République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 16 mai 2003 à 20h30
55e législature - 2e année - 8e session - 49e séance
PL 8667-A-1
Premier débat
Le président. J'ai le plaisir, à 21h45, de vous annoncer que le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement présente un nouveau plan de délimitation des zones à l'appui de ce projet de loi. Je m'étonne du travail de la commission. (Le président est interpellé.)Ecoutez, on ne sait plus sur quel document on travaille.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Je suis désolé, Monsieur le président, vos facéties n'amusent plus personne. Le projet, que je présente comme amendement, est celui qui a fait l'objet d'un vote par la commission.
Par la suite, la commission a changé d'avis, ce qui est son droit, et elle est arrivée par conséquent à un autre projet.
L'amendement correspond à la position qui est celle du département depuis le début. Cet amendement est simple, c'est un numéro de plan différent, c'est celui que l'on avait voté en première séance.
C'est pourquoi, de grâce, épargnez-nous vos commentaires. (Applaudissements.)
Le président. Bien, il s'agit donc d'un amendement du département, parce que c'est encore quand même la position de la majorité de la commission qui est l'objet du débat que nous devons encore faire ce soir. Monsieur le rapporteur de majorité, vous avez la parole.
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il est vrai que la commission s'est prononcée sur plusieurs possibilités de périmètre, concernant ce projet de loi. Dans un premier temps, je voudrais rappeler que le périmètre qui était proposé au déclassement était à peu près quatre fois plus important que celui qui nous est soumis ce soir.
A la suite d'auditions, la commission s'est rendue à l'évidence et a admis que la moitié nord du périmètre ne pouvait pas être déclassée pour toutes sortes de raisons que vous trouverez dans le rapport que je vous ai présenté. Je n'entrerai donc pas dans le détail des motifs qui ont incité la commission à réduire le périmètre de moitié.
Puis, nous avons poursuivi les auditions, et - notamment après avoir entendu et la commune, et le représentant des propriétaires et des constructeurs du périmètre concerné, ainsi qu'un certain nombre de voisins opposants - la commission s'est rendu compte que, si l'on voulait être réaliste et si l'on voulait vraiment construire quelque chose à cet endroit, il fallait faire la proposition qui vous est faite ce soir, à savoir de prolonger la troisième zone de développement, qui existe le long du chemin de Grange-Canal, et de maintenir le reste en l'état pour toutes les raisons que j'ai exposées dans mon rapport.
Cette solution a l'avantage - et je pense que c'est un avantage qui n'est pas négligeable - de recueillir l'aval de la commune, l'aval des propriétaires et des constructeurs et l'aval des voisins. C'est la raison pour laquelle nous vous invitons instamment à voter ce qui est proposé par la majorité de la commission. Car, Mesdames et Messieurs les députés, on n'aménage pas le territoire à coups de force et contre l'avis de ceux qui réalisent ledit aménagement sur le terrain, à savoir les constructeurs et les propriétaires, ni contre mais avec l'aval des autorités communales. Si vous proposez un autre déclassement à périmètre plus large, Mesdames et Messieurs les députés, nous le savons, parce que la commune l'a dit et répété, elle s'opposera au plan localisé de quartier.
Vous savez que ces derniers font l'objet d'une délibération du Conseil municipal, soumise à référendum; et lorsqu'un plan localisé de quartier ne reçoit pas l'aval d'une commune, il est extrêmement difficile de le faire aboutir et de faire en sorte qu'on le réalise jamais.
Mesdames et Messieurs les députés, il faut donc faire de la politique réaliste, et la politique réaliste consiste à essayer de construire des logements le plus rapidement possible. La proposition qui vous est faite ce soir par la majorité de la commission vise exactement cet objectif; nous pensons que c'est la seule voie pour l'atteindre.
Le président. Bien. Nous continuons le débat. Le rapporteur de minorité Pagani m'a demandé de d'abord donner la parole au rapporteur de première minorité M. Etienne. Messieurs les rapporteurs de minorité, vous demandez le retour à la proposition initiale du département, je vous rends attentifs au fait que le département a fait ce soir une proposition d'amendement qui est entre le plan initial, auquel vous vouliez revenir, et le plan de la commission. Il y a donc bel et bien trois plans ce soir.
M. Alain Etienne (S), rapporteur de première minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, la question qui est posée ici est de savoir si oui ou non nous devons construire des villas sur ce secteur. En ce qui nous concerne, c'est non. Si des mesures conservatoires ont été prises par le département, c'est bien pour éviter de gaspiller le potentiel à bâtir qui existe sur cette parcelle.
Nous étions prêts à trouver un consensus par rapport au projet initial déposé par le Conseil d'Etat. La proposition de couper le périmètre en deux a été faite dans un premier temps, et nous étions d'accord de la suivre. Dire que l'on peut construire, ici, rapidement, des logements est à première vue une évidence, mais revient à hypothéquer sur le long terme les possibilités de construire un nombre plus grand de logements. Je ne comprends par conséquent pas la position de la majorité: lorsque l'aménagement du territoire est fait au coup par coup, vous nous dites qu'il nous manque une vision globale - c'était le discours libéral, lors de l'étude du plan directeur; et lorsque nous cherchons à avoir une vision globale, vous préconisez un aménagement au coup par coup, au gré des relations particulières que vous entretenez avec les milieux immobiliers et les propriétaires fonciers.
Vous pratiquez constamment un double discours que nous devons dénoncer sans cesse. Il ne s'agit pas d'aménager le territoire de manière autoritaire, mais de faire face à nos responsabilités: les plans localisés de quartiers, que vous craignez tant, permettent de dire comment il est possible d'aménager ces périmètres clairement identifiés. Le PLQ qui sera fait sur la petite partie que vous nous proposez ne pourra pas garantir un aménagement cohérent dans ce secteur.
La crise du logement que nous vivons mérite en effet que l'on trouve des solutions pour mettre rapidement des logements sur le marché, mais la solution que vous nous imposez ici est un leurre. Le projet de loi que vous nous proposez ce soir est inacceptable en regard de la politique d'aménagement et de développement de notre canton.
J'invite alors ce Grand Conseil à opter pour une solution plus raisonnable et à suivre la proposition du Conseil d'Etat qui nous est proposée ce soir. Il n'est pas admissible de laisser construire ces villas à cet endroit.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je rappelle que l'aménagement - parce que, bien évidemment M. Koechlin a essayé de cacher cette problématique - l'aménagement qui constituait au départ la proposition du département s'appelle PAC de Frontenex et La Tulette. L'objectif du département était de déclasser des terrains qui pourraient accueillir mille cinq cents logements. Aujourd'hui, ce qui nous est proposé, et nous le regrettons, c'est de construire vingt villas de super luxe et deux cents appartements de luxe.
Celles et ceux - c'est-à-dire les programmes du PDC, des radicaux et des libéraux - qui se sont battus pendant la campagne électorale pour faire croire à leurs électeurs qu'ils voulaient résoudre la crise du logement sont aujourd'hui au pied du mur et présentent à leurs électeurs le résultat de leurs élucubrations - parce que ce sont bien évidemment des élucubrations - c'est-à-dire deux cent vingt logements au maximum, sur un terrain qui aurait pu en compter mille cinq cents, Mesdames et Messieurs les députés.
Vous avez beau rigoler, Monsieur Muller, le périmètre du premier projet de loi du département, c'était mille logements, mais La Tulette, si on la prend en considération, c'est au bas mot cinq cents logements supplémentaires. Je trouve parfaitement scandaleux que certains, qui prônent encore aujourd'hui la lutte contre la crise du logement et le don de tous les moyens aux constructeurs pour mettre à la disposition des habitants des logements relativement bon marché, soutiennent aujourd'hui cette proposition, cela d'autant plus que nous nous trouverons dans quelques mois devant des propositions de déclassement de la zone agricole.
