République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 14 juin 2002 à 20h15
55e législature - 1re année - 9e session - 46e séance
M 1452
Débat
M. Charles Beer (S). Mesdames et Messieurs les députés, la motion que nous vous proposons d'examiner et de renvoyer au Conseil d'Etat s'inscrit dans la lignée des travaux que nous avons organisés, suite à notre décision de subventionner un film participant à l'oeuvre de capitalisation de notre mémoire, concernant les tragiques événements de la Seconde Guerre mondiale et le rôle de notre pays. Plus précisément, nous pouvons dire que ce film s'insère dans un dispositif beaucoup plus large, qui a amené la Suisse à revisiter son passé, tant sur un plan politique que sur un plan économique - je pense ici aux banques de notre pays. Le Grand Conseil et le Conseil d'Etat ont misé sur la qualité d'une équipe pour réaliser un tel film, qui s'est tourné sans la moindre pression politique, ni du Conseil d'Etat, ni du Grand Conseil, même si certains auraient bien entendu aimé qu'il en soit différemment.
Cela dit, ce film est l'oeuvre de réalisateurs, de journalistes, d'historiens et de témoins de qualité. Cela en fait quelque chose d'unique, puisque le canton de Genève aura ainsi subventionné un travail historique qui interroge notre passé. Est-il pour autant acceptable que le Grand Conseil s'ingère dans les compétences du département de l'instruction publique, en disant ce que celui-ci devrait faire et, plus grave, en disant ce que les enseignants devraient enseigner ? Quoi qu'il en soit, les quelques pressions que nous avons subies au moment où nous rédigions la motion m'amènent à poser cette question. Nous tenons à remarquer que ce film doit nous aider non pas à dire ce qu'il faut faire, non pas à modifier la loi sur l'instruction publique, non pas à modifier tel ou tel règlement, encore moins à modifier les plans d'étude. Il s'agit plutôt ici d'aider le département de l'instruction publique à concrétiser le plan d'étude, en donnant notamment à l'éducation citoyenne toute la place qui lui revient à l'intérieur du cycle d'orientation, une place que, tout le monde ici le sait, la grille horaire ne garantit plus.
Notre volonté ici est donc une concrétisation du plan d'étude, plutôt qu'une quelconque ingérence dans les affaires du département de l'instruction publique. Nous connaissons un peu les réactions de ce département et, à cet égard, j'aurais préféré que Mme Brunschwig Graf soit là, non pas que M. Unger qui la remplace ne soit pas à la hauteur, mais tout simplement parce que nous avons l'habitude de la rhétorique de Mme Brunschwig Graf, qui régulièrement nous dit que tel projet de loi concernant l'instruction publique est inacceptable, qu'il existe deux sortes de motions, celles dont elle nous dit: «Nous ne vous avons pas attendus pour traiter ce sujet», et celles: «Vous n'y pensez pas, il n'est pas question que nous le traitions»... A partir de là, il est difficile aujourd'hui de discuter d'instruction publique dans cette enceinte. C'est pourtant ce que les motionnaires vous invitent à faire, en renvoyant la motion au Conseil d'Etat, parce qu'il s'agit ici d'entretenir le souvenir de ce qui s'est passé, non pas comme le ferait un musée, mais bien pour faire vivre les interrogations, sachant que ces interrogations déploient leurs effets jusque dans notre présent. Nous aurons d'ailleurs encore l'occasion d'en parler au point suivant de notre ordre du jour, à propos d'une pétition qui ne concerne pas une question d'histoire, mais une question d'actualité. L'éducation citoyenne dans l'instruction publique joue aujourd'hui un rôle absolument incontournable, non seulement pour permettre d'interroger notre passé, mais également pour questionner notre présent et pour assurer, d'une manière plus générale, l'esprit critique que la loi sur l'instruction publique propose de promouvoir.
M. Patrick Schmied (PDC). En règle générale, nous sommes bien évidemment opposés à l'idée que le Grand Conseil se mêle des programmes de l'institution scolaire. Cependant, vu l'importance du sujet et le fait qu'il a fait l'objet d'un débat national auquel nul n'a pu échapper, nous soutiendrons cette motion. Car, enfin, ce Grand Conseil doit être cohérent: si nous avons accepté de soutenir la réalisation de ce film, c'est que nous pensons qu'il doit être diffusé. D'ailleurs, on nous annonce logiquement qu'il sera mis à disposition de tous les cycles d'orientation. Ainsi, Mesdames et Messieurs les députés, si nous ne rendons pas sa diffusion obligatoire, cela signifiera que nous abandonnons la responsabilité de cette diffusion aux enseignants et aux directions des cycles, et cela ne serait pas juste.
Nous aurions volontiers signé cette motion, si elle n'avait pas été encombrée, dans ses considérants et dans l'exposé des motifs, par tout un salmigondis sur la notion de citoyen opposé à la notion d'homme, qui nous paraissait tout à fait hors sujet. Par ailleurs, nous supportions assez mal, il est vrai, l'invocation de M. Jack Lang, personnage certes fort amusant à la télévision dans sa version des Guignols, mais très peu convaincant quant à l'efficacité de son action, au-delà des salons parisiens.
