République et canton de Genève

Grand Conseil

IUE00029
(Réponse du Conseil d'Etat)Interpellation urgente écrite de M. Gilbert Catelain : Application du droit dans le domaine de la LFSEE (Réponse du Conseil d'Etat)

Mme Martine Brunschwig Graf, conseillère d'Etat. Je ne sais si les trois minutes imparties suffiront à répondre aux dix questions de M. Catelain.

Tout d'abord, il existe une base légale qui nous autorise à accueillir dans nos écoles des enfants dont les parents n'ont pas nécessairement de statut. Cela se fait depuis 1991 sur la base du droit supérieur. Il s'agissait alors de l'article 27 de la Constitution fédérale, qui fonde le droit de tout enfant à bénéficier d'un enseignement de base gratuit. L'article 62 de la nouvelle Constitution fédérale, votée en 1999, confirme ce droit fondamental et je rappelle enfin que la Suisse, dans le cadre de la Convention des droits de l'enfant, s'engage aussi à respecter l'article 28 de la convention qui reconnaît le droit de l'enfant à l'éducation. La plupart des cantons suisses, sur la base de la concertation et des recommandations de la Conférence des directeurs de l'instruction publique, pratiquent de même.

S'agissant du nombre d'enfants clandestins, j'ai déjà eu l'occasion de dire, dans ce Conseil, que nous n'avons pas et ne tenons pas de statistiques dans notre base de données scolaires, puisque ne figure pas cette indication dans le recensement. Ce que nous savons par rapport à ce que nous pouvons observer sur le terrain fait que les chiffres très fantaisistes articulés jusqu'à maintenant ne sont pas de mise.

Sur la question de l'assurance-accident, ces enfants, comme d'autres, sont inscrits et donc, pour les trois ordres d'enseignement, les parents doivent produire une attestation d'assurance; s'ils ne la possèdent pas, ils reçoivent un formulaire à remplir pour qu'ils puissent être affiliés à une assurance-maladie et accident.

Sur la base de quelles prescriptions? Je l'ai rappelé tout à l'heure: dans le cadre de la Convention des droits de l'enfant, sur la base de la Constitution fédérale et sur la base de la loi genevoise sur l'instruction publique aussi. Il n'y a, à ma connaissance, aucune prescription qui nous l'interdit, preuve en est, d'ailleurs, les autres cantons qui pratiquent de même en Suisse et sur les mêmes bases légales.

Le DIP annonce-t-il à l'office cantonal de la population, OCP, les infractions ? Non, et avec l'accord du Conseil d'Etat, depuis 1991, il n'a jamais été question de transmettre les informations détenues par le DIP au titre de l'accueil des enfants à l'office cantonal de la population.

Puisque le débat a été amorcé tout à l'heure sur les mandats d'expulsion, je précise que, lorsque des expulsions doivent se faire qui touchent les parents, les enfants restent jusqu'aux plus prochaines vacances scolaires.

Quel est le coût de la scolarisation, plus de 20 000 F? Je pense, cher Monsieur le député, qu'à partir d'un certain moment on peut estimer que ce type de calcul doit être vu d'une autre façon. Bien sûr que tous les enfants, qu'ils soient de parents clandestins ou non, qui fréquentent nos écoles coûtent à la collectivité. Cependant, il s'agit aussi que cette collectivité se rende compte qu'ignorer qu'il existe des enfants clandestins dans les rues, livrés à eux-mêmes et en proie à toutes sortes d'événements, est plutôt tragique. Cet état d'abandon peut les pousser à se livrer à des actes que la justice doit réprimer.

Tant que les enfants sont sur notre territoire, nous les accueillons dans les écoles, nous le faisons par humanité et aussi par pragmatisme, puisqu'il s'agit aussi, dans ce cadre, de faire une forme de prévention. Pour ma part, je ne regretterai pas le moindre centime dépensé pour ce faire. (Applaudissements.)