Certains de ces mêmes partis, et en l'occurrence le parti démocrate-chrétien, ont inscrit dans leur programme qu'ils préféraient déclasser des terrains se trouvant en zone villa non construite - et nous sommes en zone villa non construite - plutôt que de déclasser de la zone agricole. Or aujourd'hui ceux-là mêmes qui prétendaient ça font le contraire, en facilitant la construction de villas sur des terrains qui sont excellemment situés - parce que, je le rappelle, ce terrain est situé à moins de cinq cents mètres de la gare des Eaux-Vives, près d'infrastructures scolaires, dans un lieu qui est déjà urbanisé et qui se trouve dans la couronne suburbaine.
En réponse à tous ceux qui veulent arrêter le développement outrancier et la densification de la ville, nous prétendons que c'est un terrain excellemment bien situé, qui permettra à tous ceux qui rouspètent, parmi les bancs me faisant face, en disant qu'il n'y a pas de possibilité de circuler, qu'en implantant en tout cas mille logements sur cette superficie on met les futurs habitants de ce lieu à quinze minutes de toute infrastructure de la région genevoise.
La suppression des pendulaires commence par ici: donner des solutions au transport pendulaire et au déséquilibre qui subsiste dans notre ville entre le travail et le logement, ça commence par ce type d'infrastructures.
Que nous propose-t-on aujourd'hui ? On nous propose de rendre service à un promoteur qui a fait d'excellentes affaires, ayant acheté un terrain, parce qu'il y avait une banque en situation de déséquilibre. Ce promoteur veut maintenant viabiliser cette affaire et obtenir encore plus de bénéfices sur ce terrain en construisant des logements de haut standing pour une catégorie minoritaire de la population.
Je juge cela irresponsable du point de vue des engagements que ces partis ont pris et des mauvais procès qu'ils ont fait à la gauche. C'est aussi irresponsable du point de vue de la crise du logement que nous subissons aujourd'hui de plein fouet, de même que cela l'est vis-à-vis des familles qui s'entassent dans des deux ou trois-pièces et vis-à-vis des demandeurs de logement.
Il faut savoir ce que l'on se veut: il y avait un consensus jusqu'à maintenant à la commission de l'aménagement qui visait à faire en sorte de prioriser le déclassement des terrains non construits de zone villa en zone de développement. Ce consensus a été rompu, c'est la première fois, et je le déplore. Chacun doit prendre ses responsabilités dans le débat de ce soir.
Le président. Monsieur Pagani, j'aimerais quand même être sûr de ce que vous demandez. Demandez-vous ce qui figure dans votre rapport, à savoir le retour au plan initial, ou vous demandez, comme M. Etienne, l'acceptation de l'amendement de ce soir ?
M. Rémy Pagani. Je reviendrai, dans le cadre des amendements, sur notre position. Nous estimons que notre tâche consiste à déclasser des terrains pour les mettre à disposition des potentialités à bâtir dans ce canton sur le long terme et non pas immédiatement à la construction. J'estime donc qu'il est vital de déclasser l'ensemble de ce terrain, comme l'avait proposé le Conseil d'Etat dans un premier temps, et c'est pourquoi nous proposons donc de revenir au plan initial, Monsieur le président.
Le président. Vous me ferez bien l'amendement, parce que je n'ai pas les numéros de ces plans, c'est pourquoi je ne peux pas faire voter le dernier article, l'article numéro 4, qui parle du plan.
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, depuis quatre ans que je siège à la commission d'aménagement, j'ai appris qu'en matière d'aménagement du territoire il fallait se méfier des idées toutes faites ou des solutions qui semblent simples à première vue. Dans les faits, non seulement il n'en est rien, mais j'ai également eu maintes fois l'occasion de vérifier que, même si l'aménagement est de la responsabilité du pouvoir du canton, dans la réalité, on ne fait rien, ou presque, sans la complicité et l'accord plus ou moins forcé des communes.
Certes, il faut des principes, des règles, des plans directeurs, mais, à coup sûr, ces bonnes intentions ne peuvent et ne doivent pas être des dogmes. Le pragmatisme doit également intervenir dans nos prises de décision. Même si nous devons être fermes, volontaires et déterminés pour défendre au maximum nos principes d'aménagement, dans la plupart des cas, une attitude butée, ne concédant rien, ne provoque que le blocage des procédures ou des oppositions sans fin.
Nonobstant la crise du logement, notre population, bien souvent relayée avec force par les autorités de nos communes ou par des associations, cherche à s'opposer avec détermination à nos nécessaires tentatives d'urbanisation. Il faut donc composer, arbitrer et parfois trancher. Sans contexte, le projet de loi 8667 initial, visant au déclassement d'un large périmètre constitué de onze parcelles représentant une superficie totale de 91 890 mètres carrés, représente une intention fort louable et susceptible d'être une des réponses importantes à la grave crise du logement.
Ce projet a pourtant le défaut majeur de cumuler les difficultés, puisque, par exemple, il met en opposition des propriétés publiques ou privées aux intérêts fort divergents. La présence, dans ce périmètre, d'installations sportives, nécessaires à l'équipement public de la Ville de Genève, de maisons de valeur patrimoniale incontestée, tout comme celle d'arbres plus que centenaires, rendent le traitement d'un tel projet extrêmement délicat. Qui plus est, les difficultés ont été encore renforcées par la volonté de l'un des propriétaires de valoriser une partie de ce terrain le plus rapidement possible, volonté par ailleurs parfaitement respectable, Monsieur Pagani, même si elle est difficilement conciliable avec nos impératifs, qui consistent à construire de manière aussi dense que possible, dans un périmètre proche de la ville et déjà bien équipé.
Mais des impératifs, nous en avons également d'autres, comme celui de réaliser rapidement des logements, et des logements de toutes catégories, ou encore de préserver au mieux ce patrimoine vert tant apprécié, plus particulièrement ses arbres, indispensables à la vie.
Or, Mesdames et Messieurs les députés, ce qui vous est présenté aujourd'hui pour approbation par la majorité de la commission d'aménagement, c'est la synthèse de ces éléments. C'est une première solution pour l'intérêt du plus grand nombre. Contrairement à ce que prétendent les deux rapporteurs de minorité, les intérêts de toutes les couches de la population sont préservés.
Tout d'abord, il convient de préciser que les constructions, prévues sur la surface d'environ 17 000 mètres carrés restant en zone villa, ne seront pas des villas individuelles, comme vous le prétendez, mais des maisons en habitat regroupé dont les implantations préservent la totalité des chênes et autres arbres, ce qui n'est pas la moindre des qualités du projet, lequel prévoit plus de trente logements et non pas vingt, comme cela a été faussement affirmé par M. Pagani. Ces trente logements, construits sous forme de «clusters», comme les désigne lui-même M. Gardet, le patron de l'aménagement au DAEL, viendront rapidement répondre à une demande importante de ce type de logements.
En outre, le sol du périmètre, faisant l'objet de cette loi de déclassement, en première étape du PAC Frontenex-Tulette, permettra, à très court terme, la construction de deux cents logements sociaux. Je dis «à court terme», car nous savons que si vous votez ce déclassement ce soir, les propriétaires sont prêts à se mettre au travail dès lundi, afin de définir, avec le département et la commune, un PLQ intelligent, reprenant les premières remarques de l'urbaniste chargé du PAC de Frontenex. Or ce PLQ sera rapidement défini, ce à quoi je crois, car tant les promoteurs, dont c'est l'intérêt évident, que la commune - par la voix de sa conseillère administrative déléguée et par celle de tous les horizons politiques de sa commission d'urbanisme - s'y sont engagés devant notre commission. Cela est d'ailleurs évoqué en page 6 du rapport de majorité.