Cela dit et sans rancune, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs, à soutenir cette motion.
M. Pierre Kunz (R). Mesdames et Messieurs les députés, permettez-moi en préambule de rappeler, à l'attention des motionnaires, une sentence forte, exprimée par Arthur Koestler. Il notait que «les aberrations intellectuelles les plus fréquentes sont dues à la poursuite obsessionnelle d'une vérité partielle, traitée comme une vérité suprême».
Mesdames et Messieurs les députés, la plus grande partie des députés radicaux ont vu le film «Mémoire de la frontière» et ils sont unanimes pour juger cette oeuvre bien faite, intéressante, émouvante. Mais ils sont unanimes aussi, ou presque, pour considérer qu'il ne s'agit pas d'un film historique, retraçant tous les aspects d'un événement ou d'une période de notre histoire. Il s'agit d'un film dont l'objectif est de mettre en évidence des erreurs, des erreurs organisationnelles et opérationnelles plus que regrettables, très lourdes de conséquences, dans les directives de Berne en matière d'accueil des réfugiés, durant la Deuxième Guerre mondiale. Il n'y a rien à redire à cet objectif, à ce parti pris clairement exprimé et précisé par les auteurs du film, mais il est malhonnête de faire croire que la politique de la Confédération en matière de réfugiés fut lamentable et scandaleuse. Cette politique, dans un contexte militaire, économique, social extraordinairement lourd et dangereux pour notre pays, fut aussi, avant tout peut-être, fondée sur la générosité, même si cette générosité fut bridée par un réalisme politique que les soixante années qui se sont écoulées depuis cette époque nous empêchent aujourd'hui de juger avec objectivité, en toute connaissance de cause. C'est pourquoi nous considérons inappropriée la volonté des motionnaires de rendre obligatoire, au prétexte de l'éducation citoyenne, la diffusion de ce film à tous les élèves du cycle d'orientation.
Mesdames et Messieurs les députés, une vraie éducation citoyenne commande en effet qu'un problème ou un événement historique soit présenté et expliqué dans son contexte. S'agissant de ce film, l'honnêteté exige que tout professeur qui décide de montrer «Mémoire de la frontière» à sa classe accompagne cette présentation des explications requises par l'objectivité. Si la présentation est obligatoire, rien n'assure que ces explications seront données. De surcroît, rien ne permet de penser que tous les professeurs d'histoire et de géographie considèrent comme essentiel, prioritaire, de diffuser ce film en complément de leur enseignement. Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs les députés, et contrairement à ce que vient de proposer M. Schmied, nous préconisons - et ceci ne requiert aucun texte législatif - que ce film soit diffusé aux élèves à la décision des enseignants, des directeurs de cycle, comme ceux-ci le ressentent, car c'est bien la moindre des choses que de leur faire confiance. Finalement, nous leur faisons confiance dans bien d'autres occasions, et je crois que là aussi nous pouvons le faire. Les radicaux vous conseillent donc le rejet de cette motion ou, en tout cas, le rejet de la motion dans sa forme actuelle.
M. Blaise Matthey (L). Je m'associe aux propos de M. Kunz en ce qui concerne la façon dont ce film devrait être diffusé. A tout le moins, on devrait regretter de vouloir, comme le désirent clairement les motionnaires, diffuser ce film alors qu'il n'y a pas de dossier pédagogique. Je crois donc qu'il y a un premier manque en ce qui concerne le dossier qui devrait entourer ce film et que, par ailleurs, ce n'est pas aux députés de dire aux enseignants, qui font extrêmement bien leur travail d'éducation citoyenne, ce qu'ils doivent faire. Vous savez que ce film est à la disposition de tous et que les enseignants qui souhaitent diffuser des informations disponibles autour des problèmes rencontrés lors de la Seconde Guerre mondiale en Suisse le feront à l'appui de ce film, que nous avons tous vu et qui est remarquable. Je suis convaincu que beaucoup d'élèves de ce canton ont déjà vu ce film, étant donné qu'il a été diffusé à des heures qui leur permettaient de le voir.
J'aimerais tout de même souligner une chose, par rapport à l'exposé des motifs des motionnaires: il n'y a pas eu des milliers de morts dus au refoulement pratiqué à la frontière genevoise. Selon les archives genevoises, - et notre canton est le seul à disposer d'archives - 884 personnes de confession juive ont été refoulées. Et, le film le dit, sur ce chiffre il n'y a eu que 117 déportations. Bien sûr, c'est trop, c'est beaucoup trop. Il n'y aurait eu qu'une seule déportation, elle aurait été de trop. Mais ce ne sont pas des milliers de morts qui sont dus au refoulement pratiqué à la frontière genevoise.
