République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 16 février 2001 à 17h
54e législature - 4e année - 5e session - 8e séance -autres séances de la session
No 8/II
Vendredi 16 février 2001,
soir
La séance est ouverte à 17 h.
Assistent à la séance : Mmes et MM. Carlo Lamprecht, président du Conseil d'Etat, Micheline Calmy-Rey, Guy-Olivier Segond, Gérard Ramseyer, Martine Brunschwig Graf, Laurent Moutinot et Robert Cramer, conseillers d'Etat.
1. Exhortation.
La présidente donne lecture de l'exhortation.
2. Personnes excusées.
La présidente. Ont fait excuser leur absence à cette séance : Mme et MM. Michel Balestra, John Dupraz, Jean-Pierre Gardiol, Alexandra Gobet et Pierre Meyll, députés.
3. Déclarations du Conseil d'Etat et communications.
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que les documents suivants se trouvent à votre disposition sur la table de la salle des Pas Perdus, adressés par le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement : le projet de plan directeur cantonal et la collection complète des fiches concernant ce projet qui figure au point 84 de notre ordre du jour, rapport divers 394 et résolution 437.
4. Correspondance et pétitions.
La présidente. La correspondance suivante est parvenue à la présidence :
1306 Lettre 2001002400
Pris acte Le 16/02/2001 à 17h00
Action patrimoine vivant nous fait part de ses inquiétudes concernant le PL 7931 sur la protection des monuments, de la nature et des sites, qui figure au point 44
Par ailleurs, la pétition suivante est parvenue à la présidence :
Cette pétition est renvoyée à la commission des pétitions.
5. Annonces et dépôts:
a) de projets de lois;
Néant.
b) de propositions de motions;
Mme Dolorès Loly Bolay (HP). Madame la présidente, j'annonce le dépôt d'une motion, signée par les députés Roger Beer, Fabienne Bugnon, Laurence Fehlmann Rielle, Gilles Godinat, Pierre Marti et moi-même, concernant une problématique qui nous préoccupe et qui a donné lieu à plusieurs interpellations urgentes, intitulée : «Antennes et téléphonie mobile».
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, je vous informe que la proposition de motion suivante est parvenue à la présidence :
Mme Myriam Sormanni-Lonfat (HP). Madame la présidente, cette motion revêt un caractère d'urgence, et je demande donc qu'elle soit traitée ce soir encore. Je vous en remercie.
Mise aux voix, cette proposition est adoptée.
c) de propositions de résolutions;
Néant.
d) de demandes d'interpellations;
Néant.
e) de questions écrites.
Néant.
M. Gérard Ramseyer. Monsieur Ducrest, vous avez posé une question à laquelle je réponds. Le département de justice et police et des transports a fait procéder, dès le lendemain de la manifestation, à l'effacement des tags sprayés sur les murs concernés. Le même jour, il a requis du DAEL, propriétaire des bâtiments endommagés, de déposer les plaintes nécessaires auprès du Parquet de M. le procureur général; ce qui a été fait.
Les mesures nécessaires avaient été prises, conformément aux garanties données par les responsables de la manifestation : ceux-ci n'ont pas été capables d'empêcher les débordements qui ont abouti aux dommages causés et aux dénonciations à M. le procureur général. A l'avenir, d'autres mesures seront appliquées. Lorsque l'enquête diligentée par la justice aura permis d'identifier les auteurs des déprédations, les procédures tendant au remboursement du dommage causé seront entamées.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer. Je vous remercie, Monsieur le député Ducrest, de l'intérêt que vous portez à notre police. Je vous réponds de la manière suivante :
Depuis 1996 à ce jour, les départs pour d'autres polices ont été les suivants :
En 1996, nous avons eu 1 départ à destination de la police cantonale fribourgeoise. Lorsque je dis 1 départ, c'est 1 sur 800 gendarmes. En 1997, nous eu 1 départ, à nouveau à destination de la police cantonale fribourgeoise, aucun départ en 1998. En 1999, nous avons dû déplorer 6 départs, 1 à la police cantonale du Jura, 1 à la police cantonale du Valais, 4 départs dans des polices municipales : à Sion deux fois, à Nyon une fois et à Chardonne Vaud une fois. L'année passée, nous avons déploré 8 départs : 4 à la police cantonale du Jura, 1 à la police cantonale bernoise et 3 dans des polices municipales, Saint-Léonard, Saxon et Sion, en Valais. A ce jour, en l'an 2001, nous avons 2 départs annoncés : police cantonale fribourgeoise pour une personne, police municipale de Lausanne pour une personne. En revanche et en l'état, le département n'a pas connaissance de départs, au sein de la gendarmerie, de gendarmes qui souhaiteraient devenir agents de sécurité municipaux dans des communes genevoises.
Cela dit, en ma qualité de président de la Conférence des chefs de département de justice et police de Suisse romande, je suis intervenu, l'automne dernier, pour dénoncer la politique de recrutement de certains corps de police. Il a été décidé de charger la Conférence romande des commandants de police d'examiner cet objet et de lui faire rapport ultérieurement; l'idée étant de défrayer le canton formateur si le transfert s'effectue dans les cinq premières années d'activité. Le dossier est actuellement à l'examen, une solution interviendra, de sorte que l'on peut penser qu'elle pourrait également s'appliquer aux transferts éventuels de gendarmes dans des corps de police municipaux et, éventuellement, dans des corps de police municipaux genevois.
Cette interpellation urgente est close.
M. Carlo Lamprecht. Dans votre interpellation, Monsieur le député Jean Spielmann, vous affirmez que les CFF, faute de pouvoir recruter du personnel ayant les compétences nécessaires en Suisse actuellement, s'adressent aux Chemins de fer espagnols pour trouver des cheminots déjà formés.
Je peux vous répondre, Monsieur le député, qu'à ce jour l'office cantonal de l'emploi n'a pas encore été saisi de demandes d'autorisation de travail en faveur de nouveaux collaborateurs engagés par les CFF.
Renseignements pris auprès de l'Office fédéral des étrangers, les CFF se sont effectivement adressés à la Confédération en vue de l'obtention d'autorisations de travail visant l'engagement d'une douzaine de collaborateurs, détachés des Chemins de fer espagnols, dont la dénomination courante est la RENFE, pour une durée de quinze à dix-huit mois, au maximum. Ces personnes viendraient renforcer les effectifs des CFF et remplacer des collaborateurs appelés à suivre une formation particulière.
S'agissant d'autorisations de courte durée, l'examen de ces demandes relève, conformément à l'article 21 de l'ordonnance limitant le nombre des étrangers, de la compétence de l'Office fédéral des étrangers. Ce dernier a d'ores et déjà invité les CFF à présenter leurs différentes requêtes auprès des autorités cantonales concernées en fonction du lieu de travail de chaque collaborateur.
En ce qui concerne la rémunération de ces personnes, les CFF se sont engagés à respecter les dispositions de l'article 9 de l'ordonnance limitant le nombre des étrangers et, partant, à offrir les mêmes conditions de travail qui s'appliquent aux collaborateurs résidents Suisses, titulaires de permis C, B, N ou F, pour un travail semblable.
Cette interpellation urgente est close.
M. Laurent Moutinot. En février 2000, la Chancellerie a souhaité que l'on fasse une rapide rénovation de la salle des Pas Perdus, portant en particulier sur le rembourrage des fauteuils, l'entretien des meubles en bois, le changement des abat-jour et l'entretien des tapis.
Vous avez pu constater que ces travaux ont effectivement été faits avec l'accord de la Chancellerie. Je déplore, comme vous, que les autres utilisateurs, à savoir le Grand Conseil, d'une part, et le Conseil municipal, d'autre part, n'aient pas été consultés. Devant le tollé général concernant les paravents, j'ai donné l'ordre de les enlever. Vous avez pu constater qu'ils n'y sont plus. Pour le surplus, je ne pense pas qu'il soit utile de revenir sur ce qui a été fait, maintenant.
En revanche, je puis vous informer qu'un projet plus général, incluant bien entendu cette salle et la salle Nicolas-Bogueret, est à l'étude et que ce plan a été présenté à la CMNS, puisque, s'agissant d'un bâtiment classé, il faudra bien évidemment l'accord des spécialistes en matière de patrimoine. Je vous suggère, par conséquent, à titre provisoire, que nous acceptions les choses en l'état. En ce qui concerne la rénovation définitive, tous les utilisateurs et, notamment, votre Grand Conseil seront bien entendu consultés.
Cette interpellation urgente est close.
M. Laurent Moutinot. M. Jean Roulet constate, à juste titre, que la LDTR inclut une indexation du loyer annuel à la pièce, prévue par la loi tous les deux ans. La loi en question est entrée en vigueur le 16 octobre 1999, donc la question d'une réadaptation de ce montant sera d'actualité cet automne.
En ce qui concerne le mode de calcul, il est fait référence, dans la loi, au revenu brut fiscal médian. Il s'agit d'une donnée de droit fiscal qui est calculée par l'administration des finances. Ce chiffre n'est pas calculé systématiquement, il n'est pas publié sous forme d'indice, de sorte que je ne peux pas donner l'indice actuel de ce revenu. Seront calculés, afin de déterminer une éventuelle augmentation, le revenu brut fiscal médian d'octobre 1999 et celui d'octobre 2001, avec la nécessité de calculer, évidemment, quelques semaines ou quelques mois après, pour disposer des chiffres pertinents en la matière. Lorsque le Conseil d'Etat aura ces deux chiffres, il déterminera l'opportunité et la quotité de la hausse justifiée.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer. Monsieur Gilly, c'est parce que vous me posez toujours les mêmes questions que je vous fais toujours les mêmes réponses. La procédure d'asile est fédérale. C'est l'Office fédéral des réfugiés qui prend les décisions dans ce domaine et la commission suisse de recours en matière d'asile qui statue sur les recours.
Les cantons hébergent les requérants d'asile, les auditionnent sur leurs motifs et procèdent aux éventuels renvois ordonnés par les autorités fédérales. Dans ce cadre-là, la marge de manoeuvre des cantons est extrêmement réduite. Elle se limite essentiellement à prolonger les délais de départ. C'est ainsi que les situations de requérants d'asile déboutés définitivement de leur demande sont examinées au cas par cas par notre office cantonal de la population, selon leurs particularités, et que des aménagements sont souvent trouvés.
Cela dit, pour Genève, les autorités sont allées un peu plus loin. Elles ont notamment accordé des tolérances de séjour exceptionnelles à des familles, à des groupes de personnes sous obligation de départ, nonobstant les décisions fédérales. A ce sujet, tout le monde, vous y compris, se souviendra des actions menées en 1998 et en 1999 en faveur des réfugiés de la violence bosniaques, dont le séjour dans notre canton a été prolongé pour deux périodes d'une année, après les échéances fixées par la Confédération.
Plus récemment, le canton est intervenu auprès de Berne pour demander, en écho à M. Bernard Kouchner, alors chef de la mission des Nations Unies pour le Kosovo, que les renvois de personnes qui avaient bénéficié de l'admission provisoire collective en Suisse pendant le conflit soient suspendus pendant l'hiver. De fait, la Confédération a réduit ses exigences quantitatives et il n'y a eu, à Genève, que des départs volontaires depuis début décembre jusqu'à ce jour.
Le Conseil d'Etat est également intervenu à plusieurs reprises auprès de la Confédération pour défendre des situations qui lui paraissaient humainement peu soutenables. Nous pensons ainsi, Monsieur le député, que dans le cadre légal extrêmement rigoureux qui est celui de l'asile, et même au-delà, le canton a démontré sa volonté de sauvegarder la dignité des personnes qui viennent chercher protection dans notre pays et qui sont attribuées à Genève.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer. Le marquage en question fait suite à une demande de l'Association de sauvegarde de Bernex et environs et d'autres associations. La question a été soulevée, entre autres mesures d'aménagement et de circulation, lors d'un débat public qui a eu lieu le 16 février 2000, en présence de M. le conseiller d'Etat Moutinot, ici présent, de M. le conseiller administratif Honegger, des représentants du DAEL, de l'OTC et de plusieurs associations de parents d'élèves.
Les intéressés demandaient la suppression d'une voie sur le tronçon en question, en raison d'excès de vitesse et de non-respect des normes antibruit imposées par la Confédération. Par la suite, les services concernés ont procédé à une étude qui a confirmé que les excès de vitesse étaient fréquents, surtout lors des dépassements, et que le niveau de bruit était supérieur aux normes fédérales.
La suppression d'une voie de circulation s'est donc avérée justifiée et a été réalisée sur la base d'un plan de marquage approuvé par l'OTC, le 14 septembre 2000. Depuis cette date, aucune opposition n'a été enregistrée jusqu'ici à cette mesure. Comme vous le savez, nous sommes perpétuellement ouverts au dialogue. Si vous pensez, Monsieur le député, qu'il convient de revenir sur cette décision, c'est avec plaisir que je m'y prépare.
Cette interpellation urgente est close.
M. Laurent Moutinot. Jusqu'en automne 1998, les critères d'autorisation des antennes de téléphonie mobile n'étaient qu'esthétiques. Ce n'est qu'à partir du moment où la Confédération a publié son projet de protection contre les rayonnements non ionisants que cette problématique a été prise en compte à Genève.
Bien entendu, les valeurs limites doivent être strictement observées, à défaut de quoi les autorisations sont refusées. La mise en place des réseaux de téléphonie mobile fait l'objet d'une coordination pour favoriser le regroupement des installations des opérateurs sur des supports communs.