Il convient également de rappeler qu'aménager à 0,4, pour une part, et à 1,2, pour l'autre part, l'ensemble de cette parcelle, produira une densité d'environ 0,82, ce qui, compte tenu de la nécessaire préservation des arbres, représente une densité confortable pour tous les futurs habitants de ce secteur et ne péjore en rien la suite du développement de l'ensemble du secteur.
En première conclusion, Mesdames et Messieurs les députés, ce que nous proposons ce soir, et qui est le fruit d'une première réflexion et d'une pesée d'intérêts, n'est pas, contrairement à ce qu'affirment MM. Etienne et Pagani, une trahison par rapport aux intentions de nos programmes électoraux. Si nous partageons tous l'idée de construire, nous divergeons quant aux moyens: à une vision figée, sans prise en compte des réalités du terrain, des réalités sociologiques, économiques ou simplement pratiques, nous opposons ce soir une solution pragmatique, pouvant être rapidement mise en oeuvre, mettant, à court et à moyen terme, deux cent trente logements à la disposition de notre population, laquelle, en ce moment, a un besoin urgent de ce type de solutions, plutôt que de se lancer dans de grandes envolées urbanistiques que les groupes de travail mettront des années à concrétiser d'un seul coup.
La progression par étapes, tout en préservant les possibilités à venir, est, avec d'autres, l'une des solutions, pour, patiemment mais plus sûrement, répondre à la forte demande de logements de tous types. C'est une attitude que les démocrates-chrétiens sont prêts à assumer, avec, nous l'espérons, la majorité de notre Grand Conseil.
Pour terminer, j'aimerais revenir sur l'amendement de dernière minute du département. Monsieur Moutinot, malgré tout le respect que je vous dois, vous parlez des facéties de notre président du Grand Conseil: eh bien, moi, ce soir, en tant que président de la commission de l'aménagement, j'estime que c'est une mauvaise farce que vous faites à ce Grand Conseil... (Manifestation dans la salle.)...en arrivant avec cet amendement - même si vous en avez parfaitement le droit, je vous le concède - parce que c'est faire fi de tout le gros travail - je vous rappelle que nous avons consacré neuf séances de commission d'aménagement à ce sujet - issu de la commission et de la majorité de cette dernière.
Encore une fois, je ne vous dénie pas le droit de ne pas partager l'opinion de la majorité de la commission, mais je trouve que c'est vraiment peu respectueux de notre travail.
Mme Laurence Fehlmann Rielle (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi de vous dire combien je suis sidérée par les derniers propos de M. Portier, s'agissant de la proposition d'amendement du département. Nous y reviendrons tout à l'heure. Malheureusement, c'est aussi une illustration de la façon dont travaille la majorité de droite de cette commission de l'aménagement: d'abord on affirme qu'il est impératif de construire des logements en cette période de pénurie - tout en incriminant les lourdeurs de procédure, les tracasseries administratives - et lorsqu'on se trouve face à un projet raisonnable, où il s'agit de déclasser de la zone villa pour permettre une certaine densification, on met les pieds au mur sous des prétextes fallacieux.
Le projet qui était initialement proposé par le département correspondait au plan directeur de l'aménagement - qui a été voté, je vous le rappelle, il y a plus de deux ans - car les terrains concernés se situent en prolongement du tissu urbain avec la présence d'équipements de quartier dans un endroit attrayant et proche des transports collectifs, qui seront encore développés à cet endroit.
Au lieu de se rendre à ces raisons, la majorité de droite de la commission a préféré écouter les chantres du quant-à-soi de la commune de Chêne-Bougeries, qui ne souhaitent pas contribuer au développement de notre canton et laissent à d'autres communes moins favorisées la responsabilité de construire des logements.
M. Etienne rappelle très justement, dans son rapport de minorité, que la commune de Chêne-Bougeries a, dans sa zone à bâtir, 80% de zone villa. Je crois que cette proposition de densification était tout à fait acceptable et justifiée.
Lors de la deuxième audition de la commune de Chêne-Bougeries, on s'était même entendu dire qu'il fallait préserver des espaces de verdure pour la population. Cela est le comble de l'hypocrisie quand on sait que ces espaces de verdure se trouvent sur des terrains privés: il faudra qu'on nous explique comment cela profitera à la population. Tout cela n'est absolument pas crédible. Mesdames et Messieurs les députés, nous avons été élus pour défendre l'intérêt général, et non pas le pré carré de certains, qui veulent préserver des intérêts purement égoïstes.
Dans le cours des discussions, néanmoins, et contrairement à ce que dit M. Portier, nous étions prêts à faire des concessions et à accepter de scinder ce projet en deux - cela va dans le même sens que la proposition de M. Moutinot, qui ne tombe donc pas du ciel - et nous étions prêts à ce consensus, à l'issue d'une séance de la commission d'aménagement. Et voilà que, la semaine suivante, les députés de l'Entente ont eu des nouvelles messes basses avec les représentants de la commune, et ont décidé qu'il fallait encore scinder une fois le projet en deux, si bien que nous sommes maintenant dans un mouchoir de poche.
Vraiment, ce sont des manières de travailler qui ne sont pas crédibles du tout, et je pense que c'est une façon tout à fait désastreuse de concevoir l'aménagement, parce que cela est de l'aménagement au coup par coup, décrédibilisant de surcroît le monde politique. Nous étions tout à fait ulcérés par cette attitude, et c'est pourquoi nous avons décidé de revenir au projet initial, mais maintenant nous sommes prêts à entrer en matière sur la proposition du département.
Mme Anne Mahrer (Ve). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, Mme Fehlmann Rielle vient de dire, pour l'essentiel, ce que je souhaiterais redire: ce périmètre a été défini, dans le plan directeur, comme périmètre à urbaniser, qu'il fait l'objet d'un PAC - et les Verts sont très attachés à la concertation - et qu'il est effectivement bien desservi par les transports publics, qu'on pourrait imaginer une station RER avec le projet CEVA et, enfin, qu'il est proche du centre-ville.
On peut donc imaginer une urbanisation nuancée, il est vrai que ce site est sensible, qu'il a de grandes qualités paysagères, que l'on peut parfaitement respecter avec un aménagement adapté.
Nous étions aussi prêts à accepter de scinder ce projet en deux, et nous nous rallierons, ce soir, au projet du département. Je vous remercie.
M. Gabriel Barrillier (R). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais placer le débat à un autre niveau. Lundi prochain - la semaine prochaine - aura lieu, à 17h, une deuxième séance de concertation sur le PAC de Frontenex-La Tulette, qui réunit plus de septante personnes faisant partie des communes, des associations et des partis politiques concernés. Cette séance de concertation fait suite à un premier séminaire qui a eu lieu le 1er octobre 2002. Il s'agit de ce qu'on appelle les «plans d'aménagement coordonnés» - il y a quelques années, c'étaient des «plans d'aménagement concertés».
Je vous rappelle, et je rappelle à la majorité d'alors, que le plan directeur voté en 2001 a prévu ce nouvel outil d'aménagement. J'aimerais tout de même vous rafraîchir la mémoire: «Les périmètres d'aménagement coordonnés sont des espaces porteurs d'enjeux de première importance, significatifs pour l'ensemble du canton. Une planification directrice de quartier y est nécessaire, de manière à garantir un aménagement de qualité et à instituer un cadre prénégocié» - prénégocié ! - «permettant ensuite de traiter les projets de construction de manière transparente. Cette planification est à formaliser progressivement, en assurant une large place à la concertation». Voilà pour le rappel du cadre.
