République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 28 mars 2003 à 14h
55e législature - 2e année - 6e session - 31e séance
PL 8437-B-1
Premier débat
Le président. Ce projet de loi a été scindé en deux. Nous examinerons tout d'abord le projet 8437-B-1 dont le rapporteur de majorité est M. Mark Muller et le rapporteur de minorité M. Rémy Pagani. Nous passerons ensuite au point 24, à savoir le PL 8437-B-2. Je vous rappelle que selon votre décision sur ces objets, nous ferons un sort au PL 8864-A, point 32 de notre ordre du jour, dont les dispositions sont parfaitement inverses à l'un des projets que nous examinons.
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Je n'ai pas bien compris, Monsieur le président, à un autre point de l'ordre du jour dont les dispositions seraient inverses...
Le président. Pour l'instant, nous examinons le projet de loi 8437-B-1, nous débattrons du PL 8437-B-2 et nous reviendrons ensuite, le cas échéant, au projet de loi 8864.
M. Mark Muller. Merci, Monsieur le président. Le projet de loi dont nous débattons actuellement est extrêmement attendu par les milieux agricoles du canton. Il est vrai que nous avons souhaité, il y a quelques mois, le renvoyer en commission après un premier examen par l'ancienne commission de l'aménagement dont les conclusions n'étaient pas satisfaisantes. Elles n'exploitaient pas suffisamment les possibilités offertes par le nouveau droit fédéral en matière d'utilisation de la zone agricole et elles introduisaient des procédures extrêmement lourdes pour une utilisation rationnelle de la zone agricole. Je pense en particulier à toute la problématique de l'installation et de l'exploitation de serres.
J'aimerais apporter une petite précision technique: le projet de loi a été scindé en deux parties. Il se trouve que vu les lenteurs de notre Grand Conseil, ces deux parties se retrouvent à nouveau réunies aujourd'hui puisque nous les traitons l'une après l'autre. Malheureusement, cette scission n'a pas eu l'effet escompté, soit accélérer le traitement de la première partie de ce projet.
Sur le fond, nous allons permettre, en adoptant ce projet de loi, la transformation de bâtiments qui ne sont plus affectés à l'agriculture. Cela vise principalement des bâtiments protégés, qu'il est donc important de maintenir. Il est tout à fait logique que les propriétaires puissent transformer dans de bonnes conditions ces bâtiments qui ne sont plus affectés à l'agriculture mais qui méritent d'être protégés.
Présidence de M. Pascal Pétroz, premier vice-président
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. Bien que Monsieur Muller soit rapporteur de majorité, il n'a pas présenté les enjeux de ce projet de loi, et pour cause...
M. Mark Muller. Ils sont dans le rapport.
M. Rémy Pagani. Ils sont dans le rapport, mais c'est toujours bien de les rappeler. Ce projet vise quasiment à «empailler» un certain nombre de nos hameaux. Je rappelle qu'il y a plus de quarante hameaux dans notre canton. Cela signifie que les voisins des agriculteurs actuels auront la possibilité de spéculer sur leurs biens immobiliers et d'augmenter de cette façon le prix des terrains et la valeur locatives des habitations. Il n'y aura en effet plus aucune contrainte pour la protection de ces hameaux, mais surtout la protection de l'activité qui y a lieu. C'est à tel point vrai que vous trouvez dans le rapport une lettre de l'Office fédéral de l'aménagement qui reprécise ce qu'est, au sens de la loi fédérale, la procédure envisagée pour le développement des hameaux. La loi fédérale indique que... (L'orateur est interpellé.)Monsieur Muller, si vous permettez, je précise le cadre de ce projet de loi!
La loi fédérale indique donc que le développement des hameaux doit être contenu et dirigé. En l'occurrence, on nous propose de mettre à bas l'ensemble de ce processus. Nous estimons pour notre part que sur le fond ces dispositions ne correspondent pas à toute la politique qui a été menée jusqu'ici et qui visait, même si les conditions cadres de l'économie sont difficiles pour les agriculteurs, viticulteurs et maraîchers, à préserver les hameaux qui sont des lieux importants pour ces activités. Le fait de casser cette protection minimum permettra tout et n'importe quoi, y compris la mise à la charge des communes d'infrastructures qu'elles n'ont pas les moyens de soutenir.
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. J'aurais peut-être dû commencer par rappeler de quoi nous parlons, parce que manifestement M. Pagani se trompe de projet de loi. Nous ne sommes pas en train de traiter le projet de loi sur les hameaux qui fait l'objet d'un point ultérieur de notre ordre du jour. Nous traitons d'un projet de loi qui introduit, dans le droit cantonal, les nouvelles dispositions de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire au sujet de l'utilisation de la zone agricole. Ce n'est pas du tout la même chose.
S'il faut préciser alors de quoi nous parlons, je le fais volontiers. La loi fédérale sur l'aménagement du territoire a été assouplie, modestement, mais assouplie quand même notamment en ce qui concerne l'utilisation des terrains en zone agricole. Le nouveau droit fédéral octroie aux cantons un certain nombre de compétences pour réglementer de façon plus fine tel ou tel aspect de la question et en particulier celle des changements d'affectation de bâtiments qui ne sont plus affectés à l'agriculture. Ce projet de loi ne fait rien d'autre que de mettre en musique, sur le plan cantonal, ce nouveau droit fédéral et c'est cette modeste opération que nous vous proposons aujourd'hui d'entériner.
M. René Koechlin (L). J'entends simplement appuyer ce que vient de dire le rapporteur de majorité et préciser encore que cette mise en conformité du droit cantonal résulte d'un vote populaire national qui a eu lieu il y a exactement trois ans et dont la mise en application remonte au mois de septembre 2000. Nous ne faisons que mettre en conformité le droit cantonal avec le droit fédéral. Ce projet de loi a été examiné très en détail et nous avons pu constater que cette mise en conformité est parfaitement correcte. J'invite donc le Grand Conseil a voter ce projet.