La législation fédérale appliquée en la matière est principalement la loi sur l'aménagement du territoire et l'ordonnance de protection contre le rayonnement non ionisant, complétées par un recueil de recommandations et différentes directives émanant des offices fédéraux, notamment en matière de protection du paysage. La législation cantonale comprend le règlement sur la protection contre le rayonnement non ionisant du 29 septembre 1999, qui reprend les dispositions fédérales pour l'essentiel, tout en étant d'ailleurs plus sévère à certains égards. Ce règlement attribue au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement la compétence de délivrer des autorisations de construire et désigne le département de l'intérieur en tant qu'autorité compétente en matière de contrôle et d'assainissement.
Le règlement confère également au département dirigé par M. Robert Cramer la tâche d'élaborer et de tenir à jour un cadastre des installations en question. En ce qui concerne l'installation diAx au 5, chemin Taverney au Grand-Saconnex, elle a été acceptée par le département avant l'entrée en vigueur des différentes normes que je viens de rappeler, mais, bien entendu, dès que ces normes ont été connues, elle a été contrôlée. Sa conformité aux dispositions de l'ordonnance fédérale a été contrôlée par le service cantonal d'écotoxicologie le 16 mai 2000 : l'installation est conforme à ces normes.
Cette interpellation urgente est close.
14. Réponse du Conseil d'Etat aux interpellations urgentes suivantes :
M. Guy-Olivier Segond. A la suite de la manifestation et de la pétition des étudiants des professions de la santé, M. Pierre Vanek et Mme Mireille Gossauer ont interpellé le Conseil d'Etat sur la suppression des indemnités de stage, décidée en 1993 et confirmée à trois reprises par le Grand Conseil.
A cet égard, j'aimerais vous rappeler que, dans les autres cantons, les professions de la santé dépendent du département de la santé, à l'exception du canton de Genève, dans lequel - et c'est à mon avis tout à fait logique - elles dépendent, pour la période de formation, du département de l'instruction publique.
Cette distinction a un sens, non seulement politique et administratif, mais également en ce qui concerne le statut des étudiants : ainsi, dans la grande majorité des cantons, les élèves infirmiers ou infirmières n'étant pas considérés comme des étudiants, ils n'ont pas droit à des allocations d'étude, mais à des indemnités, ou même, dans certains cantons, à des sortes de pré-salaires dont les montants sont variables.
A Genève, les élèves infirmiers et infirmières étant considérés comme des étudiants, dépendant du département de l'instruction publique, ils ont droit aux allocations d'étude. Il y a sept ans, le Grand Conseil a considéré qu'il n'était pas justifié que les élèves des professions de la santé puissent toucher simultanément des allocations d'étude et des indemnités mensuelles. Il a confirmé cette décision à trois reprises depuis.
Il est naturellement toujours possible de revenir sur une décision prise, mais il faut aussi savoir que satisfaire la demande présentée hier par les étudiants des professions de la santé pose, au minimum, deux problèmes :
d'une part, un problème financier : faire rémunérer les stages hospitaliers par les hôpitaux universitaires de Genève représenterait une dépense annuelle de 7 à 8 millions qui, en tout cas, ne figurent pas au budget 2001;
d'autre part, cela poserait un problème d'égalité de traitement : réintroduire ces indemnités de stage pour les seules professions de la santé serait injuste à l'égard des professions enseignantes, qui effectuent également des stages non rémunérés dans les écoles primaires et les collèges secondaires.
C'est pourquoi le Conseil d'Etat considère que cette question doit être réglée dans le cadre de la mise en place de la HES social et santé qui, selon l'article 47 du concordat intercantonal, prévoit une indemnisation des étudiants pour leurs activités sur leur lieu de stage, mais qui est accompagnée également d'une indemnisation des lieux de stage pour les charges d'enseignement et d'encadrement.
Pour le reste, j'aimerais ajouter, cum grano salis, que, le 7 février dernier, Mme Brunschwig Graf a rencontré les étudiants du Bon Secours dans le cadre de la journée «portes ouvertes» du Bon Secours, qu'à cette occasion, elle s'est déclarée prête à les rencontrer pour discuter de toutes les questions liées à leur statut et, notamment, pour qu'ils bénéficient des mêmes avantages que les étudiants de l'université. Mais, probablement occupés à la préparation de la pétition et à l'organisation de la manifestation, les étudiants n'ont pas trouvé le temps, ces dix derniers jours, de prendre contact avec Mme Brunschwig Graf!
Ces interpellations urgentes sont closes.
M. Carlo Lamprecht. Avant de répondre à vos questions, Monsieur le député Pierre Vanek, j'aimerais les rappeler.
Premièrement, fallait-il, à l'initiative du Conseil d'Etat et plus particulièrement de son président, M. le conseiller d'Etat Carlo Lamprecht, organiser une rencontre entre, d'une part, le Bureau du Grand Conseil et les chefs de groupe et, d'autre part, les responsables du World Economic Forum ?
Je rappelle ici que, lors de la précédente session du Grand Conseil, soit le jeudi 25 janvier 2001, M. Pierre Vanek avait déjà interpellé le Conseil d'Etat au sujet du World Economic Forum en général et du Forum de Davos 2001 en particulier.
Dans sa réponse du vendredi 26, le Conseil d'Etat avait notamment précisé, je cite : «D'une manière générale, le Conseil d'Etat tient à affirmer son attachement à deux libertés essentielles au bon fonctionnement de la démocratie : la liberté d'expression et la liberté de réunion.» Autrement dit, le gouvernement genevois a rappelé que, conformément à la grande tradition de notre canton, symbolisée par ce qu'il est convenu d'appeler l'esprit de Genève, il a toujours favorisé la rencontre, le dialogue, plutôt que la confrontation et, surtout, la confrontation violente.
C'est tout à fait dans cette perspective que le Conseil d'Etat a proposé une rencontre entre, d'une part, une délégation des élus politiques au Grand Conseil comprenant des représentants de tous les partis politiques et, d'autre part, les responsables du World Economic Forum.
Il paraît important au Conseil d'Etat que les parties concernées puissent dialoguer, se poser des questions, se communiquer leurs points de vue directement, aussi critiques qu'ils puissent être. Le Conseil d'Etat reste convaincu que c'est du dialogue que peuvent naître des solutions à des situations jugées antagonistes.
Deuxièmement, M. Pierre Vanek demande si le World Economic Forum a bénéficié d'allégements fiscaux.
Cette fondation a été exonérée sur le plan cantonal et communal pour une durée indéterminée, par arrêté du Conseil d'Etat du 25 mai 1994, son activité étant qualifiée d'utilité publique, au même titre que de nombreuses autres organisations non gouvernementales.
Dans son préavis, la division juridique du secrétariat général du département fédéral de l'intérieur estimait que la fondation exerce un certain caractère d'utilité publique.
L'exonération de l'impôt fédéral direct a été accordée le 9 août 1994 pour une durée indéterminée. Dans son préavis, la division principale de l'impôt fédéral direct a assimilé la fondation à une organisation internationale non gouvernementale.
En prenant en considération la qualification qui lui est donnée et le fait que, de tout temps, l'activité mondiale déployée au plus haut niveau, gouvernemental et économique ne prétend pas à l'obtention de bénéfices, le but de service public apparaît ainsi clairement. Je rappelle du reste que le World Economic Forum n'est pas la seule fondation à bénéficier d'une exonération partielle.
Je relève aussi que cette exonération est partielle, puisqu'elle ne s'étend pas à l'impôt immobilier complémentaire ni aux impôts sur le revenu et la fortune afférents à la propriété d'immeubles dans le canton de Genève, ni encore à l'impôt calculé sur toutes les plus-values immobilières ou bénéfices, résultant d'aliénations de biens et d'actifs immobiliers ou de participations à des sociétés propriétaires d'immeubles.
La troisième question de M. Pierre Vanek était : le World Economic Forum bénéficie-t-il d'autres avantages de la part de l'Etat ? A part cette exonération partielle, le World Economic Forum ne bénéficie pas d'autres avantages. Il paie bel et bien des impôts sur les biens immobiliers, ainsi que sur le revenu, la fortune, etc.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer. Monsieur le député, j'ai trop souvent loué votre vive intelligence pour ne pas vous indiquer franchement que, dans le rôle du militant bonasse, vous êtes à contre-emploi.
La police devrait faire preuve de discernement, dites-vous, et comprendre que, si quelques manifestants se réunissent à proximité immédiate de l'Organisation mondiale du commerce, c'est en fait pour rendre une visite de courtoisie à la mission d'un pays d'Amérique du Sud quelques encablures plus loin.
De manière générale, vous avez raison, Monsieur le député : nous sommes en effet impardonnables de n'avoir pas compris que, ordinairement, les cagoules, c'est à cause du rhume et que les bâtons, c'est pour débusquer la fraîche morille sous les feuilles mortes du bocage de Mon-Repos... (Rires.)
A mon tour, j'aimerais vous prier, Monsieur le député, de croire que, s'il y a un gendarme de faction devant une mission étrangère, c'est une pure coïncidence, qu'un barrage de police n'est en fait que l'aimable préparation d'un gentil picoulet dans l'après-midi... (Rires.) ...et qu'à nos yeux l'Organisation mondiale du commerce est avant tout un biotope digne d'intérêt.
Dans un sketch célèbre, Fernand Raynaud disait fermement à son fils : «Si tu veux jouer les idiots, on sera deux !» Je ne suis pas votre papa, encore que j'aurais été très fier de mon rejeton, mais nous formons la paire : vous par votre question, moi par ma réponse. Je considère votre interpellation comme close, au contraire de l'amitié délicate que je vous porte. (Applaudissements.)
Cette interpellation urgente est close.
Mme Martine Brunschwig Graf. Mesdames et Messieurs les députés, le député Lescaze, toujours aussi précis, m'a en fait posé plusieurs questions. L'une avait trait à la faculté de droit et comportait deux volets, l'autre avait trait à la nomination de la délégation aux questions féminines, et la troisième aurait pu s'intituler : «Ethique ou morale», encore que je souhaiterais que l'on remplace le «ou» par un «et» !
En ce qui concerne la faculté de droit, j'ai fort bien compris quelle était la problématique soulevée par le député Lescaze, s'agissant d'une nomination en histoire du droit et des institutions politiques. Il est vrai que, pour différentes raisons, cette procédure de nomination a fait l'objet de plusieurs échanges de vue entre le rectorat et la faculté, entre le rectorat et le département de l'instruction publique, entre le département de l'instruction publique et le décanat de la faculté.
Il y a bien eu ouverture d'inscriptions publiques, le 3 septembre 1999, comme il est d'usage, pour un poste de professeur ordinaire d'histoire du droit et des institutions politiques à 75%. Nous avons, par la même occasion, fixé la liste des experts. Je tiens à dire qu'on nous propose en général une liste de cinq experts et que nous en choisissons deux. Nous ne sommes pas en mesure, à ce moment-là, de déterminer si les experts connaissent les futurs candidats, vous le comprendrez aisément, puisque, par nature, les candidats sont connus lorsqu'ils répondent aux inscriptions publiques. En l'occurrence, c'est une première étape qui ne permet donc pas d'identifier les liens des uns et des autres. Il est vrai que, dans le cas particulier, il semble que l'un des experts connaissait l'un des candidats, mais vous avouerez qu'on ne peut pas considérer cela comme une irrégularité en soi.
Je dois par ailleurs souligner qu'à mon grand regret l'université, dans ce cas-là, n'avait pas été en mesure de proposer d'expert femme, ce qui est pourtant demandé par la loi et exigé par le département, l'université devant soit proposer une femme, soit justifier son absence.
Concernant votre deuxième question - le poste offert était-il conforme aux aptitudes du candidat choisi ? - je dois vous dire, Monsieur le député, que vous posez là un problème plus large, qui dépasse celui de cette nomination. S'il était difficile de sanctionner cette nomination pour cette raison-là, il est vrai que, depuis des décennies, l'université engage ou nomme des professeurs qui sont amenés, dans le cadre de leurs fonctions, à enseigner des disciplines qui, sans faire nécessairement partie de leur cursus au départ, étaient bel et bien prévues au poste. Cet événement m'a permis de dire un certain nombre de choses à l'université, y compris qu'il était indispensable de rechercher une meilleure corrélation. Dans le cas qui nous occupe, la faculté s'est engagée, à ma demande, à s'assurer de ce que le professeur nommé acquière rapidement, de façon qu'on puisse faire l'évaluation de ses quatre premières années, les éléments nécessaires pour remplir encore mieux la tâche qui est la sienne, dans le domaine du droit privé en l'occurrence.
La loi sur l'université a-t-elle été respectée en ce qui concerne la règle de préférence du sexe sous-représenté ? Je me vois contrainte de vous répondre oui, dans la mesure où, s'il y avait bel et bien, au final, une candidate et un candidat, il se trouve que la candidate avait une charge dans une université française dont elle ne pouvait se séparer, de sorte à répondre aux exigences de présence d'un professeur ordinaire. J'ai du reste demandé de faire vérifier cet élément par le recteur, sachant qu'il y avait dans ce domaine divergence de vues. Il est apparu qu'il n'y avait plus, en fin de course, qu'un seul candidat, ce qui me permet de dire qu'effectivement la loi a été respectée, puisque, face à une seule candidature, il n'y a pas eu à appliquer la règle de préférence.
