République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 30 janvier 2003 à 17h
55e législature - 2e année - 4e session - 16e séance
IU 1344
Mme Ariane Wisard-Blum (Ve). Permettez-moi de revenir sur l'affaire des bois de Vernier. Mon interpellation s'adresse donc à Mme Micheline Spoerri.
Samedi, à 18 h 30, trois adolescents de quatorze à seize ans, scolarisés au cycle d'orientation et au collège, jouent dans les bois de Vernier. Au même moment, deux agents de police recherchent un ou des malfaiteurs dans ces mêmes bois. Il fait sombre; les policiers confondent les enfants avec leurs suspects, tandis que les enfants croient à une farce de quelques camarades - les récits des deux parties divergent sur ce point. Ce dont il est certain, c'est qu'un chien policier est lâché et attaque. Résultat: un adolescent souffre d'une vingtaine de morsures au mollet avec lésions musculaires, tandis qu'un autre a été mordu au bras jusqu'à l'os et souffre d'une fracture du coude. Ils sont tous deux encore hospitalisés à la clinique de pédiatrie.
Je ne me permettrai pas de faire le procès des uns et des autres ici. En revanche, je m'interroge: combien d'individus recherchait la police, et quels délits avaient-ils commis ? Pourquoi les rechercher dans les bois de Vernier ? L'évaluation de la situation était-elle de nature à justifier l'ordre donné aux chiens d'attaquer ? Comment se fait-il qu'un chien ait pu mordre aussi gravement deux adolescents, alors que son maître ne se trouvait qu'à une vingtaine de mètres ? Je croyais, naïvement, qu'un chien de police devait immobiliser l'individu suspect sans le blesser. Qu'en est-il de la réalité ? Les policiers ont dû rapidement se rendre compte de leur méprise: pourquoi, dès lors, avoir menotté et enfermé durant trois heures au poste de police, sans soins, deux adolescents gravement blessés et souffrants, qui n'avaient commis aucun délit ? Pourquoi ne pas les avoir immédiatement emmenés à l'hôpital ? Pourquoi avoir détenu au poste de police durant cinq heures le gamin qui n'était pas blessé ? Il n'a en effet été relâché qu'à 23h55 !
Je rappelle que le comité des droits humains a présenté à l'ONU en 2001 les conclusions d'un rapport concernant la Suisse. Ce rapport dénonçait un certain nombre d'abus de la part de la police de notre pays; des informations faisaient notamment état de brutalités policières à l'égard des personnes interpellées et détenues. Ce rapport relevait également que les enquêtes sur ces affaires sont effectuées par la police elle-même, et l'ONU recommandait la création d'un organe indépendant qui puisse mener les enquêtes librement. Depuis, la Suisse est entrée à l'ONU, et Genève est le siège de cette institution. Ne serait-il dès lors pas temps de prendre en compte les recommandations de l'ONU ? Genève devrait être irréprochable en matière de droits humains. Je suis sûre que Mme Spoerri est sensible à cette problématique.
Je conclus mon interpellation par une dernière question: qui va mener maintenant l'enquête sur cette malheureuse histoire des bois de Vernier ?
Le président. Merci, Madame la députée. La réponse de Mme la conseillère d'Etat sera donnée ultérieurement.
Nous avons eu deux interpellations par député, voici maintenant une interpellation pour deux députés. C'est bien, nous progressons chaque jour !