Mesdames et Messieurs, si l'on veut soutenir l'éducation citoyenne et le faire de manière responsable, la moindre des choses, c'est de ne pas le faire en déformant les chiffres. Et si l'on veut analyser le passé, il n'est pas interdit non plus d'aller rechercher les chiffres dans les nombreux ouvrages qui viennent de paraître sur cette question. Je citerai à cet égard l'ouvrage de Marc-André Charguéraud, intitulé «La Suisse présumée coupable», que l'on devrait distribuer comme manuel d'histoire, si l'on voulait illustrer ces dramatiques événements que notre pays a connus à l'époque, pour les raisons que M. Kunz a expliquées. Pour cette raison, Mesdames et Messieurs, le groupe libéral refusera cette motion.
M. Robert Iselin (UDC). Je voudrais en premier lieu remercier mes collègues Kunz et Matthey de ce qu'ils ont dit, car ils ont en quelque sorte remis l'église au milieu du village. J'ai déposé un amendement, non pas parce que je suis contre la diffusion de ce film, mais parce que je suis contre la pollution de l'esprit de notre jeunesse. Je me sépare de M. Kunz et de M. Matthey sur un point: je pense que si le film projeté est supportable, il est relativement unilatéral. Moi qui ai vécu cette période, je n'y ai pas reconnu l'atmosphère des années 39-45. Et je n'y ai pas vu la résistance du peuple suisse, dont Churchill a pu dire : «Ils ont peut-être fait quelques affaires avec les Allemands, mais ils ont maintenu, au milieu de l'Europe, leur résistance et les idéaux démocratiques.» Et je voudrais dire à M. Beer et à ses collègues que c'est grâce à leurs ancêtres, grâce aux miens, un tout petit peu grâce à moi et grâce à mes compatriotes, que vous n'êtes pas obligés aujourd'hui de dire «Heil Deutschland» ou «Deutschland über alles»!
Une voix. Oh là...
M. Robert Iselin. Oui, Monsieur, oh là ! Il faut que vous sachiez que la vieille génération est choquée, qu'elle est meurtrie par ce qu'on a dit. Car nous nous sommes battus comme des fous. Et quant à l'attitude de la jeune génération, qui consiste à nous lancer des pierres, c'est dégueulasse ! Je regrette de le dire, c'est dégueulasse.
Je demande donc, dans la mesure où ce film est projeté, qu'on fasse appel à des représentants de ma génération, pour qu'ils aient le droit d'expliquer aux jeunes ce qui, vraiment, s'est passé. C'est tout ce que je demande. L'amendement que j'ai présenté peut être corrigé, je m'en remets à votre Grand Conseil. Je trouve celui proposée par M. Hodgers - qui a été mon mentor lors d'un discours mémorable - un peu faible, mais, si vous le préférez, je m'en accommoderai.
Le président. Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs, que nous passerons ensuite au point 34, pétition 1380-A, puis au point 34bis, motion concernant les camps de vacances, que vous avez accepté d'introduire dans notre ordre du jour. La parole est à M. Apothéloz.
M. Thierry Apothéloz (S). Je ne peux évidemment pas être d'accord avec l'orateur précédent, avec les termes qu'il a utilisés, ni dans le fond, ni dans la forme. Le parlement a voté, il y a quelques années, l'option au sein du département de l'instruction publique de l'éducation citoyenne. Pour cela, des enseignants, principalement en histoire et en géographie, ont été formés, afin de sensibiliser leurs élèves à la notion de citoyenneté au sens large. Notre proposition ne vise qu'à proposer aux enseignants un outil, afin de développer cette éducation citoyenne. Pour celles et ceux qui auraient du mal à lire la page 2, la motion invite simplement le Conseil d'Etat «à assurer la diffusion du film «Mémoire de la frontière». Pour ceux qui souhaiteraient se plonger dans un dictionnaire, la définition du mot «assurer» est la suivante: «Faire qu'une chose fonctionne.» En effet, le sens de cette motion est de permettre aux enseignants et aux directions des différents établissements scolaires d'utiliser ce film dans le cadre de l'éducation citoyenne, et c'est à ce titre uniquement que je vous invite, Mesdames et Messieurs les députés, à soutenir cette motion et à l'envoyer au Conseil d'Etat.
Le président. Mesdames et Messieurs, le Bureau vous propose de clore la liste des intervenants. Sont inscrits : M. Christian Grobet, M. Antonio Hodgers, M. Christian Brunier, M. René Koechlin et M. Pierre-François Unger pour terminer.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
M. Christian Grobet (AdG). Monsieur Iselin, je n'ai pas votre âge, mais je suis tout de même né au début de la Guerre et, comme petit enfant, j'ai été confronté à tout ce qui s'est passé durant la Guerre. Je tiens à dire que je ne mets pas en doute votre sincérité, je doute tout au plus que des jeunes vous jettent des pierres... C'est peut-être l'impression que vous avez, je le regrette.