Lors du premier séminaire sur ce périmètre, le président du département, M. Moutinot - je cite le procès-verbal de cette séance, à laquelle j'avais participé, comme d'autres ici - a dit textuellement: «A l'heure actuelle, l'image d'aménagement du secteur n'est pas définie, et tout reste à faire. C'est précisément dans ce but que va oeuvrer le groupe de concertation. Ce processus, que le département est en train d'expérimenter dans les PAC, est en cours d'étude». La synthèse de cette première séance - composée de septante personnes, je vous le rappelle - dit la chose suivante: «Il est maintenant indispensable de réfléchir sur l'aménagement de ce périmètre en termes d'analyse et de propositions, sans s'attarder plus longtemps sur des discussions préalables quant aux choix définitifs du statut juridique des zones de construction. Ces discussions semblent effectivement stériles avant que l'on ait pu parler des principes d'urbanisme», et enfin - et je terminerai ici mes citations - «il devrait être possible de contredire l'opinion qui prévaut parfois que les Genevois ne savent vivre que dans un grand immeuble ou dans une villa».
Mesdames et Messieurs les députés, j'ai dit que j'avais un problème de méthode, parce que j'avais participé à l'élaboration de ces plans d'aménagement concerté dans les années 96-97, et qu'à l'époque, en tant que membre de la commission consultative sur l'aménagement du territoire, je m'étais laissé convaincre - moi, le bétonneur ! - qu'on pouvait se concerter. C'était d'ailleurs le président M. Moutinot qui m'avait convaincu en disant: «Voyez-vous, Monsieur Barrillier, la seule méthode d'avancer à Genève, c'est de convaincre, c'est de réconcilier les habitants avec l'acte d'aménager et de construire».
Alors maintenant, en tant que député, je ne sais plus quoi faire, j'ai une concertation PAC, qui a toujours été voulue par la gauche: la concertation, l'autogestion, la participation, et puis, en même temps, Monsieur le président, le Conseil d'Etat nous dépose un projet de densification qui couvre la moitié du périmètre en concertation actuelle dans un PAC et qui plombe la concertation. Que faut-il faire ?
La commission a eu la sagesse de réduire au maximum la décision de déclassement pour permettre une concertation véritable, parce que, si on fait un coup de force dans cette affaire, je vous dis que je ne participerai plus au plan d'aménagement concerté ou coordonné. Lundi prochain, à 17h, que va-t-on faire si on accepte votre proposition ? Pour quelle raison réunissez-vous septante personnes ? Quel est cet instrument et quel est le rôle du PAC ? J'aimerais bien le savoir.
En conclusion, je vous invite à suivre la majorité de la commission. (Applaudissements.)
Le président. Nous continuons notre débat sur le projet de loi, et celui-là seul.
M. René Koechlin (L), rapporteur de majorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je voudrais corriger un certain nombre de déclarations qui ont été faites par certains de mes préopinants.
M. Pagani, rapporteur de la deuxième minorité, tient à l'évidence un discours électoral, alors que nous sommes en dehors des élections, en parlant de 1500 logements que l'on pourrait construire. Comme ses camarades de l'Alternative, il vogue en plein délire, celui qui l'incite à prendre ses désirs pour des réalités.
Monsieur Pagani, on n'aménage pas le territoire au forceps. Il faut réaliser des logements, mais il faut les construire avec, premièrement, les personnes qui construisent et, deuxièmement, si possible, avec l'aval des communes concernées. Ce sont deux principes fondamentaux. Or vous proposez d'agir contre la volonté d'une commune, et encore, ce qui est pire, contre la volonté des constructeurs, qui sont les seuls à réaliser les logements que vous appelez de vos voeux.
Cela est si vrai, Mesdames et Messieurs les députés, que, dans ce canton, il existe des dizaines d'hectares de terrain qui sont déjà situés en zone de développement, certains depuis trente ans, d'autres depuis plus de cinquante ans, et qui ne sont pas construits. Et beaucoup de ces terrains ont fait l'objet d'études de plans localisés de quartier, qui, aujourd'hui, n'ont pas encore abouti. Ce sont des plans localisés de quartier qui ont été proposé depuis des années. Quant à d'autres de ces terrains en zone de développement, Mesdames et Messieurs les députés, on n'y construit pas, tout simplement parce que les propriétaires s'y trouvent bien et n'entendent pas construire: beaucoup y habitent et entendent y finir leurs jours; c'est leur droit - même s'ils sont en zone de développement, et parfois même avec un plan localisé de quartier en force. Il y a même, je vous le cite, tout près, un périmètre de deux hectares, vingt mille mètres carrés de terrain, Mesdames et Messieurs les députés, ce qui représente vingt-quatre mille mètres carrés de plancher.
Il y a eu trois plans localisés de quartier, M. Grobet les connaît bien, parce que le premier a été élaboré du temps où M. Vernet était chef du département. Puis, un deuxième plan localisé de quartier a été élaboré lorsque M. Grobet l'était à son tour, et puis il y en a eu un troisième, toujours sous le prétexte d'actualiser les choses, sous la présidence de M. Joye. Mesdames et Messieurs les députés, on n'a encore rien construit sur ce terrain, simplement parce que le propriétaire y habite et qu'il entend y finir ses jours. Des exemples comme ceux-là, Mesdames et Messieurs les députés, il y en a une quantité.
Or ce que la Gauche propose ce soir, avec M. Pagani, tenez-vous bien, attachez vos ceintures, parce que c'est surréaliste, c'est de déclasser l'ensemble de ce périmètre, qui comporte deux propriétés comprenant chacune une villa, qui a une valeur patrimoniale, dont il est exclu d'envisager la démolition. (L'orateur est interpellé.)Oui, mais vous proposez de reprendre le projet. Attends... (Le président agite la cloche.)C'est moi qui parle, ce n'est pas vous !
Le président. Monsieur Pagani, laissez parler le rapporteur, on ne vous interrompt pas trop, alors qu'il y aurait de quoi.
M. René Koechlin. Ce que vous proposez, c'est exactement ce qui se passe sur le plateau de Frontenex, c'est-à-dire de déclasser deux parcelles, parmi les autres, qui contiennent chacune une villa, qui a une valeur patrimoniale, et dont les propriétaires ont clairement dit qu'ils n'entendaient pas construire ni faire quoi que ce soit, mais qu'ils comptaient vivre dans ces maisons. Et vous voulez les déclasser pourquoi, alors ? Pour que l'on attende cinquante ans avant que, enfin, on y fasse quelque chose de bien. Il sera toujours assez tôt de le faire à ce moment-là.
Autre propriétaire de ce terrain dont vous proposez le déclassement: la Ville de Genève. Elle est venue déclarer devant notre commission... (Huées.)
Une voix. C'est faux !
M. René Koechlin. ...le terrain de football ?
Une voix. C'est de l'autre côté... Il n'est pas dans le périmètre...
Le président. Monsieur Pagani !
M. Christian Luscher. En plus, il est vulgaire !
Le président. Monsieur Luscher !
M. René Koechlin. Mesdames, Messieurs, je regrette qu'un conseiller administratif ne connaisse pas mieux le dossier. (Manifestation dans la salle.) (Le président agite la cloche.)...le terrain de football de la Ville fait partie du périmètre qui a été proposé au déclassement.
Des voix. Non !
M. René Koechlin. Oui !
M. Christian Grobet. Tu ne connais pas le dossier, va te rasseoir !
M. René Koechlin. Mais c'est vous qui ne connaissez pas le dossier !
Le président. Monsieur Grobet, Monsieur Hediger, vous prendrez la parole après, si vous le voulez.
M. René Koechlin. Mais c'est tout de même extraordinaire ! J'espère que M. Moutinot aura l'honnêteté de confirmer ce que je dis.
