ans. Monsieur Odier, vous avez la mémoire courte. Nous avons des projets de lois déposés par votre groupe qui ne proposent pas l'équilibre, mais un boni de 150 millions. Je suis désolé de vous le dire, vous êtes en train de raconter n'importe quoi, Monsieur. (L'orateur est interpellé.)Merci, Monsieur Gros ! Vous dites toujours n'importe quoi, Mesdames et Messieurs. Ce que vous essayez de faire aujourd'hui, c'est de vous dégager de votre très grave, très lourde responsabilité dans l'état actuel des finances publiques.
Pendant les années 1990, vous avez voté des déficits de 400 ou 500 millions. C'est vous qui étiez aux commandes et vous y êtes toujours aujourd'hui. Vous étiez, Mesdames et Messieurs les députés, majoritaires massivement au Grand Conseil comme au Conseil d'Etat. Vous aviez même réussi à faire très fort avec sept conseillers d'Etat pendant la période monocolore. Vous avez accumulé des déficits absolument abyssaux et maintenant vous venez donner des leçons sur la manière de gérer l'Etat. Vous, Mesdames et Messieurs, donner des leçons ? C'est absolument incroyable !
J'ai souhaité tout à l'heure, pendant que M. Kunz parlait, avoir la possibilité de reproduire dans une expérience - comme dans un laboratoire de physique - l'Etat tel que vous le voulez, Monsieur Kunz. Ce serait absolument incroyable, ce serait édifiant. Je crois bien que personne n'en voudra de votre Etat, de cet Etat anti-social qui est uniquement consacré à faire en sorte que les riches le soient toujours plus et que les autres soient toujours plus nombreux. Nous ne sommes pas d'accord avec ça.
Lorsque vous donnez des chiffres, Mesdames et Messieurs les députés, ils sont erronés. M. Iselin parlait tout à l'heure de l'accroissement de 1500 F en francs constants des dépenses par habitant. Monsieur, je vous mets au défi de prouver cela. J'ai donné plusieurs fois des chiffres qui montrent que depuis pratiquement quinze ans la situation n'a pas évolué s'agissant des dépenses en francs constants. Au niveau du personnel de l'Etat, avec plus de 60 000 habitants supplémentaires dans le canton - pas 6000 ni 600, mais 60 000 - eh bien il n'y a pas plus de postes dans les services de l'Etat qu'en 1991. La gravité de la situation est telle qu'à l'OCPA, par exemple, on est passé de 7000 à 9100 bénéficiaires. Le RMCas est perçu par environ 1000 personnes. Le chômage a explosé. Et c'est pour cela que les charges de l'Etat ont augmenté. C'est à cause de cette politique antisociale que vous pratiquez. Ce que vous ne dites pas aux gens lorsque vous proposez de baisser les impôts, Mesdames et Messieurs les députés, c'est quelles sont les conséquences de ces baisses d'impôt. Vous ne voulez pas qu'ils sachent quel est le lien entre ce qu'ils votent et ce qu'ils vivent. Eh bien nous, nous essayerons justement de leur dire quelles sont les conséquences des votes. Elever l'âge de la retraite à 67 ans, élever l'âge de la retraite des femmes, couper dans les prestations de la santé, de l'éducation, du chômage, etc. Voilà les conséquences des baisses d'impôt.
Nous nous voulons un budget social; un budget qui réponde aux besoins de la population et nous nous battrons pour cela.
M. Guy Mettan (PDC). J'aimerais dire que je suis sur la même longueur d'onde que mon collègue David Hiler... (Le micro de M. Mettan ne fonctionne pas.)
Le président. Attendez un instant Monsieur le député. Il semble que nous avons un petit problème technique. La parole est donc à M. Mettan et non pas à trois personnes à la fois.
M. Guy Mettan. Bien ! Je suis content quand vous pouvez m'entendre et je répète donc pour la troisième fois que je partage le point de vue de M. Hiler sur les objets qui nous sont soumis. En première réaction, quand nous avons vu ces deux projets de motions, nous les avons effectivement trouvés fort inutiles, pour la bonne raison que tout le monde sait que le Conseil d'Etat a d'ores et déjà chauffé son immeuble du Saugy pour s'y réunir dès demain matin pour pouvoir étudier le projet de budget 2004. Le Conseil d'Etat passera tout son week-end à le faire et il est d'ores et déjà prévu que nous ayons le résultat de ces cogitations le 23 mars si je ne m'abuse. (L'orateur est interpellé.)Ou le 1er avril, peut-être. C'est dire que ces deux motions n'ont, au fond, pas vraiment d'objet.
Comme vous le savez, Mesdames et Messieurs les députés, nous avons le sens de l'esthétique au PDC et nous trouvons que ce qui est inutile est parfois beau. Ces deux motions ont tout de même une certaine beauté : en premier lieu, elles nous permettent de féliciter le parti radical. Merci, les radicaux, parce que, quand le PDC avait assumé ses responsabilités en 2002 en votant le budget, vous n'aviez pas eu de mots assez durs pour nous reprocher cette attitude. Aussi, nous vous disons maintenant : «Bienvenue au club ! Merci d'entrer en matière sur un budget.» (Applaudissements.)Cela me permet de répéter que le PDC veut un budget, il ne l'a jamais caché. Il veut un budget responsable et qui tienne compte des réalités économiques qui, malheureusement, sont plutôt mauvaises. On vient de nous annoncer un déficit de 500 millions; on en prévoit un de je ne sais pas combien de centaines de millions pour 2004. Celui de 2004, nous le voulons le plus réduit possible. Voilà.