Ici, je voudrais rappeler que la dernière Guerre a quand même produit quelque chose de tout à fait particulier, c'est l'Holocauste. Aujourd'hui, il y a des gens qui nient l'existence de ce fait épouvantable de l'histoire contemporaine. Les négationistes, ça existe. Pour ma part, je me souviens qu'on disait, au lendemain de la Guerre: «Plus jamais ça ! Plus jamais ça !» A noter qu'il y a eu ces dernières années, dans certains pays, qui plus est en Europe, en ex-Yougoslavie, des événements épouvantables qui ont rappelé ces tragédies de la dernière Guerre. Je crois qu'une des leçons que toutes les démocraties ont apprise au sujet de cette tragédie, c'est qu'on doit en parler, qu'on doit informer la jeunesse. Elle doit savoir ce qui s'est passé et ce que représentait «Deutschland über alles», que vous rappeliez effectivement, Monsieur Iselin. Quand je vois aujourd'hui des jeunes qui, sans connaître précisément cette partie de l'histoire, glorifient les emblèmes nazis, je trouve ça épouvantable ! Mais je me dis que ces jeunes ne sont pas au courant...
Nous avons donc un devoir de faire connaître à la jeunesse ce qui s'est passé. Vous avez raison sur un point: face à ces faits historiques qui ont forcément touché également notre pays, il n'y a pas qu'une vérité. Mais il faut quand même faire connaître un certain nombre de choses, et je pense que notre pays a eu tort de ne pas mettre en évidence certains actes également commis en Suisse. Je me souviens qu'on nous apprenait, enfants, que la Suisse avait été parfaite durant la dernière Guerre. Or ce n'est pas le cas ! Mais je ne veux pas mettre tout le monde dans le même sac, car il y a des gens ici dont la famille a été active dans l'autre camp et il y a aussi beaucoup de Suisses qui se sont battus pour aider ceux qui fuyaient la botte hitlérienne.
Je ne vois pas, pour répondre à ceux qui s'opposent à cette motion, ce qui vous empêche de l'accepter. J'ai entendu tout à l'heure un député dire: «On ne va pas obliger chaque enseignant à présenter ce film.» Mais je ne vois pas dans le texte de la motion une obligation pour chaque enseignant de présenter ce film !
M. Pierre Kunz. Si, c'est exactement ça !
M. Christian Grobet. Laissez-moi finir, Monsieur Kunz ! Dans la motion, on invite le Conseil d'Etat à assurer la diffusion du film «Mémoire de la frontière» à l'ensemble des élèves. Oui, assurer, c'est-à-dire tenter de faire en sorte que le film parvienne partout. Mais on ne va pas donner un ordre de marche à chacun ! Du reste, une motion est un voeu et le Conseil d'Etat saura l'interpréter d'une manière raisonnable. Quand vous dites qu'il devrait y avoir des explications en relation avec ce film, je suis tout à fait d'accord avec vous. On ne peut pas simplement présenter ce film sans autre.
Je crois que vous avez une drôle d'opinion du département de l'instruction publique et tout particulièrement de sa présidente qui, je crois, face à ce film-là, saura prendre les mesures nécessaires pour que, lorsque le film sera envoyé dans les écoles, il y ait des documents d'accompagnement, qu'on explique comment ce film doit être présenté. Je ne peux pas concevoir que tel ne sera pas le cas. Et je ne vois pas Mme Brunschwig Graf faire ce que, selon vous, la motion lui demande de faire. Vraiment, Mesdames et Messieurs les députés, ayez confiance dans la sagesse et le savoir-faire du Conseil d'Etat ! (Rires.)Mais oui, parfaitement, je trouve déplorable, Monsieur Kunz, que sur une question aussi grave que celle-ci, sur notre devoir, je dis bien notre devoir, de faire connaître aux jeunes générations ce qui s'est passé durant la dernière Guerre pour que cela ne se reproduise pas, je déplore que vous ne fassiez pas confiance au Conseil d'Etat, et tout particulièrement à Mme Brunschwig Graf.
M. Antonio Hodgers (Ve). Le devoir de mémoire est indispensable à chaque peuple, pour qu'il comprenne d'où il vient. Il est d'autant plus important lorsque ce devoir de mémoire s'adresse aux jeunes générations, qui n'ont pas vécu ces événements qui sont, à l'échelle de l'histoire, récents et que certains dans cet hémicycle ont vécus dans leur chair. Il me semble effectivement que cette motion est particulièrement intéressante à ce niveau-là. La diffusion de ce film dans l'ensemble des cycles d'orientation devrait permettre aux enseignants, à la direction des cycles, d'organiser des débats. Car l'histoire, si elle est le fait d'historiens, est toujours le fait d'hommes qui l'interprètent, à partir de documents, à partir de témoignages, et elle peut toujours, finalement, être discutée. Tous ses aspects ne peuvent pas l'être, car il y a des faits historiques incontestables, mais, dans ses nuances, l'histoire peut toujours donner lieu à des discussions. C'est pourquoi, même si je ne partage évidemment pas le sentiment de M. Iselin, son intervention et la subjectivité dont elle est empreinte font également partie de notre histoire. Et il me semble que discuter, partager ces réflexions, tant avec des personnes comme M. Iselin qu'avec d'autres personnes qui ont vu d'autres réalités à la même époque... (Brouhaha, exclamations.)
