République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8165-A
a) Projet de loi de Mmes et MM. Christian Grobet, Anne Briol, Cécile Guendouz, Georges Krebs, Marie-Paule Blanchard-Queloz, David Hiler, Salika Wenger, Jeannine de Haller, Pierre Vanek, Rémy Pagani et Erica Deuber Ziegler sur la création d'une zone 4B protégée à Chêne-Bougeries. ( -) PL8165
 Mémorial 1999 : Projet, 9571. Renvoi en commission, 9585.
Rapport de majorité de M. Alain Etienne (S), commission d'aménagement du canton
Rapport de minorité de M. Walter Spinucci (R), commission d'aménagement du canton
PL 8361-A
b) Projet de loi du Conseil d'Etat modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Chêne-Bougeries (création d'une zone 4B protégée avec abrogation de la zone de développement 3). ( -) PL8361
 Mémorial 2000 : Projet, 7833. Renvoi en commission, 7842.
Rapport de majorité de M. Alain Etienne (S), commission d'aménagement du canton
Rapport de minorité de M. Walter Spinucci (R), commission d'aménagement du canton
PL 8362-A
c) Projet de loi du Conseil d'Etat approuvant l'aménagement de la rue de Chêne-Bougeries (R.C.2) destiné à la création d'un site protégé pour le tram et déclarant d'utilité publique cet aménagement. ( -) PL8362
 Mémorial 2000 : Projet, 7842. Renvoi en commission, 7846.
Rapport de majorité de M. Alain Etienne (S), commission d'aménagement du canton
Rapport de minorité de M. Walter Spinucci (R), commission d'aménagement du canton

27. Rapport de la commission d'aménagement du canton chargée d'étudier les objets suivants :

RAPPORT DE LA MAJORITÉ

Rapporteur : M. Alain Etienne

Les projets de loi 8361 et 8362, déposés le 11 octobre 2000 ainsi que le projet de loi 8165, déposé le 16 novembre 1999, ont été envoyés à la Commission d'aménagement du canton. Ces objets ont été traités lors des séances des 24 et 31 janvier 2001 et du 21 février 2001 sous la présidence successive de M. Olivier Vaucher et de Mme Laurence Fehlmann-Rielle, en présence de M. Laurent Moutinot, conseiller d'Etat, chef du DAEL, de Mme Anni Stroumza, chargée de mission, de M. Gilles Gardet, directeur et urbaniste cantonal, de M. Georges Gainon, chef de la division de l'information du territoire et des procédures, de M. J. Moglia, chef du service des études et plans d'affectation, et de M. Jean-Charles Pauli, juriste. Ont également participé partiellement M. J.-D. Haegler, ingénieur cantonal et M. D. Mottier, juriste.

Présentation du plan d'aménagement routier de la traversée du bourg, avec un site protégé :

Ce projet de réaménagement de la rue de Chêne-Bougeries est lié à la réalisation du projet de plan localisé de quartier, lequel prévoit la démolition des anciens bâtiments situés au nord-est de cette rue et leur remplacement par des nouveaux bâtiments situés plus en retrait. L'aménagement aura 185 m de long. Actuellement, il y a 12 m entre les façades et le bord côté sud. L'élargissement est pris sur les bâtiments qui pourraient être démolis soit 6,5 m. Côté nord, le trottoir est prévu en encorbellement, sous les nouveaux bâtiments. La transition, côté France, se fait en passant à un site banal mixte. Pour le projet futur de mise en site protégé, un bâtiment supplémentaire serait encore à démolir. L'idée est de rejoindre le gabarit admis à Chêne-Bourg soit des voies séparées pour les voitures. La mise en site protégé du tram, délimité par des bordures spéciales, permettrait aux véhicules de franchir les obstacles comme cela a été fait à la Terrassière. Le projet prévoit également une amélioration des conditions contre le bruit par la pose d'un revêtement phonoabsorbant.

M. Haegler précise qu'à l'époque, la mise en site protégé voulait répondre au souci de l'exploitation des TPG et de l'amélioration de la vitesse commerciale. C'était une décision du précédent conseiller d'Etat en charge de l'aménagement. Le Conseil d'Etat actuel a quant à lui confirmé la priorité aux TPG.

Une étude de l'EPFL concernant la vitesse commerciale des TPG a été produite. Voir annexe.

Concernant les propriétaires, la commune s'occupe des transactions. Elle est propriétaire majoritaire dans le périmètre. Il ne reste que 3 propriétaires privés. Le projet de loi 8362 propose une expropriation publique qui pourrait être utilisée si les transactions échouaient. Les opposants estiment que le projet ne présente pas un cas d'intérêt général susceptible de déclencher l'utilité publique. Ils estiment que la protection du patrimoine est prépondérante par rapport à la mise en place d'un schéma de circulation.

Mme Gouda rappelle que la fondation a été créée avec pour objectif de pouvoir maîtriser le parcellaire du périmètre concerné et précise que les bâtiments ont été achetés dans un état de délabrement avancé.

Le 1er PLQ est entré en force en 1972. Il prévoyait une 3ème zone de développement des deux côtés de la route. En 1991, suite à une réflexion sur tout le périmètre, les autorités de Chêne-Bougeries ont proposé de revenir, pour le côté sud, à une zone 4B protégée, car la qualité architecturale méritait son maintien, alors que le côté nord ne justifiait pas une mise en 4B protégée.

Une nouvelle étude du PLQ en force a été engagée avec des variantes pour arriver au projet qui est présenté actuellement, issu d'un concours. Le Conseil municipal s'est prononcé en faveur du PLQ qui a été établi en accord avec le DAEL. Il a été préavisé par le Conseil municipal à une forte majorité. Parallèlement, il y a une demande de 4B protégée pour le côté nord.