En conclusion, je peux vous dire que nous acceptons, par amitié pour nos amis radicaux, de renvoyer leur motion au Conseil d'Etat. Nous avons une certaine réserve avec celle de l'Alliance de gauche... (L'orateur est interpellé.)Celle du parti socialiste, excusez-moi. Elle donne en quelque sorte un permis de dépenser, une autorisation de déficit jusqu'à 450 millions. Nous espérons que ce soit moins. Nous sommes certains que le Conseil d'Etat travaillera bien ce week-end et qu'il arrivera à nous présenter un déficit inférieur à ces 450 millions. C'est pourquoi nous exprimons les plus vives réserves au sujet de ce permis de dépenser, car ce serait une mauvaise incitation à l'adresse de nos sept - peut-être - sages.
Le président. Le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. MM. Alberto Velasco, Claude Marcet, Jean Spielmann, Jean-Marc Odier, Pierre Weiss et Antoine Droin sont encore inscrits. Nous donnerons ensuite la parole à Mme Brunschwig Graf.
Normalement la parole devrait être à M. Velasco, mais il semble qu'il y ait décidément des soucis techniques ce soir...
M. Alberto Velasco (S). J'aimerais dire à M. Mettan que je partage son avis sur un point : aujourd'hui, à l'heure où nous présentons ces motions, elles sont devenues inutiles vu l'information que nous a donnée la présidente du département des finances. Elles ne l'étaient pas au mois de décembre, quand nous avons déposé notre motion.
Monsieur Iselin, il est exact que vous balancez des chiffres comme ça, mais il s'agit de lire les rapports. Quand je lis le rapport 2001, je vois que les charges de fonctionnement étaient de 4784 F par habitant en 1990 et qu'elles sont de 5065 F en 2001. Il n'y a pas 1500 F de différence, Monsieur.
Si je prends les investissements, je vois qu'en cette même année 1990 ils se montaient à 627 F par habitant pour 535 F par habitant en 2001. Je ne sais pas d'où vous sortez vos chiffres, Monsieur Iselin. Comme, M. Odier qui balance trois chiffres en parallèle qui n'ont pas de lien entre eux. La réalité, c'est ce que le département nous met à disposition des chiffres concernant un certain nombre de ratios, et je pense qu'il serait utile que les commissaires aux finances utilisent les informations que le département nous donne. C'est nécessaire pour que nous puissions avoir un vrai débat. A force de lancer des chiffres n'importe comment, on n'arrive pas à débattre de manière cohérente, Messieurs. La réalité, c'est qu'aujourd'hui l'augmentation des charges de fonctionnement n'est pas celle que vous dites, elle est pratiquement constante depuis des années.
Vos discours, Mesdames et Messieurs les députés, sont identiques chaque année. Vous tapez sur les charges de fonctionnement, alors que les problèmes, comme l'a dit M. Droin, sont plutôt du côté des recettes. Ceci dit, Mesdames et Messieurs les députés, si nous avons inscrit une limite à 450 millions de déficit dans notre motion, c'est que nous sommes bien conscients qu'en un seul exercice il est impossible de demander au Conseil d'Etat de diminuer ce déficit de 450 millions. C'est complètement ridicule, complètement ridicule ! Je pense qu'il faut tabler sur un déficit qui soit d'une certaine cohérence et peut-être donner le message au Conseil d'Etat qu'il faut aller vers un équilibre des comptes, mais pas en un seul exercice, Mesdames et Messieurs les députés. C'est complètement absurde. Je m'étonne que des grands financiers, des grands argentiers de ce cénacle tiennent ce discours-là.
C'est pour ces raisons que nous allons voter ces deux motions. J'aimerais ajouter quelque chose à l'intention de M. Odier. Vous parlez, Monsieur, de croissance économique et vous prenez l'exemple d'IKEA. Je peux vous garantir qu'IKEA n'amènera pas un seul franc de croissance dans cette République. Quant à l'emploi... (L'orateur est interpellé.)Non, Monsieur. Pouvez-vous me garantir que les employés recrutés viendront du canton de Genève. Ils peuvent très bien venir de France voisine. Je ne pense pas qu'il y aura de la croissance parce qu'IKEA viendra s'implanter à Genève. Nous aurons ce débat plus tard et ce sera un autre débat.
La question de la croissance, il faudra effectivement un jour se la poser, mais ce n'est pas forcément celle à laquelle vous pensez, Monsieur. Aujourd'hui, la croissance entraîne des graves problèmes d'environnement, des graves problèmes dans la répartition des richesses entre le Nord et le Sud de la planète. On ne sait pas très bien quelle croissance nous voulons. Nous pourrons, je pense, avoir un jour ce débat, mais pas aujourd'hui.
