République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 25 avril 2002 à 17h
55e législature - 1re année - 7e session - 30e séance
IU 1238
M. Patrick Schmied (PDC). Cette interpellation s'adresse à Mme Brunschwig Graf et concerne la question du traitement de la connaissance des religions par l'instruction publique.
Concrètement, que compte faire le département à propos des recommandations contenues dans le rapport du groupe de travail exploratoire sur la culture judéo-chrétienne, plus connu sous le nom de rapport Hutmacher, publié en septembre 1998 ?
Ce rapport aurait dû permettre de répondre à la motion 1079 déposée par les Verts en octobre 1996.
Pourquoi une interpellation urgente ? Parce que, pendant que nous laissions prudemment le sujet de côté, le monde, lui, s'est chargé de nous rappeler à l'ordre.
Il suffit d'observer ce qui se passe en France, à cinq kilomètres d'ici, pour voir qu'il est urgent d'anticiper et de prévenir, particulièrement à Genève, canton multiculturel s'il en est, car derrière les cultures, Mesdames et Messieurs les députés, il y a très souvent les religions, même si cela nous dérange de l'admettre.
Bien sûr, nous nous sentons en sécurité, mais je vous invite à écouter attentivement les dialogues entre jeunes de différentes origines dans les cours de récréation. Je vous assure que vous serez édifiés parce qu'à cet âge-là on ne s'embarrasse pas des circonvolutions du langage politiquement correct.
Bien sûr qu'il s'agit d'une question délicate, mais c'est une raison de plus pour l'empoigner avec courage et résolution. Bien sûr que nous sommes tous pour la tolérance, mais avec le temps cette notion s'est transformée en une sorte d'indifférence molle, alors que les jeunes parlent de respect.
Bien sûr, il n'est pas question d'introduire le catéchisme dans les écoles, mais l'école laïque et républicaine doit regarder les religions en face et apprendre aux élèves à faire de même. Elle ne doit pas cacher la question sous le tapis.
Elle doit informer et former au débat loyal et elle doit, en particulier, être le lieu d'une réflexion critique. Bien sûr, le désert en matière de connaissance des religions n'est pas absolu. Le séminaire de formation continue des enseignants, ainsi que l'exposition itinérante «Qui suis-je?», qui a circulé dans une demi-douzaine de collèges, rencontre un très grand succès. Mais peut-on accepter que l'institution abandonne une telle responsabilité aux enseignants ou aux directions d'établissement ? Bien sûr que non. Voilà pour les grands principes !
Mais même pour ceux qui sont imperméables - il y en a - il existe un argument bien concret pour justifier la connaissance critique des religions. C'est la lutte contre la mainmise sur nos enfants par des sectes, voire par des religions au prosélytisme bien plus affirmé que les nôtres.
En privant nos enfants de tout point de repère en la matière, nous les laissons sans défense face à ceux qui sauront profiter efficacement de leur désarroi bien réel face aux questions existentielles. Il ne s'agit pas pour nous de dicter au DIP ce qu'il doit faire en la matière, mais de l'encourager à s'atteler à la tâche rapidement. Dans l'immédiat, nous aimerions savoir ce que le DIP compte faire des très prudentes recommandations du rapport Hutmacher dont la première consistait tout simplement à organiser un débat.
Je terminerai en citant Mme Olsommer qui, en octobre 1996, débutait son intervention par ces mots: «La tolérance passe par la connaissance.» Quant à moi j'ajouterai: «La connaissance est le meilleur rempart contre la peur, et lutter contre la peur, c'est lutter contre la barbarie.»