Les autorités affirment qu'un effort considérable a été fait pour le maintien côté sud(pour 4 immeubles, la commune a investi 10 millions en fonds propres). Par contre, pour le côté nord, elles s'expriment contre la 4B protégée. Des désagréments importants sont provoqués par les transports publics. La mise en place du tram en site protégé est une solution indispensable pour rendre possible une certaine activité dans ce centre communal. La sécurité des piétons et des cyclistes est primordiale. La fondation va dans le même sens.

Le problème de l'arrêt du tram est évoqué. Auparavant, l'arrêt était situé en site propre, face à l'école. A l'époque, le conseiller d'Etat Christian Grobet a exigé son déplacement à l'entrée du « goulet » ce qui a eu pour conséquence de bloquer la circulation. La commune est allée jusqu'au Tribunal fédéral. Il a été déclaré que l'arrêt actuel était provisoire jusqu'à l'acceptation du nouveau gabarit de la route.

Concernant l'étude de l'EPFL « Vitesse commerciale des TPG :

Evaluation des mesures d'accélération prises en tant que moyen de promotion des transports publics » du 31 octobre 2000, M. Stucki indique que cette étude a été faite sur demande de la Commission d'évaluation des politiques publiques (CEEP). M. Stucki précise que ce rapport a été adressé au DJPT. Le département est appelé à faire une réponse. Les TPG ont aussi préparé une réponse. Le Conseil d'administration en a discuté et a décidé qu'il fallait reformuler les propositions d'actions à savoir : comment améliorer la vitesse commerciale des lignes TPG ? Ce rapport sera vraisemblablement adressé au Grand Conseil.

Concernant l'amélioration de la vitesse sur la ligne 12, une étude avait été entreprise, il y a 15 ans. Des mesures ont été mises en oeuvre. Le tronçon de l'Ecole internationale va être mis en site propre l'année prochaine. Dans la partie du « goulet » de Chêne-Bourg, il y a eu la réorganisation des arrêts. L'arrêt place Favre a été refait avec un site protégé. Les accès à pied ne sont pas plus dévaforables qu'auparavant. Avec la nouvelle position de l'arrêt de Chêne-Bougeries, la régulation des feux a été améliorée. M. Stucki reconnaît que le système actuel fonctionne bien lorsque le trafic correspond au dimensionnement du système global. Toutes ces mesures ont permis d'économiser six minutes sur un tour complet.

A Chêne-Bourg et à Chêne-Bougeries, on ne peut pas parler de site propre. Les TPG estiment que la situation s'est déjà améliorée mais que l'objectif fixé par le Gand Conseil en 1988, soit 18 km/h de vitesse commerciale, n'est pas atteint. On est actuellement à 15 km/h.

Le projet d'élargissement de la rue de Chêne-Bougeries est soutenu par les TPG car on s'approche de l'objectif. M. Stucki ne se prononce pas sur la préservation des immeubles. Le projet soumis améliore la situation du point de vue des TPG. Il ne peut pas dire qu'on ne pourrait pas résoudre une partie du problème par une amélioration encore plus poussée des feux, mais ce qui est déterminant, c'est le carrefour chemin de la Montagne/chemin du Vallon. M. Stucki souligne que le rapport de la CEPP n'est pas l'avis des TPG.

Mme Corminboeuf s'exprime au nom de l'ATE et de la SPE. Ces deux associations sont intervenues sur ce dossier en décembre 1998, mars 1999 et le 29 novembre 2000. Elle affirme que la mise en site protégé du tram ne faciliterait que l'accès à la voiture alors que l'on cherche à réduire la circulation en ville.

Elle rappelle que la route de Chêne-Bougeries est un axe secondaire, alors que la route de Malagnou est un axe principal. Pour les usagers des TPG, les aménagements actuels permettent de monter et descendre à même les trottoirs et que le projet présentera un obstacle supplémentaire.

Elle précise également que le projet La Praille/Eaux-Vives est en bonne voie et de ce fait l'élargissement de la route de Chêne se justifiera de moins en moins. Elle rappelle que les normes OPB sont déjà dépassées sur cette route et que l'augmentation de la capacité accentuera ce phénomène. Elle relève que dans le projet de loi, le budget d'élargissement de la route est pris sur celui de l'extension du réseau de tram.

M. Meynet nous fait part de sa position à l'aide d'un texte qu'il nous lit. Voir texte en annexe.

Mme Pillet nous indique que sa maison a été achetée par sa famille en 1910. Elle pense qu'il s'agit d'un type de construction exceptionnel, caractéristique d'une époque. Elle et son mari ne veulent pas faire une affaire financière. Ils ont procédé à des travaux. Ils pourraient abandonner leur patrimoine si il y avait un intérêt réel pour la commune, or ils estiment que ce n'est pas le cas. Mme Pillet ne comprend pas l'avis en expropriation qu'elle a reçu. Elle demande de bien vouloir l'annuler.

M. Karr se réfère au rapport d'étude d'impact. L'enjeu de l'impact de l'élargissement concerne six communes qui désirent toutes réduire les nuisances. Cet objet accélère le trafic. M. Karr considère qu'il est inquiétant d'ouvrir de nouvelles possibilités à l'automobile. Les membres de l'Association Pro Ermitage sont préoccupés par cet élargissement.

M. Boesiger rappelle la position de l'Association des habitants des Trois-Chêne qui porte sur le patrimoine, sur le développement urbanistique et sur la circulation. Il précise que les parties villageoises contribuent à maintenir la qualité de vie des habitants. L'intérêt public réside dans le maintien des fronts bâtis.

Voir annexe.