Mesdames et Messieurs les députés, comme l'a dit mon collègue, nous voterons ces deux motions.
Le président. La parole est à M. Marcet... Il faut que nous soyons tous un peu patients : il y a quelques petits problèmes informatiques. Trois micros s'allument en même temps, puis le micro qui devrait s'allumer ne s'allume pas. J'essaie de meubler jusqu'à ce que votre micro s'allume. De plus, la liste des députés inscrits s'est effacée. Tout va bien se passer.
M. Claude Marcet (UDC). Manifestement, la grande différence entre le côté gauche et le côté droit de cet hémicycle, en ce qui concerne le budget, c'est que la gauche prévoit la croissance des dépenses sans savoir ce qu'il y aura dans la caisse pour les couvrir, tandis que nous entendons savoir ce que nous avons dans la caisse pour savoir ce que nous pourrons payer.
Je dirai que la gauche a raison sur un point : la droite est au pouvoir depuis des décennies et elle n'a pas su museler les appétits de la gauche en matière de dépenses. (Brouhaha.)Je ne rappelle pas de chiffres, je dirai simplement que - c'est un chiffre pertinent et prouvé - nous avons, à Genève, plus de fonctionnaires par tête d'habitant que dans n'importe quel autre canton suisse. Le coût des fonctionnaires à Genève est le plus élevé de tous les cantons suisses. Nous avons les charges les plus élevées de toute la Suisse par tête d'habitant. Si vous voulez avoir des éléments pertinents également au niveau des recettes, des éléments présentés par le département des finances, je rappellerai que nous sommes dans le wagon de queue au niveau de la charge fiscale, notamment à cause de la taxe professionnelle, c'est-à-dire que nous avons la plus grosse charge fiscale de Suisse.
Si vous voulez continuer, Mesdames et Messieurs les députés, nous irons dans le mur. Si vous vous demandez individuellement combien vous avez dans la poche et combien vous pouvez dépenser, vous saurez tous répondre. Quand il s'agit de l'Etat, alors, comme par miracle, on oublie tout, on dépense et on dépense, puis on se retrouve avec dix milliards d'endettement. Combien en aurons-nous demain ? M. Kunz - puisqu'il paraît qu'il est de l'UDC - a également mentionné les caisses de retraite. Les caisses de retraites, c'est 3 milliards de déficit technique. Ces problèmes de déficit technique, il faudra aussi, un jour, s'en occuper, parce que manifestement dès lors qu'il y aura une augmentation dans ce domaine-là, c'est aussi l'Etat qui la paiera, c'est aussi le contribuable qui devra le payer.
Alors s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs de la gauche, il faudrait un peu modérer vos appétits en matière de dépenses sociales. Il faut fixer ces dépenses au niveau correct et non pas demander des excédents que nous ne pourrons pas payer et que nos enfants devront payer. Vous êtes à ce niveau-là, Mesdames et Messieurs - je vous prie de m'excuser - totalement incompétents ! (Applaudissements.)
Une voix. C'est toujours les autres qui sont responsables !
M. Jean Spielmann (AdG). M. Annen nous parle de vérité. Tout à l'heure quelqu'un a dit «ce que veulent les uns, ce que font les autres». Moi, je me permettrais, tout tranquillement, de vous dire, Mesdames et Messieurs les députés d'en face, que, si je ne me trompe, vous avez la majorité. Si je ne me trompe, vous l'avez toujours eue, sauf pendant quatre ans où vous ne l'aviez qu'au Conseil d'Etat. Et ce sont les quatre seules années où on a rétabli les finances publiques de ce canton et où nous avons commencé à rembourser la dette que vous avez creusée ! (Applaudissements.)
Ce que vous oubliez de dire, Mesdames et Messieurs les députés, c'est que toutes les lois en place et en vigueur aujourd'hui ont été acceptées par votre majorité. Quand vous faites d'énormes critiques sur la dette, quand vous critiquez l'absence de budget, quand vous critiquez la situation financière du canton, regardez-vous dans une glace, Mesdames et Messieurs. Et corrigez-vous ! Mais ne nous faites pas le reproche, à nous, de nous battre au niveau de la minorité pour tenter de changer les choses. La population l'a vu : si on nous donne la majorité, oui, Mesdames et Messieurs, nous sommes capables de mieux gérer financièrement les affaires de la République que vous-mêmes. (Brouhaha. Applaudissements.)Oui, Mesdames et Messieurs, la seule période pendant laquelle nous avons réduit la dette et nous sommes parvenus à équilibrer les finances du canton, c'est celle où il y avait une petite majorité de gauche dans ce parlement. Malheureusement, cette majorité n'était pas complète - il y manquait le Conseil d'Etat - autrement nous aurions pu faire beaucoup mieux. (Exclamations.)
Alors, Mesdames et Messieurs, cela doit être une plaisanterie quand vous essayez ici de nous donner des leçons; cela doit être une plaisanterie quand j'entends M. Kunz faire la morale, lui qui vient du parti politique qui porte la plus lourde responsabilité en ce qui concerne l'accumulation des dettes, qui a été pendant des années le parti spécialiste de la mise en place de la vache à lait de l'Etat pour les petits amis politiques.
