République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8480
7. Projet de loi de Mmes et MM. Christian Brunier, Christine Sayegh, Pierre Marti, Roger Beer, Laurence Fehlmann Rielle, Antonio Hodgers, Jeannine de Haller, Catherine Passaplan, Alberto Velasco, Pierre-Louis Portier, Albert Rodrik, Dominique Hausser, Fabienne Bugnon, Etienne Membrez, Claude Blanc, Françoise Schenk-Gottret, Luc Gilly, Pierre Vanek et Bernard Clerc sur le financement de la solidarité internationale. ( )PL8480

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1 Objectif

La République et canton de Genève, en tant que Cité internationale reconnue pour sa vocation de défense de la paix et de coopération internationale, s'engage à mener une politique active en faveur de la solidarité internationale.

Art. 2 Moyens

Pour concrétiser l'objectif mentionné à l'article 1, la République et canton de Genève consacre au moins 0,7 % de son budget annuel de fonctionnement à la solidarité internationale, particulièrement en soutenant des projets de coopération, d'aide au développement, de promotion de la paix et de défense des droits sociaux et de la personne.

Art. 3 Collaboration

Le Conseil d'Etat collabore avec des organismes genevois ou internationaux actifs dans le domaine et reconnus pour leur sérieux, leur transparence, leur expérience et leur compétence.

Art. 4 Evaluation

Les projets soutenus par la République et canton de Genève sont régulièrement évalués par le Conseil d'Etat ou par un organisme compétent. Le Conseil d'Etat soumet un rapport annuel au Grand Conseil sur ce thème.

Art. 5 Entrée en vigueur

Le Conseil d'Etat fixe la date d'entrée en vigueur de la présente loi.

Art. 6 Dispositions d'application

Le Conseil d'Etat édicte les dispositions nécessaires à l'application de la présente loi.

Le premier sommet mondial de l'ONU sur le développement social a tenu ses assises en 1995 à Copenhague. A cette occasion, plus de cent chef-fe-s d'Etat et de gouvernement se sont entendu-e-s pour accorder une priorité politique sur les plans national et international à la lutte contre la pauvreté, le chômage et l'exclusion sociale. En juin 2000, les Nations Unies ont organisé, dans notre canton, une assemblée extraordinaire dans le but de dresser un premier bilan intermédiaire et de convenir de nouvelles initiatives afin de concrétiser les résolutions de Copenhague. Ce premier constat est bien décevant et le bilan n'est pas réjouissant.

Au-delà des bonnes intentions, la fracture entre les pays les plus riches et les plus défavorisés se creuse de plus en plus. Chaque jour, 40 000 enfants meurent de malnutrition. L'horreur est au rendez-vous. ¾ de la population mondiale n'ont pas trouvé la paix, ni résolu les problèmes sociaux, économiques et/ou politiques. Le pillage économique, la pauvreté, l'illettrisme, la malnutrition, les conflits, la pratique de la torture, le gaspillage des ressources non-renouvelables, les violations des droits de la personne se développent.

Dans ce contexte, Genève doit réaffirmer :

la nécessité d'une solidarité entre les individus, les groupes sociaux et les nations ;

l'importance de développer une politique active, globale et cohérente de solidarité internationale ;

la prépondérance de la promotion de la paix ;

le lien indissociable entre la démocratie et le développement social et économique ;

la nécessité de donner un contenu concret à la proclamation des droits fondamentaux de la personne et des collectivités humaines ;

la lutte constante contre toutes les formes de discrimination raciale, nationale, sexuelle, religieuse et sociale.

Le but visé par ce projet de loi s'inscrit totalement dans la dynamique de l'article 15 « Coopération au développement » du projet de loi 8365 du Conseil d'Etat sur l'action publique en vue d'un développement durable, soit : l'Etat accentue son action en faveur de la coopération au développement dans le tiers monde et développe l'information en vue d'un meilleur équilibre du développement.

Une république comme Genève, Cité internationale symbole de paix et d'entraide, se doit d'accentuer son effort en faveur des plus défavorisé-e-s de cette planète et de consacrer au moins 0,7 % de son budget annuel de fonctionnement à la solidarité internationale. N'est-ce pas la moindre des choses ?

Ce geste de solidarité est d'autant plus utile qu'il est évident que l'amélioration des conditions de vie des pays les moins favorisés a une influence directe sur les problèmes de migration et d'intégration, sur les relations économiques mondiales, sur l'équilibre social planétaire et sur le développement durable de la planète.

