République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 24 octobre 2002 à 20h45
55e législature - 1re année - 12e session - 63e séance
IU 1304
Mme Janine Hagmann (L). Mon interpellation s'adresse à M. Cramer en sa qualité de patron des communes. Elle s'intitule: «Un 1er août sans flammes».
En mai 2000, les communes ont reçu des consignes pour préparer leur feu du 1er août, rappelant l'ordonnance fédérale de 1985 qui interdit l'incinération des déchets hors des installations stationnaires adéquates.
Jusque-là tout est clair pour préparer les feux du 1er août. Chaque collectivité s'est donc ingéniée à collecter des déchets naturels, mais, pour faciliter l'allumage de ces feux, plusieurs communes ont pris, comme d'habitude, de vieilles palettes en bois de sapin, inutilisables, souvent un peu pourries, ce qui va très bien, je le signale, pour retenir les branches et contenir les petits déchets.
Or, quel ne fut pas l'étonnement de certains maires en recevant, il y a quelques jours, une amende de 200 F... (Exclamations .)...au motif que des palettes se trouvaient dans les tas de bois de leur feu de la fête nationale !
Mesdames et Messieurs, la veille du 1er août, un inspecteur du DIAE a fait la tournée de la campagne genevoise pour vérifier la composition des feux des communes... (Rires et applaudissements.)Il a constaté que certaines préparations de feu n'étaient pas conformes à la loi et, au lieu d'empêcher la mise à feu, il a sanctionné les coupables postérieurement ! (Exclamations.)Cela amène quelques questions.
Premièrement, un gendarme laisserait-il commettre un délit pour le sanctionner plus tard ?
Une voix. Bien sûr !
Mme Janine Hagmann. Deuxièmement, n'est-ce pas un vice de forme ?
Troisièmement, les directives reçues par les communes, qui se doivent d'être des modèles, il est vrai, ne vous paraissent-elles pas, Monsieur le président, outrancières pour le seul feu annuel à l'occasion de la fête nationale ?
Quatrièmement, la pollution causée par ces feux dépasse-t-elle vraiment la pollution provoquée par une voiture qui fait le tour du canton ? A moins que l'inspecteur ne se soit déplacé à vélo ?
Cinquièmement, Monsieur le président, quel produit est-il autorisé pour allumer le feu, à part, évidemment, le silex ?
Sixièmement, l'Etat va-t-il publier une liste exhaustive des fournitures que chacun aura l'obligation d'acheter pour son feu du 1er août, ou alors, l'Etat va-t-il prévoir des bûches factices qui éclairent grâce à une alimentation électrique; électricité de production verte, cela va de soi.
Dans le temps, les feux étaient, entre autres, un moyen de communication, deviendraient-ils aujourd'hui, entre autres, une occasion de litige ? (Applaudissements.)
M. Robert Cramer, conseiller d'Etat. Je comprends fort bien que cette affaire se prête à la plaisanterie.
Je pourrais d'ailleurs répondre sur ce ton en vous disant que je perçois avant tout votre interpellation comme un hommage rendu à la fonction publique et, notamment, à ce fonctionnaire qui, au milieu de l'été, n'écoutant que son sens du devoir, a fait le tour des quarante-cinq communes du canton et des quarante-cinq bûchers dressés pour s'assurer des produits qui s'y trouvaient
Mais je vous dirais plus simplement que nous attendons des communes, et je crois d'ailleurs que cela leur avait été clairement indiqué, qu'elles aient un comportement exemplaire.
En matière de destruction des déchets, il faut savoir où commence l'incinération domestique. Elle commence lorsque l'on met à peu près n'importe quoi dans une cheminée.
Aujourd'hui, un certain nombre de cheminées, dans ce canton, produisent plus de dioxine que n'en produit l'usine des Cheneviers. Donc on peut légitimement demander aux communes qu'elles aient, s'agissant de l'incinération des déchets, un comportement qui soit exemplaire.
C'est la raison pour laquelle, en 2000, nous avions attiré l'attention des communes sur le fait que lorsqu'elles confectionnaient leur feu du 1er août, il leur appartenait d'alimenter ce feu avec du bois naturel et de ne pas utiliser de bois traité.
Les palettes, en particulier, auxquelles vous vous référez, et c'est une récente lecture de ce magazine professionnel que vous connaissez peut-être et qui s'appelle «La Forêt» qui me l'a appris, sont beaucoup plus toxiques à la destruction que les palettes en plastique parce que les traitements qu'elles subissent... (Brouhaha.)...rendent les émanations qu'elles dégagent au moment où elles brûlent particulièrement nocives.
C'est la raison pour laquelle nous vous avions donné ces directives, et nous imaginions que vous les suivriez. Il se fait qu'un certain nombre de communes... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, il reste trente secondes au président !
M. Robert Cramer. ...heureusement peu nombreuses au demeurant, ont voulu marquer le 1er août de cet esprit frondeur... (Rires.)...qui peut être le leur, cet esprit, du reste, qui rend hommage à nos ancêtres factieux, comme le souffle M. Vanek, qui ont fondé la Confédération, les Waldstätten.
Cela devait être sanctionné et cela l'a été, mais modestement, puisque vous savez que l'amende administrative possible se situe entre 100 F et 60 000 F. Par conséquent, cette amende de 200 F, vous nous l'avez dit, se veut purement éducative... (Rires.)
Une voix. Tout le monde s'en fout !
M. Robert Cramer. Je pense que ce moment de fraude passé, l'année prochaine... (Brouhaha.)
Le président. S'il vous plaît, Mesdames et Messieurs, ça sent le brûlé !
M. Robert Cramer. ...nous aurons le plaisir de nous rencontrer autour d'un feu du 1er août, mais un feu du 1er août fait à partir de bois indigène provenant de nos forêts cantonales. (Applaudissements.)
Cette interpellation urgente est close.