A chacune de nos interventions au sujet de la Banque cantonale et des autres grands scandales de ce canton, on nous a traités de menteurs. On nous a dit que nous racontions des histoires, qu'il ne fallait pas de commission d'enquête, qu'on ne répondrait pas aux questions. On a coupé le débat, on nous a coupé la parole, nous ne devions plus parler.
Que s'est-il passé pendant cette période ? On nous aurait seulement écoutés, on aurait seulement regardé un peu ce qui se passait, on aurait pu éviter ces catastrophes.
Et qui était aux affaires, qui a conduit à la situation actuelle où les contribuables de ce canton paient presque 20% de leurs impôts seulement pour rembourser le scandale de la Banque cantonale que vous-mêmes avez créé, Mesdames et Messieurs ? (Brouhaha. Applaudissements.)Mesdames et Messieurs les députés, aujourd'hui, il y a des responsabilités à prendre, et ce sont les vôtres. Ces responsabilités, ce sont celles de la majorité politique de ce Grand Conseil. (Brouhaha.)Vous pouvez toujours vociférer et m'interrompre, il y a la réalité des faits !
Voulons-nous sortir de cette situation ? Est-ce que nous voulons un budget ? Est-ce que nous voulons essayer de mettre en place une société dans laquelle des choses utiles se produisent ? Par exemple, quelque chose qui vous tient à coeur, Mesdames et Messieurs, puisque vous l'utilisez comme créneau politique : la sécurité. Dans une semaine, on va fermer toute une série de postes de police, dont celui du Bourg-de-Four, dont celui d'Onex et d'autres encore. On va transformer cette société en un seul poste de gendarmerie avec des gens encasernés. On va supprimer la police de proximité, les îlotiers, les postes de police ouverts 24 heures sur 24. Voilà le résultat de votre politique. La population doit le savoir !
Si je prends cet exemple, c'est parce qu'il vous préoccupe vous-mêmes, Mesdames et Messieurs les députés de l'Entente. C'est assez particulier, au fond, que nous nous occupions de la police, mais c'est qu'en l'occurrence il y a un rôle social à jouer et qu'il y a des questions de sécurité : la population attend de l'Etat qu'il la protège. Vous ne le permettez pas, vous faites même le contraire, Mesdames et Messieurs. Demandez au Conseil d'Etat de changer de politique, Mesdames et Messieurs, ou alors dotez une seule fois la police de son effectif légal. Cela n'a pas été fait pendant 20 ans. Il existe un effectif définit par la loi et il n'est pas respecté...
Dans les autorisations d'aliéner que nous avons votées tout à l'heure, il y avait un poste de gendarmerie. On vend les postes de gendarmerie, celui de Versoix, celui de Chancy, celui du Grand-Saconnex. On ferme ces postes et maintenant on vend le bâtiment pour faire des affaires avec.
Qu'attend la population ? Des prestations. Qu'attend la population ? Une présence. Vous, Mesdames et Messieurs, vous lui donnez le contraire et cela coûte encore plus d'argent de faire le contraire.
Alors, Mesdames et Messieurs les députés, il faut changer de politique et pour la changer, Monsieur Kunz, il ne suffit pas de crier. Il y a un proverbe chinois qui dit que cela ne sert à rien d'aboyer quand on est incapable de mordre. Votre majorité politique n'est pas capable de changer les lois de ce canton pour permettre la mise en place d'une politique qui profite à la population avec un budget équilibré. Qui a renvoyé le budget au Conseil d'Etat, et qui pleure maintenant pour qu'on lui amène un budget ?
Nous, nous avons seulement déposé un petit projet de loi : nous avons repris le budget et il est actuellement en commission. Vous n'avez plus besoin de faire de motion, Mesdames et Messieurs les députés. Vous pouvez discuter ce budget en commission, l'amender, le changer, mais vous ne pouvez pas équilibrer les finances du canton sans changer des lois qui contraignent à dépenser de l'argent. Mesdames et Messieurs les députés, vous avez la majorité, vous êtes responsables des lois qui sont votées ici et vous pouvez les changer comme vous voulez et quand vous voulez. Vous ne le faites pas, mais vous criez pour diminuer les dépenses qui résultent des lois que vous avez votées. Vous ne trouvez pas cela un peu absurde, Mesdames et Messieurs les députés ?