Ces montants doivent être engagés directement dans des projets de solidarité internationale ou attribués à des ONG (organisations non gouvernementales) agissant dans ce domaine, notamment à la Fédération genevoise de coopération.

Par solidarité internationale, nous comprenons particulièrement l'ensemble des projets de coopération, d'aide au développement, de promotion de la paix et de défense des droits sociaux et de la personne. Cette solidarité doit s'exercer dans le respect de l'indépendance et de l'autonomie des populations concernées.

L'aide humanitaire d'urgence ne doit pas être comprise dans ce domaine, le volume de ces aides liées aux points noirs de l'actualité pouvant fluctuer sensiblement d'année en année. De plus, cette aide humanitaire n'est qu'une première étape, non prévisible, et sur le court terme. La solidarité internationale - définie dans le paragraphe précédent - consiste, quant à elle, à mettre en place des actions et des projets sur la durée.

Evidemment, les autorités cantonales évalueront régulièrement les projets qu'elles soutiennent afin que ces moyens financiers soient utilisés avec un maximum d'efficacité en faveur des populations à qui nous apportons notre solidarité.

Au bénéfice de ces explications, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les député-e-s, à soutenir ce projet de loi en méditant la citation de Vaclav Havel : « Apprenons à nous-mêmes et aux autres que la politique peut être aussi l'art de l'impossible, c'est-à-dire l'art de nous rendre meilleurs, nous et le monde ».

Préconsultation

M. Christian Brunier (S). J'aimerais tout d'abord saluer le travail fabuleux et efficace entrepris par nombre d'associations qui préconisent depuis des années le fait d'accorder au moins 0,7% du PIB local aux plus défavorisés de la planète. Ce projet de loi est né de leur combat, et aujourd'hui nous devons leur rendre hommage, tout spécialement à la Fédération genevoise de coopération qui rassemble dans notre canton les associations qui se battent énergiquement et avec beaucoup d'efficacité pour la solidarité internationale.

Deuxième chose, j'aimerais mettre en évidence la convergence de vue sur ce thème de mouvements politiques qui ont l'habitude de s'affronter dans ce parlement. Je suis donc très content aujourd'hui de pouvoir dire que des représentants de cinq partis sur six ont signé ou cosigné ce projet de loi : quatre partis le soutiennent ainsi qu'un membre d'un cinquième parti. J'espère vraiment que nous arriverons à rassembler l'ensemble de ce parlement sur ce thème très crucial de la solidarité internationale, car je crois qu'il y a des personnes sensibles à ce problème dans tous les groupes. J'espère donc que nous trouverons un consensus en commission.

Que demande ce projet de loi ? C'est simple - c'est un combat qui est mené depuis des années - il s'agit d'accorder au moins 0,7%, pas de notre PIB mais de notre budget de fonctionnement, à la solidarité internationale. 0,7% me paraît bien la moindre des choses pour un canton qui, certes, connaît quelques problèmes mais qui est une des régions du monde où l'on vit tout de même relativement bien.

Certains vont peut-être bien avoir la tentation d'exciter un peu le populisme, voire la xénophobie, en disant que 0,7% de notre budget de fonctionnement représente 40 à 50 millions... 40 à 50 millions ça peut affoler l'opinion, mais vous savez tous très bien que 0,7% de notre budget - 40 à 50 millions, je le répète - ce n'est qu'une goutte d'eau par rapport aux 6 milliards du budget. C'est un geste logique et normal dans un monde qui compte tant de souffrances. Je vous rappelle tout de même qu'il y a chaque jour quarante mille enfants qui meurent de la pauvreté, et, par conséquent, l'effort que nous pouvons faire est me semble-t-il l'effort minimum que nous devons faire.

Nous voulons de plus - c'est mentionné très clairement dans notre projet de loi - que cette somme soit utilisée le plus efficacement possible. Il n'est pas question pour nous de créer un service de la solidarité internationale, une bureaucratie d'Etat pour gérer ces projets. Nous voulons passer par les associations spécialisées, expertes qui sont rapides dans l'action, efficaces sur le terrain, pour que cet argent bénéficie avant tout aux gens qui souffrent dans les pays les plus déshérités.