La majorité de la commission est d'avis qu'il faut mettre également en zone protégée le secteur nord, afin de préserver, d'une part, la valeur d'ensemble des bâtiments sur ce côté et, d'autre part, de sauvegarder le dernier village-rue de notre canton. A ce sujet, il faut rappeler que, dans le cadre de la demande de classement des immeubles de la rue de Chêne-Bougeries et de la rue du Vieux-Chêne, la CMNS a émis un préavis favorable au principe du maintien de l'agglomération existante, avec ses deux fronts de rue et les éléments situés en arrière.

La majorité de la commission estime qu'elle ne veut pas mettre en opposition l'amélioration des transports publics et la protection du patrimoine. Il faut ici reconnaître la qualité des lieux et intervenir sur le trafic automobile avant d'agir sur la voie du tram. Il est, par ailleurs, surprenant d'envisager des expropriations pour permettre une meilleure accessibilité au centre-ville par les automobiles. La vitesse commerciale des TPG évoquée est ici un faux problème qui ne cherche qu'à légitimer la destruction des bâtiments.

On peut s'étonner, à cet égard, du flou qui s'est instauré autour du rapport sur la vitesse commerciale des TPG. A plusieurs reprises, celui-ci a été évoqué en commission et réclamé. A ce jour, les députés n'ont toujours rien reçu. Pourtant, à force de recherches, je suis en mesure de vous indiquer que le rapport sur la vitesse commerciale des TPG, du 31 novembre 2000 de la Commission d'évaluation des politiques publiques est à disposition sur internet (www.genève.ch/ceep) et que le rapport de l'EPFL « Analyse de la vitesse commerciale actuelle des lignes TPG 1 et 12 », de février 2000, a été mis en annexe. Il est intéressant de relever dans ce dernier rapport, à la page 12 que « la traversée du goulet de Chêne-Bougeries n'occasionne pas un ralentissement pénalisant puisque cette traversée se fait à une vitesse moyenne supérieure à celle de terminus à terminus ».

La gauche et les Verts ne sont donc pas favorables à une fluidité du trafic automobile à cet endroit. Il a été démontré que les expropriations et les démolitions n'amélioreraient que fort peu la fluidité des transports. Il est inacceptable de faire croire ici que les transports publics vont être privilégiés alors que la priorité doit être la réduction du trafic automobile permettant une meilleure vitesse commerciale des trams. Nous avons l'impression qu'avec ce projet de loi, on cherche plutôt à démolir le côté nord pour mettre les voitures en site propre. Comme l'a indiqué l'ATE, l'axe de la route de Malagnou devrait servir d'itinéraire prioritaire pour éviter les anciens sites bâtis.

Du point de vue du patrimoine, je le répète, il s'agit d'un ensemble cohérent, d'une grande qualité, comparable au Vieux-Carouge, et qui forme le dernier village-rue de notre canton encore préservé des atteintes apportées à d'autres ensembles tels que ceux de Versoix ou de Plan-les-Ouates. Il faut reconnaître la valeur d'ensemble de l'ancien bourg de Chêne-Bougeries. Cette valeur d'ensemble aurait du être entérinée par une adaptation du régime des zones et par l'élaboration d'un plan de site. Il est d'ailleurs supprenant de toujours parler de goulet : c'est une vision extrêmement réductrice des automobilistes à l'encontre du patrimoine.

Oserions-nous aujourd'hui proposer la démolition d'un côté de la rue St-Victor à Carouge sous prétexte de l'amélioration de la vitesse commerciale du tram ?

Ainsi, la majorité de la commission, en l'occurrence l'Alternative, est d'avis qu'il faut accepter le projet de loi 8361 et refuser les projets de lois 8362 et 8165.

Par lettres séparées datées du 28 novembre 2000, reçues en Chancellerie le 30 novembre de la même année, la commune de Chêne-Bougeries et la Fondation communale pour l'aménagement de Chêne-Bougeries ont déclaré former opposition contre le présent projet de loi et le plan N° 29012-511, visé à l'article 1 et mis en procédure d'opposition du 1er novembre au 1er décembre 2000.

Par lettre datée du 29 novembre 2000, reçue en Chancellerie le 1er décembre de la même année, M. et Mme Emile et Michèle Biedermann, Mme Françoise Cochard-Biedermannn, M. Luc Wursten, ont également déclaré former opposition à ce projet de loi.

Par lettre datée du 30 novembre 2000, reçue en Chancellerie le 4 décembre de la même année, le groupe des locataires du chemin De-la-Montagne, se présentant comme une association regroupant environ « 550 ménages habitant les immeubles du chemin De-la-Montagne, représenté par sa présidente, Mme Monique Verhoeven, a déclaré former opposition à ce projet de loi.

Enfin, par lettre du 30 novembre 2000, reçue le 6 décembre de la même année, M. et Mme Philippe et Nicole Boissonnas, se déclarant riverains du chemin de la Besonnette, ont également déclaré former opposition.

Conformément à l'article 16, alinéa 5 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987 (L 1 30; ci-après Lalat), toute personne, organisation ou autorité, qui dispose de la qualité pour recourir contre le changement d'affectation visé par le projet de loi peut déclarer son opposition, par acte écrit et motivé, au Conseil d'Etat pendant un délai de 30 jours à compter de la première publication. Selon l'article 35, alinéa 3 Lalat, les communes et les associations d'importance cantonale ou actives depuis plus de trois ans qui, aux termes de leurs statuts, se vouent par pur idéal à l'étude de questions relatives à l'aménagement du territoire, à la protection de l'environnement ou à la protection des monuments, de la nature ou des sites ont qualité pour recourir.

