République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 5 avril 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 7e session - 15e séance
PL 8401
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP-I) Objet de l'impôt - Assujettissement à l'impôt, du 22 septembre 2000, est modifiée comme suit :
Art. 14, al. 2 (abrogé)
Art. 14, al. 4 (nouvelle teneur)
4 Le Conseil d'Etat édicte les dispositions nécessaires à la perception de l'impôt sur la dépense. Il peut arrêter des bases d'imposition et un mode de calcul de l'impôt dérogeant à l'alinéa 2, si cela est nécessaire pour permettre aux contribuables mentionnés à l'alinéa 1 d'obtenir le dégrèvement des impôts d'un Etat étranger avec lequel la Suisse a conclu une convention en vue d'éviter les doubles impositions.
Article 2 Entrée en vigueur
La présente loi entre en vigueur le lendemain de sa promulgation.
Article 3 Disposition transitoire
Les forfaits fiscaux accordés en vertu de l'article 14, al. 2 et ceux qui ont été accordés en vertu des articles 4, 4A et 4B anciens, abrogés par la loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP-I) Objet de l'impôt - Assujettissement à l'impôt, du 22 septembre 2000, prennent fin le 31 décembre 2001. Le Conseil d'Etat peut, dans les cas de rigueur, prolonger à titre exceptionnel des forfaits d'impôts dégressifs pour les exercices 2002, 2003 et 2004.
La possibilité pour l'administration fiscale d'accorder des forfaits fiscaux, telle qu'elle est prévue à l'article 14 de la loi sur l'imposition des personnes physiques, au profit de certains résidents étrangers, en général des personnes fortunées, a quelque chose de choquant devant le principe fondamental de l'égalité des citoyens face à l'impôt. En effet, ces forfaits sont bien plus avantageux pour le contribuable mis au bénéfice de cet avantage que l'imposition ordinaire à laquelle chaque habitant-e de notre canton est soumis.
Le contribuable est particulièrement sensible à la justice fiscale et le principe de l'égalité de traitement face à la loi est d'autant plus important. Certes, l'existence de forfaits fiscaux a pu susciter la venue de personnes fortunées dans notre canton, mais cet avantage est obtenu au détriment non seulement du principe rappelé ci-dessus, mais également d'un autre Etat, victime d'une sous-enchère fiscale, laquelle est une gangrène qui s'étend de plus en plus du fait des efforts déployés par certains Etats pour s'attirer les contribuables les plus fortunés.
L'Union européenne a, du reste, étudié des mesures d'harmonisation fiscale pour lutter contre ce phénomène qualifié pudiquement de « délocalisation fiscale » et qui a pour conséquence que les intérêts de certains particuliers finissent par porter atteinte à l'intérêt général. Au lieu de continuer à user du forfait fiscal pour attirer quelques riches étrangers dans notre canton et, ce faisant, de scier la branche sur laquelle nous sommes assis avec les autres Etats, notre canton doit faire preuve de solidarité et mener une politique cohérente sur le plan fiscal. Il doit cesser de jouer le jeu des personnes les plus fortunées qui cherchent à payer le moins d'impôts possible et à négocier leur statut de contribuable aux conditions les plus favorables. Ces avantages fiscaux sont d'autant plus choquants dans la situation économique actuelle et dans une société où les écarts entre les privilégiés et les démunis ne font que s'accentuer.
Celles et ceux qui déclarent venir séjourner à Genève en raison de la qualité de vie, de la sécurité ou des écoles et d'autres avantages de notre canton, avantages qui n'existeraient pas sans l'effort des contribuables genevois, devraient certainement accepter de payer les mêmes impôts que ces derniers, ce d'autant plus que ces impôts, même pour les personnes fortunées, sont souvent moins élevés que ceux applicables dans les pays qui nous entourent.
C'est la raison pour laquelle les auteurs du projet de loi ont repris, en les adaptant, les termes de leur projet de loi 7571 qui n'avait pas reçu grâce devant la majorité du Grand Conseil lors de la dernière législature, en déposant le présent projet de loi qui vise à la suppression d'ici le 31 décembre 2001 de la possibilité d'accorder des forfaits fiscaux à des étrangers résidant dans notre canton, tout en laissant au Conseil d'Etat la possibilité, dans le cadre d'une disposition transitoire, d'accorder à titre exceptionnel des abattements fiscaux permettant, dans les cas de rigueur, le passage progressif du régime du forfait au régime ordinaire. Cette disposition pourrait être complétée dans l'hypothèse où l'administration fiscale aurait conclu des forfaits fiscaux pour une certaine durée de temps. Le Grand Conseil pourrait, de plus, voter une résolution invitant les cantons connaissant également le régime du forfait fiscal à procéder de même manière.
Les auteurs du présent projet de loi ont attendu que les projets de lois « LIPP » soient adoptés avant de revenir sur la proposition de supprimer la possibilité d'accorder des forfaits fiscaux pour éviter de compliquer un débat portant sur l'harmonisation fiscale et pour tenir compte du fait que cette question méritait d'être traitée pour elle-même.
Au bénéfice des explications qui précèdent, nous vous invitons, Mesdames et Messieurs les députés, à réserver un bon accueil au présent projet de loi.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission fiscale.