Ceci m'amène à souligner qu'il y a, dans le cadre des nominations, parfois des problèmes, ou des questions qui se posent. Je rappelle que, pour respecter la liberté académique et les prérogatives de l'université, le Conseil d'Etat s'efforce de ne pas intervenir abruptement dans les nominations, ni dans les préférences de l'université. Il vérifie les procédures et, en les vérifiant, il est amené à faire un certain nombre d'observations préalables, ce que j'ai fait dans le cas particulier. Mais c'est bien un sujet, Monsieur le député, sur lequel devrait réfléchir la faculté de droit peut-être et l'université en général, à savoir qu'il est très important que nous n'ayons pas à débattre, ni en public, ni au sein de ce Grand Conseil, de problèmes qui pourraient être évités.
Pour ce qui concerne votre deuxième question, Monsieur le député, je partage votre impatience s'agissant de la délégation aux questions féminines. Je constate que la loi adoptée par le Grand Conseil le 21 septembre 2000 et entrée en vigueur le 18 novembre 2000, a bel et bien fait l'objet d'une mise au concours en ce qui concerne les postes relatifs à la délégation, mais que malheureusement le rectorat n'est pas encore en mesure de déclarer la procédure close. Le poste de déléguée à temps complet a fait l'objet de trente et une candidatures, ce qui est en soi très satisfaisant, et la nomination devrait intervenir le 1er avril 2001. Mais je partage l'idée que ceci tarde un peu et qu'il aurait été préférable d'accélérer ce processus, de la même façon que doit se terminer le processus de nomination des deux professeurs ordinaires censés faire partie de cette délégation. Les candidates et les candidats se sont déjà exprimés quant à l'intérêt qu'ils portaient à la fonction, il est important d'accélérer ce processus et la commission de l'enseignement supérieur du Grand Conseil sera informée des mesures que le rectorat entend prendre en urgence pour satisfaire à de meilleurs délais.
Enfin, en ce qui concerne les activités accessoires des professeurs, le doyen de la faculté de droit a, en effet, été mandaté par l'Etat de Vaud, dans un recours de droit public concernant un décret du Grand Conseil vaudois du 6 décembre 2000, relatif au projet triangulaire liant l'université de Genève, l'université de Lausanne et l'Ecole polytechnique fédérale. Monsieur le député, étant très prudente en ce qui concerne l'interprétation que fait l'université de sa liberté académique, je me garderai de porter un jugement. Je vous dirai simplement que, pour ma part, je pense qu'il aurait été opportun de se poser la question : n'aurait-il pas été souhaitable d'éviter d'être juge et partie dans une procédure où l'université de Genève sera forcément un jour ou l'autre engagée ? Mais, sachant qu'il existe la liberté académique, chacun fait ses choix.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer. Actuellement aucune loi cantonale ne prévoit que les débits de tabac doivent installer un second terminal afin de permettre aux gens de jouer à la Loterie romande, la Loro, en même temps qu'à la loterie à numéro.
Dans le contexte des réseaux informatiques, il y a actuellement un litige entre la Loterie romande et le Swissloto à Bâle, qui fait l'objet d'un examen devant un tribunal arbitral au sein duquel siègent notamment deux anciens conseillers d'Etat, MM. Ziegler et Marti.
Nous attendons sereinement la décision du tribunal arbitral dans ce dossier, mais ce litige, pour l'instant, ne joue aucun rôle pour l'usager.
Cette interpellation urgente est close.
M. Gérard Ramseyer. La police fait son travail, mais nous déplorons momentanément l'absence d'un fonctionnaire, à savoir l'instructeur chargé du suivi du dossier.
Vu la décision très claire du pouvoir judiciaire qui n'entend pas traiter cet objet et la position adoptée par la Commission fédérale des maisons de jeux, le dossier est à l'examen de M. le chef de la police et il doit l'évoquer avec moi le 20 février prochain. Si vous le souhaitez, je vous renseignerai personnellement à l'issue de cet entretien.
Cette interpellation urgente est close.
M. Carlo Lamprecht. Votre interpellation, Monsieur Velasco, au sujet des programmes d'emploi temporaire, organisés par l'office cantonal de l'emploi pour les demandeurs d'emploi, est essentielle. Elle correspond également à une des préoccupations de mon département. En effet, si le taux de chômage a diminué, rien ne dit que cela sera toujours le cas. Or, brader les instruments que l'OCE a mis en place pour faciliter la réinsertion des chômeurs pourrait poser problème en cas de retournement de la situation économique.
Avec les cantons, le secrétariat d'Etat à l'économie, le SECO, se préoccupe également de cette question et met la dernière main à une proposition de structure minimale de chômage, dont le financement sera assuré même en cas de chômage nul. Cela dit, nous n'en sommes pas là à Genève, et je dirai malheureusement, vu le taux relativement élevé du chômage qui se situe encore aujourd'hui à 4,2%.
Je tiens à préciser tout d'abord que les programmes d'emploi temporaire destinés aux chômeurs à Genève ne sont pas démantelés. Il est par contre exact que les mesures de réinsertion destinées aux demandeurs d'emploi font l'objet d'un réexamen par l'office cantonal de l'emploi pour être mieux adaptées à des besoins qui ont évolué. En effet, ces mesures doivent désormais viser en priorité la requalification, plutôt que l'occupation des chômeurs.
En ce qui concerne plus précisément la question de conserver des structures ne correspondant pas à des besoins actuels, mais destinées à prévenir une hypothétique augmentation du chômage, je ferai deux remarques.
Tout d'abord, il convient de rappeler que les programmes d'emploi temporaire mis en place par l'office cantonal de l'emploi sont entièrement financés par l'assurance-chômage. En conséquence, les règles qui s'appliquent dans ce domaine sont fédérales. Or, le mandat de prestations fédérales que doit appliquer le canton vise, je le rappelle, la réinsertion des demandeurs actuels et non pas futurs et, comme je l'ai dit, Genève est loin d'atteindre le niveau minimal de chômage fixé par la Confédération.
Par contre, en ce qui concerne les programmes qui ne bénéficieront plus d'une subvention fédérale, compte tenu de la baisse du chômage, la direction de l'office cantonal de l'emploi a pris contact avec d'autres services de l'Etat, notamment l'Hospice général, pour examiner si ces programmes ne pourraient pas répondre à des besoins d'autres publics cibles, notamment, les bénéficiaires du RMCAS.
Dans l'affirmative, ces programmes pourraient être poursuivis dans ce nouveau cadre, sous réserve évidement d'une évaluation de leur qualité. Les réponses sont attendues dans les jours qui viennent et j'ai le ferme espoir qu'une solution positive pourra être trouvée.
Cette interpellation urgente est close.
M. Carlo Lamprecht. La question que vous posez, Monsieur Brunier, concerne la collaboration de l'ex-directeur de la caisse cantonale genevoise de chômage, actuellement à la retraite, à des travaux menés dans le service financier de l'office cantonal de l'emploi.
Il s'est agi là de résoudre un problème technique auquel l'office cantonal de l'emploi a été confronté et pour lequel la recherche de solutions diverses par mes services a abouti à cette solution, exceptionnelle, c'est vrai, qui ne doit pas durer longtemps, je suis le premier à en convenir. Mais il était impératif de prendre en compte des contraintes extérieures incontournables.
En effet, suite à des vacances de postes et à la maladie de certains collaborateurs de son service administratif et financier, l'office cantonal de l'emploi s'est trouvé en difficulté pour clore ses comptes 2000 et respecter les délais impératifs fixés tant par le canton que par la Confédération.
C'est la raison pour laquelle la direction de l'office cantonal de l'emploi a sollicité l'autorisation de s'assurer, pour une durée limitée, je le précise, la collaboration de l'ex-directeur de la caisse cantonale genevoise de chômage, qui avait pris sa retraite le 31 octobre 2000.
Deux raisons sont à l'origine de ce choix : premièrement, la disponibilité immédiate de ce collaborateur et, deuxièmement, sa connaissance des systèmes comptables et des règles qui leur sont liées, tant sur le plan cantonal que sur le plan fédéral.
En effet, l'office cantonal de l'emploi travaille systématiquement et simultanément sur deux systèmes comptables et est tenu d'appliquer pour chacun d'entre eux des règles différentes. Cela suppose, pour ses collaborateurs, une formation approfondie qui ne pouvait être assurée dans un délai aussi court et pour une durée aussi limitée.
Par ailleurs, les directives de la Confédération imposent à l'office cantonal de l'emploi de procéder à la migration de sa comptabilité sur un nouveau système fédéral. Cet impératif suppose, lui aussi, une excellente connaissance des règles cantonales et fédérales et provoque une surcharge momentanée de travail.
La demande de l'office cantonal de l'emploi a été examinée avec attention par les services financiers de mon département et par l'office du personnel de l'Etat et elle a fait l'objet d'une autorisation exceptionnelle.
La rémunération pour cette mission temporaire placée sous statut d'auxiliaire correspond au statut de la fonction qu'occupait l'ex-directeur de la caisse, qui ne bénéficie pas du PLEND. Elle est entièrement prise en charge par la Confédération.
Cette interpellation urgente est close.
M. Guy-Olivier Segond. M. le député Pierre Froidevaux m'a interpellé sur l'interprétation exacte de l'alinéa 5 de l'article 10 de la loi cantonale genevoise d'application de la législation fédérale sur l'assurance-maladie, selon lequel, dès que l'assureur perçoit les primes de l'Etat, il est tenu de rémunérer directement les fournisseurs de prestations.
L'application de cet alinéa 5 de l'article 10 n'est pas aussi large que vous auriez pu l'espérer, en pensant qu'il s'agissait des 22 000 assurés sociaux de l'OCPA ou des assurés sociaux bénéficiaires des prestations de l'assistance publique, de l'Hospice général.
Il s'agit en l'occurrence d'une application beaucoup plus limitée qui concerne uniquement les assurés qui sont des insolvables notoires, dont l'insolvabilité est attestée par la présentation d'un acte de défaut de biens, ce qui amène alors le service de l'assurance-maladie à payer les cotisations auprès de l'assureur et à faire envoyer les factures des prestataires de soins directement à cet assureur.
Cette interpellation urgente est close.
M. Robert Cramer. Je vous transmets très précisément le message que j'ai reçu de Mme la présidente Calmy-Rey. Elle nous indique qu'elle confirme totalement ce qu'elle avait déclaré à l'époque, dans la presse. C'est l'article auquel vous vous êtes référée, Madame Wenger, et que vous avez mentionné dans votre interpellation urgente. Dès que cela sera possible, elle fera une information plus étendue au Grand Conseil. (Rires.)
Cette interpellation urgente est close.
Question de Mme Myriam Sormanni-Lonfat
Quelle garantie allons-nous avoir que les vendeuses aient le choix de leurs horaires de travail, notamment pour les mères cheffes de famille dont les horaires de la vente ne sont pas compatibles avec ceux des crèches, garderies et para-scolaires ? Je propose donc qu'une négociation soit entreprise avec les différents partenaires afin que les employées de la vente ne soient pas contraintes à accepter les horaires qui ne leur permettent pas d'assumer correctement vie professionnelle et vie familiale. Ce d'autant plus qu'avec des salaires pas très élevés, pratiqués dans la vente, le fait de devoir assumer des horaires nocturnes engagerait des frais supplémentaires pour les employés.
Je vous remercie.
Réponse du Conseil d'Etat
M. Carlo Lamprecht. Je réponds à l'interpellation urgente écrite de Mme Myriam Sormanni-Lonfat.
Les heures de fermeture des magasins à Genève sont un sujet sensible, à la fois pour les employés de la vente, qui doivent assumer des heures de travail plus tardives que d'autres travailleurs et travailleuses ainsi que pour les commerçants qui doivent faire face à la concurrence française et vaudoise, ainsi que pour les consommateurs, eu égard aux nouvelles habitudes de consommation.
Toutefois, après quatre ans de négociations, les partenaires sociaux ont trouvé un accord global pour une modification de la loi sur les horaires de fermeture des magasins du 15 novembre 1968, qui porte sur deux axes principaux :
Tout d'abord, les nouveaux horaires du commerce de vente de détail : fermeture ordinaire des magasins à 19 h durant la semaine et à 19 h 30 le vendredi. Heure de fermeture des samedis harmonisée pour tous les commerces, alimentaires et non alimentaires, soit 18 h. Une fermeture hebdomadaire retardée, vraisemblablement le jeudi, jusqu'à 21 h.
Je relève que, selon la loi actuelle, les magasins pourraient ouvrir du lundi au vendredi jusqu'à 19 h 30. Dès lors, avec les nouveaux horaires, les employés de vente termineront leur travail trente minutes plus tôt, ce qui leur permettra d'être de retour dans leur foyer en début de soirée.
Liée à cela, une convention collective-cadre sera étendue à tous les commerces de vente au détail qui ont au moins cinq employés. C'est une amélioration de la protection des travailleurs et des travailleuses de la branche qui concerne 5157 personnes, actuellement non couvertes par une convention d'entreprise ou de branche dans le secteur en question. Cette convention de travail étendue est une condition sine qua non aux modifications de la LHFM. En effet, si cette convention n'est pas étendue, les nouveaux horaires des magasins n'entreront pas en vigueur.
A ce sujet, je souligne que cette nouvelle convention-cadre tient compte des préoccupations de Mme la députée Myriam Sormanni. En effet, l'article 8, alinéa 1, du texte négocié entre les partenaires sociaux stipule spécifiquement que, dans une même semaine, l'employeur ne peut employer, au-delà de 19 h, le même personnel, à la fois le soir de la nocturne jusqu'à à 21 h et le soir de fermeture retardée, soit le vendredi à 19 h 30. Cela n'est pas valable durant le mois de décembre.
A l'article 10, lettre b, il est indiqué que, dans la mesure du possible, seront, à leur demande, dispensés entièrement ou partiellement de travailler en soirée les salariés ayant des enfants ou des parents à charge et qui ne peuvent confier leur tâche d'encadrement à une tierce personne.
