République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 17 mai 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 8e session - 25e séance
IN 115-B
1.
Arrêté du Conseil d'Etat constatant l'aboutissement de l'initiative, publié dans la Feuille d'avis officielle le
22 septembre 2000
2.
Débat de préconsultation sur la base du rapport du Conseil d'Etat au sujet de la validité et de la prise en considération de l'initiative, au plus tard le
22 décembre 2000
3.
Décision du Grand Conseil au sujet de la validité de l'initiative sur la base du rapport de la commission législative, au plus tard le
22 juin 2001
4.
Sur la base du rapport de la commission désignée à cette fin, décision du Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative et sur l'opposition éventuelle d'un contreprojet, au plus tard le
22 mars 2002
5
En cas d'opposition d'un contreprojet, adoption par le Grand Conseil du contreprojet, au plus tard le
22 mars 2003
La Commission législative a examiné, lors de ses séances des 19 janvier, 2 février et 30 mars 2001, sous la présidence de Mme Vérène Nicollier, la recevabilité de l'initiative populaire 115 « Casatax », lancée par la Chambre genevoise immobilière. M. C. Friedrich, secrétaire-adjoint du DJPT, a assisté la commission dans ses travaux.
En vertu de l'article 119A de la loi portant règlement du Grand Conseil (B 1 01), le Grand Conseil doit se prononcer sur la validité de l'initiative sur la base du rapport de la Commission législative au plus tard le 22 juin 2001. C'est en vue de cette étape de la procédure d'examen de l'initiative 115 que le présent rapport est établi. Il doit être déposé avant le 29 mai 2001 pour que le délai susmentionné soit respecté.
Rédigée de toutes pièces, l'initiative 115 propose d'inscrire un nouvel article 8A, intitulé « Propriété de son logement », dans la loi sur les droits d'enregistrement.
Selon cette disposition, les droits d'enregistrement et les éventuels centimes additionnels seraient réduits de moitié lorsque l'objet de la vente est destiné à servir de domicile à l'acquéreur.
Sur le point de la recevabilité formelle - unité de la matière - unité de la forme - unité du genre - la commission a constaté, à l'instar du Conseil d'Etat dans son rapport au Grand Conseil du 23 novembre 2000 auquel il est ici renvoyé pour les détails, que l'initiative ne posait pas de problème.
S'agissant de la recevabilité matérielle, la commission s'est demandé si l'initiative était exécutable. L'alinéa 3 de la disposition proposée par l'initiative stipule que « si, dans un délai de 3 ans dès la date de l'enregistrement, l'immeuble cesse de servir de domicile au bénéficiaire de la déduction ou est aliéné par celui-ci, le solde non perçu des droits est immédiatement exigible. Fait exception le cas du décès du bénéficiaire ». La question qui se pose est de savoir comment contrôler l'utilisation qui est faite du logement pendant 3 ans.
Pour obtenir des éclaircissements à cette question, la commission, en date du 2 février 2001, a auditionné Mme Catherine Neuenschwander, directrice de l'enregistrement de l'administration fiscale cantonale.
Celle-ci expose que le débiteur de l'administration fiscale est le notaire qui instrumente l'affaire. Si l'affaire connaît deux notaires, le premier pour l'achat et un second pour la vente, elle pense que c'est le premier notaire qui est le débiteur. Elle ajoute que cette question est délicate, puisque les clients ne s'adressent pas forcément au même notaire. Elle se demande encore s'il ne faudrait pas renotifier le bordereau. Elle termine en disant que la question de la responsabilité du notaire ne date pas d'aujourd'hui.
Mme Neuenschwander déclare également qu'il faut responsabiliser le second notaire car il peut constater que la transaction a lieu dans le délai de trois ans. Elle ajoute que cela implique une disposition légale spécifique.
Un commissaire rétorque que le deuxième notaire ne peut pas assumer de responsabilité sans avoir eu connaissance du premier acte. Il affirme que le Registre foncier est là pour ça.
Un commissaire relève que le premier notaire ne peut pas non plus assumer une responsabilité car il n'a pas les moyens de connaître le sort du logement après la transaction.
