République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 7982-A
5. Rapport de la commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil chargée d'étudier le projet de loi de Mmes et MM. Elisabeth Reusse-Decrey, Françoise Schenk-Gottret, Nicole Castioni-Jaquet, Dominique Hausser, Christian Brunier, Régis de Battista et Jean-François Courvoisier modifiant la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève. ( -) PL7982
 Mémorial 1999 : Projet, 73. Renvoi en commission, 74.
Rapport de M. Alberto Velasco (S), commission des droits politiques et du règlement du Grand Conseil

Notre commission a siégé les 22 septembre, 13 octobre et 3 novembre 1999 sous la présidence de M. Pierre Vanek pour examiner ce projet. Assistaient aux diverses séances en représentation du département, MM. Robert Cramer, conseiller d'Etat et René Kronstein, directeur de l'administration des communes.

Introduction

Dans leur exposé des motifs, les auteurs du projet de loi mettent en question la nécessité de maintenir le Département militaire en argumentant que la gestion des affaires militaires est principalement du ressort de la Confédération. Certaines tâches telles que l'organisation du recrutement, des inspections de libération, la gestion de l'arsenal cantonal, la supervision des installations de tir et de l'administration de la taxe d'exemption étant dévolues aux cantons. Mais alors que les tâches cantonales sont gérées par un simple service dans la plupart des autres cantons, Genève possède un véritable Département militaire.

Une réforme similaire a été effectuée dans d'autres cantons. C'est ainsi, qu'à Neuchâtel, le Département militaire a été supprimé, et le Service des affaires militaires est désormais rattaché au Département de justice, de la santé et de la sécurité. Le canton du Jura a intégré les affaires militaires dans le Département de la santé, des affaires sociales et de la police.

Les dépenses relatives à ce département représentent 0,2 % du budget cantonal. Si le niveau des dépenses peut paraître, pour certains, anecdotique, il est non moins vrai que pour un canton qui a accepté en 1989 l'initiative « Pour une Suisse sans armée » et qui s'est montré pour le moins réticent au défilé militaire en 1996, le symbole est d'importance.

La proposition qui vous est faite par les auteurs, Mmes et MM. les députés, consiste à supprimer le Département militaire et à répartir les activités actuelles dans les autres départements en conservant le nombre d'emplois et les activités afférentes à ce département.

Selon les auteurs, cette proposition ne ferait donc pas de Genève un canton marginal et isolé mais elle permettrait de concrétiser de manière symbolique et tangible le fort courant pacifiste qui traverse depuis de nombreuses années notre canton.

Travaux de la commission

En préambule, Mme Brunschwig Graf indique qu'elle comprend que la question de la pertinence d'avoir un département militaire puisse être posée, car, en effet, il existe des cantons qui n'en ont pas. Se référant à la proposition du projet de loi qui propose de répartir les tâches de ce département dans différents services, Mme Brunschwig Graf fait remarquer que les conséquences de cette suppression vont au-delà du symbole pacifique, et ne sont pas toujours celles que voudraient les représentants du projet.

Mme Brunschwig Graf fait un bref rappel historique pour indiquer qu'au niveau institutionnel des précautions ont été prises, depuis 1933 particulièrement, pour éviter la confusion des rôles. C'est ainsi que le chef de Justice et Police ne doit pas, en termes institutionnels et non pas en termes de personnes, être le chef du Département militaire. Par ailleurs, Mme la présidente indique que le Conseil d'Etat actuel est très attaché à cette division des tâches et rappelle, que le Conseil d'Etat précédent, après un long débat, s'était refusé, pour des raisons de nature politique, à organiser un grand département qui regrouperait les aspects de sécurité civile et de sécurité militaire.

Se référant aux aspects institutionnels que soulève le projet de loi, Mme Brunschwig Graf insiste sur le contrôle politique pour gérer à bon escient un département militaire, l'autorité militaire devant être subordonnée au pouvoir civil, le cas échéant la Confédération intervenant.

Parmi les conséquences que le projet de loi aurait du point de vue organisationnel suite à la dispersion des services, Mme Brunschwig Graf cite l'accumulation des petits chefs, susceptible de provoquer aussi un manque de transparence, ainsi qu'une influence négative sur la communication avec l'Administration militaire fédérale.

Pour toutes ces raisons, et sans préjuger des développements que l'armée va subir dans les années à venir, Mme Brunschwig Graf assure qu'il faut conserver le Département militaire.

Répondant aux questions des commissaires touchant des questions telles que la perception des taxes militaires, possibles dérapages et sur le département de sécurité, Mme Brunschwig Graf rappelle que la constitution de ce département a été refusée par le Conseil d'Etat. Quant aux dérapages, ceux-ci ne peuvent être évités sans autorité politique qui soit le pendant de l'autorité politique et militaire à Berne, ce qui évite l'effet d'opacité engendré quand les administrations traitent entre elles. Et de citer comme exemple les exercices militaires qui pourraient être décidés sans maîtrise du politique et la structure actuelle où, le Conseil d'Etat a pu contenir les missions militaires, séparer ce qui relève de l'armée de ce qui n'en relève pas, contrôler les effectifs et ce qui doit être accompli. Enfin, Mme Brunschwig Graf pointe les faiblesses d'une telle proposition, car à l'occasion des changements politiques, les services se baladent d'un département à un autre et l'on perd en transparence. Le mieux étant l'ennemi du bien, si Genève n'apparaît pas comme un canton particulièrement pacifiste du fait qu'il a un département militaire, il est par contre reconnu pour savoir contrôler les affaires y relatives. En conclusion, Mme Brunschwig Graf propose plutôt que le projet de loi inscrive dans la loi la séparation entre le Département de police et celui des militaires.