S'agissant des dénonciations au pouvoir judiciaire, je pense que la réponse que je vous ai donnée, s'agissant des administrations de l'Etat, est valable aussi pour le pouvoir judiciaire.

Vous vous êtes préoccupé, Monsieur le député, des sanctions administratives que je suis censée prendre contre le directeur du cycle d'orientation des Voirets ou contre d'autres personnes encore, s'agissant d'élèves «briefés de manière unilatérale, à gauche» dans le cadre de la manifestation en faveur de la petite Rafaela.

Au vu des courriers que je reçois ces jours, Mesdames et Messieurs les députés, je ne pense pas, vu les noms qui figurent sur l'en-tête de ces lettres, que la préoccupation, s'agissant des enfants clandestins et de leur sort, soit un apanage de la gauche, bien au contraire. Je crois qu'en l'occurrence - et vous aurez constaté que le cycle des Voirets l'a fait avec beaucoup de dignité - il s'agissait pour les enfants présents, pour les enseignants et pour toutes celles et ceux qui s'en préoccupaient, d'exprimer ce qu'ils ressentaient par rapport à leur camarade d'école.

Mesdames et Messieurs les députés, j'aurais été fort inquiète de voir des élèves adolescents se satisfaire, sans autre et sans réaction, du départ brutal d'une de leurs camarades. Quelles que soient les raisons ou les opinions politiques, je suis persuadée qu'à l'âge de ces élèves beaucoup d'entre nous auraient eu la même réaction. Ils se sont tenus dans la dignité. Ils l'ont fait avec correction et quand je les ai informés des quelques limites qu'ils devaient observer dans leurs actions, ils les ont observées de façon tout à fait concertée. Il n'y a donc lieu de réprimander ni le directeur ni les enseignants et encore moins les élèves.

S'agissant de l'interdiction d'entrer probablement prise par l'Office fédéral des étrangers à l'encontre de Rafaela, rien n'indique dans le dossier qu'une telle décision sera prise, au contraire, semble-t-il. Ce que Mme Micheline Spoerri, conseillère d'Etat en charge du DJPS, vous a dit, je n'ai pas besoin de le répéter: il s'agit, pour un éventuel retour de Rafaela, que les conditions légales soient remplies. Si elles ne le sont pas, le retour ne se fera pas. C'est la raison pour laquelle des démarches ont été entreprises dans ce sens, et Rafaela ne reviendra pas en Suisse si les conditions légales ne sont pas remplies.

S'agissant de la question 9 sur les conditions de séjour de Claudia et du beau-frère, que vous appelez «virtuel», de Rafaela, Claudia est en formalité pour l'obtention d'une autorisation de séjour pour vivre avec son compagnon, dont elle a, par ailleurs, un enfant.

D'autre part, il convient de relever que, pour une infraction à l'article 23 de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers, il faut que la personne concernée connaisse et couvre la présence en Suisse d'un étranger qui séjourne illégalement. Votre question portait sur la connaissance que pouvait avoir le beau-frère virtuel de Rafaela de sa présence. En l'occurrence, le nom de Rafaela ne figurait pas à l'adresse dudit beau-frère.

Enfin, s'agissant de l'émotion suscitée par cette affaire, le Conseil d'Etat autorise-t-il la police judiciaire à présenter la réalité des faits aux députés et aux medias?

Mesdames et Messieurs les députés, la police judiciaire a une autorité de tutelle. Cette autorité de tutelle est le département de justice et police et sa présidente, Mme Micheline Spoerri. Elle, tout comme moi, estime que la police judiciaire, si elle a des informations à transmettre, doit utiliser les voies de service usuelles. Mais, sur le fond, je rappelle que le Conseil d'Etat n'a jamais refusé de communiquer à qui que ce soit, députés ou medias - à moins qu'il y ait un impératif de protection des données ou de la personnalité, ou d'autres éléments liés aux besoins de l'enquête - des informations que la police judiciaire estimait nécessaires de porter à la connaissance du public. (Applaudissements.)

Cette interpellation urgente écrite est close.