Une voix. Il n'est pas ici, le terrain de football, il est là !
M. René Koechlin. Mais non ! Il est... (Le président agite la cloche.)Mettez votre crayon de l'autre côté... Le périmètre est là et le terrain de football est ici. (Manifestation dans la salle.)Il est de l'autre côté... (L'orateur est interpellé.)Mais c'est inouï, quand même ! De mentir aussi effrontément ! (Manifestation dans la salle.)C'est faux !
Une voix. Allez, continue !
M. René Koechlin. J'y passe tous les jours, je le connais par coeur ! (Manifestation dans la salle.)Mais venez ici que je vous explique ! Monsieur Hediger, venez ici que je vous explique !
Le président. Monsieur le rapporteur, vous vous adressez au Grand Conseil ou à moi-même !
M. René Koechlin. C'est inouï. Des gens vous montrent...
M. Christian Grobet. Il est là, le terrain ! Ceci, c'est le projet de classement... Il est là... C'est le truc de l'UBS !
Le président. Monsieur Grobet !
M. René Koechlin. Mais non, l'UBS est ici !
M. Christian Grobet. C'est ça, l'UBS...! Tu ne connais pas ton dossier !
Le président. Je constate, en tout cas, que les rapports de la commission de l'aménagement sont peu clairs. Monsieur Koechlin, vous avez deux minutes.
M. René Koechlin. Monsieur le président, je déplore que des députés mettent en doute des évidences, et je me demande pour quels motifs, Mesdames et Messieurs, nous aurions dû auditionner le Conseil administratif de la Ville de Genève, qui venait défendre son terrain de football - et on sait très bien duquel on parlait. Alors vous êtes quand même incroyables, venez à la commission de l'aménagement et suivez les dossiers un petit peu mieux que de la manière dont vous le faites.
Des voix. Bravo ! (Applaudissements.)
M. René Koechlin. Oui, c'est scandaleux. Et quand je pense que c'est l'ancien maître de sport de la Ville de Genève qui vient nous dire des choses ! (L'orateur est interpellé.)Non, ce n'est pas de l'UBS. (Le président agite la cloche.)C'est un scandale d'entendre des choses pareilles. (Brouhaha.) (Manifestation dans la salle.)Bien, Mesdames et Messieurs les députés, toujours est-il que les quatre propriétaires concernés, dont la Ville de Genève fait partie, sont venus dire qu'ils n'entendaient pas qu'on déplace leur terrain de sport. Ils ont demandé qu'on ne déplace pas leur terrain de sport, au même titre que l'UBS, qui a aussi des terrains de sport, qui est un club de tennis, et qui a demandé qu'on ne les déplace pas.
Une voix. On va voir sur place !
M. René Koechlin. Mais non ! Ils ne connaissent pas le dossier, c'est évident. (Manifestation dans la salle.)
Une voix. Mais arrête !
M. René Koechlin. Ils ne connaissent pas le dossier, c'est quand même inouï qu'ils viennent perturber un débat avec des contrevérités. C'est inouï.
Le président. Je vais quand même vous dire, Monsieur Koechlin, qu'il est plus facile, pour des députés, de mettre en doute des évidences que de mettre en évidence leurs doutes. (Exclamations.) (Applaudissements.)
M. Christian Grobet (AdG). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je crois que M. Hediger se fera un plaisir de prendre M. Koechlin... André, André, André ! (Exclamations.) (Brouhaha.)Dis-moi que ça te fera plaisir de prendre M. Koechlin par la main, de l'amener du côté du Pré-Picot, qui est la propriété de la Ville de Genève, et de lui montrer de quel côté du chemin...
Le président. Messieurs Hediger et Koechlin, veuillez, s'il vous plaît... (Le président est interpellé.)Vous vous raconterez vos histoires après. Bien, Monsieur Grobet, continuez ! Je vous rappelle qu'à 23h, soit c'est renvoyé en commission soit c'est voté, mais en tout cas nous lèverons la séance.
M. Christian Grobet. Les minutes se comptent à partir du moment où on peut parler... (Exclamations.)...et, si vous ne m'interrompez pas, cela ira d'autant plus vite. Ce que je voulais dire, c'est qu'on peut être fatigué, ça nous arrive à tous, et je comprends que, parfois, le soir, on confonde les choses, cela arrive à d'autres députés dans cette enceinte. Vous avez confondu, ça peut arriver, le terrain de sport de l'UBS qui était prévu dans le projet... (Exclamations.)
Une voix. Mais non !
M. Christian Grobet. ...dans le projet de déclassement initial et le terrain Pré-Picot, propriété de la Ville de Genève, qui n'était pas compris dans le périmètre initial. Bref, ce n'est pas grave, M. Hediger m'a promis de vous prendre par la main pour vous amener au Pré-Picot. Comme ça vous connaîtrez mieux le plateau de Frontenex. Cela étant dit, je n'aimerais pas faire de peine à M. Pagani et à l'autre rapporteur de minorité, mais je ne suis pas d'accord avec vous sur un point essentiel, à savoir que je ne pense pas, contrairement à ce que vous avez dit, que le PDC a trahi son programme électoral. Je crois qu'au contraire le programme électoral des partis de droite est parfaitement clair, on l'a compris, notamment du côté du PDC, qui, il est vrai, il fut un temps, avait des magistrats remarquables comme M. Jean Dutoit et M. Jean Babel... (Exclamations. Brouhaha.)...menaient activement... (L'orateur est interpellé.)...j'allais arriver à M. Dutoit, parce que j'allais arriver aux radicaux. J'ai fait un petit saut trop rapide, je voulais dire Emile Dupont et Jean Babel... (Exclamations.)Je voulais dire que les radicaux avaient un éminent magistrat qui s'appelait Jean Dutoit, et c'était des constructeurs de logements, et ces deux partis peuvent être fiers de ce que ces magistrats ont fait. Mais depuis, il faut bien dire que l'intérêt général... (Brouhaha.) (Le président agite la cloche.)
Le président. Messieurs les libéraux, je vous en prie !
M. Christian Grobet. Je ne cite pas les libéraux, parce qu'effectivement les logements sociaux ça n'a jamais été votre tasse de thé, donc là il n'y avait rien de surprenant. Je voulais simplement dire que les PDC et les radicaux ont complètement tourné casaque depuis un certain temps, et votre politique est claire: vous voulez favoriser les promoteurs, parce qu'ici, et je crois que M. Koechlin a été très clair, pour lui, pour vous, c'est le promoteur qui doit décider. Et on doit lui laisser faire son projet, même si cela va à l'encontre de l'intérêt général.
Je dois dire, Monsieur Koechlin, que ce soir vous vous êtes révélé dans toute votre splendeur, parce que d'habitude on vous entend vous lever, pousser des jérémiades sur les projets qui sont bloqués, l'impossibilité de construire des logements à Genève, enfin, tous ces discours que vous tenez d'habitude. Or ce soir, vous voulez diminuer des trois quarts le projet de déclassement, pour ne plus utiliser qu'une petite partie du terrain affecté à la construction de logements, et vouer le reste en priorité à la construction de logements de luxe. Vous savez aussi bien que moi, et que de nombreux autres députés dans cette enceinte, que la zone villa représente 50% de la zone de construction de ce canton. Il y a beaucoup de terrains pour la construction de villas: ce n'est pas la priorité aujourd'hui. La priorité c'est de construire des logements locatifs répondant aux besoins de la grande majorité de la population, non des logements de luxe.