Nous avons aussi prévu des clauses d'évaluation. Nous savons qu'il y a un certain nombre de projets qui ne sont pas forcément très efficaces, alors nous voulons les évaluer régulièrement : c'est l'article 4 de notre projet de loi qui le prévoit. Vu la situation...

La présidente. Monsieur le député, le temps de parole en préconsultation est de cinq minutes...

M. Christian Brunier. Oui, oui ! Je termine, Madame la présidente ! Vu la situation internationale, je crois qu'il est urgent de voter un tel projet et de le rendre contagieux dans les autres communes, dans les autres cantons et, bien entendu, au niveau de la Confédération. Ce projet va aussi permettre une certaine transparence, puisque aujourd'hui le Conseil d'Etat comme les parlementaires sont incapables de dire vraiment combien d'argent nous consacrons à la solidarité internationale. Peut-être s'agit-il de 0,3 ou 0,2% du PIB ? Personne n'en sait rien ! Ce projet nous permettra au moins d'obtenir un chiffre précis.

Et puis, nous avons rencontré...

La présidente. Monsieur le député !

M. Christian Brunier. Je termine ! Dix secondes, s'il vous plaît ! (Exclamations.) Nous avons rencontré la Fédération genevoise de coopération qui a des projets en cours qui ne peuvent pas être concrétisés par manque de financement. Ce projet de loi permettra de les réaliser sur le terrain, et je vous invite à trouver un consensus en commission sur ce projet qui me semble crucial pour l'avenir de notre planète. (Exclamations.) 

M. Bernard Clerc (AdG). Nous avons signé ce projet de loi, nous y adhérons, mais il convient quand même de faire une remarque sur le fond. Je reviendrai ensuite sur un élément chiffré qui a été donné par M. Brunier et qui ne correspond malheureusement pas à la réalité...

Sur le fond, il est juste d'augmenter l'aide aux pays en développement, aux défavorisés de ces pays. Mais il convient de regarder la réalité en face : augmenter cette aide sans dénoncer les causes qui conduisent au sous-développement de parties ou de pays entiers de cette planète, c'est marcher sur une seule jambe ! C'est pourquoi en ce qui nous concerne, nous soutenons l'augmentation de cette aide, mais, en même temps, nous disons clairement que cette augmentation ne résoudra rien tant que les rapports des forces économiques au niveau mondial, seront axés principalement sur la concurrence à tous crins, la compétitivité à tous crins - dont nous faisions état tout à l'heure - qui conduit inévitablement à l'augmentation de la pauvreté et de la misère dans le monde.

En ce qui concerne les aspects purement techniques, je crois que M. Brunier s'est laissé un peu emporté dans son plaidoyer pour ce projet de loi puisqu'il a parlé de 40 à 50 millions pour l'aide au développement... Vous vous êtes trompé d'un zéro, Monsieur Brunier : en effet, 0,7% représente environ 4 millions, et nous dépensons actuellement environ 2,5 millions dans ce secteur !  

M. Pierre Marti (PDC). Le projet de loi que nous proposons avec la presque totalité des autres partis représente pour le PDC un principe fondamental de solidarité envers les plus défavorisés, mais, encore plus, une condition pour tenter d'apaiser, voir d'empêcher, les conflits toujours plus nombreux.

Pour le PDC, le développement est le nouveau nom de la paix. Ce projet de loi, c'est admettre que le partage avec les pays en voie de développement doit aussi être envisagé par voie légale comme l'est, par exemple, le RMCAS actuellement. Je me permets de rappeler que, déjà en 1960, M. André Ruffieux, alors député, déposait un projet de loi dans ce sens. D'autres interventions, avant l'initiative 0,7 de 82, furent émises par des députés, tels que Mme Gillet, M. Milleret et M. Fontanet. Le PDC fut un des acteurs de cette proposition qui, malheureusement, fut refusée par le peuple.

Heureusement, le Conseil d'Etat d'alors, sensible à ce problème, inscrivit un montant dans une nouvelle ligne budgétaire, qui n'a malheureusement pas été augmenté proportionnellement à la hausse du coût de la vie. Je ne reviendrai pas sur tous les considérants que M. Brunier a évoqués, que je salue et dont je suis également un ardent défenseur. Je dirai simplement que la proposition qui vous est faite doit être renvoyée à la commission des finances sans trop de palabres et de discussions, même ou, plutôt, surtout si certaines questions se posent à son sujet, comme le taux, sa mise en application éventuellement évolutive, etc. Elle permet surtout de faire l'inventaire chiffré de l'effort fait par l'Etat, la Ville et les communes.