La modification de la LHFM et l'extension de la convention collective de travail, négociée et acceptée par les partenaires sociaux, ont fait l'objet, comme je l'ai dit, d'un processus global. Les nouveaux horaires des magasins et la convention de travail ne peuvent entrer en vigueur que conjointement et solidairement.
L'ensemble de cette négociation et son résultat sont un cas unique en Suisse. Cela représente une avancée sociale et économique importante pour notre canton, dans un secteur primordial de notre économie. Le projet de loi de modification de la LHFM est d'ailleurs à l'ordre du jour de notre session. en ce qui concerne les horaires de prise en charge des enfants par les institutions de notre canton - crèches, garderies, parascolaire, etc. - c'est un débat beaucoup plus large, qui touche non seulement les travailleurs et travailleuses de la vente de détail, mais l'ensemble des employés de notre canton, toutes branches d'activité professionnelle confondues. Un remodelage des horaires d'ouverture dans les autres branches pourrait effectivement être discuté, mais ce n'est pas, à mon avis, l'objet premier de cette interpellation.
Cette interpellation urgente écrite est close.
Question de M. Pierre Marti
Le parti Démocrate-chrétien enregistre avec satisfaction les mesures prises en ce qui concerne le dépistage du cancer du sein par la prise en charge des frais de mammographie. Il salue en cela l'initiative de la ligue genevoise contre le cancer.
Le Conseil d'Etat peut-il nous indiquer si, à titre d'encouragement et d'aide, l'Etat participe financièrement à cette compagne de prévention. Enfin, sachant que le cancer fait également de nombreux ravages chez les hommes de 50 ans et plus atteint du cancer de la prostate une campagne de dépistage gratuite pourrait être également lancée à leur intention ?
Réponse du Conseil d'Etat
M. Guy-Olivier Segond. Au titre de l'égalité des sexes, M. Marti m'a interpellé sur la campagne de dépistage du cancer du sein qui se déroule actuellement et sur une éventuelle campagne de dépistage du cancer de la prostate.
La campagne de dépistage systématique du cancer du sein n'a pas été conçue, comme vous le pensiez, par la Ligue genevoise contre le cancer, mais par le département de l'action sociale et de la santé. Sa mise en oeuvre a été confiée à une fondation, présidée par votre collègue, Mme Marie-Françoise de Tassigny. Cette fondation reçoit une subvention annuelle du DASS d'un million par année, inscrite au budget de l'Etat à la rubrique 85.11.00.365.82, complétée par une subvention de 100 000 F de la Ligue genevoise contre le cancer.
Cette campagne de dépistage systématique du cancer du sein se déroule bien : l'année passée, chaque semaine, soixante-dix femmes ont demandé une mammographie de dépistage.
En ce qui concerne le dépistage systématique du cancer de la prostate, qui est le cancer le plus fréquent chez l'homme et notamment chez l'homme âgé, il ne suffit pas de faire appel au principe de l'égalité des sexes pour justifier le lancement d'une campagne de dépistage systématique : si tous les experts sont unanimes pour soutenir une campagne de dépistage du cancer du sein, ils sont, par contre, divisés sur l'opportunité d'un programme de dépistage du cancer de la prostate, dont l'efficacité n'est non seulement pas démontrée, mais surtout mise en doute par de nombreux milieux aux Etats-Unis, au Canada et en Europe.
En attendant donc les résultats des enquêtes épidémiologiques en cours sur le dépistage systématique du cancer de la prostate et, au-delà, sur la manière la plus efficace de le traiter, les experts recommandent le dépistage individuel, notamment par le test sanguin dosant le taux de PSA, qui permet en principe de détecter un cancer de la prostate à un stade précoce.
Cette interpellation urgente écrite est close.
26. Réponse du Conseil d'Etat aux interpellations urgentes écrites de :
Questions de M. Rémy Pagani
(IUE 10)
Cette interpellation urgente s'adresse au Conseil d'Etat. Elle fait suite à l'interpellation qu'y a été développée à notre session du 25 janvier et qui n'a donné lieu qu'à une réponse laconique de M Lamprecht en l'absence de M. Ramseyer qui était en déplacement à Davos. Monsieur le Conseiller d'Etat Lamprecht, Président du Conseil d'Etat, ayant admis qu'une réponse plus détaillée était nécessaire, il s'est réservé la possibilité d'y revenir. C'est pourquoi, par cette interpellation urgente écrite nous lui en donnons formellement l'occasion.
Depuis de nombreux mois, l'office des poursuites et faillites de notre canton défraie les chroniques des quotidiens.
Citons pour mémoire l'affaire des temporaires engagés par ce service sans qu'ils ne figurent au budget de l'Etat ou encore, il y a une année, la démission du directeur dans des circonstances pour le moins troubles. Et enfin, ces derniers jours, plusieurs faits préoccupants qui ont été rendus publics.
L'ensemble de ce tableau appelle de notre part les commentaires et interrogations suivantes :
tout d'abord, est-ce bien normal que des cadres mettent à l'isolement un ou plusieurs membres du personnel en invitant leurs collègues à ne plus donner de travail et à ne plus parler à la personne qu'on veut voir démissionner ou changer de service ?
est-ce bien normal d'attribuer un poste de travail à une personne dont les qualifications ne correspondent pas aux exigences de l'emploi en question et pour quelles raisons agit-on de la sorte : favoritisme, volonté de ralentir les procédures, etc. ?
comment se fait-il qu'une section entière - celle des faillites de Carouge - disfonctionne au point que le médecin conseil de l'Etat admette publiquement que, sur les 12 personnes qui composent le service des poursuites, six se soient plaintes pour des ennuis de santé liés aux conditions de travail qui leur sont faites ?
L'ambiance étant tellement exécrable, certains membres de ce personnel on été forcés, soit de changer de service, soit de prendre leur retraite anticipée ou encore de démissionner.
d'un autre côté est-ce bien légal que des employés d'Etat définissent leur emploi du temps à leur convenance en incluant dans les heures de travail qu'ils sont censés accomplir au service de la collectivité, des parties de tennis ou de cartes ?
Poser l'ensemble de ces questions c'est aussi se demander si les pratiques scandaleuses et l'ambiance délétère qui règnent dans cet office ne sont pas la résultante de nombreux privilèges qui ont été accumulés au fil du temps. De privilège en privilège, on peut légitimement se demander s'il n'y a pas eu des pratiques illégales, des irrégularités, voire des infractions pénales.
Par avance nous saluons l'action de notre commission de contrôle de gestion qui va rendre son rapport dans quelques jours et nous attendons avec impatience ses constats et conclusions. Toutefois, sans attendre, il appartient au Conseil d'Etat dans son ensemble de préserver l'intégrité physique et psychique du personnel qu'il emploie et ce, au plus vite. C'est pourquoi nous souhaitons le voir non seulement mettre en route rapidement le service de contrôle financier pour que nous disposions d'une image très claire de la réalité financière de cet office - ce contrôle a démarré semble-t-il le vendredi matin 26 janvier - mais nous estimons qu'il doit aussi et en urgence mandater une commission de hauts cadres de l'administration, détachés de l'office du personnel, indépendante du Département de Justice et Police, pour que ces derniers recueillent en toute liberté l'ensemble des doléances des membres du personnel, y compris ceux ayant quitté l'office depuis un an. Au terme de ses investigations, cette délégation devrait proposer des mesures pour remédier à cette gabegie et rétablir des conditions de travail conformes au droit.
Questions
1.-
Le Conseil d'Etat va-t-il enfin prendre des mesures énergiques notamment sur le volet des conditions de travail du personnel de l'office des poursuites et faillites et, plus généralement,
le Conseil d'Etat va-t-il nous proposer un projet de loi qui permette à l'office du personnel de l'Etat et au contrôle financier d'en finir une bonne fois pour toutes avec ces chasses gardées que sont les départements de chaque Conseiller d'Etat et tous les abus et opacités que ces prés carrés permettent dans la gestion financière et du personnel de l'Etat ?
2.- L'Inspectorat cantonal des finances (ICF) a-t-il bien entrepris un contrôle des comptes de l'office des poursuites et faillites fin janvier et qu'elle en est le résultat ?
3.- Une délégation de hauts cadres de l'office du personnel indépendante du DJPT a-t-elle été mandatée par le Conseil d'Etat pour auditionner tout le personnel y compris ceux ayant quitté l'office depuis un an et qu'elles sont ses conclusions et recommandations ?
(IUE 11)
Après avoir pris connaissance des très graves dysfonctionnements qui ont été rendus publics et étayés dans la Tribune de Genève du 10-11 février 2001 et qui correspondent sur nombre de points aux agissements que j'avais dénoncés dans mon interpellation urgente (orale) de la session précédente du Grand Conseil, il m'apparaît nécessaire d'y apporter quelques compléments et de poser quelques questions au Conseil d'Etat dans son ensemble.
Tout d'abord, il ressort des faits rapportés par ce quotidien, que les agissements de certains cadres de l'administration pourraient être assimilés aux notions d'abus de confiance, de gestion déloyale des intérêts publics, et d'abus d'autorité. Se pose alors la question de la poursuite au plan pénal de ces infractions ainsi que de savoir l'étendue des bénéficiaires de ces détournements ?
Ensuite, comme vous pourrez en prendre connaissance dans l'annexe de la présente, troublé par certaines informations portées à ma connaissance, j'ai fait parvenir mercredi dernier à Monsieur le Conseiller d'Etat Ramseyer une lettre à laquelle il n'a - à ce jour - pas donné de réponse. Dans cette missive, je faisais état, entre autres, des démarches qu'il avait entreprises pour entraver le bon déroulement, tant de la dénonciation des abus qui sont aujourd'hui dans le domaine public, que de son refus de voir l'Inspectorat cantonal des finances (ICF) accomplir son travail dans des conditions normales. En outre, sur le plateau de Léman Bleu il a prétendu: «Toute cette affaire des Offices des poursuites et faillites est un gag» et encore «On cherche à s'en prendre à des cadres que je connais par coeur, l'un fait partie du Parti Libéral et est adjoint au Conseil administratif d'une commune et l'autre est président de l'association des cadres de L'Etat de Genève».
A l'évidence et au regard des faits, il me paraît que les propos publics tenus et les actions entreprises par Monsieur le Conseiller d'Etat Gérard Ramseyer laissent penser qu'il était et est parfaitement au courant des agissements de ses subordonnés et que - comme eux - il assume la responsabilité de leur comportement. Mais là n'est pas le plus grave.
En effet, l'attitude et les moyens que le Conseiller d'Etat a mis en place pour entraver le travail de l'ICF me font imaginer qu'au-delà de son caractère et de son langage de corps de garde, il a pu ou pourrait tenter de soustraire quelques informations ou pièces déterminantes à la compréhension totale des raisons de ces graves dysfonctionnements. Les dommages subis par les débiteurs et les créanciers de ce service et au premier chef les travailleurs et les employeurs pris dans un processus de faillite ne pourraient alors être totalement répertoriés.
En conséquence, et dans l'esprit et la lettre de la loi sur l'exercice des compétences du Conseil d'Etat et de l'organisation de l'administration (B1 15), le Conseil d'Etat ne devrait-il pas se saisir de ce dossier et relever immédiatement le Conseiller d'Etat Gérard Ramseyer de la responsabilité de l'Office des faillites et poursuites?
1- Le dépôt d'une plainte sur le plan pénal par rapport aux infractions évoquées a-t-elle été envisagée par le Conseil d'Etat. Si oui quelles en sont les modalités?
2- Le Conseil d'Etat s'est-il saisi de ce dossier et a-t-il relevé immédiatement le Conseiller d'Etat Gérard Ramseyer de la responsabilité de l'Office des faillites et poursuite comme la loi le lui en donne le pouvoir ?
Réponse du Conseil d'Etat
M. Gérard Ramseyer. Monsieur le député, le Conseil d'Etat me charge de répondre à votre interpellation urgente écrite No 10 du 30 janvier dernier.
En préambule, j'aimerais dire que vos préoccupations fondamentales rejoignent le souci constant du Conseil d'Etat d'offrir au public un service de qualité dans le cadre d'un volume d'actions optimalisé.
Monsieur le député, il faudrait une vision politique malsaine pour imaginer que nous ne sommes pas attachés au premier chef à ce que nos services soient productifs, compétents et modernes, et à ce que le personnel y travaille dans les meilleures conditions possibles.
C'est donc l'heure de rappeler ici que les trois offices des poursuites et faillites genevois ont, en dix ans, triplé leurs émoluments, passant d'un volume d'activité de 216 000 réquisitions à 324 000. Comme vous le savez, le département des finances est le premier client des offices des poursuites et faillites par le volet fiscal de son activité; il représente 30% du volume des réquisitions.
Quant à l'OPF Rhône-Arve, son taux de rotation du personnel pour les sorties - 1,7% en moyenne sur sept ans - est très inférieur à la moyenne de l'Etat.
On peut, dès lors, légitimement s'interroger sur l'aspect fondamental de vos préoccupations.
Dans votre interpellation urgente, vous paraissez vouloir traiter de l'ensemble des offices des poursuites et faillites de notre canton. Vous avez cependant tenu une conférence de presse le 24 janvier 2001 au sujet de l'office des poursuites et faillites Rhône-Arve à Carouge et c'est sur cet office que portent de manière réitérée vos critiques. Nous répondons donc sur les deux registres.
