République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 5 avril 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 7e session - 16e séance
P 1312-A
Sous la présidence de Mme Louiza Mottaz, la Commission des pétitions a étudié la pétition 1312 dans sa séance du 11 septembre 2000.
Mme Normand distingue deux aspects distincts du problème, les nuisances sonores et la présence de chiens dans une cour d'école.
Des jeunes gens, propriétaires de chiens de la race Pitbull, se réunissent de jour comme de nuit jusqu'à trois, voire quatre heures du matin. Les cris, la musique des radios et les aboiements des chiens provoquent un vacarme insupportable pour les habitants du quartier. N'étant pas tenus en laisse, les chiens se promènent librement à travers le préau d'école en présence des enfants et courent après leurs ballons. Il en résulte tout naturellement que les parents redoutent de laisser leurs enfants jouer dans le préau.
Habitant les abords directs de la scène, Mme Normand n'ose pas intervenir craignant recevoir des projectiles genre canettes de bière. Néanmoins, en ayant eu l'occasion de discuter avec l'un des jeunes, Mme Normand s'est fait une idée plus précise du profil de ces personnes.
Les nombreuses réclamations, interventions de police et tentatives de dialogue, n'ont rien modifié. Les jeunes changent de préau pour un soir, notamment pour celui de l'école de St Jean, et reviennent pour recommencer de plus belle leur tapage.
Dernièrement, une personne de l'immeuble a subi une tentative d'effraction et s'est fait agresser.
Les habitants ne se sentent plus en sécurité et demandent que des mesures énergiques soient rapidement prises (effectifs d'intervention rapide, éducateurs de rues, …).
Faut-il qu'un drame arrive - enfant mordu, locataire au bord de l'énervement - pour que nos autorités agissent ? L'interrogation de Mme Normand résume toute l'incompréhension des habitants du quartier sur une situation jugée particulièrement anormale.
Les commissaires sont catégoriques pour dire que des chiens n'ont rien à faire dans un préau d'école. Cela est d'autant plus inacceptable que les chiens en question appartiennent à une race dite d'attaque, tristement réputée pour sa dangerosité possible et qu'ils sont laissés en liberté, sans muselière, dans un espace réservé aux enfants.
Conscient de la recrudescence de situations à risques de ce genre, le Conseil d'Etat mettait en consultation le 22 novembre 2000 auprès des milieux intéressés un projet de règlement (F 3 15.04) classant cette race de chiens (Pitbull) dans une catégorie considérée dangereuse. Le règlement permettra de soumettre les propriétaires de ces chiens à des obligations garantissant la maîtrise de leur animal et prévoyant des sanctions dans les cas contraires.
S'agissant des nuisances sonores, le Grand Conseil avait renvoyé au Conseil d'Etat la pétition des habitants voisins du préau de l'école du Devin-du-Village sur les conclusions que nous reprenons pour la présente pétition.
La seule intervention des gendarmes ne s'avérant pas, à terme, une solution, il convient dans un premier temps de favoriser le dialogue et la médiation entre les protagonistes. Ainsi, il est nécessaire de recourir aux éducateurs de rues et aux agents de sécurité municipaux pour tenter de restaurer une coexistence sociale basée sur les principes du respect d'autrui et d'une raisonnable tolérance. Ce n'est que lorsque ce travail ne donne pas les résultats escomptés qu'il doit être fait appel à la police et à d'éventuelles sanctions.
Sur la base de ce qui précède, à l'unanimité (2 AdG, 1 DC, 1 L, 2 R, 2 S, 2 Ve), la commission se détermine favorable au renvoi de la pétition au Conseil d'Etat.
Suite aux travaux de la commission, la rédaction du présent rapport a mené son auteur à revenir sur un cas similaire, celui du préau de l'école du Devin-du-Village.
Le Conseil d'Etat explique dans son rapport du 26 octobre 2000 qu'après avoir donné son accord pour la mise sur pied d'une médiation, un éducateur avait finalement informé trois mois plus tard les services de police qu'il renonçait à s'en occuper, par manque de temps.
Le rapport du Conseil d'Etat évoque un courrier du 22 juin 2000 des pétitionnaires au corps de police, le remerciant pour ses interventions qui ont permis le retour à une situation calme, et précisant :
« Après l'année 1999, qui a été faite de courriers et de discussions qui n'avaient donné aucune amélioration, nous restons persuadés et l'expérience de ce début d'été le prouve, que seule l'autorité de police peut rétablir immédiatement le calme que tout citoyen a droit ». (annexe 1)
Force est de constater que si le résultat final donne satisfaction aux pétitionnaires, les moyens utilisés pour y parvenir ne l'ont pas été sur le schéma préconisé par la commission.
Il semble donc important que les équipes sociales assument correctement la mise en place de la médiation au premier échelon avant de faire appel, si nécessaire, à des moyens plus autoritaires.
Compte tenu des conclusions et du vote unanime de la commission, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat.