En l'espèce, M. et Mme Emile et Michèle Biedermann, Mme Françoise Cochard-Biedermannn, M. Luc Wursten ainsi que la Fondation communale pour l'aménagement de Chêne-Bougeries se déclarent propriétaires de diverses parcelles comprises à l'intérieur du périmètre du plan N° 29012-511, visé à l'article 1 du projet de loi 8361. C'est dire que leur qualité pour agir peut être admise, tout comme celle de la commune de Chêne-Bougeries. Formées en temps utile, ces oppositions sont donc recevables à la forme.

La question de la recevabilité des actes d'opposition formés par les autres opposants peut rester ouverte, compte tenu de la réponse qui sera apportée au fond.

Au vu de la grande similitude des motifs invoqués, les oppositions seront traitées de façon jointe, conformément à l'art. 70 LPA, applicable par analogie.

Au fond, le projet de plan N° 29012-511 vise à protéger un tissu urbain « extrêmement riche et varié », soit un ensemble bâti entre la fin du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle, qui constitue un témoin cohérent d'une morphologie urbanistique caractéristique de cette époque. Il s'agit d'un « élément devenu rarissime en territoire genevois, les autres exemples qui subsistent (Versoix et Plan-les-Ouates, par exemple) présentant une morphologie nettement moins affirmée », selon la Commission des monuments, de la nature et des sites. Telle est la raison pour laquelle, en substance, cette commission, dans son préavis du 26 mai 1998, se déclare « favorable au principe du maintien de l'agglomération existante, avec ses deux fronts de rue et les éléments situés à l'arrière » et recommande au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement « d'étudier la possibilité de gérer le trafic de transit d'une manière différente, d'adapter le régime des zones en vigueur et d'engager des investigations historiques plus approfondies, afin de déterminer des mesures de sauvegarde cohérentes pour chacun des bâtiments, lesquelles pourraient être définies dans le cadre d'un plan de site ».

Suite à une pesée des intérêts en présence, la commission est d'avis qu'il n'existe pas de motifs d'intérêt public ou privé suffisamment pertinents et sérieux pour s'écarter de ce préavis.

En particulier, il résulte du rapport d'impact préliminaire lié au projet d'aménagement de la chaussée et à la création d'un site protégé pour le tram (PL 8362) et au projet de plan localisé de quartier (ci-après PLQ) N° 28985, que le tronçon de la rue de Chêne-Bougeries situé au milieu du goulet devrait être assaini même en cas de réalisation de l'image de développement prévue par ce projet de plan. En effet, même dans cette hypothèse, les valeurs limites d'immission au bruit seraient de toute façon dépassées, le rapport d'impact précité précisant que « l'effet du projet sera légèrement positif pour les bâtiments compris actuellement dans le goulet (éloignement des sources de bruit des façades). En revanche, sans mesures particulières, des effets négatifs (augmentation des niveaux sonores) sont pronostiqués aux deux extrémités du goulet » (p. 18 de ce document).

C'est dire qu'en matière de bruit, la situation ne serait guère améliorée, ce qui se conçoit aisément, dès lors que la réalisation de l'aménagement envisagé par le projet de PLQ et le projet routier, en fin de compte, par l'élargissement prévu des chaussées routières, aboutiraient surtout à faciliter les conditions de la circulation automobile en supprimant toute entrave à celle-ci, voire même à en augmenter le flux.

Quant à la vitesse de circulation des trams, la réalisation du projet d'élargissement de la rue de Chêne-Bougeries ne l'améliorerait que de façon minime. Au demeurant, il résulte d'un rapport d'analyse de l'EPFL, de février 2000, que la traversée du goulet de Chêne-Bougeries ne figure pas parmi les points faibles de cette ligne. Au contraire, ce même rapport indique que « la traversée du goulet de Chêne-Bougeries n'occasionne pas un ralentissement pénalisant, puisque cette traversée se fait à une moyenne supérieure à celle de terminus à terminus » (p. 12).

Enfin, les autres intérêts publics et privés invoqués, en particulier la « recréation » ( ?) d'un tissu villageois, n'apparaissent pas prépondérants par rapport à l'important motif de protection du patrimoine poursuivi par le projet de loi querellé.

Au vu de ce qui précède, les oppositions apparaissent infondées et doivent être rejetées, dans la mesure où elle sont recevables.

L'entrée en matière du PL 8165 est refusée par 11 non (3 S, 2 Ve, 2 AdG, 2 L, 1 R, 1 DC).

L'entrée en matière du PL 8361 est acceptée par 7 oui (3 S, 2 Ve, 2 AdG) et 4 non (2 L, 1 R, 1 DC).

Concernant la deuxième phrase de l'article 2, M. Moutinot estime qu'elle n'est pas convenable car elle introduit ici un privilège par rapport à l'ensemble des immeubles en 4B protégée soumis aux mêmes règles et, ainsi, une inégalité de traitement. La majorité de la commission n'y voit pas d'inconvénient, puisqu'elle laisse une marge de manoeuvre au département avec la formule « peut ordonner ». Il faut également rappeler que, dans ce périmètre, un bâtiment a été démoli de manière autoritaire. La majorité de la commission se demande également pourquoi l'on n'arrive pas plus à stopper le processus de dégradation. M. Moutinot nous informe que la commission du logement étudie le projet d'une ligne budgétaire pour encourager la restauration. Il est précisé que le degré de sensibilité III attribué correspond aux secteurs de zone mixte, avec habitat et activités.

La proposition de supprimer la deuxième phrase de l'article 2 est refusée par 6 non (3 S, 1 Ve, 2 AdG), 4 oui (2 L, 1 R, 1 DC) et 1 abstention (Ve).

Il est proposé d'introduire un article 4 nouveau pour le rejet des oppositions. Cet article 4 nouveau est accepté par 7 oui (3 S, 2 Ve, 2 AdG) et 4 non (2 L, 1 R, 1 DC).