A l'intention de nos très chers amis libéraux, je me permets de lire quelques lignes de l'éditorial de feu le «Journal de Genève» des 12 et 13 avril 1980, sous la plume de leur conseiller national Jacques-Simon Eggli, qui, après avoir rappelé que le principe d'affecter 0,7% du revenu cantonal brut à l'aide au développement vient tout droit de la norme recommandée par l'OCDE, dit : «L'initiative, sur le fond, vise juste et suscite l'intérêt. Les intentions des auteurs de l'initiative, leur manière d'envisager l'effort de coopération au développement, nous semble correspondre à un devoir et à une obligation de solidarité, notamment envers les pays industrialisés qui font généralement davantage que la Suisse. Cette initiative mérite donc d'être discutée, même si l'idée du pourcentage imposé est discutable. Il sera bon que le Conseil d'Etat et le Grand Conseil se penchent sur cette question. Il est déjà bon que le débat sur l'aide au tiers-monde soit ainsi relancé directement au sein de notre communauté genevoise.»

Voilà ce que disait le porte-parole du parti libéral, il y a juste vingt et un ans ! Voici ce que je vous dis encore maintenant ! 

M. Michel Halpérin (L). Permettez-moi en premier lieu de souhaiter une très cordiale bienvenue parmi nous à M. le député Marti... Je suis content qu'il se rallie à notre position sur ce sujet !

Evidemment, Mesdames et Messieurs les députés, la paix, le progrès, le développement, passent par un effort de solidarité, et la solidarité suppose que ceux qui le peuvent fassent quelque chose en faveur de ceux qui ne peuvent pas ou de ceux qui peuvent moins. Sur ce point, nous ne pouvons qu'être d'accord avec vous. Nous pensons en effet qu'une République comme Genève, avec les ressources qui sont les siennes et celles de ses habitants, avec la position particulière qu'elle occupe dans le monde, ne peut que s'engager davantage encore, si c'est possible, qu'elle ne l'a fait jusqu'à présent sur la voie du développement en y contribuant au moins par des moyens financiers.

Et, donc, bien entendu, nous n'avons pas d'objection à envisager de fixer une sorte de critère non dépourvu d'arbitraire - convenons-en - parce que 0,7%, cela ne veut strictement rien dire... On aurait pu fixer le taux à 1%, à 0,4%, 1,8%... (Exclamations.) Le chiffre en lui-même, disais-je, n'a aucune espèce de signification. Ce qui est important, me semble-t-il, dans un projet comme celui-ci, n'est ni le montant ni le pourcentage, c'est l'idée que nous décidions d'institutionnaliser un type de solidarité internationale. Sur ce plan-là, encore une fois, nous sommes d'accord, mais pas au point de nous exalter jusqu'à l'incandescence, comme notre collègue Brunier, en disant que ce projet est crucial...

Il n'est pas crucial, car ce ne sont pas 42, 45 ou 50 millions de plus - M. Clerc, très exceptionnellement ce soir, est fâché avec les chiffres, mais ça ne lui arrivera plus. (Rires.) - qui seraient versés à un monde cruellement dépourvu, qui changeront quelque chose - hélas, Monsieur Brunier ! - à la misère du monde. Ce qui compte, c'est le geste, et nous sommes donc d'accord sur les rangs libéraux pour nous engager avec vous en commission à travailler sur ce projet.

Reste un bémol, qui n'est pas un bémol vis-à-vis de l'aide au tiers-monde ou de la solidarité internationale. Nous pensons que l'effort que vous nous proposez et que nous sommes prêts à accepter ne suppose, par définition, qu'une simple analyse des prestations que nous consentons déjà. Il est possible que nous soyons à 0,7; il est possible que nous n'y soyons pas. Et si nous n'atteignons pas ce taux, eh bien, il faudra que nous répartissions autrement qu'elles ne le sont aujourd'hui les ressources collectives, ce qui ne signifie pas, Monsieur Brunier, que nous appuierions pour cela des hausses d'impôts qui vous auraient éventuellement traversé l'esprit...  

M. Roger Beer (R). Le groupe radical a eu de longues discussions à propos de ce projet de loi, et certains collègues pourraient bien vous rejoindre, Monsieur Halpérin, sur un certain nombre de points. Vous aviez bien commencé votre intervention, mais je ne crois pas que ce projet de loi impliquera une hausse des impôts, comme vous le laissez entendre.