M. Alain Etienne (S). Nous voyons maintenant le problème posé par la scission de ce projet de loi en deux parties. Nous avons un débat durant lequel on ne sait plus de quoi l'on parle et il est difficile d'y voir clair. Je pensais m'exprimer sur ces deux projets, mais comme nous les examinons l'un après l'autre...
Je tiens à rappeler en préambule que la gauche et les Verts avaient soutenu le référendum contre la modification de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire. C'est donc dans un esprit d'ouverture et dans le respect de la votation populaire que nous avons travaillé sur le projet de loi proposé par le Conseil d'Etat en janvier 2001. Nous étions parvenus à un consensus dont M. Pagani parle dans son rapport. Soudain, parce qu'il y a eu un changement de majorité, ce projet a été renvoyé en commission pour procéder à des nouvelles modifications. Ce que nous avons compris, c'est qu'il y avait des intérêts particuliers à scinder le projet en deux parce que, semble-t-il, il y avait des autorisations de construire pendantes que M. Moutinot ne pouvait pas accorder. Toujours est-il qu'aujourd'hui, comme M. Muller l'a rappelé tout à l'heure, nous traitons les deux projets en même temps. On ne voit donc pas très bien l'intérêt de cette scission. Pour être cohérents, il aurait fallu maintenir l'unité de ce projet. Vous l'avez scindé, c'était une erreur.
J'interviendrai tout à l'heure au sujet des serres. On voit bien là que l'enjeu de ce projet de loi n'est pas véritablement l'intérêt de l'agriculture, mais plutôt l'intérêt des milieux immobiliers dans le cadre des nouvelles opportunités offertes par la révision de la LAT. Je constate également que vous nous parlez, Mesdames et Messieurs, de la protection du patrimoine alors que quand il est question de protection du patrimoine en milieu urbain, dans la Vieille-Ville par exemple, vous jugez que cette question n'est pas très importante. Il y a là une incohérence de votre part, cela d'autant plus que le rapport de minorité propose un certain nombre d'amendements. Vous avez, Mesdames et Messieurs des bancs d'en face, apporté des modifications importantes au projet de loi du Conseil d'Etat. C'est pourquoi nous refuserons ce projet si vous n'êtes pas d'accord d'entrer en matière sur ces amendements.
M. John Dupraz (R). Comme l'ont dit le rapporteur M. Muller et M. Koechlin, nous devons adapter la loi aux dispositions fédérales. Moi-même, j'étais en commission et j'étais rapporteur de langue française au plénum du National sur cette loi. Je dois dire que nous avons essayé d'établir des règles qui s'appliquent aussi bien à des maisons isolées en zones rurales et agricoles en plaine, qu'aux rusticisitués à 1500 ou 2000 mètres d'altitude. Si j'ai défendu cette loi au niveau fédéral, je dois dire qu'elle n'est pas très heureuse dans son application et qu'elle pose de gros problèmes, à telle enseigne que l'Union suisse des paysans a pris rendez-vous avec le service de l'aménagement du territoire pour voir ce qui devrait être modifié pour améliorer la situation. J'en prends à témoin M. Moutinot: le système précédent fonctionnait bien et, depuis la modification de la loi fédérale, les cantons qui réglaient les problèmes de construction dans la zone agricole avec un certain bon sens et un certain pragmatisme se trouvent maintenant prisonniers de dispositions fédérales bien plus contraignantes qu'avant et qui paralysent ces cantons. Encore une fois, ce sont les mêmes règles qui s'appliquent à Genève à 400 mètres d'altitudes qu'à 2000 mètres et cela entraîne de très grosses difficultés. On n'y peut rien! On ne peut que voter ce projet de loi.
Je ne comprends pas très bien les récriminations de M. Etienne qui se plaint que la nouvelle majorité a voulu modifier les conclusions de la commission. Vous savez, Monsieur, quand vous avez eu la majorité, avec l'Alternative, vous avez aussi voulu changer certaines choses. Nous l'avons accepté, c'est la loi démocratique. Il faudra que vous appreniez, Monsieur Etienne, après quelques années dans ce parlement, que la première règle de la démocratie, c'est la loi des nombres. C'est la première chose. Nous, le groupe radical, nous voterons le projet de loi tel qu'il est défendu par M. Mark Muller et la majorité de la commission en sachant que ce n'est qu'un pis-aller et que nous n'avons pas réglé grand-chose en fait.
M. Rémy Pagani (AdG), rapporteur de minorité. J'ai fait une première intervention pour situer l'enjeu central du débat. L'enjeu périphérique est effectivement compris dans le projet dont nous débattons maintenant, c'est-à-dire le sort de toutes les constructions diverses et variées qui subsisteraient dans la zone agricole. Je pense par exemple à un hangar à tracteur ou à d'autres constructions qui, grâce aux actions de M. Muller, pourraient devenir des logements.
Je vous rappelle, Monsieur Dupraz, la loi fédérale que vous avez votée et qui prévoit que toutes les constructions et installations existantes en dehors de la zone à bâtir ne peuvent pas faire l'objet d'un changement complet.
M. John Dupraz. Hélas, hélas, c'est une ânerie !
M. Rémy Pagani. N'empêche que c'est bien ce que vous avez voté, Monsieur ! Pour contourner cette disposition de la loi fédérale actuelle - autant nous sommes respectueux de la démocratie, autant nous sommes respectueux de la loi...
