République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 14 juin 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 9e session - 28e séance
IU 1084
M. Gilles Godinat (AdG). Mon interpellation s'intitule : «L'Etat de Genève, garçon de courses de EDF». Elle s'adresse au Conseil d'Etat, mais concerne plus particulièrement l'activité des services de M. Carlo Lamprecht.
Les Genevois connaissent bien EDF, Electricité de France. Cette entreprise exploite un parc de centrales nucléaires d'une soixantaine de réacteurs, dont certains proches de nos frontières, et dont le combustible est retraité pour en extraire le plutonium dans l'inquiétante et polluante usine de La Hague en Normandie.
Feu le surgénérateur de Creys-Malville, que nous avons tous combattu avec le succès que l'on sait, faisait partie de ce parc et avait fait de la France le pays le plus nucléarisé de la planète, sans que ses citoyennes et citoyens n'aient été consultés à ce sujet.
Aujourd'hui, EDF dispose, en outre, grâce à son parc nucléaire, d'une surcapacité de production qui lui donne les moyens de mener une politique agressive de dumping électrique au-delà de ses frontières. Ceci est confirmé dans le numéro 8 du magazine de la Chambre de commerce et d'industrie de Genève, que je cite : «EDF envisage d'investir 42 milliards de francs au cours des trois prochaines années pour conquérir des parts de marché hors de l'Hexagone, et la Suisse est toute désignée pour être dans les premières à tomber dans son escarcelle.»
Dans le contexte de libéralisation du marché de l'électricité que nous connaissons, que le récent référendum lancé vise à combattre et que notre Grand Conseil combat également, EDF s'attaque aujourd'hui, de manière dynamique et agressive, à tous ces marchés européens, prend le contrôle d'entreprises et étend ainsi son empire.
George Bush lui-même, pour relancer le nucléaire aux Etats-Unis, cite la France et vante l'exemple d'un pays qui produit 80% de son électricité avec l'atome.
J'en viens à mes quatre questions. Dans ce contexte, le Conseil d'Etat peut-il répondre aux questions suivantes :
1. Est-il exact qu'EDF a pris contact avec les services de promotion économique de l'Etat de Genève pour demander l'assistance de ceux-ci dans une campagne d'autopromotion qu'il engagerait en direction du marché genevois ?
2. Est-il exact que, malgré le fait qu'EDF risque à l'avenir de se poser en concurrent direct des SIG - notre régie publique qui est soumise aux exigences démocratiques de l'article 160 C de notre constitution bien connu et de notre politique cantonale de l'énergie - les services concernés de M. Lamprecht auraient donné une suite favorable aux demandes d'EDF et effectué des démarches concrètes dans ce sens ?
3. En quoi la pénétration d'EDF à Genève, sous quelque forme que ce soit, peut-elle être considérée comme représentant un objectif public digne d'être financé par les citoyennes et citoyens de ce canton, et les contribuables par conséquent ?
4. M. Lamprecht s'engage-t-il à ce que les initiatives de ses services soient prises de manière à prendre en compte explicitement, parmi d'autres critères, les objectifs de la politique cantonale de l'énergie ?