Mme Neuenschwander estime que le terme de « solde non perçu » pose problème. Elle explique qu'il s'agit plutôt d'une « réduction » et qu'il faudrait trouver un libellé qui ne parle pas de solde. Cas échéant cette solution responsabiliserait le premier notaire.
A l'issue de l'audition de Mme Neuenschwander, la commission a entamé une discussion sur l'attitude à adopter à l'égard de l'alinéa 3 de la disposition proposée par la Chambre genevoise immobilière (CGI) dans l'initiative 115. La commission a considéré que l'idée contenue dans cet alinéa était recevable, mais que la formulation était malheureuse. Elle a examiné la possibilité de modifier sa rédaction, soit par l'élaboration d'un contre-projet, soit d'accord avec les initiants.
Pour ce faire, il a été décidé d'auditionner la CGI et de consulter la Chambre des notaires par écrit. Cette démarche a été effectuée par courrier adressé à Me Natacha Gregorc, présidente de la Chambre des notaires, en date du 9 février 2001, dont copie en annexe. En revanche, la CGI n'a pas été approchée.
Par courrier du 7 mars 2001 joint en annexe au présent rapport, la présidente de la Chambre des notaires a répondu à la commission. En résumé, la Chambre des notaires rappelle que « le notaire n'a ni le droit, ni le devoir, ni les moyens de contrôler l'usage que son client fera de son acquisition ». Elle envisage qu'une telle charge revienne au « deuxième » notaire, qui instrumenterait une revente, et que celui-ci perçoive le solde non perçu. Mais, pour ce faire, il faudrait à tout le moins, comme cela se pratique dans d'autres cas analogues, tels que l'utilisation des fonds de la prévoyance professionnelle (2e pilier) pour acquérir son logement, qu'une mention indiquant que le propriétaire a bénéficié de droits d'enregistrements réduits soit inscrite au Registre foncier.
La commission a pris acte de la réponse de la Chambre des notaires et considérant que celle-ci répond aux questions qui se posaient, a renoncé à l'auditionner.
La Commission législative, par 4 oui (1 DC, 1 R, 2 L) et 5 abstentions (2 S, 1 Ve, 2 AdG), est entrée en matière sur cette initiative, l'a déclarée recevable et vous propose, Mesdames, Messieurs les députés, de la suivre dans ses conclusions.
La Chambre genevoise immobilière a lancé l'initiative populaire intitulée « Casatax », qui a abouti.
Le tableau ci-dessous indique les dates ultimes auxquelles cette initiative doit être traitée aux différents stades du processus d'examen des initiatives prévus par la loi.
1.
Arrêté du Conseil d'Etat constatant l'aboutissement de l'initiative, publié dans la Feuille d'avis officielle le
22 septembre 2000
2.
Débat de préconsultation sur la base du rapport du Conseil d'Etat au sujet de la validité et de la prise en considération de l'initiative, au plus tard le
22 décembre 2000
3.
Décision du Grand Conseil au sujet de la validité de l'initiative sur la base du rapport de la commission législative, au plus tard le
22 juin 2001
4.
Sur la base du rapport de la commission désignée à cette fin, décision du Grand Conseil sur la prise en considération de l'initiative et sur l'opposition éventuelle d'un contreprojet, au plus tard le
22 mars 2002
5
En cas d'opposition d'un contreprojet, adoption par le Grand Conseil du contreprojet, au plus tard le
22 mars 2003
Les citoyens soussignés, électeurs et électrices dans le canton de Genève, en application des articles 64 et 65A de la constitution de la République et canton de Genève, du 24 mai 1847, et des articles 86 à 93 de la loi sur l'exercice des droits politiques, du 15 octobre 1982, appuient la présente initiative formulée, qui demande au Grand Conseil que la loi sur les droits d'enregistrement, du 9 octobre 1969 (D 3 30), soit modifiée comme suit: :
Article unique
La loi sur les droits d'enregistrement, du 9 octobre 1969, est modifiée comme suit :
Article 8A Propriété de son logement (nouveau)
1 En cas d'acquisition de la propriété d'un immeuble destiné à servir de domicile à l'acquéreur, les droits d'enregistrement et les éventuels centimes additionnels sont réduits de moitié.
