République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 5 octobre 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 12e session - 49e séance
PL 8260-A
Lors de sa séance du 22 juin 2001, présidée par Mme la députée Vérène Nicollier, la Commission législative a traité le projet de loi du Conseil d'Etat 8260 dont le but est de mettre la procédure de recours prévue dans la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (ci-après LaLSEE) en conformité avec l'article 6 alinéa 1 de la Convention européenne des Droits de l'Homme (CEDH) et l'article 98 de la loi fédérale sur l'organisation judiciaire (ci-après LOJ).
Assistaient aux travaux M. Bernard Gut, secrétaire adjoint du DJPT, et Mme Laura Bertholon-Barchi, directrice adjointe du service juridique du DEEE. Le procès-verbal était tenu par M. Christophe Vuilleumier.
Le contexte est le suivant : lors de la réforme de la juridiction administrative cantonale octroyant la clause générale de compétence au Tribunal administratif, le Grand Conseil a maintenu celle du Conseil d'Etat dans les domaines où l'autorité de recours peut décider en opportunité. C'est le cas pour toutes les décisions prises par l'Office cantonal de l'emploi (OCE) en matière de main-d'oeuvre étrangère.
Dans l'hypothèse où le Conseil d'Etat accepte le recours, il rend un arrêté et la procédure est terminée. Toutefois quand il entend rejeter le recours pour des motifs d'opportunité et que le recours de droit administratif auprès du Tribunal fédéral est possible, le droit fédéral commande que ce soit une instance judiciaire et non exécutive qui statue. C'est pourquoi le Conseil d'Etat propose que dans ces situations, il se dessaisisse en faveur de la Commission cantonale de recours de police des étrangers, agissant comme instance cantonale unique. Cette commission est déjà compétente pour connaître des recours contre les décisions de police des étrangers. Elle est également autorité de contrôle de la légalité et de l'adéquation des décisions dans le domaine des mesures de contrainte (détention administrative d'étrangers en vue d'un refoulement et assignations territoriales). Dans ces situations, c'est alors le Tribunal administratif qui est l'autorité cantonale de recours.
A) Initialement la présidente avait prévu d'étudier simultanément les projets de lois 8260 et 8506, lesquels émanent tous deux du Conseil d'Etat et tendent à modifier la LaLSEE. Néanmoins, après une première discussion, il s'est avéré que le projet de loi 8506 nécessitait des investigations complémentaires et notamment des auditions alors qu'une séance suffisait pour les travaux relatifs au projet de loi 8260. C'est ainsi que le présent rapport ne reprendra que partiellement le contenu du procès-verbal du 22 juin 2001.
B) Audition de M. Bernard Gut, représentant du DJPT, et Mme Laura Bertholon-Barchi, pour le DEEE :
M. Bernard Gut explique que le projet de loi 8260 consacre une nouvelle procédure de recours des décisions de l'OCE en matière de main-d'oeuvre étrangère. Les modifications légales proposées tendent à rendre le texte et le traitement des recours conformes à deux exigences juridiques de droit supérieur : d'une part, l'art. 6, al. 1 CEDH qui exige que - dans certains domaines - les décisions puissent être contrôlées par un tribunal indépendant; d'autre part, l'art. 98 LOJ qui veut que toutes les décisions pouvant faire l'objet d'un recours de droit administratif au Tribunal fédéral soient susceptibles d'être soumises préalablement au contrôle d'une autorité judiciaire cantonale.
M. Gut ajoute que le projet de loi 8506-A, quant à lui, a pour propos d'accélérer la procédure de traitement des recours contre les décisions de police des étrangers par l'adoption de trois mesures : l'augmentation des effectifs de la Commission cantonale de recours de police des étrangers ; la diminution à 6 mois des délais pour statuer sur les recours ; l'abandon du contrôle automatique des décisions d'assignations territoriales par cette même commission.
Pour la bonne compréhension des procédures, M. Bernard Gut et Mme Bertholon-Barchi précisent encore que les décisions en matière de main-d'oeuvre étrangère sont prises par l'OCE sur la base d'un préavis émis par une commission tripartite (Etat, employeurs, syndicats).