Le projet de loi 8361 est accepté dans son ensemble ainsi amendé par 7 oui (3 S, 2 Ve, 2 AdG) et 4 non (2 L, 1 R, 1 DC).

L'entrée en matière du PL 8362 est refusée par 7 non (3 S, 2 Ve, 2 AdG) et 4 oui (2 L, 1 R, 1 DC).

La majorité de la commission vous demande, Mesdames et Messieurs les députés, de suivre ses recommandations.

Projet de loi(8165)

sur la création d'une zone 4B protégée à Chêne-Bougeries

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1

1 Le plan annexé au présent projet de loi modifiant le régime des zones de construction sur le territoire de la commune de Chêne-Bougeries (extension d'une zone 4B protégée avec abrogation de la zone de développement 3) est approuvé.

2 Les plans des zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

1 Les bâtiments situés dans le périmètre de la zone 4B protégée et construits avant 1920 doivent être maintenus et ne peuvent être démolis que si leur coût de rénovation est totalement disproportionné par rapport au coût d'une reconstruction à neuf. Vu leur intérêt historique, le Département des travaux publics et de l'énergie peut ordonner l'exécution de travaux de restauration et accorder, le cas échéant, des subventions à travers le fonds cantonal des monuments, de la nature et des sites.

2 En cas de reconstruction d'un bâtiment, celle-ci doit être réalisée dans l'alignement des bâtiments existants, avec un gabarit et un nombre de niveaux identiques aux bâtiments démolis.

Art. 3

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre du plan visé à l'article 1.

Art. 4

Un exemplaire du plan susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.

13Projet de loi(8361)

modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Chêne-Bougeries (création d'une zone 4B protégée avec abrogation de la zone de développement 3)

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1

1 Le plan N° 29012-511, dressé par le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, le 1er septembre 1998, modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Chêne-Bougeries (création d'une zone 4B protégée avec abrogation de la zone de développement 3 à la rue de Chêne-Bougeries) est approuvé.

2 Les plans des zones annexées à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.

Art. 2

1 Les bâtiments situés dans le périmètre de la zone 4B protégée et construits avant 1920 doivent être maintenus et ne peuvent être démolis que si leur coût de rénovation est totalement disproportionné par rapport au coût d'une reconstruction à neuf. Vu leur intérêt historique, le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement peut ordonner l'exécution de travaux de restauration et accorder, le cas échéant, des subventions à travers le Fonds cantonal des monuments, de la nature et des sites.

2 En cas de reconstruction d'un bâtiment, celle-ci doit être réalisée dans l'alignement des bâtiments existants, avec un gabarit et un nombre de niveaux identiques au bâtiment démoli.

Art. 3

En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre du plan visé à l'article 1.

Art. 4

Les oppositions à la modification du régime des zones par la commune de Chêne-Bougeries, la Fondation communale pour l'aménagement de Chêne-Bougeries, M. et Mme Philippe et Nicole BOISSONNAS, un groupe des locataires des immeubles du chemin De-la-MONTAGNE, M. et Mme Emile et Michèle BIEDERMANN, Mme Françoise COCHARD-BIEDERMANNN, M. Luc WURSTEN et les propriétaires de la parcelle 638, feuille 18 de la commune de Chêne-Bougeries, sont rejetées dans la mesure où elles sont recevables, pour les motifs exposés dans le rapport de la commission chargée de l'étude de la présente loi.

Art. 5

Un exemplaire du plan N° 29012-511 susvisé, certifié conforme par le président du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.

17Projet de loi(8362)

approuvant l'aménagement de la rue de Chêne-Bougeries (R.C. 2) destiné à la création d'un site protégé pour le tram et déclarant d'utilité publique cet aménagement

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Article unique

1 L'aménagement de la rue de Chêne-Bougeries (R.C. 2) destiné à la création d'un site protégé pour le tram, comprenant le tronçon situé entre le chemin De-La-Montagne et la place des Trois-Martyrs, sur le territoire de la commune de Chêne-Bougeries, est approuvé.

2 La réalisation de l'aménagement visé à l'alinéa 1, selon plan N° 02-602 D, dressé par le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, en date du 5 octobre 1998, est déclarée d'utilité publique au sens de l'article 3, lettre a, de la loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, du 10 juin 1933.

3 En conséquence, l'acquisition des immeubles et droits nécessaires à cette réalisation peut être poursuivie par voie d'expropriation.

RAPPORT DE LA MINORITÉ

Rapporteur: M. Walter Spinucci

Le rapporteur de minorité ne consacrera pas un long texte au sujet du projet de loi 8165.

En effet, une étude détaillée effectuée par le Service juridique du secrétariat général du DAEL rappelle que ledit projet de loi, ayant fait l'objet d'une saisine directe du Grand Conseil, soulève une question de nature institutionnelle. Cette étude affirme en conclusion que :

« ce projet de loi contrevient au principe de la légalité, à celui de l'égalité de traitement, que la loi ordinaire (la loi matérielle) a pour fin d'assurer et porte atteinte à l'organisation des pouvoirs institués par la législation en la matière ».

L'entrée en matière sur ce projet de loi doit donc être tout simplement refusée.

Le véritable enjeu de ce dossier est constitué par les projets de lois 8361 et 8362, tous deux présentés par le Conseil d'Etat.

Il s'agit manifestement de trancher entre deux types d'intérêts différents. Doit-on privilégier les transports publics en procédant au réaménagement de la rue de Chêne-Bougeries, en renonçant au bâti actuel du côté Nord de ladite rue, ou alors maintenir le statu quo au détriment de la fluidité du trafic, notamment celle des transports publics ?

Pour sa part, le Conseil d'Etat a clairement manifesté ses intentions, puisqu'il recommande de refuser le projet de loi 8361 (création d'une zone 4B protégée avec abrogation de la zone de développement 3) et d'accepter le projet de loi 8362 (aménagement de la rue de Chêne-Bougeries (R.C. No 2) destiné à la création d'un site protégé pour le tram et déclarant d'utilité publique cet aménagement).