M. John Dupraz. Quoi ? Vous plaisantez ! (Rires.)
M. Rémy Pagani. Le subterfuge consiste, pour contourner la loi fédérale, à élargir la possibilité de protéger des bâtiments afin de déclarer protégé n'importe quel bâtiment. C'est ce qui est visé par l'alinéa 2, lettre d), de l'article 27D de ce projet de loi. Cela signifie que non seulement dans les hameaux, mais aussi dans la zone agricole, on fera monter artificiellement le prix des terrains. Il est vrai que certains agriculteurs genevois préfèrent être spéculateurs immobiliers qu'agriculteurs. (Brouhaha.)Toujours est-il qu'on engage un processus qui à terme transformera les agriculteurs de ce canton en propriétaires fonciers. De ce point de vue, nous nous opposons à ce projet, non seulement parce qu'il correspond à une logique qui est contraire à l'intérêt de l'ensemble de la population - les capacité de production agricole doivent en effet être maintenues, quoi qu'on en dise - mais aussi parce que ce projet est contraire au droit fédéral.
Mme Michèle Künzler (Ve). La majorité a changé, c'est exact, mais j'aimerais rappeler à M. Dupraz que le projet de loi initial avait été voté à l'unanimité. Je pense que c'était une erreur de le renvoyer en commission. Vous l'avez fait, il faut assumer. Il y a des mois que ce projet de loi traîne et, soyons sérieux, ne porte tout de même pas sur des objets énormes. Nous ne sommes pas au Tessin ou en Valais où il y a effectivement des problèmes avec les rusticiou les mazots qui sont transformés. Il y a peu de ces objets anciens, valables ou moins valables, qui restent en zone agricole non bâtie.
Un amendement malheureux à l'article 27D a été voté en commission qui permet de conserver encore des maisons qui seraient dignes d'intérêt, mais pas trop. C'est un problème marginal et je suis d'accord pour supprimer cette mention. J'aimerais tout de même dire à M. Pagani que ce n'est pas n'importe quel hangar à tracteur qui pourrait être transformé. Ce sont soit des objets qui sont inclus dans un plan de site, soit qui sont classés, soit qui sont mis à l'inventaire. L'amendement voté en commission ajoute à cela des maisons intéressantes. Ce n'est pas n'importe quel hangar à tracteur en métal. Il n'y a pas de «note 4» à l'inventaire pour ce genre d'objet.
Par ailleurs, il est vrai que ce projet de loi introduit une automaticité de toutes les décisions qui nous gênait. C'est une manie de la majorité. Ce genre de proposition revient dans tous les projets de loi. Il est nécessaire que le niveau politique puisse aussi faire une pesée des intérêts. Dans un certain cas un bâtiment peut être intéressant ou moyennement intéressant et doit être maintenu; dans d'autres cas, c'est inadéquat et son changement d'affectation n'est pas tolérable. Nous rappelons que tout cela doit se passer dans le respect de la loi fédérale. Au final, les Verts se sont abstenus en commission parce que ce projet n'est pas de ceux qui sont fondamentaux pour notre république. On peut donc soit refuser ce projet, soit s'abstenir, le monde ne changera pas pour autant!
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Je voulais revenir sur deux ou trois affirmations à l'emporte-pièce de M. Pagani sur les hangars à tracteur et sur la spéculation. Les hangars à tracteur Mme Künzler les a évoqués; en ce qui concerne la spéculation, dont M. Pagani aime beaucoup parler, j'aimerais vous rappeler qu'en zone agricole le prix du terrain est contrôlé. Il est actuellement de six ou sept francs le mètre carré. Ce n'est pas parce qu'on va transformer une ancienne bâtisse de valeur en habitation que le prix va changer. C'est la commission foncière agricole qui fixe les prix autorisés, il n'y a donc pas de spéculation, Monsieur Pagani!
M. John Dupraz (R). Il y a des choses qu'on ne peut pas laisser passer. Tout d'abord, à la représentante des Verts qui dit que ces problèmes ne sont pas fondamentaux pour la république, je répondrai que ce n'est peut-être pas le cas, mais les personnes qui sont touchées par ces problèmes-là se trouvent devant des difficultés énormes à l'heure actuelle.
Ensuite, je constate que M. Pagani sombre dans une démagogie et une polémique stérile et stupide. Monsieur Pagani, dites-moi la différence qu'il y a entre un hameau et un village en zone 4B protégée! Je vais vous le dire. Entre le hameau de la Petite-Grave qui est en zone agricole et le village de Cartigny, le chef-lieu, qui est en zone 4B protégée, la seule différence, c'est qu'en 1961 le législateur n'a pas cru bon d'inscrire les petits villages dans un périmètre de zone à bâtir. Du reste, l'un et l'autre sont des bourgs constitués, ils ont exactement les mêmes caractéristiques typologiques aux points de vue de l'architecture, de la structure de l'habitat et de la configuration des bâtiments.
Par ailleurs, on dit que ces bâtiments seraient entièrement transformés. Monsieur Pagani, je vous rappelle que cette loi ne donne aucune autorisation de construire. Toute la loi sur les constructions et installations diverses s'applique et je peux vous dire, pour avoir vécu une ou deux expériences pour ma famille dans un village en zone 4B protégée, que c'est le parcours du combattant actuellement dans ce canton pour mettre une tuile sur un toit ou faire une fenêtre. M. Moutinot en a parfaitement conscience; il est parfois même désolé des restrictions et des exigences de certaines commissions consultatives. Alors n'allez pas croire, Mesdames et Messieurs, que ce projet de loi permettra d'ici demain de transformer tous les bâtiments, voire les poulaillers, comme le prétend M. Pagani, qui sont en zone agricole! Cela est faux et ce n'est pas l'avis des milieux agricoles. Ce que je tiens à dire à ce parlement, lorsqu'on entend parler ici ou là de transformation partielle d'un bâtiment...