2 Cette réduction s'applique aux contrats de vente, ainsi qu'aux actes hypothécaires et aux contrats d'entreprise ou tout autre contrat analogue au sens de l'article 83.
3 Si, dans un délai de 3 ans dès la date de l'enregistrement, l'immeuble cesse de servir de domicile au bénéficiaire de la déduction ou est aliéné par celui-ci, le solde non perçu des droits est immédiatement exigible. Fait exception le cas du décès du bénéficiaire.
Démocratisons la propriété de son logement !
Parmi les rêves que nous nourrissons tous, devenir propriétaire de son logement figure en bonne place.
Or, après Bâle-Ville, Genève est le canton suisse qui compte le moins de propriétaires. Pour aider les locataires genevois à réaliser leur rêve, la Chambre genevoise immobilière lance deux initiatives populaires.
La propriété est l'une des valeurs fondamentales de notre société. Alors que bien des repères ont tendance à disparaître, la propriété individuelle peut et doit rester une référence solide.
En devenant propriétaire, on constitue un patrimoine pour sa famille. De plus, le propriétaire prend un soin particulier de son environnement. Ces éléments sont conformes à la notion de développement durable, qui doit guider les options à prendre pour le futur. Le développement de la propriété individuelle contribue par ailleurs à la prospérité de la société.
Nos propositions
Celui qui veut devenir propriétaire rencontre deux problèmes majeurs : le coût du logement qu'il souhaite acquérir et son financement. En particulier, il est difficile de réunir 20 % de fonds propres.
Pour réduire le coût de la propriété, nous proposons de réduire de moitié les droits d'enregistrement de 3 % de la valeur du logement à la charge de l'acquéreur. Il ne serait pas raisonnable de les supprimer, puisqu'un transfert de la propriété implique des frais administratifs pour l'Etat. En revanche, 3 %, c'est trop.
Cette proposition fait l'objet de notre première initiative, appelée « Casatax ». Si l'initiative est acceptée par le peuple, les droits d'enregistrement seront immédiatement réduits.
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Débat
Mme Christine Sayegh (S). Nous souhaitons expliquer notre abstention quant à la recevabilité matérielle de cette initiative, plus particulièrement... (Commentaires.) Souhaitez-vous intervenir, Monsieur Lescaze ? M. Lescaze veut parler après moi, je demande au Bureau de ne pas oublier d'enregistrer sa demande de parole!
Notre abstention est liée au problème de l'exécutabilité de cette initiative. Celle-ci demande une réduction des droits d'enregistrement, sous certaines conditions, pour encourager l'accès à la propriété. Mais il faut rappeler que le débiteur des droits d'enregistrement est le notaire et non l'acheteur lui-même. Si bien qu'au bout de trois ans, si les conditions ne sont plus réalisées ou que la personne revend son bien immobilier, elle devra payer la réduction du droit d'enregistrement qui lui avait été faite initialement. Ceci pose des questions importantes, à savoir : le notaire va-t-il demander des garanties, ou va-t-il demander l'entier du droit avant d'en rendre éventuellement la moitié, après trois ans, si le bien n'a pas été revendu ? Une autre question est de savoir quel contrôle on peut avoir, au cas où la personne va chez un autre notaire, et comment savoir si le bien acquis pour le domicile sert vraiment de domicile et ce pendant le délai de trois ans.
C'est la raison pour laquelle nous estimons que cette initiative est très difficilement exécutable. La lettre des notaires montre que la question est complexe : faut-il donner la responsabilité au premier notaire ou au deuxième notaire, dans le cas où il y a un deuxième notaire pour le second acte de vente ? Pour notre part, nous doutons fort de l'exécutabilité de cette initiative.
M. Bernard Lescaze (R). Il est bien connu que lorsqu'on veut noyer son chien on déclare qu'il a la rage, la gale ou ce que l'on veut! Les objections purement formelles de la préopinante ne reflètent, à notre avis, que son hostilité quant au fond, sachant qu'un certain nombre de gens dans cette assemblée ne souhaitent pas favoriser l'accès à la propriété. Ce n'est évidemment pas le cas du groupe radical et je n'hésite pas à dire qu'en réalité les objections prétendument formelles qui viennent d'être soulevées peuvent aisément être résolues, comme le montre d'ailleurs excellemment le rapport de M. Fritz.