En outre, dans vos textes, vous vous exprimez sur deux sujets différents. D'une part, je cite, vous parlez «des pratiques illégales, des irrégularités, voire des infractions pénales». Il s'agit donc de la gestion financière des OPF; vos allégations sont graves, elles sont enregistrées comme telles.
D'autre part, vous évoquez des problèmes ayant trait au personnel dont, dites-vous, «l'intégrité physique devrait être préservée». C'est sans doute excessif, mais cela mérite attention.
Je traiterai en premier lieu de la gestion financière et économique.
S'agissant de votre question sur un contrôle des comptes, le Conseil d'Etat n'a pas mis sur pied une commission d'enquête financière ad hoc et ceci pour quatre raisons au moins :
Premièrement, en sept ans, l'inspection cantonale des finances, l'ICF, a contrôlé, dans le cadre de ses vérifications usuelles, à huit reprises nos OPF. Les rapports sont tous dans la norme. Les correctifs proposés ont été appliqués en fonction des exercices comptables. Dans ces rapports d'expertise, on ne trouve surtout nul constat vous permettant les allégations que vous avez lancées.
Deuxièmement, depuis 1998, l'OPF Rhône-Arve est un site pilote NPM. Son directeur est, de plus, membre du comité de pilotage du projet Service public 2005, SP 2005, animé par le département des finances. L'ICF a fourni, depuis l'automne 1999, deux rapports au sujet des sites NPM. Le troisième rapport, de synthèse, est sorti, lui, le 8 janvier dernier : il n'indique aucun dysfonctionnement de gestion, ce que l'ICF n'aurait pas manqué de signaler si tel avait été le cas.
Troisièmement, les OPF sont soumis à une autorité de surveillance du ressort, non pas de mon département ou de l'ICF, mais de la justice genevoise. Cette autorité, en l'occurrence trois juges à la Cour, nous a fait parvenir, le 30 janvier 2001, un document dont je vous donne partiellement lecture. Je cite : «Nous vous confirmons que nous n'avons été saisis d'aucune plainte d'ordre disciplinaire ni n'avons détecté de dysfonctionnement quelconque à l'office des poursuites et des faillites Rhône-Arve pendant l'année 2000, ce dont nous donnerons avis au Tribunal fédéral dans le corps de notre rapport annuel destiné à l'autorité fédérale de surveillance.» Ce document sera joint à la présente réponse.
C'est l'heure de rappeler qu'en 1983 les OPF totalisaient 997 plaintes déposées, sur 180 000 procédures. Ce chiffre est descendu en 1996 à 680 plaintes déposées. Il a chuté encore pour l'année 2000 à 404 plaintes déposées, sur 324 000 procédures. Le nombre de plaintes admises, et non pas déposées, ne représente que les 10% des chiffres que je viens de citer, soit une plainte environ pour 10 000 dossiers traités. Ne vous sentez-vous pas quelque part gêné, Monsieur, de parler de gabegie ?
Quatrièmement, l'ICF, comme vous le savez sans doute, travaille en rotation sur l'ensemble des services de l'Etat. Sur la base de sa planification 2000 et de ses 106 contrôles usuels planifiés, l'ICF devait contrôler les OPF en 2001. Nous avons souhaité que ce contrôle ordinaire soit avancé et l'attention de l'ICF a naturellement été attirée sur les accusations que vous portez.
Il faut ajouter à ceci que, comme elle en a le droit, la commission de contrôle de gestion a mandaté l'ICF au sujet de l'OPF Rhône-Arve. Elle l'a fait par lettre du 2 février 2001. Mais je dois rappeler ici que le 12 novembre 1999, à la demande déjà de cette même commission, l'ICF a rendu un rapport relatif à l'emploi de personnel intérimaire par les offices des poursuites et faillites. Les recommandations de l'ICF ont été appliquées à la lettre, certaines avaient même été anticipées après contact avec le département des finances. C'est ce rapport ICF qui devait permettre à la commission de contrôle de gestion de rendre son rapport, lequel, quatorze mois plus tard et de manière inexpliquée, n'est toujours pas publié...
De ce qui précède, Monsieur, il ressort que vos allégations confuses et lancées tous azimuts nous laissent pour le moins perplexes. Encore que sur 324 000 dossiers par année, il soit possible de trouver l'un ou l'autre motif de contestation. Mais nous vérifions. Il va sans dire, Monsieur le député, que si tout ou partie de ce que vous prétendez est fondé, nous corrigerons tous ensemble : ICF, départements concernés et autorité de surveillance. Dans le cas contraire, les droits des personnes s'estimant calomniées seront par elles-mêmes préservés!
En ce qui concerne la gestion du personnel, vous évoquez pêle-mêle plusieurs offices, plusieurs services et plusieurs époques différentes, ainsi, je cite, «qu'une ambiance exécrable, voire délétère, des cas de favoritisme, une volonté de ralentir les procédures...». Vous soulignez même la réalité de plaintes pour ennuis de santé liés aux conditions de travail.
Une remarque d'abord s'impose. Ecrivez-vous bien que le médecin-conseil de l'Etat se serait publiquement exprimé sur le contenu de dossiers médicaux concernant des membres du personnel de l'Etat ? Affirmez-vous vraiment qu'un médecin-conseil aurait violé à la fois son secret de fonction et son secret médical ? Voilà une affirmation grave qui mérite de notre part un contrôle immédiat !
Nous observons, d'autre part, que le personnel de l'OPF Rhône-Arve lui-même a adressé à sa direction, le 23 janvier 2001, une lettre démentant en totalité vos dires.
Mais le Conseil d'Etat ne veut pas du maintien de l'état de suspicion que vous créez. Il est au contraire attaché - c'est son intérêt - à la notion de transparence. Avec mon accord, il traitera cet aspect du problème de la manière suivante :
Le Conseil d'Etat désignera une personne issue de la société civile. Il laissera, si elle le veut bien, à la commission de contrôle de gestion le privilège de faire de même. Ces deux personnes choisiront ensemble une troisième personne pour équilibrer le groupe. Le mandat de ce groupe est en cours de rédaction. Il est voulu général et extensible. Il peut en particulier s'élargir en complément ou en préparation du travail de l'ICF et viser à donner, si c'est possible, à vos allégations une base concrète et contrôlable. Le texte de ce mandat sera proposé pour accord à la commission de contrôle de gestion.
L'action de ce groupe débutera en mars prochain. Son rapport sera rendu dans les meilleurs délais.
Et, comme pour le volet «gestion financière», si des correctifs s'imposent, nous agirons tous ensemble : OPF, office du personnel, service de santé de l'Etat, départements concernés. Dans le cas contraire, les droits des personnes qui s'estimeraient calomniées pourront être préservés.
Le Conseil d'Etat a ainsi répondu à vos questions 1 a) et 3) qui portaient sur un contrôle, que nous voulons limité dans le temps, en ampleur et en coût.
Par votre question 1 b) traitant des abus et opacité, des prés carrés et autres chasses gardées, le Conseil d'Etat est mis en cause en tant que tel, et ceci pour l'ensemble de ses départements. Le Conseil d'Etat vous indique qu'il n'a pas l'intention de présenter un projet de loi qui aurait pour seule et unique base l'agitation politique qui vous anime personnellement !
Enfin pour conclure, Monsieur, le Conseil d'Etat prend note avec sérénité de votre interpellation urgente écrite. Il en regrette la complète vacuité en éléments concrets. Il lui donne, telles que le commandent les règles démocratiques, une suite pratique, en se refusant par contre de participer à la polémique que vous animez. Pour répondre concrètement, au rendu des documents attendus, les personnes visées par vos allégations ont, d'ores et déjà, expressément réservé leurs droits.
Monsieur le député, vous avez déposé, dans le droit fil de la première, une deuxième interpellation urgente No 11 écrite à laquelle nous venons de répondre. Au sujet de cette deuxième interpellation urgente écrite, le Conseil d'Etat vous indique qu'il ne dispose d'aucun élément qui justifierait l'application de l'article 11 du code de procédure pénale. Il répond donc par la négative à vos deux questions.
Ces interpellations urgentes écrites sont closes.
Annexe : Cour de Justice
RAPPORT DE LA MAJORITÉ
Rapporteur : Mme Fabienne Bugnon
Déposé par le Conseil d'Etat le 9 septembre 1998, ce projet avait déjà fait l'objet d'un traitement anticipé le 1er juillet 1998. C'est ensuite tout ou partie de 8 séances qui ont été consacrées à son traitement, soit les 1er juillet et 2 septembre 1998, 1er et 22 septembre 1999, 6 octobre 1999, 27 septembre, 8 et 29 novembre 2000, sous les présidences successives de Mme et MM. Fabienne Bugnon, Hervé Dessimoz et Rémy Pagani.
M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot a participé à presque toutes les séances, accompagné de M. Georges Gainon, chef de la Division de l'information du territoire et des procédures. Plusieurs fonctionnaires se sont en outre succédés au cours des séances, notamment MM. Gardet, Pauli, Haegler et Vonlanthen.
Ce projet a été étudié conjointement avec le projet 7815 modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur les routes nationales qui se voulait, comme on le verra plus loin, une alternative au projet présenté par le Conseil d'Etat.
Il faut revenir en arrière d'environ quinze ans, puisque c'est au milieu des années quatre-vingts que le souhait de réaliser une aire autoroutière à Genève est évoqué. Les conseillers d'Etat d'alors, MM Grobet et Ducret sont en charge du dossier. Le site retenu est Blandonnet. S'ensuit une étude complexe et de nombreux échanges de courrier avec la Confédération. L'ensemble de ce dossier ne peut être repris dans le présent rapport, mais il fait l'objet d'un volumineux dossier à disposition au DAEL.
En 1993, un arrêté du Conseil d'Etat autorise la construction d'une aire autoroutière sur ce site, mais avec la réserve « pour autant qu'il soit compatible avec les jonctions autoroutières » Trois variantes ont été proposées à l'Office fédéral des routes qui les a toutes trois refusées.
Le nouveau chef du département, le conseiller d'Etat Joye, décide de renoncer à ce projet et signe le 12 décembre 1994, une convention relative à l'abandon du projet de l'aire autoroutière de Blandonnet et du contrat de bail à loyer initié par son prédécesseur avec Coop-Genève.
Si le site de Blandonnet a été abandonné, le projet de construire une aire autoroutière a tout de même continué son chemin. Plusieurs sites ont été recherchés et proposés, notamment à Versoix, mais il faut dire que les conditions émises par l'Office fédéral des routes, très strictes, tant sur l'emplacement, que sur la proximité avec la frontière ou encore les contraintes liées aux directives fédérales sur les longueurs des voies d'accélération et de décélération rendaient dans un canton comme Genève la tâche particulièrement ardue.
Finalement le ment le conseiller d'Etat Joye a retenu le site de Bardonnex, proche de la plate-forme autoroutière et situé dans sa majeure partie, soit environ 44 000 m2 en zone agricole, propriété de l'Etat de Genève. En octobre 1995, la commune de Bardonnex entérinait ce choix par une résolution de son Conseil municipal. Immédiatement, une association de riverains s'est créée. Portant le nom d'ARIA (Association des riverains de l'autoroute) elle regroupe une soixantaine de membres à Bardonnex et à Perly et s'oppose à ce projet.
Le Conseil d'Etat, visiblement peu affecté par cette réaction, décide de lancer un concours ouvert à des groupements pluridisciplinaires composés au moins d'une société pétrolière, d'un restaurateur, d'un bureau d'ingénieurs et d'un bureau d'architectes et d'un spécialiste de l'environnement. Le concours portait sur l'étude du concept jusqu'au projet d'exécution, sur la réalisation, le financement et l'exploitation.
Ainsi, sous la présidence de Philippe Joye, le jury dut se prononcer sur 7 projets et, le 19 mars 1997, le groupement désigné lauréat a été retenu pour l'exécution du projet primé.
Les études du projet de détail et les procédures ont été rapidement engagées, le Conseil d'Etat estimant que, s'agissant d'une installation imposée par sa destination, au sens de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, sa réalisation ne devait pas obligatoirement être soumise à une modification des zones.
Le régime dérogatoire que la nouvelle majorité du Grand Conseil n'a cessé de dénoncer depuis fin 1997 s'est donc une fois de plus illustré dans ce dossier en portant sur, faut-il le rappeler, plus de 44 000 m2 de zone agricole.
Lors de la campagne électorale de 1997, l'ARIA a pressé les différents candidats au Conseil d'Etat de se prononcer sur l'avenir de ce projet. A la question : « seriez-vous d'accord d'épargner la zone agricole et de rechercher une solution afin d'implanter ce Restoroute dans une zone industrielle ou de développement ? » Les futurs conseillers d'Etat Moutinot, Calmy-Rey, Cramer et Ramseyer répondaient OUI, prenant également l'engagement de rediscuter avec leurs futurs collègues de l'emplacement d'un tel équipement.(les questionnaires sont à disposition auprès d'ARIA).
C'est ainsi, que tout en prenant malgré tout une position en faveur du projet (cf. exposé des motifs du projet de loi 7891), le Conseil d'Etat soumettait le 9 septembre 1998 un projet de modification des limites de zones sur le territoire de la commune de Bardonnex visant à créer une zone de développement 3 affectée à de l'équipement public. Ceci conformément à la loi qui, à notre connaissance, n'autorise pas la construction d'une aire autoroutière sur un terrain prévu pour l'exploitation agricole.
Si l'on peut se féliciter que le Grand Conseil ait enfin été saisi de ce projet, on peut néanmoins s'étonner que le nouveau Conseil d'Etat ait persisté dans un projet dont la majorité de ses membres avaient pourtant déclaré, lors de la campagne électorale, être prêts à rediscuter de l'emplacement afin de préserver la zone agricole !