«Partiel», cela signifie qu'une partie du bâtiment doit être laissé à l'ancienne affectation. Et vous savez, Mesdames et Messieurs, qu'avec la libéralisation que connaît l'économie en général et en particulier l'agriculture, énormément de bâtiments se trouvent libérés de toute activité agricole. Ces bâtiments existent depuis un certain nombre d'années et on pourrait y faire des logements pour la classe moyenne, voire la classe aisée. Ce sont des logements qui seraient occupés par des habitants qui libéreraient d'autres logements en ville ou dans la périphérie. Que signifie laisser une partie du bâtiment à son affectation antérieure? Cela signifie loger les araignées! Que faire alors du bâtiment ? C'est une mesure complètement stupide! Cette mesure peut se comprendre pour des rusticiet des bâtiments dans les alpages parce qu'il manque les infrastructures, mais je vous rappelle que dans le hameau de la Petite-Grave, toutes les adductions en eau, les canalisations eaux usées et eaux claires ont été construites. Malgré cela, au nom de la sacro-sainte protection du patrimoine bâti ou de la zone agricole, il ne faut surtout pas toucher des bâtiments et ne pas en construire dans un jardin qui se situerait entre deux maisons alors que cela ne gêne pas et qu'il n'y a aucune affectation agricole. Il faut arrêter d'être aussi absolu! Je crois qu'il faut faire preuve d'intelligence, comme le fait M. Moutinot, ouvrir le dialogue et trouver des solutions. Mais Monsieur Pagani, discuter avec vous, c'est perdre son temps!
Le président. Le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants.
M. Carlo Sommaruga (S). En ce qui concerne la manière de travailler, je m'associe à ce qui a été dit par le rapporteur de minorité et par mon collègue Alain Etienne. Il y avait effectivement un consensus en commission qui s'inscrivait dans la volonté exprimée par le Conseil d'Etat. Il y avait eu un projet de loi qui est arrivé en plénière et qui répondait aux préoccupations de tout le monde dans un parfait équilibre des divers intérêts que cette modification de la LAT touchait. Et la majorité de ce parlement a changé. Cela n'aurait pas dû amener une modification de fond sur ce projet, sauf si une nouvelle formation politique venait à proposer un amendement. Or tel n'était pas le cas: le parti qui a suscité ce revirement était déjà présent lors de la précédente législature. Cela montre bien la manière de travailler de l'Entente sur toutes les lois concernant l'aménagement du territoire. A chaque fois, la droite veut forcer les choses et imposer la vision unilatérale de certains milieux. Je rappelle que la Chambre genevoise de l'agriculture avait donné son accord sur le premier projet de loi, et vous le savez parfaitement, Monsieur Dupraz! C'est uniquement du côté des milieux immobiliers qu'est venue la pression pour casser le consensus, Monsieur le député! (Brouhaha.)
Ce que je constate ici, c'est que M. John Dupraz vient nous dire qu'un certain nombre de bâtiments sortent du régime agricole parce qu'ils ne sont plus utilisés et que M. Mark Muller nous dit en même temps que ces bâtiments sont soumis au régime agricole et, donc, au contrôle des prix. Aujourd'hui, il y a effectivement une pression sur le bâti agricole pour le sortir de son régime particulier et en faire un bâti immobilier destiné au logement. C'est là que réside le problème! Il y a une volonté d'élargir les règles de la LAT pour favoriser l'affectation de bâtiments agricoles à des logements. On ne parle pas de hangars métalliques. C'est un faux débat: il est effectivement question de bâtiments en dur, des granges et autres qui devraient être transformés pour devenir des logements. Quand on vient nous dire qu'il n'y aurait pas de spéculation sur ces bâtiments, c'est évidemment faux: c'est évident qu'il y aura de la spéculation, une augmentation des prix et une pression sur d'autres agriculteurs pour qu'ils rentrent dans cette logique!
C'est pour ces raisons qu'il convient, du point de vue du groupe socialiste, de ne pas entrer dans la logique proposée par la majorité actuelle, logique qui change au gré des mois qui passent.
Présidence de M. Bernard Lescaze, président
M. Christian Grobet (AdG). Je voudrais simplement approuver ce que le rapporteur de minorité à dit tout à l'heure. En effet, s'il y a une zone dans ce canton qui est particulièrement susceptible de faire l'objet de spéculation, c'est évidemment la zone agricole, et M. John Dupraz est bien placé pour le savoir. Je n'entends pas rappeler ici la longue liste d'abus qui ont eu lieu en zone agricole. M. Dupraz les connaît bien parce que lui-même, en tant qu'éminent représentant des milieux agricoles, a très souvent dénoncé ces abus, même parfois avec courage s'agissant de citoyens de son propre village.
Le problème est bien connu, ce qui ne signifie pas pour autant que tous les agriculteurs - loin s'en faut heureusement - sont des spéculateurs. Il n'empêche que si l'on veut précisément éviter la spéculation en zone agricole, il faut prendre des mesures. Heureusement que des mesures ont déjà été prises tout particulièrement à Genève, car s'il y a un canton ou la zone agricole fait l'objet d'une très forte pression, eh bien, c'est précisément dans les cantons-villes comme le nôtre! Les mesures qui sont en place actuellement ont, dans l'ensemble, donné satisfaction.