Il faut effectivement que Genève participe concrètement à cette solidarité internationale. Une des raisons pour lesquelles j'ai signé ce projet de loi, c'est qu'effectivement le Conseil d'Etat, le canton de Genève, fait déjà un certain nombre d'actions dans ce sens. Chaque conseiller d'Etat propose des projets au sein de son département. Et nous avons eu en commission des finances quelques difficultés à connaître l'ampleur de cette coopération technique internationale. Un des premiers objectifs de ce projet de loi sera donc de savoir ce qui se fait déjà.

Finalement, je trouve très positif d'entendre M. Brunier, qui a participé très sérieusement à l'élaboration de ce projet de loi avec Genève Tiers-Monde et la Fédération genevoise de coopération - que je profite de remercier pour le travail effectué - dire que même lui, socialiste, n'entendait pas créer un nouveau service de l'administration qui s'occuperait de la gestion des sommes versées à la coopération. Je pense que ce projet permettrait d'utiliser les forces déjà en vigueur à Genève avec les ONG et les indépendants qui s'occupent de cette coopération.

Enfin, j'aimerais dire également que l'Etat doit contrôler directement la destination de cet argent. Le projet présenté est une bonne chose à cet égard.

Par ailleurs, lors de notre caucus, pour qu'un maximum de députés soient d'accord de renvoyer ce projet de loi en commission, nous avons évoqué le fait que le taux de 0,7% - cela fera peut-être l'objet d'un amendement - devrait être calculé sur le budget, mais sans le service de la dette. Je pense effectivement que c'est une bonne proposition d'amendement : ce pourcentage ne doit pas être calculé sur ce que l'on doit payer pour nos dettes. 

M. Claude Blanc. Espèce d'épicier, va !

M. Carlo Lamprecht. J'aimerais tout d'abord saluer l'intention et l'élan de solidarité des députés qui ont déposé ce projet de loi. Nous sommes tous conscients des inégalités qui se creusent entre le monde des nantis, dont nous faisons partie, et celui des plus défavorisés. Et nous devons tout faire pour tenter d'y remédier.

Actuellement, selon une évaluation approximative effectuée par mes services, notre canton consacre, toutes aides confondues, environ 12 millions de francs - ce sont des chiffres de 1999 - à la coopération, au développement et à l'aide humanitaire, ce qui représente quelque 0,22% du budget de fonctionnement actuel de l'Etat. A titre de comparaison, la Ville de Genève, qui vise également un taux de 0,7%, en est pour l'instant à 0,26%. Quant à la Confédération, elle consacre 0,35% du PNB et vise un taux de 0,4% en 2010 et en 2015.

Pour Genève, j'exclus encore les montants dévolus par notre canton au soutien et à l'accueil d'organisations internationales comme l'OMS, le BIT, le PMUD, le Haut Commissariat aux Réfugiés, la commission des droits de l'homme, qui, elles aussi, oeuvrent en faveur de la solidarité internationale, des droits des personnes et de la paix.

Mais mon propos n'est pas de me lancer dans des comptes d'apothicaire... Genève, on le sait, est le canton qui fait le plus en matière d'aide au développement : plus que Zurich, dont les dépenses dans ce domaine atteignent 70% de celles de Genève, tandis que Bâle, à titre de comparaison, vient en troisième position avec 23%.

Cela ne signifie pas que Genève doive s'arrêter en si bon chemin... Notre canton, je pense, doit en tout cas pouvoir tendre vers cet objectif de 0,7% du budget de fonctionnement. Il peut faire davantage et mieux - c'est vrai - et il doit le faire, le but n'étant pas de faire valoir la générosité genevoise, mais que cette générosité soit réellement efficace et profite bel et bien à qui de droit.

Or, pour atteindre cet objectif, Mesdames et Messieurs les députés, il ne suffit pas de se donner les moyens financiers nécessaires : il faut également s'assurer que les sommes susceptibles d'être débloquées soient dépensées pour des projets utiles, profitables à ceux qui en ont vraiment besoin. Il faut par conséquent aussi se donner les moyens d'assumer une bonne gestion et un bon contrôle de l'argent qui est investi et des montants à disposition, et bien définir les priorités de nos actions.

Cela étant, nous aurons sans doute tout loisir d'en débattre en commission. 

Ce projet est renvoyé à la commission des finances.