Aujourd'hui, vous ne voulez pas du tout faire un projet de concertation, vous voulez simplement exécuter les désirs d'un promoteur, qui a mis la main sur une parcelle et qui sait qu'il fera plus de profit en construisant des logements de luxe qu'en construisant des logements locatifs pour les besoins de la population. Quant à M. Barrillier, qui est tout le temps en train, aussi, de gémir, de faire des auto-proclamations des métiers du bâtiment: vous avez vraiment perdu une bonne occasion de vous taire, ce soir, parce que, quand vous venez aussi prétendre qu'il faut dynamiser la construction, je constate qu'entre vos propos et vos votes c'est le grand canyon.
J'aimerais encore ajouter une ou deux remarques à propos de cette affaire. Vous nous avez fait du bluff, Monsieur Barrillier, avec M. Muller, de prétendre que vous alliez mettre 500 logements sur le marché si la modification de la LDTR, destinée à augmenter les loyers, avait été adoptée par le peuple. Et vous avez encore osé, oséentretenir ce mythe, et, lorsque, le soir de la votation, vous avez perdu sur cette modification de la LDTR, vous vouliez encore faire croire que vous alliez mettre 500 logements sur le marché. D'abord, ç'aurait été des logements existants qu'on aurait retapés, donc ce n'était pas des nouveaux logements, et quand on vous a demandé, parce que je savais que tout ça c'était du bluff, de nous donner la liste des appartements qui auraient pu être rénovés en vertu de cette loi, vous étiez incapable de citer un seul immeuble.
Alors, vous comprenez, votre discours, on commence à le connaître. Vous prétendez que des logements vont être construits, pour démanteler la protection des locataires, et puis quand il s'agit de construire, tout à coup, vous êtes les défenseurs du patrimoine, vous êtes les défenseurs des zones vertes - j'entends M. Koechlin vouloir sauver une villa, alors que dans le périmètre dans lequel vous parliez de ce plan d'aménagement vous vouliez démolir ces villas. J'ai dû me battre contre vous avec la Ville de Genève pour sauver ces deux maisons, et aujourd'hui vous faites semblant de porter intérêt à des maisons que vous auriez été les premiers à démolir. Alors, vous comprenez, ce double langage, ça prend peut-être auprès de certains, mais pas auprès de nous et, comme cela a été dit tout à l'heure, ce double langage commence à devenir intolérable.
Pour le surplus, quand vous dites, et cela est vrai, qu'il y a un certain nombre de terrains qui ne sont pas bâtis en zone de développement - d'abord la plupart ne sont pas des terrains non bâtis, vous le savez, ce sont des territoires où il y a des villas, des maisons existantes, et c'est vrai que ce sont des opérations très difficiles de démolir des villas et de reloger les gens, leur trouver des autres terrains pour construire - laissez-moi vous dire qu'il n'y en a pas autant que ça et je vous défie de me donner, sur-le-champ, dix exemples de terrains de vingt mille mètres carrés non bâtis, en zone de développement et, si possible, à l'intérieur d'un plan localisé de quartier. Vous me donnerez la liste tout à l'heure et on la vérifiera ensemble.
Le président. Il faut conclure.
M. Christian Grobet. Pourquoi faut-il déclasser l'autre moitié que le Conseil d'Etat a proposé ? Vous le savez très bien. D'habitude, vous jouez au maître d'école ici en disant: «Il faut voir l'avenir, il faut prendre les dispositions nécessaires pour préserver et permettre la construction de logements», alors que ce soir vous dites «non, il ne faut pas déclasser des terrains, on ne veut pas bâtir, on attendra». Jusqu'à ce qu'un architecte vienne nous proposer de faire des villas sur ces terrains que vous refusez de déclasser ? Puis après on nous dira, avec une voix désolée: «Oh, c'est trop tard, on ne peut plus les déclasser, et, vous vous imaginez, ce pauvre promoteur, qui a imaginé de faire des villas, et qui ne pourra pas les construire, mais c'est horrible !» (Rires.)
Alors, vous avez raison, il ne faut surtout pas déclasser ! (Applaudissements.)
M. Olivier Vaucher (L). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je n'aimerais pas rentrer dans des polémiques stériles. Je voudrais tout d'abord m'arrêter sur un certain nombre de propos et de contrevérités que j'ai relevés dans les deux rapports de minorité.
Tout d'abord, M. le rapporteur Etienne parle du fait que les groupes de l'Entente voulaient servir en priorité des intérêts privés. Non, bien sûr que non ! Vous vous asseyez, vous me laissez parler et, quand j'aurai fini, vous vous adresserez aux députés. Merci, Monsieur Sommaruga.
Non. Ce que nous voulons, et certains de mes préopinants l'ont déjà dit, c'est construire rapidement des logements pour tout le monde. Nous avons parlé des périmètres d'aménagement, comme l'a rappelé M. Barrillier tout à l'heure, nommés autrefois «périmètres d'aménagement concertés» et par la suite, pour des raisons connues, rebaptisés «périmètres d'aménagement coordonnés». J'aimerais tout simplement rappeler que ces périmètres, M. Moutinot le sait d'ailleurs aussi bien, puisqu'il y a eu treize périmètres. Sur ces treize, six sont déjà passés, et ont été acceptés, et pourquoi ? Tout simplement, parce qu'ils ont fait l'aval des communes concertées, des propriétaires et de tous les partenaires concertés. Par conséquent, quand il y a concertation, on arrive à des résultats.
Quant au rapport de M. Etienne, il parle de la commune de Chêne-Bougeries en la citant comme une commune qui reste comme un petit village. Monsieur Etienne, j'aimerais quand même vous rappeler que la commune de Chêne-Bougeries a été pionnière dans la construction massive de logements, puisque les immeubles de la Gradelle étaient, après le Lignon, un des premiers grands projets de logements collectifs à Genève. Alors ne dites pas que la commune de Chêne-Bougeries veut rester un petit village !
J'aimerais aussi vous rappeler, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, qu'il y a sur la même commune un projet de développement, qui s'appelait la Garance, et qui a été rebaptisé les Hauts de Malagnou. Et qui bloque ce projet aujourd'hui, qui pourrait mettre plusieurs centaines de logements sur le marché ? Ce sont les Verts. Il faut donc rendre à César ce qui est à César, et la commune de Chêne-Bougeries, qui n'est pas un petit village, a montré des efforts certains pour la construction de logements collectifs, de toutes catégories confondues.
M. Etienne, dans son rapport, parle de 50 à 60 logements. Alors là, je dois rendre honneur à M. Pagani, qui lui, au moins, a eu l'honnêteté, dans son rapport de deuxième minorité, de donner le bon nombre, c'est-à-dire de 220 logements en tout. Ne mettez donc pas de contrevérités aussi grosses que celle-ci en parlant de 50 à 60 logements qui pourraient être réalisés.
Quant à M. Pagani, comme le dit le proverbe populaire de circonstance, «c'est au pied du mur que l'on reconnaît le maçon». Eh bien, le maçon - oui je suis un maçon - est un maçon qui aimerait construire. (L'orateur est interpellé.)On se passe de tes commentaires. Et nous avons, en effet, Monsieur Pagani...
Une voix. Un franc-maçon !
Une voix. Exactement !
Le président. Messieurs, s'il vous plaît, Mesdames et Messieurs les députés !
M. Olivier Vaucher. M. Grobet, tout à l'heure, a demandé à M. Koechlin, de lui faire une liste d'au moins dix objets qui pourraient être réalisés dans un délai très bref: nous avons justement déposé, M. Koechlin, Mme Hagmann et moi-même, une motion, que le président Moutinot a acceptée, pour construire des logements dans un endroit où ils peuvent se faire immédiatement, avec l'aval de la commune, du Conseil municipal et des propriétaires. La liste pourra donc vous être donnée, sans aucun problème.