On peut s'étonner également, dans ce dossier, qu'à aucun moment le Conseil d'Etat n'ait déposé de projet relatif à la modification du projet général de l'autoroute, conformément aux dispositions de la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur les routes nationales.
Ce long préambule afin d'expliquer dans quel contexte ce projet a finalement été refusé, ceci principalement à l'égard des différents acteurs qui se sont succédés au fil de ce dossier.
Afin de relayer les préoccupations de l'ARIA, mais aussi par conviction personnelle, quatre députés de l'Alliance de gauche et des Verts déposaient un projet de loi (7815) modifiant la loi d'application de la loi fédérale sur les routes nationales. Ce projet avait pour but de relancer le processus d'installation de l'aire autoroutière à Blandonnet et d'offrir une alternative au projet de Bardonnex, préservant ainsi le site agricole.
Les deux projets ont donc été étudiés parallèlement. Le projet de loi 7815 n'ayant toutefois pas encore fait l'objet d'un vote formel, il sera développé dans un rapport ultérieur.
Une part importante des travaux de la commission ont été consacrés à l'historique (cf. préambule de ce rapport).
M. Haegler, ingénieur cantonal, a ensuite informé la commission sur l'état actuel du dossier, suspendu dans l'attente de la modification de zones demandée par le Conseil d'Etat. Selon lui, seul le site de Bardonnex peut être retenu, car il est à même de répondre à toutes les conditions fixées par l'Office fédéral des routes dont il a d'ailleurs reçu un préavis favorable .
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1. d'entrer en discussion avec le groupe sélectionné pour la réalisation du projet, afin qu'il lui soumette une variante sous-dimensionnée ;
2. d'envisager, en collaboration avec les douanes, un déplacement du projet, éventuellement sur la plate-forme douanière extrêmement étendue.
Déplacement sur place le 2 septembre 1998
Un tableau résume les caractéristiques des deux projets (voir annexe).
Blandonnet : la difficulté réside de manière évidente dans l'exiguïté du terrain à disposition, réduit encore par la future construction des bretelles autoroutières. Il est certain que le projet primé ne pourrait y prendre place. Il faudrait entièrement repenser le concept ne retenant que la station-service (considérée comme non rentable sans restaurant) et de toutes façons le site a été préavisé négativement par l'Office fédéral des routes, principalement à cause des bretelles autoroutières.
Bardonnex :le site est en zone agricole, il jouxte la France. Il a toutes les caractéristiques pour accueillir le projet, mais il serait particulièrement dommageable pour l'environnement du point de vue de son emprise sur une zone agricole étendue. Il est contesté par les riverains réunis au sein de l'association ARIA et par le WWF (oppositions disponibles au DAEL).
Auditions
A deux reprises, soit les 2 septembre 1998 et 22 septembre 1999, la commission a auditionné des représentants du groupement primé soit les dirigeants du groupe Elf Suisse ainsi que leur avocat et administrateur, Me Jacquemoud. Ceux-ci ont répété aux deux occasions que, forts des promesses faites par le conseiller d'Etat Joye suite à la désignation de leur groupe comme lauréat du concours, ils ont entrepris les études nécessaires à la réalisation du projet, qui devrait être « un monument architectural » puisqu'ils se sont associés le concours d'un architecte internationalement reconnu en la personne de M. Santiago Calatrava.
Ils regrettent que l'arrivée d'un nouveau Conseil d'Etat impose des étapes non prévues par son prédécesseur. Ils rappellent leur attachement à Genève, Elf étant l'un des plus gros contribuables du canton. Ils souhaitent en outre créer environ trente nouveaux emplois pour un projet entièrement à leur charge.
Ne cachant pas une certaine irritation, les représentants du Groupe concluent qu'ils ont participé à un concours, qu'ils l'ont gagné, qu'ils ont aujourd'hui investi des frais d'études importants et qu'ils souhaiteraient pouvoir réaliser ce projet dans un délai rapide.
La commission a également entendu MM. Hottelier et Bailat, représentants l'association ARIA (Association des riverains de l'autoroute).
A l'aide de photos (voir annexe), ils ont expliqué à quel point la construction de ce Restoroute nuirait à l'environnement. Ils estiment que les terres agricoles sont de bonne qualité et qu'il n'y a pas lieu de les sacrifier. Si ce projet était vraiment reconnu comme indispensable, ils pensent « qu'il pourrait fort bien être construit dans le périmètre des douanes qui est assez vaste, d'autant plus que les douanes vont peut-être disparaître d'ici quelques années ».
La dernière audition a été celle du responsable des douanes suisses, M. Cottet.
D'entrée, M. Cottet a expliqué que l'utilisation de la plate-forme douanière par d'autres activités n'est pas envisageable. Les bilatérales ne changeront rien pour les douanes, l'utilisation de la plate-forme restera donc ce qu'elle est. Même si le parking peut paraître parfois sous-occupé, beaucoup d'activités s'y déroulent, les surfaces à disposition sont indispensables, pour le trafic des camions mais aussi pour le transfert des marchandises.
A la question d'envisager l'implantation du Restoroute sur la plate-forme, la réponse est donc catégoriquement négative !
Position du Conseil d'Etat
En date du 6 octobre 1999, le Conseil d'Etat par la voix du président du DAEL rappelle qu'étant défavorable au régime dérogatoire pratiqué par son prédécesseur, il a décidé de soumettre un projet de déclassement. Il a ainsi offert au Grand Conseil l'occasion de discuter de ce projet. Il ne considère pas que la proposition de Blandonnet soit une alternative pour toutes les raisons évoquées plus haut, notamment l'exiguïté du terrain et le préavis négatif de l'Office fédéral des routes. Après étude approfondie, il lui apparaît donc que le site de Bardonnex est le seul qui réponde aux critères imposés par l'Office fédéral des routes ; il estime toutefois que le projet soumis empiète trop sur la zone agricole, sans que l'on ait discuté de compensations. Le Conseil d'Etat s'engage donc à rediscuter avec la société Elf d'un redimensionnement de ce projet.
C'est à l'unanimité que la Commission de l'aménagement a décidé de suspendre le projet pour permettre au conseiller d'Etat Moutinot d'entreprendre les démarches proposées.
Et ce n'est qu'un an plus tard, soit en septembre 2000, que le dossier a été remis à l'ordre du jour.
Le 8 novembre 2000, la commission prend connaissance de la position du groupe Elf par le biais de deux courriers, l'un adressé au chef du département, l'autre au président de la commission. Ces lettres sont annexées au présent rapport, de même que la lettre de réponse du président Pagani.
Conformément aux voeux émis par certains commissaires, un redimensionnement du projet est présenté; il comprend un emplacement pour poids lourds et véhicules légers, en accord avec les directives fédérales, une distribution de carburant, un restaurant, différentes fonctionnalités. Son emprise au sol est considérablement réduite de 44 à 20 000m2 environ, mais le concept au niveau de l'architecture est très largement modifié. L'architecte ayant refusé de revoir son projet à la baisse, il a été revu par la société Elf. L'idée du pont suspendu est toutefois maintenue.
Cette manière de faire a déclenché l'ire des architectes membres de la commission qui ont estimé « qu'on improvisait un projet réduit, sans tenir compte des qualités architecturales».
S'ensuit donc une discussion fort animée entre les défenseurs du geste architectural percutant et les protecteurs de l'environnement de moins en moins convaincus par la nécessité d'une aire autoroutière fût-elle sous-dimensionnée.
La moralité de cette histoire, au jour du vote en commission en tout cas, a voulu que les efforts déployés par le chef du département pour contenter les uns et les autres furent vains, puisque réunis dans un même élan, ils furent unanimes à contester le nouveau projet, les uns le considérant comme médiocre, les autres estimant qu'il ne laissait qu'une part congrue à l'agriculture et que la priorité de la réalisation d'une aire autoroutière ne s'était pas fait sentir.
Il restait donc à voter l'entrée en matière du projet de loi, le nouveau projet serait, lui, traité comme amendement.
L'entrée en matière a été refusée par 8 NON (3 S, 2 Ve, 3 AdG) contre 7 OUI (3 L, 2 R, 2 DC).
La modification des zones ayant été refusée, c'est bien sûr l'ensemble du projet qui est remis en cause. Le conseiller d'Etat Laurent Moutinot, après le vote du Grand Conseil, fera part des prétentions émises par le groupe Elf et de la suite que le Conseil d'Etat entend leur donner. La majorité de la commission considère au demeurant que les éventuelles prétentions d'ELF sont infondées.
La majorité de la Commission de l'aménagement vous recommande donc Mesdames et Messieurs les députés, de suivre ses conclusions et de rejeter ce projet.
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
1 Le plan N° 28993-505, dressé par le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement, le 19 février 1998, modifiant les limites de zones sur le territoire de la commune de Bardonnex (création d'une zone de développement 3 affectée à de l'équipement public, au lieu-dit la Planche) est approuvé.
2 Les terrains sis dans la zone visée à l'alinéa 1 sont destinés exclusivement à la réalisation d'une aire autoroutière.
3 La surface brute de la construction à édifier est limitée à 1'500 m2 de plancher.
4 Les plans de zones annexés à la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, du 4 juin 1987, sont modifiés en conséquence.
Article 2
1 Si le projet n'est pas mis à exécution dans un délai de cinq ans à compter de l'approbation par le Grand Conseil, du plan visé à l'article 1, les terrains faisant l'objet de la présente modification des limites de zones sont restitués à la zone agricole, conformément à la procédure instituée par la loi.
2 En cas de recours contre l'autorisation de construire relative au projet, le délai précité est suspendu entre la date de la publication de l'autorisation de construire et l'entrée en force de celle-ci.
Article 3
En conformité aux articles 43 et 44 de l'ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit, du 15 décembre 1986, il est attribué le degré de sensibilité III aux biens-fonds compris dans le périmètre de la zone, créée par le plan visé à l'article 1.
Article 4
Un exemplaire du plan N° 28993-505 susvisé, certifié conforme par la présidence du Grand Conseil, est déposé aux archives d'Etat.
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RAPPORT DE LA MINORITÉ
Rapporteur : M. Hervé Dessimoz
Selon le plan directeur des stations service en bordure des routes nationales de première et deuxième classe (Département fédéral de l'intérieur, ordonnance du 3 décembre 1973 concernant les directives techniques et recommandations relatives à la construction et à l'exploitation des installations annexes), une aire de ravitaillement est prévue sur le territoire genevois, à proximité immédiate de la frontière nationale.
Une première variante, dite de Blandonnet, qui portait sur des terrains situés entre les routes de Vernier et de Meyrin, avait fait l'objet d'une enquête publique pour la réalisation des accès routiers. Elle avait reçu l'approbation, le 6 février 1989, du Département fédéral des transports, des communications et de l'énergie.
Sur la base de cet accord de principe, une requête en autorisation de construire DD 92550 fut déposée en 1993. Dans le cadre de son examen, l'Office des transports et de la circulation (OTC) émit un préavis demandant de démontrer la compatibilité du relais autoroutier de Blandonnet avec les jonctions complètes reliant la route de Meyrin et la route de Vernier avec l'autoroute. Le Conseil d'Etat, reprenant à son compte ce préavis, décida le 23 novembre 1993 de subordonner la délivrance de l'autorisation de construire à cette démonstration. Ensuite de quoi, l'autorisation fut délivrée le 3 décembre 1993, puis transmise pour approbation à l'Office fédéral des routes le 6 décembre 1993.
Par courrier du 29 décembre 1993, l'office précité répondit au département qu'il ne pouvait se prononcer en l'absence d'un projet de détail qui ne lui avait jamais été adressé et que, par ailleurs, aucune des solutions de modification des accès n'était techniquement satisfaisante.
Compte tenu de ces éléments, le Conseil d'Etat décida au début de la législature 1993-1997, le 22 décembre 1993, de surseoir à l'implantation de l'aire de ravitaillement de Blandonnet et le 12 décembre 1994, une convention relative à l'abandon du projet de l'aire autoroutière de Blandonnet était signée entre le chef du département et Coop-Genève, au bénéfice d'un contrat de bail à loyer daté du 3 décembre 1993.
Après recherche d'autres solutions, par exemple sur le territoire de la commune de Versoix, il ne restait que l'implantation de cet équipement à Bardonnex, à proximité immédiate de la plate-forme autoroutière, implantation qui satisfaisait aussi bien au plan directeur qu'aux contraintes de circulation, grâce à la vitesse limitée à 40 km/h. à l'endroit considéré. Le choix de ce site fut entériné par une résolution du Conseil municipal de la commune de Bardonnex en octobre 1995.
La réalisation d'une aire autoroutière à Genève revêt une grande importance sur le plan économique. A toutes les frontières autoroutières du continent, de telles stations service sont génératrices d'une intense activité économique, donc de retombées financières et fiscales intéressantes.
C'est le cas en Suisse des importantes aires de ravitaillement qui se trouvent, par exemple à Chiasso, ou à St-Margrethen. En plus des 32 emplois immédiats que créerait un tel projet à Genève, il est d'une importance primordiale que notre canton puisse réaliser cette aire autoroutière avant que celle-ci ne soit construite de l'autre côté de la frontière… De plus, un tel emplacement aurait pour avantage de présenter un site de promotion particulièrement adéquat pour les activités touristiques et les produits agricoles de Genève.
Le concours qui s'est déroulé fin 1996, début 1997, s'adressait à des groupements pluridisciplinaires composés au moins d'une société pétrolière, d'un restaurateur, d'un bureau d'ingénieurs et d'un bureau d'architectes avec un spécialiste de l'environnement. Il portait sur l'étude du concept jusqu'au projet d'exécution, sur la réalisation, le financement et l'exploitation.