Mesdames et Messieurs les députés, il y a un martinet dans la salle, mais est-ce un mâle ou une femelle ?
Une voix. Eteignez la lumière !
Une voix. C'est une Martine ?
Le président. Continuez, Monsieur Hodgers, je suis sûr que vous n'avez pas besoin de notes...
M. Antonio Hodgers. Le martinet est dans la salle, pas Martine. Martine n'est pas dans la salle... (Rires.)
Le président. J'espère que ce n'est pas un oiseau de mauvais augure...
M. Antonio Hodgers. Voilà, le martinet est sorti !
A l'invite de M. Iselin, je fais donc une contre-proposition qui viendrait s'adjoindre à l'invite actuelle et qui dirait: «...à inviter le corps enseignant à organiser des débats enrichis de témoignages de personnes ayant vécu cette époque». J'espère que vous pourrez accepter cet amendement et la motion dans son ensemble.
M. Christian Brunier (S). Mesdames et Messieurs les députés, je ne sais pas qui a vu ce film, mais ceux qui l'ont vu pourront dire que ce film ne juge pas. Il parle bien sûr d'erreurs, de situations scandaleuses, mais ce film parle aussi de la complexité de l'époque et salue aussi des actes de générosité. Ce film montre vraiment la large palette d'attitudes que la population genevoise a eues. Et donc, Monsieur Kunz, il faut faire attention lorsqu'on utilise certains mots pour parler de situations extrêmes, scandaleuses. Vous parlez d'«erreurs organisationnelles plus que regrettables», or on ne peut pas réduire ceci à une erreur organisationnelle. Il y a eu des erreurs politiques scandaleuses, odieuses.
Au niveau de l'historique du film, Charles Beer l'a dit, ce film a échappé au contrôle politique. C'est vrai et c'est tant mieux. Mais si on reprend l'histoire de l'élaboration du film, on peut dire qu'on a eu chaud ! Une partie de celles et ceux qui, en commission, au tout début des travaux, voulaient instaurer un contrôle politique, demandaient une commission de suivi du film, demandaient de pouvoir, en commission parlementaire, choisir les experts de ce film, contrôler le scénario. Ces personnes ont échoué en plénière, parce qu'en plénière aucune d'elles n'a osé dire ce qu'elle avait dit en commission, loin des caméras, loin des journalistes, loin du public. Ce film a donc pu voir le jour et c'est tant mieux. Aujourd'hui, plus ou moins les mêmes personnes essaient d'empêcher la diffusion de ce film. Elles ne sont pas arrivées à empêcher sa réalisation, elles veulent donc empêcher sa diffusion: on retombe dans une moralisation et un contrôle politique inacceptables.
Monsieur Iselin, vous avez raison: beaucoup de personnes de votre âge ont été remarquables, ont lutté contre le nazisme, ont donné leur vie pour lutter contre ces thèses intolérantes. Mes grands-parents sont d'ailleurs morts dans la lutte contre ces horreurs nazies. Mais je pense qu'aujourd'hui ce film permet justement de dire aussi aux jeunes générations qu'il ne faut pas oublier cette période dramatique, qu'il y a un devoir de mémoire. Finalement, je dirai une chose: je pense qu'il y a un parti qui ne peut pas revendiquer ce soir les idées de résistance contre le nazisme, alors qu'on a entendu ce même parti, il y a vingt-quatre heures, faire des déclarations odieuses en interpellation urgente, qui rappellent malheureusement un triste passé !
M. René Koechlin (L). Je ne pensais pas prendre la parole, mais j'aime la proposition d'amendement de M. Hodgers. C'est en tant que témoin de cette époque que je m'adresse à vous. D'aucuns savent que j'ai vécu la débâcle, que j'ai vécu à Paris jusqu'en 1944, que j'ai eu plusieurs fois l'occasion de passer la frontière suisse avec des convois de la Croix-Rouge réservés aux enfants, que j'ai vécu pendant trois ans à côté d'une compagnie de SS. En 1944, nous avons dû quitter Paris précipitamment et demander d'être rapatriés d'urgence, parce que ma mère avait participé à des réseaux de résistance, parce que nous avions hébergé, à la barbe de ces SS, un certain nombre de juifs ou de résistants, un parachutiste même, et parce que le réseau auquel ma mère appartenait avait été démantelé fin 1943.