Pour le surplus, le président du DAEL a affirmé et confirmé que le Conseil d'Etat désire privilégier les transports publics.

Cette détermination du Conseil d'Etat et du président du DAEL, partagée sans réserve par les députés de l'Entente, ne recueille pourtant pas les faveurs de l'Alternative.

Ainsi, il est étonnant de constater que l'amélioration de la vitesse commerciale des TPG, si faible soit-elle, ne doit pas se faire au détriment du patrimoine. Il est tout autant étonnant de constater que l'amélioration de la fluidité du trafic, de la circulation des piétons et des cyclistes, l'amélioration des normes OPB et OPair ne sont pas de nature à encourager les députés de l'Alternative à souscrire aux propositions du Conseil d'Etat et du président du DAEL.

Les arguments de la majorité de la commission se sont développés essentiellement sur ces deux principes :

maintien du « patrimoine bâti » ;

fluidité du trafic = plus de trafic, plus de pollution, etc.

Concernant le premier point ci-dessus, il y a lieu d'apporter les commentaires suivants :

en 1991, classement du périmètre au Sud de la rue de Chêne-Bougeries en zone 4B protégée ;

en 1997, une demande de l'APV de classement de l'ensemble des bâtiments situés de part et d'autre de la rue de Chêne-Bougeries était préavisée défavorablement par le Conseil municipal et par la CMNS, et ensuite refusée par le Conseil d'Etat.

Il est dès lors légitime de s'interroger sur la valeur patrimoniale des bâtiments situés au Nord de la rue de Chêne-Bougeries que l'Alternative voudrait maintenir.

Concernant le deuxième point ci-dessus, il paraît difficile d'admettre qu'une meilleure fluidité du trafic puisse en augmenter les nuisances.

Une fluidité du trafic améliorée signifie moins de freinages, moins d'accélérations, moins de dégagement de gaz, moins de bruit. Ajoutons à cela une sécurité accrue pour les piétons qui ne marcheront plus à proximité des voies du tram, tel qu'actuellement. La circulation des cyclistes également s'en trouvera améliorée dès l'instant où ils ne seront plus obligés à des arrêts fréquents entre des voitures dégageant des gaz.

Les commerçants y trouveront également des avantages puisque le stationnement sera rendu possible par l'aménagement de places réservées.

Pour terminer, la sinuosité du tracé des divers éléments (chaussées, voies, trottoirs) et le marquage de passages pour piétons constituent un excellent modérateur de vitesse.

Concernant la polémique relative aux déclarations des autorités exécutives de la commune, représentant également la Fondation immobilière communale et certains opposants, il y a lieu de relever :

les magistrats communaux et cantonaux, assermentés, agissent dans l'intérêt collectif et ce, dans ce dossier, depuis des décennies. Il n'est pas imaginable qu'ils soient motivés autrement que par l'intérêt collectif qui, parfois, doit faire abstraction, sans l'ignorer, de l'intérêt particulier.

C'est ainsi que le projet de loi 8362 prévoit une déclaration d'intérêt public en vue d'une expropriation.

les déclarations de certains opposants, parfois contradictoires, laissent planer quelques doutes sur leur seul désir de vouloir garder leur bien par pur sentimentalisme, à l'exclusion de tout autre intérêt pécunier.

Mesdames et Messieurs les députés, en vous encourageant à soutenir la position du Conseil d'Etat et de la minorité (refus du projet de loi 8361 et acceptation du projet de loi 8362), ayez également à l'esprit que la réalisation rapide du programme souhaité par l'autorité communale permettra, par la mise à disposition d'un nombre non négligeable de logements, de réduire la pénurie connue dans ce domaine dans notre canton.

Je vous remercie de l'attention que vous porterez à ce qui précède.

Premier débat

M. Alain Etienne (S), rapporteur de majorité. Nous devons nous prononcer aujourd'hui sur trois projets de lois. Le premier, le projet de loi 8165, a été déposé par des députés de l'Alliance de gauche et des Verts le 16 novembre 1999, demandant l'extension d'une zone 4B protégée avec abrogation de la zone de développement au lieudit le Goulet. A l'époque, ce projet de loi ne pouvait être traité puisque la procédure prévue par la loi d'application de la loi sur l'aménagement du territoire n'avait pas été suivie. Depuis, la législation a été changée. C'est pourquoi le Conseil d'Etat a déposé, le 11 octobre 2000, le projet de loi 8361 pour répondre à la demande du Grand Conseil, ainsi que le projet de loi 8362 permettant l'élargissement de la rue. Il est à noter que le Conseil d'Etat nous invite à refuser la création de la zone 4B protégée.

Pour la clarté du débat démocratique, ces différents projets, ainsi que le projet de plan localisé de quartier initié par la commune, ont fait l'objet d'une enquête publique simultanée. Après étude des documents remis et diverses auditions, la majorité de la commission s'est prononcée en faveur de la création de la zone 4B protégée et contre l'élargissement de la rue, ceci pour plusieurs raisons.

D'abord, pour une question de préservation du patrimoine. Il s'agit ici d'un ensemble d'immeubles cohérent, qui forme le dernier village-rue du canton, comparable au Vieux-Carouge. Aurions-nous aujourd'hui l'idée de vouloir démolir les immeubles carougeois sur un côté sous prétexte qu'il faut améliorer la circulation ? Je ne le pense pas. Alors, pourquoi cela est-il différent à Chêne-Bougeries ? Ces immeubles ont une valeur d'ensemble, il s'agit là de préserver le caractère homogène de la rue. Certes, la demande de classement a été refusée, mais j'aimerais rappeler le préavis de la CMNS qui, bien que défavorable au classement, a préavisé favorablement au maintien des bâtiments sur les deux fronts.