Par ailleurs, quelqu'un a parlé tout à l'heure de contrôle des prix en zone agricole, prix qui seraient bloqués à six francs le mètres carré. C'est une totale invention, je m'excuse de le dire. Des parcelles agricoles ont fait l'objet de ventes à des prix très divers. Vous savez, Mesdames et Messieurs, que nous ne parlons pas ici des terrains agricoles non bâtis, mais précisément des terrains qui se trouvent dans des hameaux, à proximité, ou en bordure de zone agricole sur lesquels sont érigés des bâtiments. Evidemment, on peut donner à un bâtiment la valeur que l'on entend et dans l'acte de vente on ne distingue pas la valeur du bâtiment de celle du terrain. Il n'y a donc pas de contrôle des prix, comme certains l'affirment à tort. Il ne s'agit pas d'un contrôle, mais d'une fixation de la valeur d'un terrain dans le cadre de l'autorisation de construire.
En outre, je ne voudrais pas faire de la peine à mon ami Rémy Pagani, mais personnellement je ne suis pas opposé à ce que des bâtiments recensés comme dignes de protection fassent partie de la liste de l'article 27D. Le problème, c'est que la rédaction du texte n'est pas satisfaisante. M. Moutinot pourra peut-être le préciser: après avoir quitté un département, la mémoire devient défaillante. (L'orateur est interpellé.)Cela vous arrive aussi, mon cher collègue ! J'ai regardé dans la loi sur la protection de la nature des monuments et des sites, ainsi que dans le règlement d'application, je n'ai pas trouvé précisément de référence au recensement. Ce dont je suis certain en tous cas, c'est qu'il n'y a pas de décision du département en matière de recensement. Le recensement a été fait dans les villages, en zone agricole, et il existe effectivement des valeurs de un à six. Au-dessous d'une certaine cotation, on estime qu'il s'agit de bâtiments dignes d'intérêt. En général, ces recensements ont été faits sous la responsabilité - en son temps - de la commission des monuments, de la nature et des sites. Par voie de conséquence la lettre d) de l'alinéa 2 de l'article 27 doit être rédigée différemment parce que telle qu'elle est actuellement, elle est, à mon avis, inapplicable.
Le problème majeur dans cet article 27D, c'est celui que M. Pagani a relevé relativement à l'alinéa 1, à savoir qu'on laisse entendre que le département serait en quelque sorte obligé de délivrer des autorisations de construire alors que tout le principe de la loi sur les constructions - que M. Muller connaît fort bien pour avoir été, un certain temps, collaborateur à la police des constructions - c'est que l'autorisation n'est délivrée que si certaines conditions sont réunies. La loi ne prévoit pas la délivrance d'autorisations automatiques ou obligatoires. Nous sommes de surcroît en pleine application du droit fédéral et, par voie de conséquence, l'autorisation ne peut être délivrée que dans l'hypothèse où elle est conforme au droit fédéral. M. Pagani propose, à juste titre et comme le prévoit la loi fédérale, de modifier l'article 27D en indiquant à l'alinéa 1 : «Le département peut autoriser...». De toute façon, si la majorité s'entête à vouloir retenir la formulation présentée par la commission, elle frappera un coup d'épée dans l'eau parce que le département - M. Moutinot le confirmera - devra bien procéder à l'examen habituel pour savoir si l'autorisation peut être délivrée ou non. Donc, sur le plan rédactionnel, la proposition issue de la commission me paraît mal rédigée.
M. Rémy Pagani (AdG). Je trouve que le procès d'intention que me fait M. Dupraz est un peu bizarre. Je ne prétends pas connaître, comme lui, les milieux agricoles, mais j'en connais un bout et je pourrais vous citer deux cas, qui me reviennent en mémoire, de poulaillers qui ont été transformés en logements, et même de bûchers qui ont subi le même sort. Pour ceux qui ne savent pas ce qu'est un bûcher, c'est une installation de dix mètres sur dix. Faire un appartement là-dedans, c'est un tour de force, et cela est arrivé. (L'orateur est interpellé.)Oui, sans cette loi, parfaitement! C'est ce qu'il y a de pire. Avec cette loi on pourra faire tout et n'importe quoi!
Je trouve spécial - mais cela fait partie des contradictions habituelles de la droite - d'affirmer que notre pays est petit au point, nous dit-on, qu'on ne peut pas accueillir toutes les misères de la planète, que l'on doit contrôler l'urbanisme et, dans le même temps, lorsque les intérêts bien compris de certains, pas forcément des agriculteurs, mais des propriétaires voisins, on affirme que tout est possible, qu'il faut laisser se développer des petites entités à droite et à gauche... Il est exact que l'on doit contrôler l'urbanisme de notre canton. La majorité de la population habite dans des villes: le cas de la Suisse est exemplaire puisque nous n'avons pas à proprement parler d'arrière-pays. A l'échelle de la planète d'ailleurs, ce sont près de 60% de la population qui résident en ville. Il s'agit, Mesdames et Messieurs d'en accepter les conséquences, c'est-à-dire d'éviter le mitage du territoire, car c'est de cela dont il est question dans ce projet, Monsieur Dupraz!
De plus, la construction de petites entités en campagne nécessitera des investissements de la part des communes. Elle générera des problèmes de pollution importants puisque ces personnes - que vous appelez, Monsieur Dupraz, les classes moyennes et élevées - devront bien se rendre dans les villes pour y travailler à leur poste de direction. Ce sont des allées et venues quotidiennes en voitures. Or, la pollution est déjà un phénomène dramatique dans ce canton.
