République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 11 mai 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 8e session - 22e séance
IUE 13
Question de M. Albert Rodrik
Le 21 septembre 2000, le Grand Conseil a donné son aval au projet de réforme de la psychiatrie publique genevoise, tel qu'il résultait du rapport d'experts du 12 janvier 2000, approuvé successivement par le Conseil d'Administration des HUG et le Conseil d'Etat.
Dans la foulée de ces décisions, plusieurs groupes se sont mis au travail et devraient arriver incessamment au terme de leur tâche.
Sachant que dans le contexte qui nous préoccupe les choses ont tendance à se figer inopinément et à devenir irréversibles de façon surprenante, je demande au Conseiller d'Etat chargé du département de l'action sociale et de la santé (DASS) - par ailleurs, président du Conseil d'administration des Hôpitaux Universitaires de Genève - de fournir au Grand Conseil les renseignements énumérés ci-après, afin d'éviter que les pouvoirs publics se trouvent mis devant des faits accomplis.
1. Quel est le calendrier des prises de décision ?
2. Quelles sont les perspectives sur des points essentiels de santé publique, à savoir
• la création d'un service d'accueil-urgence-évaluation distinct du service de psychiatrie adulte,
• la réalité de la sectorisation mise en place et la propension aujourd'hui réalité, à organiser la psychiatrie adulte par pathologie allant jusqu'à l'identification de pavillons à des pathologies répertoriées, le tout baptisé programmes spécifiques, le résultat étant la réduction d'un être humain à une étiquette pour la vie, le tout avec force prétention scientifique,
• la place de la psychiatrie relationnelle comme moyeu de la pratique de la psychiatrie publique genevoise,
• l'avenir de "l'idolâtrie" des publications par opposition à l'expérience clinique et au comportement au chevet du malade dans le choix des médecins-cadres,
• les choix concernant les foyers et ateliers, choix dûment communiqués à l'office fédéral des assurances sociales, car nul ne peut émarger pour la même activité simultanément à la loi fédérale sur l'assurance - invalidité (LAI) et la loi fédérale sur l'assurance maladie (LAMaL) ?
Par ailleurs, où en sont les travaux à propos de deux demandes du groupe d'experts ne concernant pas les Hôpitaux Universitaires de Genève, soit l'urgence sociale et "l'audit" juridique ?
Réponse du Conseil d'Etat
M. Guy-Olivier Segond. M. le député Rodrik a interpellé le Conseil d'Etat sur la réforme de la psychiatrie adulte et, en particulier, sur le calendrier des décisions de principe et des mesures d'application.
En ce qui concerne l'état d'avancement des travaux, le Conseil d'Etat rappelle qu'à la suite du rapport de la commission d'experts sur la psychiatrie adulte, déposé en janvier 2000, les décisions de principe ont été prises en mars et en mai 2000 par les autorités cantonales et par le conseil d'administration des hôpitaux universitaires de Genève.
La mise en oeuvre de ces décisions de principe a été confiée au comité de direction des hôpitaux universitaires de Genève qui a créé, à cet effet, sept groupes de travail chargés de proposer les mesures d'application. Ces sept groupes de travail ont rendu leurs rapports à fin avril 2001. Ils sont examinés par le comité de direction au cours de ce mois de mai et ils seront à l'ordre du jour du conseil d'administration du mois de juin. Voilà pour la procédure et l'état d'avancement des travaux.
Sur le fond, le Conseil d'Etat rappelle que, pour l'essentiel, les conclusions des experts étaient claires et fortes :
d'une part, la place des approches relationnelles dans les processus de soins, comme dans les programmes de recherche, devait être revue en mettant au centre des préoccupations le respect du patient et de ses droits;
d'autre part, ce choix devait se traduire dans la politique de recrutement des professeurs et des cadres médicaux, afin d'influencer la pratique clinique du département de psychiatrie.
Dans cette perspective, la discussion du conseil d'administration du mois de juin se concentrera probablement sur la volonté de certains d'organiser la psychiatrie adulte par pathologie, ce qui risque non seulement de vider de sa substance l'organisation par secteur, mais aussi d'attribuer à chaque patient, pour reprendre votre expression, Monsieur le député, «une étiquette pour la vie».
En ce qui concerne les relations, que vous savez complexes et subtiles, entre les ambitions académiques et les nécessités cliniques - question qui ne se pose pas seulement en psychiatrie, mais dans l'ensemble des départements médicaux des hôpitaux universitaires de Genève - le Conseil d'Etat rappelle qu'il a déposé un projet de loi mettant sur pied d'égalité les aspects universitaires et les aspects hospitaliers dans les procédures de nomination des professeurs de la faculté de médecine qui exercent des responsabilités hospitalières.
Par ailleurs, le conseil d'administration devra se prononcer sur la création d'un service d'accueil d'urgence et d'évaluation - qui ne devrait pas poser de problèmes particuliers - et sur les foyers et les ateliers, où le statu quo ne paraît plus possible et où il s'agit, en préservant le statut public, de choisir, pour simplifier, entre un financement par l'assurance-maladie, par l'assurance-invalidité ou par le canton.
Enfin le Conseil d'Etat vous confirme qu'il a donné les mandats nécessaires pour que des personnalités extérieures aux hôpitaux universitaires de Genève donnent des suites concrètes aux recommandations des experts relatives aux urgences sociales et aux droits des patients psychiatriques, et à l'évaluation de leur mise en oeuvre.
En conclusion, je vous confirme, clairement et publiquement, que le Conseil d'Etat, le conseil d'administration et le comité de direction veilleront à ce que les décisions prises soient appliquées exactement et complètement, à court terme comme à long terme, quelles que soient les velléités, affichées ou souterraines, de faire échouer cette réforme de la psychiatrie adulte.
Cette interpellation urgente écrite est close.