En effet, il suffirait d'introduire une nouvelle initiative populaire qui modifierait un article de notre constitution. La difficulté, que je ne minimise pas, est celle à laquelle il vient d'être fait allusion, à savoir que le notaire est débiteur des droits d'enregistrement, comme le rappelle la Chambre des notaires, vis-à-vis de l'acte qu'il a instrumenté. Mais, si jamais il y avait une difficulté à suivre la marche proposée par la Chambre des notaires - à savoir de conférer cette responsabilité soit au second notaire, soit à l'administration fiscale cantonale, lorsqu'on ne peut pas vérifier le changement d'affectation - il conviendrait simplement de modifier la loi sur les droits d'enregistrement, laquelle est une norme législative inférieure à la norme constitutionnelle. C'est donc là un mauvais prétexte qui est avancé pour expliquer l'abstention de la gauche.
En réalité, sur le plan pur de la recevabilité formelle et matérielle, cette initiative est parfaitement recevable. Je tiens à préciser qu'à l'alinéa 3, lorsqu'on parle du «bénéficiaire de la déduction», déduction doit s'entendre comme réduction, ainsi qu'il est précisé à l'alinéa 1, où l'on parle de droits «réduits de moitié», et à l'alinéa 2, où l'on parle de «réduction». Pour des raisons que j'ignore, les initiants ont employé le mot déduction à l'alinéa 3, mais c'est une réduction. D'ailleurs, en français, la réduction en matière fiscale est aussi une forme de déduction. Là encore, c'est un point purement formel.
Dans ces conditions, le groupe radical approuve la décision de la commission législative et invite le Grand Conseil à l'approuver également.
M. Albert Rodrik (S). Pour répondre à mon excellent ami Bernard Lescaze, notre problème n'est pas l'accession à la propriété, qui figure dans le programme de nombreux partis socialistes en Europe, même si elle ne nous met pas spécialement en transe à Genève... Notre problème est : est-il normal qu'un texte soit suffisamment ambigu pour que les rentrées fiscales soient continuellement en péril ? La Chambre des notaires le dit, du reste, fort explicitement.
En nous abstenant, nous voulions, sans faire de victimes au niveau du contrôle formel de la recevabilité, envoyer un signal d'alarme à nos collègues de la commission fiscale pour qu'ils examinent le fond du problème. Nous avons entendu une des directrices de l'administration fiscale et nous avons reçu une prise de position suffisamment claire et engagée de la Chambre des notaires pour que le travail de la commission fiscale, lui, ne soit pas formel. C'est cela, le sens de notre abstention et rien d'autre!
M. Jacques Fritz (L), rapporteur. Je confirme : je crois que ce sera effectivement à la commission fiscale de discuter de la suite de ce projet.
Mme Micheline Calmy-Rey. Sur le plan de la recevabilité formelle, cette initiative ne pose aucun problème. Sur le plan de la recevabilité matérielle, à savoir : est-elle applicable ou non, il conviendrait manifestement, lors de l'examen en commission fiscale, de clarifier l'applicabilité, éventuellement par l'introduction d'une nouvelle norme faisant obligation d'une inscription au Registre foncier, ou par d'autres moyens. Car, telle quelle, elle est difficilement applicable, à témoin la lettre de la Chambre des notaires. Cela étant, le Conseil d'Etat s'est d'ores et déjà prononcé, après analyse, sur la recevabilité de cette initiative : il a conclu qu'elle était recevable.
Les conclusions de la commission législative (recevabilité de l'initiative 115) sont adoptées.
Cette initiative est renvoyée à la commission fiscale.
La présidente. Nous poursuivons nos travaux avec le projet de loi 8497...
M. Daniel Ducommun (R). Madame la présidente, il s'agit en l'occurrence d'un projet de loi constitutionnelle sur lequel le peuple de Genève sera invité à se prononcer : je trouverais dommage que l'on commence à le traiter durant cinq minutes et que l'on reprenne à 14 h. Je propose donc de commencer ce débat à 14 h...
La présidente. Bien, je vois que l'assemblée approuve cette proposition. Nous levons donc la séance et reprendrons nos travaux à 14 h.
La séance est levée à 11 h 55.