République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 28 juin 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 10e session - 32e séance
IU 1096
Mme Erica Deuber Ziegler (AdG). Mon interpellation s'adresse à M. Laurent Moutinot, chargé du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement.
Les activités regroupées sur le site d'Artamis, et gérées en collectif, ont-elles, Monsieur le conseiller d'Etat, une chance d'avenir ? Je rappelle brièvement les faits suivants qui expliquent pourquoi je pose la question :
A première vue, le site des anciens terrains des services industriels mis à disposition de l'Association Artamis, il y a cinq ans, à bien plaire et à travers une convention Ville-Etat, devait être abandonné par Artamis au moment de la réalisation des projets prévus sur le site, selon un PLQ en force.
Pourquoi donc s'inquiéter de la poursuite de l'expérience ? C'est d'abord parce qu'une collectivité féconde, formée d'associations et de personnes, déploie aujourd'hui une quarantaine d'activités différentes sur le site, ce qui n'est pas négligeable en terme d'emploi, d'économie, d'intégration sociale et de culture. Ce ne sont pas moins de 230 artisans, artistes, sportifs, créateurs et producteurs novateurs qui s'activent à cet endroit avec des effets d'interdisciplinarité et d'entraînement remarquables. Il y a les arts visuels, la musique, le théâtre, la vidéo, l'informatique, le skate, la grimpe, le multiculturel, les réparations, etc.
Ces activités, installées dans des ateliers et des équipements de production, sont souvent mises en oeuvre au prix d'importants investissements. Le site bouge, permet des rotations; les partants laissant leur chance aux nouveaux arrivants, des travailleurs et des travailleuses qui gagnent partiellement leur vie, souvent en combinaison avec une autre activité salariée.
La gestion collective aujourd'hui bien maîtrisée du site permet des synergies et des économies de coût de production, évidemment impossibles dans un système locatif habituel. Grâce à cette situation, des percées remarquables ont pu avoir lieu à Genève dans des domaines de pointe, comme la musique et l'image électronique, dont le rayonnement dépasse Genève et les frontières du pays.
Enfin, l'importance du site pour les jeunes n'est plus à démontrer pour qui fréquente et connaît Artamis. Vous savez, Monsieur le président, le manque criant de locaux et d'ateliers pour le genre d'activités déployées sur le site d'Artamis qui dégagent peu de plus-value. Vous connaissez l'état de la demande de locaux à l'endroit des pouvoirs publics, comme d'ailleurs à l'endroit des responsables d'Artamis.
J'en viens à ma question : en pleine connaissance du projet des autorités de réaliser sur ce site des logements sociaux, les responsables d'Artamis ont élaboré, en collaboration avec les organismes coopératifs de la CODA, de la Ciguë et des Jardins de Cocagne, un projet appelé Coquelicot, conciliant logements sociaux et maintien des activités actuelles de création et de production dans une structure collective coopérative. Ce projet préconise de garder quelques-uns des bâtiments industriels qui sont la mémoire de l'ancienne usine à gaz et ont valeur de patrimoine.
La Ville de Genève, grâce aux soins de notre collègue le conseiller administratif Christian Ferrazino, a ouvert une concertation avec le Collectif Artamis qui pourrait déboucher sur la conservation de deux des immeubles industriels bordant le boulevard Saint-Georges avec les activités qu'ils abritent.
Monsieur Moutinot, vous avez pris part à ces rencontres, mais en privilégiant l'option de contrats individualisés à court terme, avec différents occupants du site. Puis-je savoir si, à l'avenir, vous envisagez d'examiner avec sérieux le projet Coquelicot en vue de rapprocher les points de vue et les projets pour préserver à long terme certaines activités du site, tout en assurant la construction de logements sociaux ?
Etes-vous prêt pour cela à trouver un moyen de reconduire la convention en collaboration avec la Ville de Genève, afin de permettre l'aboutissement d'une telle réalisation qui pourrait être, je crois, exemplaire, tant en terme de partenariat qu'en terme de mixité urbaine, de soutien public à la création d'entreprise des jeunes, de construction coopérative et de développement durable ?
Réponse du Conseil d'Etat
M. Laurent Moutinot. Je vous remercie, Madame la députée, de cette question qui me permet de faire un point rapide sur la situation d'Artamis.
Première information, la convention a été résiliée par la Ville et par l'Etat pour l'ensemble du site.
Deuxième information, nous avons effectivement négocié par groupe de bâtiments des baux d'une durée de trois ans. A ce jour, trois baux ont été signés, qui regroupent l'essentiel du site, côté rue du Stand. Un quatrième bail est en cours de négociation. Dès lors, à partir du moment où j'ai signé des baux pour trois ans, Madame la députée, je ne peux plus courir le risque, me semble-t-il, que l'on me reproche de vouloir détruire Artamis. Ce qui est par contre vrai, concernant la suite des opérations, c'est la chose suivante :
Du côté du boulevard Saint-Georges, la Ville a indiqué qu'elle souhaitait que soit conservé le petit bâtiment du cybercafé. Je n'ai aucune objection à cet égard. Pour le reste, concernant le long bâtiment et notamment le hangar, je souhaite qu'un immeuble de logements soit conçu à cet endroit. Il semble que ce soit possible, avec certaines réserves.
Entre ce bâtiment de logements et le reste du site, des baux ont d'ores et déjà été conclus avec les associations qui représentent des entreprises culturelles et artisanales - Galpon, Compagnie Declic, Krick messagerie, etc. La Ville souhaite un espace vert dans le prolongement du cimetière. La création de cet espace nécessite cependant la démolition des deux hangars présents. Cela ne pose pas de problèmes majeurs en ce qui concerne le relogement des locataires. Il y a un seul bâtiment pour lequel nous enregistrons, à l'heure actuelle, un refus de négocier le bail. C'est le bâtiment numéro 71, celui qui abrite l'administration d'Artamis. Pour le reste, ainsi que je viens de vous l'exposer, la situation est stabilisée.
En ce qui concerne le projet Coquelicot, il faut dire clairement qu'il s'agit d'un projet dont l'esprit est juste. L'idée de soumettre ce site au développement durable apparaît juste. En revanche, l'emplacement des immeubles, tels qu'ils sont proposés, pose toute une série de problèmes qui ne sont pas acceptables. En réalité, si l'on regarde dans les grandes lignes le projet tel que je viens de vous le décrire, on constate que la situation devrait vraisemblablement aboutir à un arrangement. La construction d'une barre de logements sur des hangars boiteux n'apparaît toutefois pas être une très bonne idée et elle ne se fera pas.
L'idée, c'est donc du logement du côté du boulevard Saint-Georges, un espace vert à côté, des baux sur le reste du périmètre. Il s'agit de négocier avec les occupants - qui sont maintenant des locataires, puisqu'ils sont au bénéfice de baux - avec la Ville de Genève et avec les voisins pour aboutir à une nouvelle image générale de cette partie-là du site. Il s'agit d'une négociation à moyen terme.
Cette interpellation urgente est close.