Je pense qu'il faut changer un peu le cours des choses. Il faut avoir un discours plus raisonnable, plus responsable et, dans ce sens, il faut entrer en matière sur un budget. Le modeler pour faire face aux besoins de la population. Il y a 6000 habitants de plus par année dans ce canton, c'est aussi une responsabilité politique, c'est aussi une volonté. Des décisions ont été prises : on a baissé la fiscalité. Vous avez refusé de débattre sur le futur paquet fiscal fédéral. Il faudra aussi inclure dans votre budget les millions que l'on va perdre avec ça. Qui en parle ? En Suisse allemande, on commence à en parler un petit peu. Mesdames et Messieurs les députés, ce que vous proposez à la population de voter n'est simplement pas acceptable. Regardez les journaux : ils publient aujourd'hui les chiffres des conséquences du programme financier fédéral. En dessous de 50 000 F personne ne gagne, tout le monde paie plus. Entre 500 et 600 F de plus jusqu'à des revenus de 100 000 F. C'est après, au-delà, pour vos petits amis politiques, pour ceux dont vous n'êtes même pas, mais dont vous espérez être une fois - et c'est pourquoi vous leur léchez les bottes - que vous baissez les impôts. C'est une mesure pour les nantis, pour les plus riches !
Mesdames et Messieurs, vous n'arriverez à rien de cette façon-là. Il faut changer cette politique. Malheureusement, la population doit le savoir, pour changer de politique, il faudra changer de majorité, car je vous sais incapables de faire un vrai budget. (Applaudissements.)
M. Jean-Marc Odier (R). On a l'habitude des interventions de M. Spielmann; il y a 30 ans qu'il dit la même chose ! Ce soir il était seulement un peu plus grossier que d'habitude. Avant que M. Spielmann ne s'exprime, l'ambiance dans ce parlement était très détendue et plusieurs groupes se sont exprimés avec ironie et un esprit moqueur sur la motion radicale.
J'aimerais rappeler que cette année nous allons voter sur des comptes qu'on nous annonce déficitaires à hauteur de 430 millions et sur un budget, que nous avons renvoyé, et qui à l'origine présentait 500 millions de déficit. Ce qui fait au total à peu près un milliard.
Alors, continuez à rigoler, Mesdames et Messieurs ! Soit. Je suppose que vous avez des raisons pour ça, à gauche comme à droite. Continuez à rigoler ! mais je ne suis pas du tout sûr que le contribuable soit d'accord avec cette attitude.
Si nous avons refusé initialement la motion socialiste, c'est simplement parce qu'il est inacceptable de proposer de reparler d'un budget qui peut aller jusqu'à 450 millions de déficit. Maintenant c'est clair, il faut arrêter avec le déficit ! Il faut revenir à des finances équilibrées et nous n'allons pas approuver une motion qui propose un déficit de 450 millions.
Monsieur Mouhanna, vous n'avez pas tout compris, mais peut-être avez-vous une mémoire un peu courte. J'aimerais donc vous rappeler que nous avons déposé deux projets de lois. Effectivement, le premier projet demandait que le budget 2003 présente un boni de 250 millions. Ce projet a été rédigé sur la base d'un engagement de l'Entente, aux dernières élections, d'arriver à un boni de 500 millions. C'était difficile, nous n'avons pas été suivis. Il n'y a que le groupe UDC qui, en commission des finances, a indiqué qu'il était d'accord de débattre de ce projet de loi. Aucun autre groupe dans ce parlement n'a été d'accord de parler de ce projet de loi, raison pour laquelle il dort en commission des finances. Nous avons donc déposé un deuxième projet de loi qui demande l'équilibre sur trois ans.
En ce qui concerne M. Mettan, j'estime qu'il parle avec beaucoup de légèreté. Il parle d'amitié vis-à-vis des radicaux. Je n'irai pas plus loin, parce que cela veut tout dire et je me méfie beaucoup de tout ça.
A quoi sert cette motion ? Nous avons passé six mois sans budget et nous n'avons pas entendu un mot du Conseil d'Etat. Alors, simplement nous allons entendre Mme Brunschwig Graf, je crois que c'est une demande légitime. Le groupe radical veut un budget et veut surtout que nous ayons le temps d'en parler en commission, de l'examiner correctement, parce que nous ne voterons pas n'importe quoi.
Présidence de Mme Marie-Françoise de Tassigny, première vice-présidente
M. Antoine Droin (S). J'aimerais poursuivre ce que je disais tout à l'heure. En fait, il ne s'agit pas d'un problème de dépenses, mais plutôt d'un problème de recettes. Or, on voit que la droite a récemment fait des propositions de baisses d'impôt et va continuer à en faire. (M. Bernard Annen réagit vivement.)Vous avez bien proposé de baisser les impôts, Monsieur Annen ? La proposition libérale était bien une diminution de 12% des impôts, non ? Cela représente 350 millions à terme en moins pour le budget de l'Etat. C'est déjà une bonne partie du trou qu'il s'agit de combler. (Brouhaha. La présidente agite la cloche.)
La présidente. Laissez parler le député, Monsieur Annen !
M. Antoine Droin. Effectivement, Monsieur Annen, laissez parler le député. (Rires.)
M. Spielmann a entièrement raison. Qui assumera la responsabilité du paquet fiscal ? C'est vous, Mesdames et Messieurs des bancs d'en face. Il faut aussi prendre cela en considération. La suppression de l'impôt sur les successions, qui en est responsable ? C'est vous et pas nous. (Vif brouhaha. Commentaires de Mme Janine Berberat.)Le tout cumulé représentera 500 millions. (Brouhaha.)Madame la présidente faites quelque chose s'il vous plaît ! (Rires.)Non, franchement.