Il ressort en outre de la discussion qui s'est instaurée avec les députés que le nombre de cas visés par le projet de loi 8260 est très faible et que le Conseil d'Etat reste l'autorité la plus apte à revoir les décisions concernées sous l'angle de l'opportunité car, de par son rôle, il est le mieux placé et le mieux informé pour évaluer les situations, par rapport au marché du travail et aux besoins de l'économie locale. La Commission cantonale de recours de police des étrangers devient compétente pour sa part, sous l'angle de la légalité, lorsque le Conseil d'Etat n'admet pas le recours pour des motifs d'opportunité et que la voie du recours de droit administratif au Tribunal fédéral est ouverte (soit, lorsque l'étranger a un véritable droit à la délivrance d'une autorisation de travail, sous réserve du respect des conditions légales en vigueur).
C) Pour mémoire l'article 4 LaLSEE, base légale de la Commission de recours de police des étrangers a la teneur suivante :
Les commissaires, après avoir fait une première lecture des deux projets de lois 8260 et 8506 et s'étant exprimés sur l'ensemble des articles en première lecture, votèrent à l'unanimité l'entrée en matière sur le projet le plus pressant, à savoir le projet de loi 8260, qui ne sollicitait pas d'autres renseignements que ceux donnés par les représentants du DJPT et du DEEE.
Les commissaires sont d'accord sur le fond mais la question est posée de savoir si la forme ne peut pas être améliorée.
Il est en conséquence proposé de remplacer les termes « Toutefois, le Conseil d'Etat se dessaisit de la cause et la transmet à la Commission cantonale de recours de police des étrangers lorsqu'il n'entend pas admettre le recours pour des motifs d'opportunité et que le recours de droit administratif au Tribunal fédéral est ouvert contre la décision cantonale de dernière instance. » par « ... lorsqu'il entend rejeter le recours pour des motifs d'opportunité et que... »
Vote : nouveau libellé accepté à l'unanimité (2 L, 1 DC, 1 R, 1 AdG, 2 S).
Ce texte n'a, par contre, pas fait l'unanimité au service juridique du Conseil d'Etat qui a soumis une contre-proposition encore plus explicite qui a été acceptée à l'unanimité (2 L, 1 DC, 1 R, 2 AdG, 2 S, 1 Ve) par la commission lors de sa réunion de la commission le 29 juin 2001.
La commission fera une demande d'amendement et proposera en conséquence que le Grand Conseil accepte la teneur suivante :
Ce nouveau texte a l'avantage de clarifier le pouvoir d'examen de la Commission cantonale de recours, qui se limite aux questions de faits et de droit puisque le Conseil d'Etat s'est déjà prononcé sur celle de l'opportunité.
La modification consiste à formuler la restriction du pouvoir d'examen de la Commission de recours de police des étrangers dans la disposition légale relative à la procédure.
En effet la teneur actuelle est la suivante : « Elle applique la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985. Elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle » et il y a lieu d'ajouter l'exception lorsque la décision émane de l'OCE.
Vote : unanimité (2 L, 1 DC, 1 R, 1 AdG, 2 S)
Vote : unanimité (2 L, 1 DC, 1 R, 1 AdG, 2 S)
Mesdames et Messieurs les députés, la Commission législative vous invite en conséquence à voter le présent projet de loi dans la teneur issue de ses travaux avec l'amendement dont le texte figure en page 4 de ce rapport.
Projet de loi(8260)
modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (F 2 10)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1 Modifications
La loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, du 16 juin 1988, est modifiée comme suit :
Art. 3, al. 3, phrase 2 (nouvelle)
Le Conseil d'Etat se dessaisit toutefois de la cause et la transmet à la commission cantonale de recours de police des étrangers lorsqu'il entend rejeter le recours pour des motifs d'opportunité et que le recours de droit administratif au Tribunal fédéral est ouvert contre la décision cantonale de dernière instance.
Art. 4, al. 6 (nouvelle teneur)
6 Elle applique la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985. Elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle, sauf lorsque la décision entreprise émane de l'office cantonal de l'emploi.
Article 2 Disposition transitoire
Les modifications apportées à la loi du 16 juin 1988 d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers s'appliquent aux recours pendants lors de leur entrée en vigueur.