Le règlement mentionnait expressément, dans les critères principaux de jugement, le rapport entre le projet et le site, ainsi que les qualités des aménagements extérieurs, des plantations et de l'environnement.
Le programme indiquait la réalisation d'une station service contenant 14 aires de distribution, un buffet libre-service avec terrasse d'environ 200 places, un bar, une échoppe de vente de produits agricoles et régionaux, un stand de l'Office du tourisme ainsi que des sanitaires.
Ce bâtiment, situé au centre du périmètre devait être pourvu de part et d'autre de 2 parkings de voitures comprenant chacun 66 places. De plus, il devait prévoir, au sud, un parking de poids lourds de 12 places. La dimension modeste de ce dernier se justifiait par la proximité immédiate de l'aire douanière qui offre des stationnements adaptés. Une liaison piétons entre l'aire douanière et la plate-forme autoroutière devait être proposée.
Les futurs usagers devaient pouvoir bénéficier d'une aire de pique-nique, d'un espace de jeux pour les enfants ainsi que d'un cheminement de détente. Enfin, un bassin permanent d'une profondeur d'environ 60 cm. devait servir de bassin de rétention des eaux pluviales.
Par décision du 19 mars 1997, le Jury du concours, composé de 19 membres, désignait le projet « Genève, Porte de la Suisse » lauréat du concours. Il recommandait au Gouvernement genevois d'engager la réalisation du projet sur la base du projet lauréat.
Les membres du groupement lauréat étaient :
Elf Oil (Switzerland) SA, Autogrill, Santiago Calatrava Valls SA, Infraconsult SA et Solfor SA.
Dans la présentation du projet, M. Mikael John Vandy, directeur général d'Elf Oil (Switzerland) SA indiquait :
L'aire de ravitaillement « Genève, porte de la Suisse » ne se contente pas d'être une aire multiservices, au sens fonctionnel. L'univers enchanteur qu'elle constitue est une véritable oeuvre d'art. Les zones d'arrêt de service et de repos sont réparties harmonieusement sur un site ouvert, elles se succèdent sans obstacle et s'articulent de façon équilibrée autour d'un axe de symétrie qui épouse le terrain naturel.
Le dispositif favorise tous les recyclages de flux par le biais d'un long giratoire en forme d'hippodrome.
Les regards culmineront au sommet du site sur le bâtiment central d'architecture « avant-gardiste » où sont regroupés services, prestations commerciales et lieux de détente ; en prolongement, un auvent de même facture assure l'abri des véhicules, auvent tendu vers le ciel.
Le panorama d'ensemble est du plus heureux effet ; le « bâti » et le « planté » y réalisent la synthèse recherchée.
Outre les fonctionnalités, tout est conçu pour le plaisir des yeux et la qualité de la halte. Le voyageur sera séduit par ce pôle de vie adossé aux plates-formes douanières; son oeil s'y fixera, guidé par la flèche monumentale d'un pont haubané lui servant de fil conducteur.
C'est le défi audacieux d'accueil et de convivialité que lance le groupement Oil Elf (Switzerland) SA en ce lieu.
Il est intéressant de relever que M. Vandy pouvait fonder ses arguments sur un projet d'une qualité remarquable élaboré par l'architecte Santiago Calatrava Valls.
Santagio Calatrava Valls bénéficie d'une renommée internationale par la qualité des projets qu'il a développés, notamment à travers l'Europe, et nous citerions : le pont métallique Trinity Bridge à Manchester, le pont Alamillo à Séville, la gare de Stadelhofen à Zurich, la gare de Lucerne, le Campo Volantin à Bilbao ou encore l'aérogare et la gare TGV de Lyon Satolas.
Architecte et ingénieur, Santiago Calatrava Valls est également professeur à l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich.
Au-delà des qualités urbanistiques et architecturales du projet (le rapporteur de minorité tient à disposition des membres du parlement une plaquette de présentation du projet de manière à ce que chacun puisse en prendre connaissance) l'architecte, parlant de la protection environnementale, disait : « …
Bruit :
Paysage :
Eau :
Sols :
la terre végétale décapée sera stockée sur place et réutilisée sur le site. La surface disponible sera suffisante pour assurer un stockage dans de bonnes conditions ;
des mesures de protection seront prises pour un déplacement minime des remblais en scories nécessités par l'implantation de la bretelle d'accès Nord.
… »
Dans son rapport du 19 mars 1997, le Jury du concours commentait le projet comme suit : …«
le Jury relève la qualité des accès sur le site et de l'ouvrage d'art qui marquent l'entrée sur le territoire genevois et qui permettent, de par leur situation, de préserver un espace vert proche des habitations ;
le bâtiment des services dont l'expression architecturale est structurée est en symbiose avec l'ouvrage d'art, marque une rupture sur le parcours de l'automobiliste, et s'intègre de manière adéquate sur le site en épousant les lignes déterminées par les circulations autoroutières ;
la circulation en limite nord de la parcelle pourrait être améliorée pour limiter les nuisances face à la zone agricole ;
la localisation des stationnements des poids lourds et des autocars, à proximité de la plate-forme douanière, est judicieuse ;
très bonne approche financière ;
le jury souhaite toutefois, dans le cadre des aménagements extérieurs définitifs, qu'un soin particulier soit apporté à la mise en valeur d'un espace de transition en faveur des piétons entre les aires de stationnement et le bâtiment. »
Suite à la proclamation des résultats le 20 mars 1997 et aux recommandations du jury, le groupement lauréat a été retenu pour l'exécution du projet primé.
Les études du projet de détail et les procédures ont été rapidement engagées, notamment l'étude de l'impact sur l'environnement, dont le rapport a été préavisé favorablement par le Service de l'écotoxicologie cantonal avant de l'être également, le 4 mars 1997 par l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage.
S'agissant d'une installation imposée par sa destination, au sens de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, la réalisation de la plate-forme autoroutière de Bardonnex ne nécessite en principe pas de modification des limites de zones.
Toutefois, vu l'importance de cet objet tant au niveau cantonal que régional, le Conseil d'Etat a estimé souhaitable de le soumettre à l'appréciation de la population par le biais de ce projet de modification des limites de zones qui prévoit la création d'une zone de développement 3 affectée à de l'équipement sur une surface de 46 400 m2. Il convient de signaler que ce secteur est englobé dans un périmètre plus général faisant l'objet d'une étude pour un schéma directeur qui vise à garantir un aménagement harmonieux à l'ensemble des pôles constitués par Bardonnex, St.-Julien et Archamps.
Le projet de plan localisé de quartier N° 29007-505 définit plus précisément l'aménagement de ce secteur. Il a fait l'objet d'une procédure séparée.
Le présent projet de loi précise que, dans l'hypothèse où la construction de ladite installation ne serait pas mise à exécution dans un délai de 5 ans à compter de l'adoption de la loi par le Grand Conseil, les terrains visés seraient restitués à la zone agricole.
En ce qui concerne les surfaces d'assolement (SDA), l'Office fédéral de l'aménagement du territoire a indiqué qu'il serait prêt à admettre la perte de SDA correspondant au périmètre pour un tel projet d'infrastructure, faisant l'objet d'une planification de la Confédération.
En conformité aux articles 43 et 44 de l'Ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986, il a été proposé d'attribuer le degré de sensibilité 3 au bien-fonds compris dans le périmètre de la zone créée par le projet de loi.
L'enquête publique ouverte du 6 mai au 8 juin 1998 a suscité un certain nombre d'observations qui ont été communiquées à la Commission d'aménagement du canton. Il faut rappeler ici le préavis favorable du Conseil municipal de la commune de Bardonnex.
Pour le détail des travaux de la commission, je vous propose de vous référer au rapport de majorité.
La commission a effectué des déplacements à Blandonnet et à Bardonnex.
Une proposition de déplacement de l'emprise de la plate-forme autoroutière, pour environ 50 %, sur la plate-forme douanière, a été demandée. Cette proposition a été refusée par les douanes suisses en raison des besoins de stationnement des poids lourds concernés par les contrôles douaniers.
Une variante minimale a été demandée à Elf Oil (Switzerland) SA. Elle a été présentée en commission. Son stade d'élaboration était bien entendu en retrait du projet de M. Calatrava.
Après de nombreuses années de tergiversations, le débat politique a repris le dessus lors de la séance de la Commission d'aménagement du canton, présidée par M. Pagani, en date du 8 novembre 2000.
Si la minorité de la commission a pu croire, pendant les années où la commission a évoqué de temps en temps le projet, que la majorité admettrait un projet de qualité, peut-être dans une version réduite, le 8 novembre elle a pu mesurer, en moins de deux heures, que la réalité était tout autre, que la majorité ne voulait tout simplement pas d'aire autoroutière à Genève ! Le vote d'entrée en matière donnait les résultats suivants :
En faveur du projet : 7 oui (3 L, 2 R, 2 DC).
Contre le projet : 8 non (3 S, 2 Ve, 3 AdG).
Soit une confrontation classique des blocs, sans nuances, et un rejet pur et simple d'un projet discuté depuis 1993 :
Pourtant, le président avait, préalablement au vote, enregistré 5 propositions qu'il résumait ainsi :
Oui à une aire autoroutière.
Ce projet ou rien d'autre.
Un projet réduit.
Le projet primé.
La présentation de l'ensemble des projets.
Avec le refus d'entrée en matière, nulle chance n'a été donnée à ces propositions !
Considérant l'esprit dogmatique de la majorité sur ce sujet, considérant l'intérêt de ce projet pour Genève, la minorité a demandé au soussigné la présentation d'un rapport susceptible d'ouvrir un nouveau débat en séance plénière et peut-être de sauver le projet.
S'il est vrai que l'Etat de Genève a les moyens de passer par pertes et profits les frais d'études plutôt élevés déjà engagés dans ce projet.
S'il est vrai que Genève a les moyens de manquer une chance de plus d'améliorer ses équipements d'infrastructure.
S'il est vrai enfin que Genève a pour habitude, pour préserver son bien-être, de rejeter chez ses proches voisins français, malheureusement plus pauvres et moins gâtés, le surplus de son bien-être, le débat politique sur la plate-forme autoroutière de Bardonnex permet de poser quelques questions :
Genève, ville internationale, croisée des chemins et des cultures depuis des siècles, ne devrait-elle pas offrir un lieu de repos de haute qualité pour les automobilistes qui traversent l'Europe du Nord au Sud et vice versa ?
Est-il plus avantageux de rejeter en territoire français l'équipement autoroutier contesté, donc de perdre la possibilité de fixer les dispositions environnementales et maîtriser les impacts et les nuisances d'un tel équipement ?
N'est-ce pas mener une politique non durable que de pratiquer la politique de l'autruche en renonçant à prendre en main les avantages et les contraintes de ce projet ?
La liste des questions de ce type pourrait être déroulée sans limites mais également sans intérêt !
Le projet « Genève, porte de la Suisse », est une véritable opportunité pour notre canton.
Nous dirons :
sa réelle valeur artistique aussi bien au niveau de la qualité esthétique des ouvrages que de la qualité de son intégration environnementale et des espaces verts qui l'entoureront ;
la qualité de vitrine pour Genève à l'intention des automobilistes qui transitent et qui continueront à transiter sur le territoire du canton de Genève que la majorité parlementaire le veuille ou ne le veuille pas !
la qualité d'interface de communication avec les populations d'Europe qui s'y arrêteraient. Au-delà de sa vocation de ville internationale, Genève pourrait y dire ses convictions en matière de qualité de la vie, tout simplement son engagement en faveur du développement durable.
Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les députés, j'ai essayé dans ce rapport de dire, au mieux de ma conscience, les convictions de la minorité, sa volonté de vous convaincre d'accepter l'aménagement d'une plate-forme autoroutière à Bardonnex et plus particulièrement le projet « Genève, porte de la Suisse ».
Premier débat
La présidente. Je vous demanderai, Madame et Monsieur les rapporteurs, de ne pas vous asseoir l'un en face de l'autre... C'est uniquement pour que les cameramen puissent vous cadrer, car les caméras se trouvent en face de vous. Il est donc préférable de vous décaler.
Madame la députée Bugnon, avez-vous quelque chose à ajouter à votre rapport de majorité ?
Mme Fabienne Bugnon (Ve), rapporteuse de majorité. Oui, merci, Madame la présidente.
Le projet qui vous est soumis ce soir remonte au milieu des années 80, époque où le Conseil d'Etat en place avait souhaité réaliser une aire autoroutière sur le territoire du canton de Genève.
Le site retenu par le Conseil d'Etat de l'époque, le site de Blandonnet, était idéal pour accueillir ce genre de projet, loin des habitations, sur un territoire où tout espace naturel a déjà été largement sacrifié.
La Coop est alors partenaire, et une convention est signée. Malheureusement pour les promoteurs de l'époque, l'Office fédéral des routes ne veut pas entendre parler de ce projet, notamment en raison du problème des voies de décélération et d'accélération.
L'arrivée du conseiller d'Etat Joye à la tête du département des travaux publics a mis un terme définitif à ce projet, puisqu'il a purement et simplement signé, le 12 décembre 1994, une convention relative à l'abandon du projet de l'aire autoroutière de Blandonnet initié par son prédécesseur, sans enterrer pour autant l'idée, puisque le nouveau Conseil d'Etat restait très intéressé par la manne financière qu'une station-service améliorée pouvait apporter.