La présidente. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés ! Un peu de silence ! Je vous prie de respecter le temps de parole de chacun. Chacun doit respecter l'écoute de l'autre.
M. Antoine Droin. Merci, Madame la présidente. Je ne vais pas m'allonger longtemps. (Rires. Brouhaha.)
La présidente. Je vous prie de continuer, Monsieur le député.
M. Antoine Droin. J'aimerais bien, Madame la présidente... Pour répondre à M. Mettan, qui est intervenu tout à l'heure, j'indiquerai que le groupe socialiste n'est pas forcément prêt à accepter un déficit de 450 millions. Le groupe socialiste est prêt à en discuter. Nous sommes prêts à envisager certaines diminutions de déficit, car il est vrai que c'est un problème préoccupant. Pourtant, nous ne sommes pas non plus figés dans un carcan et nous n'entendons pas aller au casse-pipe sans assumer nos responsabilités sociales, comme je l'ai indiqué tout à l'heure.
Merci, Madame la présidente.
La présidente. Merci, Monsieur le député. La parole est à M. Pierre Weiss. (Exclamations.)
M. Pierre Weiss (L). Merci de votre respect attentif, Mesdames et Messieurs. (Brouhaha.)Notre collègue Guy Mettan a justement commencé à rappeler l'importance de l'esthétique quand on aborde l'examen de ces motions. Il aurait dû en particulier faire référence au surréalisme, parce que ces motions ne sont pas un budget. Elles sont en quelque sorte «magrittiennes». Elles ne sont pas un budget, pas plus que le projet de loi de l'Alliance de gauche n'est un budget dans la mesure où il est illégal. (Commentaires.)
Puisque je parle de M. Mettan, j'aimerais le féliciter de sa fermeté sur la question du budget. Il a en effet d'ores et déjà annoncé l'appui que continuera de donner le PDC à l'Entente en matière de rigueur financière dans cette affaire.
Je crois qu'il est erroné, comme certains l'ont fait dans ces motions, d'attaquer le Conseil d'Etat. Il est trop tôt pour le faire. Ce temps viendra, peut-être, lorsque nous parlerons du budget 2004. Celui-ci est annoncé pour le 1er avril. Ces motions, en revanche, devraient plutôt nous conduire à l'autocritique. Par exemple, dans la motion radicale, je lis qu'il y a des bruits selon lesquels le budget serait présenté en mai prochain. Or, nous savons maintenant que cette présentation aura lieu le 1er avril. On ne devrait pas baser une motion sur des bruits. Je lis également qu'il est douteux que les mesures d'accompagnement puissent être adoptées avant la fin de la législature. On devrait être moins sceptique quand on est au PRD, faute d'être pris pour le Parti de la Rumeur et du Doute.
En ce qui concerne la motion du parti socialiste, elle est aussi étonnante. Elle aspire à un déficit de 450 millions. Nous savions le parti socialiste attaché au déficit, mais à ce point... Etre le Parti Satisfait des Déficits, le PSD, vraiment, c'en est trop pour nous !
Ces motions, en fait, sont comme ce débat et, j'allais dire, comme les paroles que je prononce : superflues. (Applaudissements.)
Pourtant, il y a quand même eu des bons moments. Nous avons vu un professeur de mathématique se transformer en professeur de paléolithique - je parle d'histoire bien entendu - pour rejoindre un professeur de néolithique qui se référait à la guerre de Trente Ans. Peut-être était-ce le contraire, je ne sais ?
Nous avons aussi entendu des donneurs de leçons qui n'ont pas compris que le peuple genevois est incohérent, parce qu'il vote effectivement des baisses d'impôts, mais que, quand il s'agit de baisser les prestations, il a de la peine à s'y résoudre. Il y a des leçons à tirer de cela. Peut-être une excellente éducation à donner, mais je ne suis pas sûr que nous créions les moyens les plus adéquats pour que ce peuple soit plus éduqué. (Brouhaha.)Je dis cela, vu notamment l'absence de respect avec laquelle certains, en face, se permettent des gestes inconsidérés.
J'aimerais, au fond, Mesdames et Messieurs les députés, vous dire qu'il importe peu que ces motions soient acceptées ou refusées. La seule chose qui importe, c'est, à partir du 1er avril, de ne pas accepter un budget qui présente plus de 300 millions de déficit. (Vif brouhaha.)Il importera de ne pas accepter - et nous serons fermes...
Une voix. Nous aussi !
M. Pierre Weiss. ...nous serons fermes sur cette exigence, il ne faudra pas accepter des mesures de restructuration de l'Etat qui ne soient que pure cosmétique. Il faudra vérifier l'unité de l'Entente dans cette opération... (Exclamations.)Nous verrons bien ce jour-là si l'UDC a, à l'égard de la rigueur financière, autre chose à proposer que des paroles. Nous verrons si ce parti sait joindre les paroles aux actes, plutôt que de s'unir à l'AdG comme elle le fait trop souvent dans ce parlement.