Du point de vue de la circulation, la majorité n'est pas favorable au projet d'élargissement de la rue. Nous considérons qu'il ne faut pas répéter les erreurs du passé; le gabarit de la route de Chêne ne correspond plus aux critères de la politique des transports de notre époque et irait à l'encontre des études actuelles qui tentent d'améliorer la qualité de l'espace urbain. L'élargissement de la rue va engendrer encore plus de nuisances. Il n'est donc pas acceptable ici de mettre en opposition la protection du patrimoine et l'amélioration des transports publics.

Nous considérons que ce projet d'élargissement est plus une mise en site propre de la voiture qu'une mise en site propre du tram! D'ailleurs, il est intéressant de noter que l'étude de l'EPFL concernant l'analyse de la vitesse commerciale actuelle des lignes TPG 1 et 12 indique que le goulet n'occasionne pas un ralentissement pénalisant, puisque cette traversée se fait à une vitesse moyenne supérieure à celle de terminus à terminus.

Mesdames et Messieurs les députés, la majorité de la commission vous invite donc à voter le projet de loi 8361 et à refuser le projet de loi 8362.

M. Walter Spinucci (R), rapporteur de minorité. J'aimerais tout d'abord aborder la problématique de l'élargissement de la rue de Chêne-Bougeries. Dans cette problématique, nous sommes en présence de deux théories qui s'opposent, et cela est normal. La théorie de l'Alternative imagine que la situation actuelle, avec ses bouchons, est la bonne solution pour éviter un plus grand afflux de voitures. Selon nous, cette solution diminuant la fluidité génère de plus grandes pollutions en rapport avec l'OPAir et l'OPB. Notre théorie préconise, si l'élargissement de la rue est accepté, une plus grande fluidité et partant une amélioration des conditions ambiantes air et bruit, une sécurité accrue pour les piétons et une mise en site protégé des cyclistes. C'est pour cette raison que nous sommes favorables à l'élargissement de la rue de Chêne-Bougeries.

Se rattache évidemment à cette problématique celle du bloc d'habitations situé au nord de la rue de Chêne-Bougeries. Concernant cet aménagement, je pense qu'il est utile de rappeler ce qui est préconisé par le projet, qui est issu d'un concours d'architecture mis sur pied en collaboration entre le département des travaux publics de l'époque et la commune de Chêne-Bougeries. Ce projet, qui porte le nom «Processus itératif», et le plan d'aménagement et d'élargissement de la route cantonale ont servi de base pour l'élaboration du nouveau plan localisé de quartier. Ce projet développe un certain nombre de concepts qui visent à faire revivre le village de Chêne-Bougeries en se basant sur son histoire, sa morphologie, et en réinterprétant son processus de développement.

Le site est composé aujourd'hui de plusieurs bâtiments d'époque, de fonction et d'architecture différentes. Nous pensons qu'il est important de conserver cette diversité d'écriture qui caractérise le lieu. C'est pour cela que le projet propose un processus qui puisse recréer les conditions de création de ce site. Ainsi, il est proposé des entités composées de projets différents qui s'inscrivent sur les divisions foncières existantes. Cette approche permet au lieu de conserver ses caractéristiques historiques, volumétriques et programmatiques. Chaque intervention ne nécessite pas une table rase totale mais recompose le site par fragments, dans une succession d'interventions singulières, à l'image de ce qui a été fait jusqu'à aujourd'hui.

Nous pensons que la conservation de tous les bâtiments existants n'est pas une solution face au développement des villes, au même titre d'ailleurs - il faut le reconnaître - que les démolitions brutales de sites chargés d'histoire ne peuvent être qu'une perte de patrimoine. Nous pensons en conséquence qu'il est fondamental d'inscrire le développement des cités sur les traces de leur histoire afin que le passé porte l'avenir, et non pas l'inverse.

Le projet est constitué de divers petits projets qui sont soit des modifications de bâtiments existants, soit de nouvelles constructions. Les bâtiments conservés sont soit rénovés, soit transformés ou agrandis, afin qu'ils puissent répondre à leurs nouveaux usages. Les nouveaux édifices reprennent les caractéristiques des constructions existantes : petits volumes et gabarits différenciés. L'échelle des interventions est en harmonie volumétrique avec le front sud du village, tout en conservant une dimension humaine. La composition d'ensemble s'inscrit sur les traces historiques et respecte les divisions foncières existantes. Les aménagements extérieurs proposent des dispositifs pour réduire les nuisances sonores du site. Des cours et une place sont recréées pour favoriser les rencontres et les échanges entre les habitants. Il y a dans ce projet environ 2 200 m2 de surface affectée à des activités et 6 100 m2 de surface pour des logements. Le coefficient d'utilisation du sol est inférieur à 2. Un parking d'environ 100 places est aménagé en sous-sol pour compléter le programme. Enfin, la mise en oeuvre de ce projet peut se faire par étapes successives, ne nécessitant pas la démolition de l'ensemble du périmètre.

Je pense qu'il était utile de rappeler quel était le programme initial qui a fait l'objet du concours d'architecture et qui a été primé. Je reviendrai ultérieurement sur la problématique du rapport de l'EPFL, dont le contenu n'a d'ailleurs jamais été soumis aux TPG, qui sont malgré tout les principaux intéressés.