C'est pourquoi le maçon que je suis peut vous dire qu'il y a des possibilités de construire rapidement, là où il y a eu concertation, avec des partenaires désireux de faire quelque chose à Genève.
Enfin, M. Etienne dit qu'il n'y a, dans le secteur qui nous occupe pour le moment, que des villas qui peuvent se construire. Bien sûr que non, Monsieur Etienne, je veux bien que l'on plaisante, qu'on attaque certains promoteurs, les spéculateurs - oui, c'est du passé, et ils ont fait beaucoup de mal à la République, mais, heureusement, il n'y a pas seulement des spéculateurs, il y a aussi des promoteurs, qui essaient de construire des logements toutes catégories confondues. Il n'y a donc pas de double discours, chez nous. Il y a eu, sur treize, six périmètres d'aménagements concertés qui ont déjà été réalisés. Pourquoi ? Parce que tous les partenaires étaient d'accord.
Il n'y a pas de concertation, Mesdames et Messieurs les députés, sans un consensus. Ce consensus se travaille. C'est la raison pour laquelle ce périmètre a été réduit momentanément à une portion congrue, qui permet de réaliser immédiatement 220 logements, comme cela a justement été dit.
Une possibilité de périmètre élargi reste ouverte, puisque, comme M. Barrillier l'a rappelé tout à l'heure, il y a un groupe de travail, il y a des séminaires, il y a une commission ad hoc, il y a des personnes intéressées qui travaillent sur le périmètre, et peut-être que d'ici quelques mois, quand la concertation sera terminée, l'on arrivera, dans ce périmètre, à réaliser d'autres logements. J'aimerais bien sûr rappeler ceci à M. Pagani qui ne parle que de logements de luxe qui seront réalisés dans ce périmètre: non, Monsieur Pagani. Oui, pour quelques villas, appelez-les comme vous voulez, que ce soient des «clusters», comme les appelle M. Gardet, ou autre dénomination, mais il y a aussi des immeubles - et M. le président Moutinot est assez intelligent, et il le sait, comme vous et moi, quels sont les besoins en matière de logement à Genève, pour négocier - il y a déjà, dans les constructions du promoteur, des logements sociaux qui seront prévus.
Alors de grâce, Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, je conclurai ainsi: laissez la concertation se faire et nous aurons des logements dans des délais bien plus brefs que si nous les imposons à ceux qui n'en veulent pas. Merci Monsieur le président. (Applaudissements.)
M. Pierre-Louis Portier (PDC). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'aimerais rapidement revenir sur les propos de Mme Fehlmann Rielle et de M. Grobet.
Madame Fehlmann Rielle, vous dites que nous avons une façon désastreuse de concevoir l'aménagement. J'en prends acte. Il y a six ans, qui est donc arrivé au pouvoir, dans cette République ? Il me semble que c'est la gauche, l'Alternative. (L'orateur est interpellé.)Vous aviez, pendant quatre ans, tout loisir d'appliquer vos propres concepts d'aménagement. Combien de logements avez-vous construits pendant cette période ? Une misère, Mesdames et Messieurs les députés, une misère qui fait que nous sommes, sur le front du logement, dans un jus noir, actuellement. Alors, s'il vous plaît, ne venez pas nous donner des leçons à cet égard !
Deuxième chose, Madame Fehlmann Rielle: vous dites qu'il faut revenir à l'amendement du Conseil d'Etat. Bon. Mais vous ne dites pas, Madame Fehlmann Rielle, combien de temps il faudra pour mettre tout le monde d'accord, combien de temps il faudra pour déjouer toutes les oppositions qui se cumuleront - celles de la commune, celles des privés. Ce dont la population a besoin, c'est de logements maintenant, Madame Fehlmann Rielle, pas à la Saint-Glin-Glin. (Applaudissements.)
Monsieur Grobet, vous dites de notre projet qu'il est croupion. Non, Monsieur Grobet, vous tentez de tromper les gens, les téléspectateurs, notamment. Vous savez très bien qu'il ne s'agit là que d'une première étape, M. Vaucher l'a rappelé. Cela s'inscrit comme une première étape dans un PAC, comme l'a soulevé également M. Barrillier. C'est donc tromper les gens que de parler comme ça.
Enfin, Monsieur Grobet, vous vous moquez de nous en faisant le guignol, parce que nous sommes soi-disant tout à coup les défenseurs de l'environnement. Monsieur Grobet, je n'ai personnellement pas attendu ce projet de loi pour me soucier de l'environnement.
En tant que magistrat communal, avec l'aide de mes collègues, j'ai construit le groupe scolaire, qui est certainement le plus écologique du canton. A cette occasion, nous avons instauré une politique qui mettait en oeuvre une concertation et une collaboration entre les propriétaires privés et publics des bois de Veyrier. Ce concept a d'ailleurs été aidé dans sa croissance par les services de M. Cramer et a été cité en exemple par d'autres communes. Actuellement, l'école, à laquelle je faisais allusion précédemment, est chauffée avec le bois de notre commune. Alors ne dites pas que nous avons attendu longtemps pour nous soucier de l'environnement et passer à la pratique.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de deuxième minorité. Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, il y a un préambule à faire dans ce dossier. J'essaie de me tenir au plus près des informations qu'on nous donne au département, et les chiffres que nous avançons, nous ne les avançons pas par objectif idéologique, nous essayons de nous y tenir.
Je vous rappelle qu'à plusieurs reprises - encore il y a un mois - on m'a reproché de mettre cet amendement, et on se retrouve aujourd'hui avec le même amendement que je proposais, proposé par le département sur un autre dossier. Et il y en a une multitude d'éléments comme ça. Il faut arrêter, une fois pour toutes, de nous faire des procès d'intention. Quand on dit que, sur ce terrain, avec le PAC de Frontenex-La Tulette, il s'agit de 1500 logements qui pourraient être construits, c'est ça l'enjeu de la discussion aujourd'hui. Et malheureusement, concernant le projet qui nous a été soumis par le Conseil d'Etat - et là encore M. Koechlin me dit que j'affabule, alors que je me base simplement sur le projet de loi du Conseil d'Etat, qui, lui, propose de déclasser l'ensemble du terrain - je ne fais que reprendre, avec l'amendement de l'Alliance de gauche, le projet de loi du Conseil d'Etat. Vous dites, en m'insultant, au Conseil d'Etat, je ne me souviens pas de vos termes, parce que ça me passe dessus, mais toujours est-il que là encore, vous ne partez pas de la réalité et je le déplore.
Ceci étant...
Une voix. Cela étant...
M. Rémy Pagani. Ceci étant...
Une voix. Cela étant...
M. Rémy Pagani. Ceci étant, prenons le discours de M. Barrillier, parce que je le trouve excellent du point de vue de la rhétorique - parce que nous nous situons au niveau de la rhétorique - pour dire à M. Barrillier qu'il est, comme moi, enfin, je ne l'ai jamais vu dans des séances de participation, des assemblées populaires de concertation avec les autorités, toujours est-il que s'il rallie notre camp ce soir, je l'en félicite, et je suis prêt à discuter avec lui.
Toutefois, en l'occurrence, ce qui va se passer en votant ce projet de loi, c'est que vous allez laisser la possibilité de construire vingt villas sur le secteur ouest de cette parcelle et deux cents trente appartements ou villas de luxe et même de super luxe - même si vous les mettez sous un terme anglais qui permet de bien cacher la situation. Enfin pas villas, «habitats groupés» ! Mais, une fois à l'intérieur de leurs petits lofts, ces gens feront opposition et bloqueront tous les processus: quoi que M. Barrillier ait discuté dans ses séances de concertation, tout le périmètre sera bloqué. De sorte qu'on retrouvera M. Barrillier en train de dire: «Nous avons bien essayé, mais ce sont les autorités qui ont décidé de faire autrement».