Je pense pour ma part qu'il faut mettre un terme au double discours : soit on choisit de développer ce canton de manière sensée pour permettre aux gens qui veulent y résider de vivre dans des conditions correctes; soit on revient à la politique en vigueur, il y a trente ou quarante ans, qui consistait à miter le territoire, et que la ville se développe de façon anarchique. Vous pouvez, Mesdames et Messieurs, en voir l'exemple dramatique dans les zones frontalières : il n'y a aucune gestion de l'urbanisme et cela n'engendre que des désagréments pour tout le monde. Ce projet de loi s'inscrit contre la logique d'un aménagement cohérent. C'est la raison pour laquelle nous y sommes opposés, même si, Madame Künzler, il n'est question que de petits objets. On sait bien que le diable se cache dans les détails... Quand on en vient à transformer en logements des poulaillers et des bûchers, c'est que tout passe par le marchandisage, y compris de ces constructions qui peuvent, à un titre ou à un autre, être inscrites à un inventaire. Effectivement, il se trouve que certains bûchers présentent une valeur architecturale intéressante.
M. René Desbaillets (L). Je veux essayer de recentrer le débat. Pour moi, il y a deux questions toutes simples qui se posent : voulons-nous des villages morts et en ruines, comme on en trouve régulièrement dans le sud et le centre de la France, des villages où, à défaut d'agriculteurs et d'habitants, tout tombe en ruines; voulons-nous au contraire conserver une campagne, des villages entretenus et vivants ? J'ose espérer que la totalité de ce parlement répondrait non à la première question et oui à la seconde.
Cela signifie en premier lieu qu'il faut entretenir nos villages et nos hameaux, qu'ils soient en zone agricole, en zone 4B, en zone de village, etc., peu importent ces affectations, ce qui compte, c'est qu'ils soient entretenus. Il y a dans notre campagne des bâtiments qui datent des années 1500, 1600, 1800 qui méritent d'être entretenus. Il est bien clair que le propriétaire de ces bâtiments essaie d'en tirer un certain rendement qui lui permette de les entretenir. Il est donc nécessaire que ces bâtiments soient utilisés. Ce n'est pas de notre faute si, en l'espace de dix ans, quasiment une entreprise agricole sur deux a disparu. Pour vous donner un exemple, Choully, le village où j'habite, est passé de dix exploitations agricoles et viticoles, il y a dix ans, à cinq exploitations aujourd'hui. Cela signifie que cinq familles ont quitté l'agriculture, qui travaillent en ville, mais qui habitent toujours leur demeure. Reste néanmoins les dépendances, les anciennes écuries, les anciennes granges, les garages, les anciens locaux pour le personnel, etc., qui sont désaffectés. Ces locaux tombent en ruines. Je peux vous inviter à faire un petit tour dans la campagne genevoise pour voir le nombre de beaux bâtiments qui tombent en ruines. C'est lamentable ! Et c'est surtout que les gens n'ont ni les autorisations ni, souvent, les moyens de les transformer, ce qui est malheureux.
L'agriculture évolue et nous devons nous restructurer. C'est ce que l'on entend tous les jours de la part du Conseil fédéral. Encore dernièrement, les décisions prises sur la nouvelle politique agricole PA 2007 le confirment! On nous pousse à restructurer, à mécaniser, à agrandir. Une porte de grange qui était faite pour rentrer une vache et quelques chevaux ne laisse pas passer une moissonneuse-batteuse, un enjambeur. Il faut donc adapter les bâtiments, ceux dont on a l'utilité pour l'exploitation. Le reste tombe en ruines. La solution, c'est de changer ces bâtiments d'affectation, d'y faire des logements pour des gens qui aiment vivre à la campagne, dans ces villages, et qui effectueront de jolies transformations satisfaisant aux exigences du site et au maintien de notre patrimoine.
Je pense que ce projet de loi qui vise à assouplir les possibilités de rénovation est indispensable si l'on veut que nos villages restent vivants et ne tombent pas en ruines. C'est très grave de perdre un patrimoine comme celui-ci uniquement sur des questions de principe et de prétendue spéculation. (Applaudissements.)
Mme Michèle Künzler (Ve). J'aimerais, moi aussi, recentrer le débat. Ce projet de loi avait été accepté à l'unanimité. Qu'est-ce qui a changé depuis ce vote en commission? La première modification est le caractère automatique de la décision que nous contestons parce que le département doit avoir un marge de manoeuvre. Il faut pouvoir examiner ce qu'il est possible de faire ou non. Je pense, comme l'a dit M. Grobet, que même si ce projet de loi est voté tel quel, le département se sentira libre de prendre les décisions qu'il veut.
La deuxième modification porte sur l'article 27D. J'ai déjà dit que cette rédaction était malheureuse et M. Grobet l'a dit aussi. Cet article est mal formulé parce qu'il n'y a pas de décision effective. Il faut supprimer cet article ou proposer un amendement avec une modification correcte.
A part ces deux modifications, il n'y a pas d'autres enjeux. Il faut accepter ce projet de loi, du moins lorsqu'il sera amendé dans le sens que je viens d'indiquer.
On peut, par ailleurs, encore relever un problème à l'article 22. J'aimerais bien savoir, Monsieur le président, s'il faut introduire des indications horaires dans la rédaction des projets de loi! En effet, nous allons voter l'article 22 de ce projet de loi et, dans quelques minutes ou quelques heures, nous voterons le projet de loi 8864 avec lequel nous supprimerons l'article 22. C'est ce que je n'aime pas dans la commission de l'aménagement: on y vote tout et son contraire et, finalement, c'est ce que je dénonçais, il n'y a plus de continuité, il n'y a plus de pilote dans l'avion! Des projets de lois contradictoires sont à l'ordre du jour de cette commission qui finit par voter n'importe quoi! J'aimerais bien que le président décide quelque chose en ce qui concerne l'article 22. Si ces deux lois sont publiées dans la même «Feuille d'avis officielle», je me demande ce que les citoyens en penseront.