Présidence de M. Pascal Pétroz, président
Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Mesdames et Messieurs les députés, j'avais envie de vous dire en préambule, comme je le dis parfois, qu'une des meilleures périodes de ma vie politique ont été les années où j'étais députée. Je dois vous avouer qu'il y a des moments où j'aimerais me promener dans la salle, m'asseoir sur tous les bancs et m'offrir des bons moments en faisant les déclarations que vous avez faites les uns et les autres.
C'est amusant en définitive. Cela ne porte pas à grandes conséquences. Cela dure un moment et finalement, le but de l'opération c'est tout de même de dire au Conseil d'Etat : «Faites ce que vous avez à faire !» Ce Conseil d'Etat, certains ne le portent pas toujours dans leur coeur. Sur les bancs qui me sont les plus proches, non pas en termes d'inclination politique, mais en termes topographiques, quelqu'un a l'habitude de dire qu'il y a sept nuls au Conseil d'Etat. Il le dit plus ou moins à mi-voix et quelquefois à haute voix. Il le pense très fort. D'autres, dans cette enceinte, ont évoqué toutes les qualités et ont dit tout le bien qu'ils pensaient du gouvernement...
Le problème n'est pas là, on l'aura compris. Je crois que la sagesse du gouvernement, c'est de prendre la distance nécessaire par rapport à ce qui peut être dit dans un parlement.
Les motions que nous examinons aujourd'hui expriment le besoin d'un budget. En ce sens, je dirais que le gouvernement rejoint le parlement. Il n'a jamais été dans les intentions du gouvernement de ne pas avoir de budget pour 2004. Il l'a dit, en septembre de l'année dernière et lorsque vous avez voté les douzièmes provisoires, Mesdames et Messieurs les députés, le gouvernement a eu l'occasion de dire au parlement que le fait de rejeter le budget impliquait forcément le passage par le régime des douzièmes provisoires. Elaborer un budget, même s'il ne satisfait pas le parlement, est tout de même un effort; le reprendre en est un aussi.
Curieusement, lorsque l'on informe la presse d'un événement - en l'occurrence le dépôt du budget - en le signalant en annexe d'un communiqué du Conseil d'Etat, on peut constater que les députés n'en ont pas connaissance. Au point qu'il aura fallu insister auprès de la commission des finances mercredi dernier pour que chacun veuille bien noter que le gouvernement avait bel et bien annoncé, lundi dernier, qu'il déposerait son budget le 1er avril. Je vous rappelle que ce sont les journaux du 1er avril qui relatent les farces, pas ceux du 2 avril. Par conséquent, ricaner sur le choix de cette date n'a pas grand sens.
Ce choix permet notamment, M. Kunz avait raison de le souligner, de présenter le budget une fois connus les comptes. L'idée n'était pas du tout de surcharger le parlement ou la commission des finances. Nous avons pensé qu'il était sain de pouvoir comparer, pour une fois, les dépenses réelles de l'année précédente avec le budget présenté. C'est une façon aussi de pouvoir travailler correctement et la commission des finances ne devrait pas s'en sentir dérangée. Si nous lui en donnons les outils, je pense qu'elle pourra travailler de façon tout à fait efficace sur ce budget-là.
Au-delà de cela, il sera bien temps pour les uns et les autres de juger ce qui est convenable et ce qui ne l'est pas. Mais j'aimerais simplement dire ceci, en guise de conclusion, on peut juger que c'est une crise des recettes ou une crise des dépenses. Je crois qu'à un moment donné, si l'on veut regarder le futur, il y a lieu de savoir - comme à peu près tous l'ont dit à leur manière dans cette salle - où l'on va, pour permettre à notre canton à la fois d'assumer sa mission, d'en assurer les moyens, sans faire fuire les contribuables et sans s'endetter exagérément.
Il est vrai - certains l'ont dit aussi - que l'on cultive l'ambiguïté. La tentation de baisser les recettes fiscales n'est pas simplement une tentation de droite. A voir ce que le peuple vote lorsqu'il est consulté, on ne peut pas dire que ce ne sont que les gens de droite qui votent des baisses d'impôt. Ce n'est pas le cas et comme vous le savez ça ne l'était pas non plus dans les résultats du mois de février. C'est un fait.
De la même façon, la tentation d'augmenter les dépenses, y compris dans ce parlement, n'a pas toujours été le fait simplement de partis de gauche ou de gens de gauche. Cela aussi il faut le reconnaître, y compris sur les bancs de ceux qui, aujourd'hui, se sentent davantage dans l'opposition. (Commentaires. Rires)
Il est extraordinaire de constater qu'en ne nommant personne, tout le monde se sent nommé. Chacun choisira... (Brouhaha.)Je conçois que dire «tout le monde» pour M. Kunz, c'est déjà beaucoup.
En définitive, si vous avez choisi les uns et les autres de ne pas déposer de projet de loi alors que vous en avez les moyens - vous êtes le législatif - c'est que quelque part vous sentez bien que le débat est délicat et qu'il s'agit de trouver des solutions qui ne sont pas si simples. Je comprends l'envie que l'on soit drastique d'un côté, mais quel est le groupe qui déposera effectivement dans le domaine des dépenses sociales les projets de loi qu'il pense parfois vouloir déposer. Aucun jusqu'à maintenant ! Chacun sait parfaitement ce qu'il en est.