Le devoir de mémoire est indiscutable. Il faut que les jeunes générations sachent quels ont été, dans les moindres détails, les événements dramatiques que l'Europe et le monde ont connus pendant ces années difficiles, ces années noires. Mais il faut que ces témoignages soient absolument objectifs et c'est là toute la difficulté. Je n'ai pas vu le film en cause, de sorte que je m'abstiendrai sur celui-ci. Mais je romps une lance concernant les témoignages et l'information, aussi objective que possible, à l'intention de la jeune génération. Je crois que cela est extrêmement important. Il faut que les jeunes réalisent dans quelle situation délicate se trouvait la Suisse, complètement encerclée, comme un îlot dans la tempête. Elle accueillait chaque année des dizaines de milliers de personnes qui cherchaient refuge, mais elle en refoulait aussi, pour des raisons que je ne suis pas en mesure de pouvoir expliquer ni analyser. Il n'y a donc pas de doute quant à l'attitude pour le moins ambiguë de notre pays à cette époque. Mais elle était ambiguë aussi de par la situation dans laquelle la Suisse se trouvait, une situation évidemment très difficile, car notre patrie devait maintenir son indépendance, bien sûr toute relative puisqu'elle était matériellement dépendante des nazis qui l'entouraient. Cela n'était donc pas si simple. L'éclairage que l'on doit apporter sur cette période doit être extrêmement complet et relater la complexité des problèmes auxquels notre pays était confronté, ainsi que la diversité des opinions. Parce qu'il y avait des nazis convaincus en Suisse, et nous en avons connu ! Il y avait à côté de mes grands-parents à Blonay, où je passais mes vacances grâce à la Croix-Rouge, qui nous convoyait chaque été pour trois mois, une villa occupée par un agent de la Cinquième colonne. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de vous expliquer ce qu'était la Cinquième colonne: c'était les espions nazis. Or, ils habitaient là en toute impunité, en toute tranquillité, ils avaient même une antenne dans le peuplier à côté de la maison, qui leur permettait de communiquer avec leurs commanditaires. Et, contraste frappant, dans la maison voisine, de l'autre côté de la route, il y avait un juif réfugié, un dénommé Oppenheim. Et ces gens coexistaient, là. On ne savait pas très bien comment les choses allaient se passer. Il y avait une espèce de suspense entre ces entités totalement antagonistes, qui vivaient comme cela, en voisinage, sous nos yeux.
Ceci n'est qu'un exemple, mais qui illustre les contradictions que l'on trouvait dans absolument tous les recoins de notre pays. Il sera toujours extrêmement difficile de relater ces événements paradoxaux sous leur vrai jour et dans toute leur complexité.
Ce que je voulais dire, c'est que face à une motion comme celle-ci, je salue l'amendement de M. Hodgers, parce que si un film a peut-être sa raison d'être - je répète que je ne l'ai pas vu, je ne peux pas le juger - il me paraît extrêmement important d'organiser des débats enrichis de témoignages de personnes qui ont vécu cette époque. Parce qu'ils constituent un des biens les plus précieux. C'est précisément un modeste témoignage que, ce soir, j'ai tenté de vous présenter.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. Tout a été dit s'agissant des émotions que les uns et les autres peuvent ressentir: les plus âgés se souviennent simplement d'une période qu'ils ont vécue, avec tous ses troubles, toutes ses complexités, toutes ses ambiguïtés, toutes ses ambivalences, toutes ses dualités, tandis que les plus jeunes soulignent à juste titre l'impératif de mémoire que notre peuple doit avoir sur cette période d'une extrême complication. Personne dans ce parlement ne songerait à interdire les émotions, pas plus que nous ne songerions à autoriser l'oubli de ce pan d'histoire que nous avons découvert, certains plus tardivement que d'autres, il est vrai. Néanmoins, la question que pose votre motion, mais peut-être l'ai-je mal lue ou mal interprétée, va un peu au-delà. Il n'y aurait aucune difficulté si la formulation, comme je la comprends tout du moins, n'imposait pas une démarche et un outil pédagogique uniques pour aborder un pan particulier de l'histoire. Notre parlement n'a jamais fait ce type d'erreur et il ferait bien de s'en garder.
M. le député Beer a raillé Mme Brunschwig Graf avec un certain talent, mais sans élégance, vu l'absence de celle-ci. Si M. Beer avait connu - mais il est vrai qu'il est un peu jeune - l'acharnement de M. Chavanne, pendant plus de vingt ans, à refuser que les libéraux se mêlent du matériel pédagogique que l'on voulait imposer à l'instruction publique, il serait bien inspiré de se rappeler de la protection que tous les parlementaires avaient offerte à M. Chavanne...
Monsieur Hausser, vous feriez mieux de sortir, plutôt que de vous comporter comme un singe !
Une voix. Bien dit ! (Applaudissements.)
M. Pierre-François Unger. Je le répète : il ne fait aucun doute pour le Conseil d'Etat que ce document représente un des documents fondamentaux pour témoigner de la période de l'histoire dont vous avez beaucoup parlé ce soir. Mais il en existe d'autres. Saviez-vous qu'un professeur du cycle d'orientation a rédigé un livre qui s'intitule «Le Rapport Bergier à usage des jeunes adolescents», revu par M. Bergier qui le trouve remarquable ? Allez-vous, Monsieur Beer, en rendre la lecture obligatoire ? Et jusqu'où pousserez-vous cette manie d'imposer du matériel pédagogique là où personne ne conteste la qualité de celui qui est à disposition, là où personne ne conteste l'importance de sa mise à disposition, mais là où le Conseil d'Etat n'entend pas se faire imposer un matériel unique par le parlement ?