Mme Fabienne Bugnon (Ve). Les Verts sont opposés au projet de loi déposé par le Conseil d'Etat, qui vise à détruire un ensemble de maisons villageoises pour élargir la route dans le but de fluidifier et donc d'augmenter le trafic. Un élargissement aurait pour effet de mettre le trafic automobile en site propre sur un axe pourtant secondaire en vertu de la hiérarchie du réseau Circulation 2000-Mobilité 2005. Les conséquences seraient une augmentation de la quantité et de la vitesse du trafic automobile, non seulement à travers Chêne-Bougeries, mais depuis Gaillard jusqu'aux Eaux-Vives, péjorant ainsi la qualité de vie des riverains des six communes.

Monsieur Spinucci, vous avez dit, dans votre intervention, que l'Alternative estimait qu'il y avait des risques importants pour l'environnement, alors que vous pensez que la qualité ambiante restera la même. En l'occurrence, il n'y a pas que l'Alternative : le rapport préliminaire d'impact relève que «le projet consécutif au projet de loi entraînera un bruit et une pollution de l'air accrus : aggravation des limites OPB déjà dépassées; une augmentation de la quantité de circulation, un accroissement de sa vitesse et, en conséquence, une augmentation du risque d'accident et des atteintes à la santé.» Nous ne sommes donc pas seuls à le penser.

Les Verts sont évidemment favorables à l'amélioration du réseau TPG partout où cela peut se faire. Mais l'élargissement de la route prévu par le projet de loi permettrait une augmentation de la vitesse commerciale de deux minutes seulement, sur la ligne déjà la plus performante, alors qu'à la rue du Rhône, pour ne citer qu'un exemple, les bus, selon les heures, ne peuvent pratiquement pas circuler. Il y a d'évidence des priorités et celle-là n'en est pas une. Du reste, la récente étude de l'EPFL, pour le compte de la Commission d'évaluation des politiques publiques, estime que la vitesse commerciale, dans la traversée de Chêne-Bougeries, est en moyenne supérieure à celle de terminus à terminus.

Nous nous interrogeons également - et cette question n'a pas reçu de réponse satisfaisante en commission - sur le bien-fondé du récent déplacement de l'arrêt du tram, qui auparavant était bien placé. D'ici à imaginer que l'on souhaite accumuler les obstacles il n'y a qu'un pas, que je ne franchirai pas!

Enfin, pour cet élargissement et pour la mise en site protégé du tram, on veut exproprier et démolir un ensemble villageois de qualité homogène, qui, selon les propriétaires autres que la commune, assure un rendement locatif raisonnable et des loyers abordables. Selon la CMNS, l'actuel ensemble bâti est aujourd'hui le dernier témoignage cohérent de l'agglomération historique de Chêne-Bougeries et est un élément devenu rarissime en territoire genevois.

En dehors de la commune, les propriétaires ont d'ailleurs tous exprimé - et quelquefois dans des termes très émouvants - leur attachement à leur bien. Ce sont donc ces propriétaires et cet ensemble villageois que l'on veut sacrifier au profit de la fluidité du trafic, l'argument de la vitesse commerciale du tram étant, comme je l'ai dit, dérisoire.

Ces raisons poussent évidemment les Verts à refuser fermement ce projet et à vous recommander, Mesdames et Messieurs les députés, d'adopter les conclusions du rapport de M. Etienne.

M. René Koechlin (L). En prenant connaissance de la position de la majorité, on se demande ce que veulent les membres de l'Alternative qui soutiennent son rapport... Entendent-ils vraiment maintenir le goulet de Chêne-Bougeries, qui quotidiennement, Madame Bugnon, freine le trafic des TPG par les étranglements et autres bouchons dont il est l'objet ? Les chiffres que vous articuliez tout à l'heure, Madame, sont des chiffres officiels, purement théoriques : ils ne tiennent pas compte des encombrements quotidiens, le matin et le soir, qui se prolongent dans la journée et qui entravent complètement la circulation du tram le plus fréquenté de notre République, je tiens à le préciser.

Nous sommes surpris de cette position, parce que ces mêmes députés de l'Alternative ne cessent, par ailleurs, de briser des lances à tour de bras en faveur des transports publics, en faveur de l'amélioration de leurs performances et de la fluidité de leur trafic. Mais tout cela, ce ne sont que des discours, des mots, du vent! Du vent qui fait du bruit à travers les trompettes de leur doctrine! Car, quand il s'agit de passer aux actes et d'entreprendre des travaux qui réellement améliorent le trafic, là vous vous effacez, Mesdames, Messieurs, et pour quel motif ? Pour protéger des bicoques, je pèse mes mots, et un goulet qui entrave le trafic.

De même, quand le Conseil d'Etat nous propose enfin une solution cohérente, qui non seulement améliore la circulation, mais qui, de surcroît, offre plus de logements moins chers, vous refusez et optez pour la solution qui maintient moins de logements plus chers! Là aussi, vous êtes en contradiction avec ce que vous défendez habituellement et ce que vous défendiez encore tout à l'heure, en votant l'amendement du député Hausser concernant Battelle, qui visait à construire plus de logements moins chers. Alors, il faudrait savoir! Tout à l'heure vous disiez qu'il fallait construire plus de logements moins chers, et maintenant vous nous dites exactement le contraire : à Chêne-Bougeries, construisons moins de logements sensiblement plus chers! Il faudrait savoir quelle est votre politique. Elle est incohérente; c'est du «n'importequoisme», pour reprendre une expression chère à Jean Piaget.

Mesdames et Messieurs, vous préconisez en l'occurrence des mesures conservatrices qui nous font nous interroger : êtes-vous progressistes ou franchement conservateurs ? En tout cas, s'agissant du projet qui nous occupe ici, c'est à cette seconde catégorie de politiques qu'à l'évidence vous appartenez. Qu'on se le dise : l'Alternative est résolument conservatrice!

La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, nous interrompons ici nos débats. Nous les reprendrons à 20 h 30, avec le rapport de la commission de contrôle de gestion sur les OPF.