Au sujet du département de la sécurité, M. Cramer rappelle que plusieurs modèles sont possibles. Un de ceux-ci pourrait regrouper police, armée et pompiers dans un même département ; c'est le gouvernement des casquettes, et le Conseil d'Etat ne veut clairement pas la police et l'armée dans un même département. Un autre, basé sur un concept de sécurité civile, sur lequel travaille son département regrouperait police, feu et protection civile. Cette dernière perdrait alors définitivement son caractère militaire ; devenant un service pour l'aide en cas de catastrophes. Pour parvenir à un tel département, M. Cramer rappelle que le Grand Conseil devra sortir les pompiers de l'armée. L'objectif d'un tel département étant de centraliser différents services pour leur donner une unité de commandement et de décision dans les cas d'urgence. Revenant sur le projet de loi, il souligne qu'en dispersant les compétences, on aura irrémédiablement besoin d'un coordinateur ; or, par élimination, celui-ci sera inévitablement le chef de la police. Ainsi, si le projet de loi était accepté, il irait en direction inverse de ce que recherche le Conseil d'Etat, mais, sans doute aussi, dans le sens inverse des intentions des initiants.

Tel qu'exposé dans l'introduction, M. Velasco, prenant la parole au nom des auteurs du projet de loi, expose les raisons qui justifient le dépôt de celui-ci. En effet, considérant la spécificité de notre République en tant que lieu de rencontre pour la paix et vu la sensibilité de la majorité de sa population, la question pour les auteurs est de savoir s'il est pertinent et justifié que notre canton conserve un département militaire. Et ceci d'autant plus que les tâches du Département militaire étant d'ordre administratif et non stratégique, leur répartition dans les différents services pourraient répondre à sa mission sans que cela implique une suppression de ses compétences ou du personnel.

Après avoir entendu les différents exposés et remarques, la majorité des groupes représentés au sein de la commission souscrivent à un projet de loi institutionnalisant le principe de la séparation entre le département militaire et celui de la police.

Les auteurs du projet de loi, après consultation de leur groupe, informent par courrier

Voir en annexe le document adressé à la commission, et qui est parvenu postérieurement à la séance du 3 novembre 2000.

Amendement proposé :

Art. 70, al. 3 (nouveau)

3 Le Département militaire ne peut en aucun cas être rattaché au département qui s'occupe de la police.

A la suite de cette déclaration et considérant que le sujet reste inchangé, les commissaires s'accordent pour amender ce projet de loi dans le sens qu'il soit clairement spécifié l'impossibilité pour le Département militaire d'être rattaché au Département de justice. C'est ainsi que le département propose la formulation suivante :

« Le département chargé des affaires militaires et le département chargé de la police ne peuvent dépendre de la présidence. »

Considérant que cet amendement respecte l'esprit énoncé par celui proposé par Mme Reusse-Decrey, et après avoir consulté le groupe socialiste, le président soumet celui-ci au vote.

Vote de l'amendement tel que proposé par le département.

L'article 70, alinéa 3 (nouveau) est accepté à l'unanimité

(2 AdG, 3 S, 1 Ve, 2 L, 1 DC, 1 R )

Au bénéfice de ces explications, nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, que vous réserverez un bon accueil au présent projet de loi.

Article unique

La loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993, est modifiée comme suit :

Art. 70, al. 3 (nouveau)

3 Le département chargé des affaires militaires et le département chargé de la police ne peuvent dépendre de la présidence.

7

8Premier débat

M. Alberto Velasco (S), rapporteur. J'aimerais tout d'abord préciser la raison fondamentale pour laquelle les auteurs de ce projet de loi l'ont déposé. Les tâches du Département fédéral de la défense relevant de la compétence fédérale, il n'y a pas lieu d'avoir chez nous un département militaire. Il est cependant très rapidement apparu, lors de l'audition de Mme Brunschwig Graf, que la dilution de ce département militaire dans d'autres départements et services aurait comme effet d'engendrer une certaine opacité. C'est la raison pour laquelle les auteurs du projet, sans renoncer au fond, ont par la suite déposé un amendement, que vous avez tous reçu sur vos tables, afin de préciser que le département chargé des affaires militaires et le département chargé de la police ne peuvent dépendre du même conseiller d'Etat. 

Mis aux voix, ce projet est adopté en premier débat.

Deuxième débat

Mis aux voix, le titre et le préambule sont adoptés.

Art. 70, al. 3

La présidente. Vous avez donc reçu un amendement. Il s'agit simplement d'une question de formulation de la phrase qui a été corrigée, modification qui ne change cependant rien au fond. L'alinéa 3 devient ainsi :

« 3Le département chargé des affaires militaires et le département chargé de la police ne peuvent dépendre du même conseiller d'Etat. »

Mis aux voix, cet amendement est adopté.

Mis aux voix, l'article 70 alinéa 3 ainsi amendé est adopté.

Mis aux voix, l'article unique (souligné) est adopté.

Troisième débat

Ce projet est adopté en troisième débat, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Article unique

La loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993, est modifiée comme suit :

Art. 70, al. 3 (nouveau)

3 Le département chargé des affaires militaires et le département chargé de la police ne peuvent dépendre du même conseiller d'Etat.