Le président. Trois amendements ont été déposés: je propose aux trois auteurs de prendre quelques minutes pour les présenter.
M. Pierre Kunz (R). J'ai été très heureux d'entendre M. le conseiller d'Etat Unger s'exprimer parce que, si j'ose dire, les Laconnésiens se rencontrent. En effet, je vous ai présenté un amendement qui, me semble-t-il, va dans le sens de ce qu'il disait et pourrait recueillir l'assentiment général. Dans cet amendement, l'invite est remplacée par: «...à mettre le film Mémoire de la frontièreà disposition de tous les enseignants d'histoire et de géographie des degrés secondaires - car il n'y a pas de raison d'exclure le collège - qui en feront la demande, en vue de sa diffusion dans leurs classes».
Une voix. Mais c'était clair comme ça !
M. Pierre Kunz. Eh bien, puisque c'est clair, il vaut mieux que ce soit clair de cette manière, plutôt que de la vôtre.
M. Robert Iselin (UDC). Je l'ai dit tout à l'heure: vu les relations amicales que j'ai avec M. Hodgers et comme j'apprécie la proposition qu'il a faite, cela m'importe peu que l'amendement de M. Hodgers soit préféré au mien par ce Grand Conseil. Cela dit, je voudrais simplement préciser, parce qu'il m'a semblé comprendre que M. Grobet pensait que j'étais opposé à la diffusion de ce film, que ce n'est absolument pas le cas ! Je pense qu'il doit être vu, mais je pense en même temps que les élèves de nos écoles doivent entendre les gens de ma génération, qu'ils sachent ce que nous avons vécu et combien nous avons lutté. J'aimerais qu'on aille leur dire aussi que la Suisse a sauvé deux cent vingt mille juifs pendant la guerre, alors que les Etats-Unis en ont sauvé vingt mille. Après cela, on a osé nous cracher dessus. Je regrette, vous permettrez que je sois indigné.
Le président. Monsieur Hodgers, vous voulez présenter votre amendement? Non, votre amendement est clair...
M. Jean Spielmann (AdG). Je ferai une intervention très rapide par rapport aux amendements et à la motion. Lorsque nous avions présenté et débattu de ce film dans ce Grand Conseil, j'avais fait un amendement, en demandant que ce parlement renonce à contrôler ou à mettre en place des mesures qui auraient permis de vérifier le contenu du film. Je pensais qu'il était normal qu'un tel film soit librement tourné par les responsables, qui avaient choisi les thèmes et les personnes à auditionner. Cela étant, je considère pour ma part que de grands volets de l'histoire ne sont pas contenus dans ce film, notamment une certaine réalité politique de ce canton, durant les années trente et quarante. A cette période, des gens ont été chassés de ce parlement, précisément parce qu'ils avaient face à eux suffisamment de personnes influentes désirant instaurer un certain ordre, qui puisse davantage plaire aux Allemands. Il faut savoir, par ailleurs, que deux cents personnes ont été déclarées inéligibles et interdites de droits politiques dans ce pays, que beaucoup d'entre elles ont été emprisonnées parce qu'elles avaient aidé des résistants, que beaucoup d'entre elles ont subi des dommages très importants du point de vue professionnel, qu'on leur a supprimé le droit au logement, le droit de faire de la politique, le droit d'association. Tout cela est ignoré dans le film et ignoré volontairement, pour des raisons politiques.
J'ai dit que je ne demandais pas de contrôle: laissons la liberté aux gens de dire ce qu'ils ont à dire et de faire le film qu'ils veulent faire. Mais, aujourd'hui, je pense qu'il n'est pas juste d'imposer une seule version de l'histoire, d'imposer ce film qui occulte une bonne partie de la réalité. Je me permets tout de même de rappeler que dans cette enceinte siégeaient à l'époque des personnes qui venaient en chemises noires et en chemises grises, et qui défendaient les idées fascistes. Ces parlementaires ont décidé de chasser ceux qui pensaient différemment; ils ont essayé de faire place nette pour mieux préparer le pays à se soumettre aux Allemands ou, éventuellement, à ne pas subir trop de dommages si ces derniers venaient. En occultant toute cette partie de l'histoire, qui a tout de même considérablement chamboulé la Genève des années trente et quarante, le film donne une image historiquement incorrecte et injuste de ces événements. Je ne dis pas qu'il ne doit pas être diffusé: je l'ai déjà dit, je me battrai pour la liberté d'expression. Mais imposer aux enseignants ce film qui occulte une partie de la réalité, c'est aussi une manière plus ou moins discutable de présenter l'histoire.