Pétition(1312)
des habitants des Charmilles : nuisances dans la cour d'école
Mesdames etMessieurs les députés,
Comme chaque année, dès le printemps, nous devons subir le BRUIT (hors des heures scolaires, de jour comme de nuit). Malgré de nombreuses réclamations, interventions de la police, tentatives de dialogues, nous sommes constamment agressés par la musique techno, cris, injures et aboiement de chiens (pitbull), laissés en liberté dans la cour d'école alors que les enfants jouent.
Dernièrement, une personne de notre immeuble a subit une tentative d'effraction et s'est fait agresser.
Nous ne nous sentons plus en sécurité et demandons que des mesures énergiques soient rapidement prises (effectifs d'interventions rapide, éducateurs de rues, …).
Faut-il qu'un drame arrive - enfant mordu, locataire au bord de l'énervement - pour que nos Autorités agissent ?
5Débat
M. Jean-Marc Odier (R), rapporteur. J'aimerais préciser très rapidement quelques éléments, puisque, suite au vote de la commission, j'ai rajouté quelque chose au rapport. Je rappelle que cette pétition soulève deux problèmes : les nuisances sonores provoquées dans les préaux d'école, et dont les habitants riverains se plaignent, ainsi que l'insécurité provoquée par des chiens de race pitbull qui se promènent dans un préau d'école.
Les travaux de la commission ont conclu à un renvoi au Conseil d'Etat en recommandant d'intervenir de manière progressive, c'est-à-dire en favorisant le dialogue, la médiation, les éducateurs de rue, et d'intervenir seulement par la suite avec les forces de l'ordre si nécessaire.
La commission a voté dans ce sens, et, en établissant un rapport, je suis revenu sur un précédent rapport concernant le préau de l'école du Devin-du-Village. Suite au rapport du Conseil d'Etat, les pétitionnaires ont en effet adressé un courrier à la police pour la remercier et dire, en substance, que si les éducateurs de rue étaient intervenus quelquefois dans un premier temps, ils étaient revenus pour dire qu'ils ne pouvaient rien faire et qu'ils n'avaient pas les moyens d'agir, et que les fauteurs des troubles n'ont quitté les lieux que lorsque la police est intervenue. C'est comme cela que les choses se sont arrangées.
La commission ne fait pas cette recommandation au Conseil d'Etat, mais je pensais toutefois nécessaire de le mentionner, puisqu'il y a probablement quelque chose qui ne fonctionne pas dans la première phase pendant laquelle interviennent les éducateurs de rue, alors que nous aimerions tous que les choses s'arrangent par la médiation.
M. Christian Brunier (S). Envoyer une telle pétition au Conseil d'Etat est une évidence partagée par l'ensemble des groupes de ce Grand Conseil, et l'on peut s'en réjouir.
Nous devons néanmoins concrétiser rapidement les orientations qui sont fixées dans ce rapport. Je lis un passage - très bref mais important - de notre collègue Odier : «La seule intervention des gendarmes ne s'avérant pas, à terme, une solution, il convient dans un premier temps de favoriser le dialogue et la médiation entre les protagonistes.» C'est du reste ce qu'il a confirmé dans l'intervention qu'il vient de faire.
Oui, la prévention, le dialogue et la médiation sont d'excellents remèdes. Reste à nous doter des moyens de nos ambitions. Tout le monde loue l'utilité des éducateurs de rue - les médiateurs hors murs, comme disent les professionnels - néanmoins, lorsqu'il faut passer à l'action, lorsqu'il faut voter des postes pour les envoyer sur le terrain, là on voit que les forces politiques se montrent un petit peu plus prudentes...
L'effort public, Mesdames et Messieurs, en faveur de la médiation hors murs, de l'éducation de rue, est insuffisant que ce soit au niveau cantonal ou au niveau municipal, même si certaines municipalités font des efforts, et, du reste, la Ville de Genève nous a montré l'exemple ces derniers mois. Nous devons donc passer à l'action en la matière et développer véritablement l'éducation de rue : cela correspond à un besoin important du moment.
Je vous annonce d'ores et déjà que le parti socialiste est en train de finaliser un projet de loi sur ce sujet. J'attends donc avec impatience le soutien unanime de ce parlement sur cette cause qui a l'air de tous nous rassembler dans ce rapport. J'espère que nous serons aussi unis dans l'action !
Mme Martine Brunschwig Graf. Bien entendu, nous attendons avec grand intérêt le projet de loi qui est annoncé.
J'aimerais toutefois dire au député Brunier que nous n'avons pas attendu le dépôt d'un projet de loi sur ce sujet pour en discuter, notamment avec la Fondation pour l'animation socioculturelle qui, si j'ai bonne mémoire, n'est pas présidée par un parti de gauche et qui prévoit le développement des éducateurs de rue en accord avec le département.
Il n'est donc pas nécessaire de déposer ce projet de loi : il vous suffira de soutenir le budget 2001 - ce qui a déjà été fait - et 2002 en ce qui concerne cette fondation !
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.