Je ne sais pas si c'est un manque de courage ou la conscience du fait que, dans le débat qui doit s'instaurer pour rétablir les finances publiques, il faudra chercher, autant que possible, un point de jonction. Ce n'est pas en divisant la population en deux camps que l'on réussira nécessairement. Si le gouvernement a pris du temps pour élaborer une nouvelle proposition de budget, c'est qu'il a aussi cherché à avancer autant que possible ensemble pour trouver des solutions. Il n'a pas voulu faire un champ de bataille qui ensuite aboutisse simplement à constater ce que nous avions malheureusement constaté en 1998, malgré tous nos efforts, c'est-à-dire un rejet populaire de solutions qui pourtant avaient demandé du temps et de l'énergie. Cela a beaucoup marqué les esprits, cela les marque encore.
Ce n'est pas l'exploit de la majorité de gauche qui a rétabli les finances publiques. Je pense que la présidente du département des finances de l'époque - je l'ai dit et je le redis ici - a réorganisé l'administration fiscale, c'est une réalité. Mais le travail n'est pas terminé. Au-delà de cela, il faut avoir l'honnêteté de reconnaître que nous avons traversé, en 1999, en 2000 et en 2001, une conjoncture qui a amené dans les caisses de l'Etat des recettes inespérées. Rien ne permet de dire que ces recettes se maintiendront dans le futur. Nous devrons faire avec les estimations d'une croissance raisonnable et donc, nous devrons prendre des décisions.
J'en termine ici parce qu'il ne me semble pas que vous soyez tellement intéressés par mes réponses. Nous aurons à débattre encore, mais j'aimerais simplement vous dire que le temps passé jusqu'au dépôt du budget a été utilisé, par le gouvernement, pour travailler en profondeur; pour mettre en place des outils de contrôle qui n'étaient pas nécessairement présents; pour faire en sorte de partager ensemble des préoccupations et non pas d'additionner sept ou huit départements comme quelqu'un le disait tout à l'heure. Cela aussi, c'est une culture qui prend du temps et qui demande du travail. Je pense que cela en vaut la peine et, si le budget qui est déposé n'est pas de nature à satisfaire tout le monde, j'espère en tout cas qu'il donnera lieu à des débats sereins et qu'il nous permettra de construire un plan financier quadriennal que nous nous sentirons ensuite obligés de tenir, tous ensemble, quel que soit notre bord politique.
Le président. Merci, Madame la conseillère d'Etat. Je mets aux voix la motion 1574.
Mise aux voix, la motion 1574 est adoptée par 66 oui contre 15 non et 5 abstentions.
Le président. Je mets maintenant aux voix la motion 1570. Visiblement, je dois préciser que nous venons d'accepter la motion radicale. Nous votons maintenant sur la motion du groupe socialiste avec quelques députés d'autres partis de l'Alternative.
Mise aux voix, la proposition de motion 1570 est rejetée par 47 non contre 39 oui et 3 abstentions.
Le président. Monsieur Mouhanna, j'imagine qu'il s'agit d'une erreur : vous ne voulez pas la parole. Je ne comprends pas ce que vous voulez dire, mais je vous donne la parole brièvement.
M. Souhail Mouhanna (AdG). Monsieur le président, je n'ai pas voulu, tout à l'heure, perturber la séance, lorsque M. Weiss m'a nommément cité, en tant que professeur de mathématique qui se prendrait pour je ne sais pas qui...
Je pensais, Monsieur le président, que vous alliez me donner la parole parce que j'ai été pris à partie par M. Weiss. Je n'ai pas voulu perturber le débat. Je tiens quand même à dire que l'intervention de M. Weiss était inadmissible. Je suis intervenu en tant que député au sujet d'une proposition de motion. Quand il m'a interpellé, je pensais qu'il allait donner quelques arguments par rapport à ce que j'avais dit. Il n'a strictement rien apporté. Eh bien, j'aurais souhaité, Monsieur le président, que vous le rappeliez à l'ordre. Je tiens à dire que M. Weiss est très mal placé pour donner des leçons. Ma fonction de professeur de mathématique, Monsieur Weiss, doit être appréciée ou non, c'est selon, par mes étudiants et non pas par vous. Quant à vous, vous ne parlez jamais de votre mission de messager de la pensée unique des milieux patronaux et de la Fédération des syndicats patronaux. Nous savons ce que vous faites ici ! (Applaudissements.)
Le président. Je vous remercie, Monsieur le député d'avoir fait avancer nos débats. Je dois dire que, franchement, indépendamment de toute considération politique - de gauche ou de droite - ce que l'on voit ici, d'un coté comme de l'autre, n'est pas très beau. (Commentaires.)Je vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, pour le débat suivant de faire preuve d'un peu plus de tenue : c'est bien beau de signer des chartes comme vous l'avez fait hier et de ne pas les respecter. (Applaudissements.)Je pense que vous applaudissements signifient qu'on ne fait pas que se payer la tête du président. Je vous remercie, cela fait plaisir.