Par ailleurs, certains ici présentent des amendements qui parlent «d'imposer aux maîtres de classe, aux responsables de l'enseignement de l'éducation citoyenne respectivement, de faire...», alors que ce n'est pas le rôle du parlement d'imposer, d'exiger une orientation des enseignants, une orientation de l'histoire ! Je pense qu'il appartient effectivement à chacun de choisir les témoins qu'il entend écouter. Certains témoins qui ont été emprisonnés à cette période-là sont toujours en vie. Je pense notamment aux résistants qui, à l'époque, sont allés aider la République espagnole et qui, aujourd'hui, ne sont toujours pas amnistiés et qui subissent encore les conséquences de leur engagement. Ils avaient tout quitté pour aller défendre la République espagnole, car ils avaient bien compris à ce moment-là que c'était contre le fascisme qu'il fallait se battre. Tout cela, Mesdames et Messieurs les députés, fait aussi partie de notre histoire, cela fait aussi partie de la réalité, et il faut donc que cette réalité soit plurielle, que les gens s'expriment. Quand on veut être historien et faire la leçon aux autres, il faut au moins avoir l'honnêteté de présenter un volet complet de ce dont on parle. Voilà pourquoi, Mesdames et Messieurs, je ne voterai pas cette motion.
Le président. Je suis navré, ce débat commence à prendre du temps et je ne suis pas sûr qu'on arrivera au bout... Comme je vous l'ai annoncé, après le vote sur cette motion, nous passerons à la motion sur les camps de vacances que vous vouliez traiter impérativement ce soir, parce qu'elle concerne une subvention et qu'il est important de décider rapidement si cette somme doit être débloquée ou non.
Je vais maintenant vous faire voter sur les amendements; il y en a trois. Celui de M. Kunz n'est pas très clair : je ne sais pas s'il s'agit d'une invite supplémentaire ou si cet amendement remplace l'invite actuelle. Monsieur Kunz, j'aimerais avoir cette précision pour faire voter, s'il vous plaît. Ce n'est pas la peine de développer, précisez simplement votre pensée.
M. Pierre Kunz (R). Monsieur le président, dans mon esprit, l'invite proposée remplace celle de la motion. Ceci dit, pour mettre les choses au point, je suis prêt à la modifier de la manière suivante. A la place de «...à mettre le film Mémoire de la frontièreà disposition...», je suis prêt à écrire: «...à recommander la diffusion du film Mémoire de la frontièreet à le mettre à disposition de tous les enseignants». Deuxièmement, les radicaux seront prêts à accepter, à la suite de cette invite, celle proposée par M. Hodgers.
Le président. Mesdames et Messieurs, tous les amendements sont à peu près équivalents du point de vue de leur éloignement d'avec le texte d'origine. Dès lors, si, comme M. Kunz vient de le dire, il y a une condition à l'invite des radicaux, je vous suggère de voter d'abord l'invite de M. Hodgers. Monsieur Unger, vous avez la parole.
M. Pierre-François Unger, conseiller d'Etat. La formulation proposée par le député Kunz paraît effectivement correspondre exactement à ce que nous pouvons non seulement accepter, mais souhaiter. A titre personnel, je vous recommanderais également d'adopter l'amendement de M. Hodgers, qui complète de manière heureuse la vision d'une pédagogie critique et non monolithique. Je vous remercie.
Une voix. Monsieur Iselin retire son amendement.
Le président. Je vous remercie, Monsieur Iselin.
M. Charles Beer (S). Il est vrai qu'il y a parfois des divisions stériles, mais il y a parfois une hystérie du consensus qui trouble. En l'occurrence, nous nous trouvons ce soir dans la deuxième situation. J'aimerais dire que, s'il s'agit d'«encourager la diffusion de ce film», nous serons bien entendu dans le cas de figure que j'évoquais tout à l'heure, c'est-à-dire que le DIP nous répondra: «Nous y avions déjà pensé, nous n'avons pas besoin de vous.» En outre, quand on ajoute à cet amendement celui proposé par M. Hodgers, soit la nécessité d'organiser, en plus, des débats avec des témoins, il y a fort à parier que ce sera plutôt une difficulté supplémentaire pour la diffusion du film. A force d'amendements pour rallier tout le monde, nous pouvons être sûrs d'une chose, c'est que cette motion n'aura plus aucun sens.
Le président. Bien, je fais voter l'amendement de M. Kunz: «à recommander la diffusion du film « Mémoire de la frontière » et à le mettre à disposition de tous les enseignants d'histoire et de géographie des degrés secondaires qui en feront la demande en vue de sa diffusion dans leurs classes».
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Le président. Nous mettons maintenant aux voix l'amendement de M. Hodgers, qui s'ajouterait à celui que nous venons de voter. Il se formule ainsi : «à inviter le corps enseignant à organiser des débats enrichis de témoignages de personnes ayant vécu cette époque».
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mise aux voix, la motion 1452 ainsi amendée est adoptée.