Le président. Pour moi, la chose est simple: si nous votons ce soir l'article 22 dans la formulation de ce projet de loi et qu'ultérieurement nous votons une autre formulation, il faudra préciser que cette dernière annule celle qui aurait été votée tout à l'heure. C'est tout simple et on ne peut pas procéder autrement.
M. Laurent Moutinot, président du Conseil d'Etat. Je pense effectivement que le problème est plus simple qu'il n'y paraît. Il s'agit de savoir si le département délivre ou peut délivrer l'autorisation. Or, vous allez voter probablement au point 25 de l'ordre du jour une loi qui dit très clairement que, lorsque les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l'autorisation. Dès lors, que l'on «puisse», que l'on «doive», que l'on «délivre», que l'on «délivrât», que l'on «délivrera» - conjuguez-le à tous les temps que vous voulez! - la règle est claire : soit les conditions légales sont réunies et le département doit délivrer l'autorisation; soit elles ne sont pas réunies et le département ne peut pas délivrer. Il y a évidemment, comme dans toute législation, quelques notions qui se prêtent à interprétation, mais fondamentalement nous sommes dans le cadre que je viens d'indiquer et pas dans un autre.
Par ailleurs, il est exact que la formulation de l'article 27D, alinéa 2, lettre d), n'est pas un chef-d'oeuvre. Elle ne vient pas du département. L'idée était, au sein de la commission, qu'un bâtiment qui ne faisait pas encore l'objet d'une mesure de protection, mais dont il aurait été souhaitable qu'il fît l'objet d'une telle mesure, devait pouvoir bénéficier de la dérogation. Cela n'est évidemment pas stupide. Quant à la formulation, je n'ai pas réussi à trouver mieux pendant l'heure de débat que vous avez consacrée à ce projet. Si vous voulez que j'en trouve une entre maintenant et le troisième débat, je veux bien essayer. L'idée était cependant celle que je viens d'indiquer. Il peut en effet arriver, malgré tous les efforts que nous faisons, que l'inventaire ne soit pas parfait, que la liste des objets classés ne soit pas complète. Cette disposition nous permet d'avoir une petite marge de manoeuvre. J'admets que ce n'est pas extraordinaire, mais même si vous votiez cet alinéa malgré les difficultés légales et grammaticales, il me semble qu'on sait de quoi on parle.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat par 45 oui contre 26 non et 4 abstentions.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés, de même que le 2e considérant (nouveau) à l'art. 27C.
Le président. Nous sommes saisis d'un amendement à l'article 27D. Le texte de cet amendement figure à la page 15 de votre rapport.
M. Hubert Dethurens (PDC). Cette lettre d) de l'alinéa 2 laisse une certaine souplesse au département. Cette disposition ne concerne pas les hangars métalliques, comme dirait M. Pagani - quoiqu'on s'apprête bien à classer la patinoire des Vernets, pourquoi pas des hangars métalliques ? Cet alinéa vise des bâtiments qu'il y aurait lieu de maintenir sans qu'il soit possible de les classer. M. Moutinot avait indiqué que, après l'arrêt de l'activité d'un exploitant, on pouvait soit classer, soit mettre à l'inventaire, soit maintenir les bâtiments qui n'auraient plus d'affectation agricole. J'avais demandé ce qu'il arriverait aux autres bâtiments et M. Moutinot m'avait répondu qu'on les raserait. Pour ma part, j'aurais voulu une certaine souplesse. Bien sûr que certains bâtiments méritent d'être rasés, mais pas tous. Il y a certains bâtiments qui doivent être maintenus mais qu'on ne peut pas classer. Le but de cette lettre d), c'est de laisser une certaine souplesse.
En outre, un bâtiment peut aussi être repris par un autre agriculteur. Ce serait un peu ridicule de le faire démolir, alors que trois ans après le voisin se sera développé et aura peut-être besoin du bâtiment. C'est pourquoi je pense qu'il faut maintenir cette lettre d). S'il y a une formulation plus jolie grammaticalement, nous sommes prêts à l'accepter. Dans le cas contraire, je pense qu'il faut voter cet article tel quel.
Le président. Il y a deux amendements sur cet article 27D. Le premier est de nature sémantique à l'alinéa 1. Le second vise à supprimer la lettre d) de l'alinéa 2.
M. Christian Grobet (AdG). J'essayais de freiner un peu votre hâte habituelle...
Le président. Elle n'est pas habituelle. Je tâche de préciser les choses.
M. Christian Grobet. Je vois que cela n'a pas été inutile, car il y a deux alinéas dans cet article et chacun de ces alinéas fait l'objet d'un amendement. La logique veut donc qu'il y ait deux votes distincts.
En ce qui concerne la lettre d) de l'alinéa 2, je ne pense pas qu'il s'agisse seulement d'une question de sémantique. J'ai dit tout à l'heure qu'à mon avis il n'y a pas de décision du département. Il me semble qu'il aurait été plus correct de parler de la cotation comme digne de protection d'un bâtiment dans le cadre d'un recensement architectural. En effet, ces recensements architecturaux ont pour but de donner une cotation, de un à six, aux bâtiments, et c'est en fonction de celle-ci qu'on estime si un bâtiment est digne de protection ou non. Vous connaissez le système peut-être encore mieux que moi, Monsieur le président, puisque vous siégez à la commission. Je n'en fais pas le tour de la main, mais je pense que la formulation que je suggère enlèverait l'ambiguïté de cet alinéa qui se base sur un article qui, à mon avis, n'existe pas.
Le président. M. Grobet nous fournira son amendement que je relirai. Et si M. Pagani retire le sien, il ne s'agira pas d'un sous-amendement.