Projet de loimodifiant la loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (F 2 10)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1 Modifications
La loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, du 16 juin 1988, est modifiée comme suit :
Art. 3, al. 3, phrase 2 (nouvelle)
Le Conseil d'Etat se dessaisit toutefois de la cause et la transmet à la commission cantonale de recours de police des étrangers lorsqu'il n'entend pas admettre le recours pour des motifs d'opportunité et que le recours de droit administratif au Tribunal fédéral est ouvert contre la décision cantonale de dernière instance.
Art. 4, al. 6 (nouvelle teneur)
6 Elle applique la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985. Elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle, sauf lorsque la décision entreprise émane de l'office cantonal de l'emploi.
Article 2 Disposition transitoire
Les modifications apportées à la loi du 16 juin 1988 d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers par la loi n° (à compléter) du (à compléter par la date d'adoption) s'appliquent aux recours pendants lors de leur entrée en vigueur.
Premier débat
Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. Il s'agit d'un projet de loi tendant à harmoniser le droit cantonal avec le droit fédéral... (L'oratrice est interpellée par M. Blanc.) Parfaitement, Monsieur Claude Blanc, ce projet n'est pas inconstitutionnel : il respecte le droit supérieur ! Je disais, il s'agit d'un projet de loi tendant à harmoniser le droit cantonal avec le droit fédéral, par rapport aux demandes de main-d'oeuvre étrangère. En effet, quand le Conseil d'Etat refuse un recours pour des motifs d'opportunité, il faut ouvrir une voie de droit auprès d'une instance judiciaire cantonale.
Ce projet de loi n'a pas suscité d'opposition, et je vous invite à le voter tel qu'issu des travaux de commission.
Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.
Deuxième débat
Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.
Article 1 (souligné)
Art. 3, al. 3
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, un amendement a été déposé par la commission à l'article 3, alinéa 3, phrase 2, dont la teneur est la suivante :
«3Toutefois, lorsque le recours de droit administratif au Tribunal fédéral est ouvert contre la décision cantonale de dernière instance, le Conseil d'Etat se dessaisit de la cause et la transmet à la commission cantonale de recours de police des étrangers pour contrôle de la légalité de la décision attaquée, à moins qu'il n'admette le recours pour des motifs d'opportunité.»
Madame Sayegh, vous avez la parole.
Mme Christine Sayegh (S), rapporteuse. Madame la présidente, je voudrais juste préciser que le texte du projet de loi initial ne nous semblait pas très clair pour le justiciable, et nous avons voulu le modifier. La chancellerie nous a proposé une nouvelle rédaction qui est, à mon avis, effectivement plus accessible pour le justiciable, et qui ne change rien quant au fond. Je vous invite donc à voter cet amendement.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je mets au vote l'amendement que je viens de vous lire.
Mis aux voix, cet amendement est adopté.
Mis aux voix, l'article 3, alinéa 3, ainsi amendé est adopté.
Mis aux voix, l'article 4, alinéa 6, est adopté.
Mis aux voix, l'article 1 (souligné) est adopté, de même que l'article 2 (souligné).
Troisième débat
Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.
La loi est ainsi conçue :
Loi(8260)
modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers (F 2 10)
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1 Modifications
La loi d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers, du 16 juin 1988, est modifiée comme suit :
Art. 3, al. 3, phrase 2 (nouvelle)
Toutefois, lorsque le recours de droit administratif au Tribunal fédéral est ouvert contre la décision cantonale de dernière instance, le Conseil d'Etat se dessaisit de la cause et la transmet à la commission cantonale de recours de police des étrangers pour contrôle de la légalité de la décision attaquée, à moins qu'il n'admette le recours pour des motifs d'opportunité.
Art. 4, al. 6 (nouvelle teneur)
6 Elle applique la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985. Elle est compétente pour apprécier l'opportunité des décisions portées devant elle, sauf lorsque la décision entreprise émane de l'office cantonal de l'emploi.
Article 2 Disposition transitoire
Les modifications apportées à la loi du 16 juin 1988 d'application de la loi fédérale sur le séjour et l'établissement des étrangers s'appliquent aux recours pendants lors de leur entrée en vigueur.