Parce que là aussi, il y aura le double discours pour trahir une deuxième fois les personnes qui sont venues honnêtement à ces séances de concertation. En votant ce projet de loi, Monsieur Barrillier, vous donnez toutes les conditions aux futurs habitants, qui seront bien évidemment riches et privilégiés, de se payer des avocats pour s'opposer à toute densification sur le haut de la parcelle, voire sur le terrain de La Tulette, qui ne fait même pas partie du projet de loi qui nous est soumis ce soir.
Il faut être honnête, Monsieur Barrillier. En vous faisant le chantre de la concertation... (L'orateur est interpellé.)...vous trahissez les personnes en votant ce projet de loi. (L'orateur est interpellé.) (Le président agite la cloche.)Vous trahissez les personnes, qui, elles, viennent honnêtement discuter d'évaluation.
Cela étant, Monsieur Koechlin, je trouve que, une fois de plus, quand on veut suivre les travaux et qu'on se permet de dire que les gens disent des contrevérités, c'est-à-dire qu'ils mentent - vous m'avez traité de menteur - il faudrait quand même regarder ses dossiers plus précisément. L'UBS, dont le terrain est une zone de loisir au nord de cette parcelle, partira. Et la parcelle devrait pouvoir être urbanisée à ce moment-là, mais malheureusement, avec ce que vous allez voter, ça ne sera pas possible.
Il y a le terrain de la Ville de Genève: le terrain de sport. La ville de Genève est venue en commission dans un premier temps pour nous dire qu'elle ne voulait pas que nous touchions à ce terrain. Puis, quand elle a compris que ce n'était pas de ce terrain de sport-là qu'il s'agissait mais du terrain de sport qui était à l'extérieur du périmètre - le terrain de sport de Frontenex - elle a revu sa position. Malheureusement le rapporteur ne fait pas figurer cela dans son rapport. (L'orateur est interpellé.)J'espère que vous reconnaîtrez votre erreur, Monsieur Koechlin.
La Ville de Genève nous a dit qu'elle ne s'opposait pas au déclassement de ce périmètre, parce qu'effectivement elle y a intérêt, elle aussi, pour essayer de se désenclaver. Là encore, Monsieur Koechlin, quand vous traitez les autres de menteurs, vous êtes prié de vérifier... (L'orateur est interpellé.)Oui, vous avez dit que je disais des contrevérités.
Au final, je trouve regrettable, une fois de plus, qu'on fasse passer à la trappe un objectif qui est une de nos responsabilités de parlementaires, à savoir d'estimer dans quel lieu de notre canton on a envie que la ville se développe pour satisfaire aux besoins des demandeurs de logement. J'appartiens à une fondation d'habitations à loyers bon marché. Nous avons 2500 personnes qui demandent à être logées aujourd'hui. Il y a un véritable besoin de logements. Et, avec ces 1000 logements que vous sacrifiez sur l'autel du profit et de la spéculation, Monsieur Vaucher, comme vous l'avez reconnu, je trouve que vous trahissez les Genevois une fois de plus.
M. Carlo Sommaruga (S). Monsieur le président, Mesdames et Messieurs les députés, j'avoue que je suis extrêmement surpris de la position du rapporteur de majorité. Ce dernier arrive à écrire une chose et son contraire dans les pages de son rapport, et je tiens à citer ces quelques éléments.
En page 8 de votre rapport, Monsieur Koechlin, vous dites ceci, en citant la loi: «Les autorités cantonales et communales sont tenues d'appliquer les principes et les objectifs du plan directeur cantonal, notamment en veillant à ce que les plans d'affectation du sol soient conformes au plan directeur cantonal et à son concept de l'aménagement cantonal (art.11A, al.1, LaLAT). Au vu des réserves limitées de terrain à bâtir aux fins de construction de logements collectifs répondant aux besoins prépondérants d'intérêt général, elles prennent les mesures nécessaires afin de promouvoir une utilisation rationnelle des réserves de terrains en 5e zone de construction (zone résidentielle destinée aux villas; cf. art. 11A, al. 2, LaLAT). Cela, au besoin, par le biais d'une mesure de déclassement en une zone plus dense...». Il rappelle, une page plus loin, quels sont les objectifs du plan directeur cantonal, et quel est le concept directeur cantonal. En bas de la page 9, vous dites «en périphérie urbaine»...
Des voix. On peut le lire, on l'a lu ! On a dit qu'il fallait être bref !
Le président. Ecoutez M. Sommaruga !
M. Carlo Sommaruga. Donc vous vous rappelez que le parlement doit respecter le plan cantonal, le concept et le plan directeur cantonaux, et plus loin, vous rappelez: «en périphérie urbaine: en 5e zone destinée aux villas, densifier les terrains libres qui s'y prêtent par modification du régime des zones». Aujourd'hui, ce que vous faites et ce que vous proposez, c'est un plan de zone qui n'est pas conforme au plan directeur cantonal. Dans le plan directeur cantonal, et vous le savez, il est prévu de densifier toute la zone, et ce que vous faites, en coupant en quatre, pas les cheveux, mais le terrain tel qu'il a été prévu et la zone telle qu'elle a été prévue, c'est simplement permettre à un promoteur privé de réaliser ces trente villas, parce qu'il s'agit de villas, de trois cent mètres carrés, destinées à des personnes avec des moyens. Et vous savez très bien qu'en construisant... (Manifestation dans la salle.)Vous savez très bien qu'en construisant ces villas il y aura une réalisation contraire au plan directeur cantonal, ceci au détriment du logement locatif destiné à la classe moyenne. Vous le savez pertinemment, et vous tentez de l'occulter.
Je m'adresse maintenant à M. Portier et à M. Barrillier. Derrière vos discours qui consistent à faire attention à la concertation, vous démontrez un manque de courage. Vos prédécesseurs, qu'ils aient été radicaux ou PDC, eux, avaient du courage au moment où il s'est agi de construire pour l'ensemble de la population. Et effectivement, si l'on a construit la Gradelle, c'est parce qu'il y a eu des magistrats locaux et des députés qui ont eu le courage de placer l'intérêt public et général avant l'intérêt individuel. Lorsque l'on observe ce qui est prévu sur ces terrains, et la partie haute des terrains, vous savez pertinemment qu'ils appartiennent à des membres du parti libéral. Or aujourd'hui, le parti libéral s'engage à défendre les intérêts de ses membres à titre individuel, avant de défendre l'intérêt collectif. Et c'est ceci qui est l'enjeu. Tout ceci se fait au détriment de la population en général.
Ce dont Genève a besoin aujourd'hui, ce sont des logements pour la classe moyenne, répondant aux besoins prépondérants de la population. En procédant à un déclassement, soit un déclassement au minimum, comme le propose le Conseil d'Etat, de la moitié de la parcelle initiale, cela permettrait, à terme, de construire beaucoup plus de logements que les trente proposés. De plus, en un lieu où il y a une desserte de transports publics, où il y aura bientôt l'axe du CEVA. Plutôt que de laisser ce périmètre à une minorité, il faut produire un aménagement qui permettra, à terme, de loger quelques centaines de personnes.
Cependant, c'est le profit immédiat et le soutien de ceux qui réalisent ce profit immédiat qui vous intéresse aujourd'hui. A quoi sert-il d'en construire trente si demain on ne peut pas construire quelques centaines de logements ? Et vous savez très bien que la majorité de ce canton n'aura pas accès à trente logements de luxe.
Le président. Mesdames et Messieurs les députés, il y a neuf orateurs inscrits, il est 23h, nous n'arriverons à l'évidence pas à terminer ce soir. Je suspends les débats et nous reprendrons à un moment déterminé lors de notre prochaine session.