M. Alain Etienne (S). Pour ma part, je pourrais être d'accord avec le député Dethurens, simplement j'aimerais qu'il y ait une égalité de traitement entre la zone urbaine, ou plutôt la zone à bâtir, et la zone agricole en ce qui concerne la prise en compte des bâtiments qui ont une cotation de 1 à 4 +. J'ai vu en zone à bâtir des bâtiments que l'on voulait raser qui avaient une cote de 4+ et que les milieux immobiliers ne voulaient pas prendre en compte. Alors, d'accord avec la réflexion de M. Dethurens, mais qu'il y ait la même approche en zone agricole qu'en zone urbaine!
M. Rémy Pagani (AdG). J'indique simplement que si l'amendement de M. Grobet est déposé, il est clair que nous retirons l'amendement général sur l'article 27D alinéa 2.
Par ailleurs, Monsieur le président, vous avez indiqué qu'il y avait une modification sémantique à l'alinéa 1; à mon sens, cette modification dépasse la sémantique et porte sur le fond.
Le président. Je reprenais seulement les propos de M. Moutinot. Bien entendu, nous voterons sur votre texte à l'alinéa 1, sur celui de M. Grobet à l'alinéa 2.
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Je voudrais proposer une formulation un peu différente de la lettre d) de l'alinéa 2. Elle me semble répondre à la fois aux considérants développés par M. Pagani dans son rapport en ce qui concerne l'aspect juridique. Je propose le libellé suivant: «L'inscription au recensement au titre de bâtiment digne d'être maintenu.»
M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat. Il me semble que les deux formules, celle de M. Muller et celle de M. Grobet sont très proches. J'ai le sentiment que celle de M. Muller est plus claire dans le sens où elle mentionne le recensement et non pas la cotation. Je vous suggère d'accepter l'amendement de M. Muller, étant précisé une chose - c'est ce que je vérifiais dans la loi fédérale - il faut que le bâtiment ait été placé sous mesure de protection pour que la loi s'applique. Il faut donc que la décision soit préalable, de sorte que la formule trop vague de «digne d'intérêt» entendue a posteriori n'était probablement pas conforme au droit fédéral en toute hypothèse. Ce qui fait que la solution proposée par M. Muller répond à l'ensemble des objections.
M. Rémy Pagani (AdG). Je vous propose, Monsieur le président, de faire voter l'amendement à l'alinéa 1 qui se formule ainsi: «Le département est compétent pour délivrer...» au lieu de: «Le département délivre...».
En effet, il me semble que la discussion qui a eu lieu montre que de toute façon le département n'est pas contraint de délivrer les autorisations. Dès lors qu'une demande lui est présentée, le département doit vérifier qu'elle répond à des critères précis.
Il y a un autre élément que je devrais peut-être mentionner à la fin du débat, mais à ce moment-là tout sera joué, je trouve que le débat d'aujourd'hui montre bien qu'il y avait un problème et je me réjouis de l'avoir soulevé dans mon rapport de minorité.
Le président. Bien entendu, j'allais mettre aux voix votre amendement au premier alinéa. De même, si l'amendement de M. Muller au deuxième alinéa n'était pas accepté, je mettrai aux voix le vôtre, au deuxième alinéa, et, sinon, on reviendra au texte original. Je mets aux voix l'article 27D...
Monsieur Muller, vous voulez la parole? Tout de même, nous sommes en procédure de vote! Tout le monde est d'accord sur la nouvelle formulation, les majorités sont faites. Je ne vois pas pourquoi vous voulez encore parler.
M. Mark Muller (L), rapporteur de majorité. Je vous remercie infiniment de me donner la parole, Monsieur le président. Je voulais dire deux mots sur l'alinéa 1 et sur l'amendement de M. Pagani. Il convient de refuser cet amendement. De toute façon, le département ne délivrera l'autorisation que si les conditions légales sont réunies, notamment celles posées par le droit fédéral. En revanche, ce que permet la formulation votée en commission par rapport à l'amendement de M. Pagani, c'est que, si les conditions sont réunies, alors le département doit délivrer l'autorisation et ne peut pas, sur la base de sa propre appréciation, choisir s'il veut ou ne veut pas la délivrer. La différence est importante, et c'est pour cela qu'il faut rejeter l'amendement de M. Pagani.
Le président. Je mets aux voix l'amendement de M. Pagani tel qu'il figure à la page 15 de votre rapport et tel qu'il nous l'a lu tout à l'heure.
Mis aux voix, cet amendement est rejeté par 40 non contre 33 oui et une abstention.
Le président. A l'alinéa 2, lettre d), nous sommes saisis d'un amendement de M. Muller qui se formule ainsi: «l'inscription au recencement au titre de bâtiment digne d'être maintenu». Cette formulation remplacerait la lettre d) telle qu'elle figure à la page 9 de votre rapport.
M. Christian Grobet(AdG). Je vous prie de m'excuser, mais il y a de nouveau une ambiguïté. Je ne vois pas ce que signifie la mention «au recensement». Il y a des recensement architecturaux et je crois qu'il faut préciser «recensement architectural».
Le président. Vous avez raison et, si M. Muller est d'accord, nous votons sur l'amendement ainsi modifié: «l'inscription au recensement architectural au titre de bâtiment digne d'être maintenu». M. Muller étant d'accord, je mets aux voix cet amendement à la lettre d) de l'alinéa 2, soit : «d) l'inscription au recensement architectural au titre de bâtiment digne d'être maintenu.»
Mis aux voix, cet amendement est adopté à l'unanimité.
L'article 27D ainsi amendé est adopté, de même que les articles 1 et 2 (soulignés).
Troisième débat
La loi 8437-1 est adoptée en troisième débat par article.
La loi 8437-1 est adoptée en troisième débat dans son ensemble par 42 oui contre 33 abstentions.