Un nouveau site fut donc recherché. On parla du site d'Ecogia à Versoix, jusqu'à ce que le dévolu du chef du DTP s'arrête sur la magnifique plaine de Bardonnex... Dès ce moment-là, tout s'accélère... Le soutien de l'Office fédéral des routes est acquis, un concours est lancé et un projet primé. Je ne m'arrêterai pas sur ce projet : son apologie figure dans le rapport de minorité de M. Dessimoz...
Dans la précipitation, on oublia - par mégarde, sans doute - de requérir une modification du projet général de l'autoroute, conformément aux dispositions de la loi cantonale d'application de la loi fédérale sur les routes nationales. On fit également l'impasse - mais volontairement cette fois-ci - sur une demande de déclassement, la zone prévue étant agricole. Mais il est vrai qu'en ces temps-là la dérogation était de mise ! Fort heureusement, le département des travaux publics changea de direction en 1997. Le DTP devint DAEL, et le système dérogatoire passa à la trappe.
Au cours de la campagne électorale pour les élections au Conseil d'Etat, l'Association des riverains de l'autoroute, constituée pour s'opposer à cette nouvelle atteinte au patrimoine agricole, adressa à l'attention des candidats un questionnaire fort intéressant sur l'avenir de l'aire autoroutière. Ainsi l'on vit les candidats Cramer, Moutinot et même Ramseyer, assurer la main sur le coeur qu'ils étaient prêts à rediscuter de l'emplacement du restoroute pour épargner la zone agricole...
La suite, Mesdames et Messieurs les députés, on la connaît : le Conseil d'Etat a partiellement tenu ses engagements, puisqu'il n'a pas présenté d'autre projet... Il n'a pas retiré celui-ci, n'épargnant ainsi pas la zone agricole comme promis, mais, au moins, il a soumis le déclassement de la zone au Grand Conseil.
A la demande des députés de la commission d'aménagement du canton, M. Moutinot est entré en négociation avec les partis pour proposer une diminution de l'emprise du projet. Malgré cette diminution qui permettait d'épargner provisoirement 20 000 m2 de zone agricole - je dis bien provisoirement, car elle ne protégeait pas vraiment les futures extensions - ce projet ne trouvait pas grâce à nos yeux, ni à ceux des défenseurs du projet primé - mais je laisserai M. Dessimoz vous en donner les raisons.
C'est donc un déclassement de terrain qui nous est soumis ce soir. Je me permets de le préciser pour celles et ceux qui n'auraient pas lu le rapport de majorité, parce qu'il est vrai que les conclusions du rapport de minorité sont curieuses, qui appellent à voter pour le projet «Genève, porte de la Suisse»... En ce qui nous concerne, nous n'avons jamais porté de jugement sur le projet primé, jamais remis en cause non plus les qualités de l'architecte.
Il s'agit encore une fois d'une question d'aménagement du territoire. Nous n'acceptons pas que 40 000 m2 soient détruits au profit d'un relais autoroutier dont personne à ce jour n'a réussi à nous convaincre du bien-fondé !
Nous espérons, Mesdames et Messieurs les députés, qu'au-delà des pressions fortement médiatisées - même encore hier la «Tribune de Genève» a sorti un plan erroné, la zone prévue pour l'installation du restoroute est beaucoup plus importante que ce qui a été dessiné sur le plan - vous partagerez nos préoccupations et celles des riverains déjà fortement gênés par les nuisances liées à l'autoroute et voterez les conclusions du rapport de majorité. (Applaudissements et bravos fusent.)
La présidente. Je rappelle aux personnes qui se trouvent à la tribune qu'il est interdit de manifester. Si tel devait être le cas, je serais obligée de demander l'évacuation de la tribune. Je pense donc qu'il est préférable de s'abstenir !
Monsieur Dessimoz, vous avez la parole.
M. Hervé Dessimoz (R), rapporteur de minorité. Mme Bugnon a évoqué la conclusion de mon rapport, intitulée «Genève, porte de la Suisse». Il est effectivement important de le dire, car le déclassement sans ce projet n'aurait pas de sens. Comme je crois savoir que plus de 50% de ce parlement n'ont pas connaissance du projet, je tiens à la disposition de ceux qui le désirent et qui veulent savoir de quoi on parle deux plaquettes de ce projet qui ont été élaborées par le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement.
J'ai pris avec moi l'Agenda 21 du Sommet de la Terre à Rio, parce que je pense que ce soir nous allons beaucoup parler de développement durable, et je voudrais qu'on soit bien d'accord sur les termes que nous allons utiliser.
Par ailleurs, je dois faire un correctif à votre rapport, Madame Bugnon, à la page 7, alinéa 3, où vous dites que l'ire des architectes se serait déclenchée lorsqu'il a fallu comparer la variante proposée par la société lauréate au projet primé... En fait, Madame Bugnon, l'ire des architectes n'était pas due au fait de devoir comparer un projet en version réduite de mauvaise qualité à un projet de qualité, mais de devoir comparer une esquisse d'intention à un projet de qualité !
Enfin, pour commencer ce débat dans la bonne humeur, je vous confie à toutes et à tous la bonne blague que les Fribourgeois m'ont réservée... Je vous la lis : «Lully 01 SA et ses partenaires ont le plaisir d'inviter M. Hervé Dessimoz à l'inauguration officielle du nouveau restoroute Rose-de-la-Bois à Lully. L'aire de ravitaillement se situe à Lully sur l'autoroute A1, Saint-Gall / Genève, le tronçon suisse de la route européenne E25, qui permet de relier d'un seul tenant Rotterdam à Gênes. Les travaux de l'autoroute ont révélé de nombreux sites archéologiques allant de l'ère néolithique à l'époque romaine. Cette proximité des sites archéologiques et des routes romaines a été source d'inspiration pour l'aménagement du restoroute, pour faire de ce restoroute l'un des plus accueillants et des plus attractifs du réseau autoroutier suisse. Tout a été mis en oeuvre dans le but de valoriser la détente des automobilistes et autres visiteurs de passage. Lully 01 SA et ses partenaires ont le plaisir de vous inviter à l'apéritif qui sera donné à l'occasion de l'inauguration officielle et dans le programme, trois syndics : celui de Lully, celui d'Estavayer-le-Lac, celui de Frasses, auront le plaisir de couper le ruban. Le président du département des travaux publics de l'Etat de Fribourg posera la dernière pierre de la mosaïque autoroutière.»
Tout cela pour vous dire que ce qui distingue le restoroute de Bardonnex et celui de Lully, c'est que le tronçon autoroutier de Lully est en voie d'achèvement, alors que l'autoroute de contournement de Genève est achevée depuis huit ans !
Merci de votre attention ! (Applaudissements.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, plusieurs lectures de lettres ont été demandées. Je vous prie, Monsieur le secrétaire, de bien vouloir les lire.
Annexes : TCS
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Commune de Bardonnex
Jacquemoud & Stanislas
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M. Alain Etienne (S). Le parti socialiste ne soutiendra pas l'aire autoroutière de Bardonnex, et cela, pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, nous voulons sanctionner la politique dérogatoire de Philippe Joye, alors conseiller d'Etat. Nous l'avons déjà dit, nous ne sommes pas favorables aux dérogations, et Mme Bugnon a très bien expliqué notre position dans son rapport.
En cela, il faut saluer la volonté du Conseil d'Etat actuel multicolore et de M. le conseiller d'Etat Laurent Moutinot, en particulier, d'être revenu à des pratiques plus démocratiques et d'avoir soumis au Grand Conseil ce projet de loi de modification de zone qui nous permet, aujourd'hui, d'avoir un vrai débat, débat que vous appelez de vos voeux, Monsieur le rapporteur de minorité, ce débat que nous avons aujourd'hui... Je croyais que l'affaire des déclassements pour Reuters avait servi de leçon, mais je constate qu'il n'en est rien !
La position des socialistes a été claire dès le début - nous l'avons dit en commission - l'aire autoroutière ne pouvait se faire à Bardonnex que si elle pouvait se situer sur l'aire douanière qui, à notre avis, est surdimensionnée. La réponse du responsable des douanes a été on ne peut plus claire : non ! A partir de là notre position était prise...
Monsieur le rapporteur, vous nous parlez ensuite de durabilité. Du reste, dans cette enceinte, vous nous avez souvent parlé de développement durable, encore dernièrement avec votre motion 1346 au titre éloquent : «Genève doit montrer l'exemple».
Mais ce projet de restoroute a-t-il vraiment été étudié sous l'angle du développement durable ? Alors, je sais, comme vous, que le projet présenté traite du bruit, de l'air, de la gestion de l'eau, de la qualité des espaces verts, de l'intégration dans le site, mais je rajouterai deux choses essentielles :
Tout d'abord, cette aire autoroutière est une perte considérable pour le monde agricole : près de 44 000 m2. J'aimerais rappeler ici que le sol est une matière pour ainsi dire non renouvelable, car les sols mettent de nombreuses années pour se constituer et être de qualité. Les terres agricoles sont également l'outil de travail des agriculteurs et restent encore le substrat absolu pour produire nos aliments. Il est donc de notre responsabilité de préserver la fertilité des sols, et le concept de l'environnement, qui sera bientôt à l'ordre du jour du Grand Conseil, est très clair à ce sujet. La Chambre genevoise d'agriculture, elle-même, a, à plusieurs reprises et notamment lors du débat sur la taxation des plus-values foncières, rappelé que les agriculteurs payaient un lourd tribut à l'urbanisation.
D'autre part, dans la démarche du développement durable, il y a la notion de citoyenneté participative, et, là encore, nous en sommes loin ! Nous sommes dans un schéma traditionnel où l'économie l'emporte !
Alors, ne venez pas, Monsieur le rapporteur, vous approprier les voix des citoyens et des citoyennes en affirmant dans la presse qu'il faut être à l'écoute des Genevois ! Nous les entendons aussi. Nous entendons aussi les représentants des habitants riverains, les représentants de l'ATE ou encore de Bardonnex Alternative.
Et puis, il y a le projet d'architecture de M. Calatrava dont vous vous faites l'ardent défenseur. Et j'insisterai sur ce point : nous ne sommes pas là pour juger de la qualité d'un projet, ni même pour défendre une corporation, quand bien même je pense que les concours sont des opportunités pour la profession. Nous sommes là pour dire si oui ou non nous voulons déclasser des terres agricoles pour construire une aire autoroutière ! D'ailleurs, vous nous le répétez assez du côté de l'Entente, quand l'Alternative pose des questions trop précises sur les projets en commission de l'aménagement, qu'il faut s'en tenir aux seules compétences qui nous ont été données !
S'il faut parler du projet, parlons-en ! Je vous l'ai dit en commission, la douane française a aussi, sauf erreur, fait l'objet d'un concours avec cette grande arche jaune. «Genève, porte de la Suisse» existe déjà. Ces deux projets mis côte à côte vont se faire concurrence dans le paysage. D'ailleurs, la maquette que nous avons pu voir fait abstraction de cet élément. Quant à l'insertion dans le site, on peut se poser des questions. Nous ne sommes pas à Gruyère devant un panorama de carte postale. Nous sommes à Bardonnex, coincés entre une aire douanière et une zone artisanale...
La question essentielle aujourd'hui est celle-ci : Genève a-t-elle besoin d'une aire autoroutière ou, plutôt, est-il nécessaire d'avoir une aire entre la Côte, dans le canton de Vaud et Valleiry en France, à l'heure de la construction européenne ? Nous sommes d'avis que non, ou, en tout cas, pas dans ces conditions !
Et puis, permettez-moi de trouver un peu dépassé le tableau que vous nous peignez sur la halte bénéfique pour les automobilistes européens de passage qui pourraient acheter les produits du terroir... Croyez-vous vraiment qu'une aire autoroutière à Genève soit le lieu idéal pour faire connaître les produits du terroir ? (Commentaires.) Evidemment, je connais bien l'aire de Montélimar, et je m'y arrête parfois pour acheter du nougat... (Exclamations.) Mais, vous en conviendrez, les produits du terroir qui sont proposés sont souvent, même si ce n'est pas toujours le cas, des sous-produits commerciaux qui sont loin d'être authentiques ! (Rires et exclamations.) Et puis, en définitive, combien de personnes, croyez-vous, vont-elles quitter Bardonnex pour venir visiter Genève ? Tout ceci est un leurre !
Vous faites également référence au plan directeur cantonal de l'aménagement, mais vous en faites une interprétation toute personnelle. En effet, d'une part, il est préconisé de préserver des terres agricoles cohérentes pour leur intérêt fonctionnel et paysager et, d'autre part, je ne crois pas que le plan d'aménagement concerté transfrontalier de St-Julien / Neydens / Archamps / Bardonnex mentionnait précisément un restoroute. L'étude d'un schéma de secteur franco-suisse en cours va bien au-delà de la simple implantation hasardeuse de l'objet qui nous concerne. Je vous rappelle encore que le PAC est une procédure qui permet la concertation avec les communes et les associations représentatives concernées.
Et puis il est inacceptable de venir parler ici de la renaturation de l'Aire ! La renaturation de l'Aire fait l'objet d'un projet en cours. Le concours a permis de donner une idée de ce qu'il est possible de faire pour redonner vie à une rivière de notre canton. Et hier, le conseiller d'Etat Robert Cramer nous a apporté des garanties qui ne sont pas nouvelles. Rien ne se fera sans projet de loi, sans compensation et sans concertation.
Et puis, et j'en terminerai par là, il y a toute cette pression médiatique et cette lutte d'intérêts exercée ces derniers jours. J'aimerais rappeler ici que Mme la députée Fabienne Bugnon est la porte-parole de la majorité. Elle n'a pas à subir personnellement cette pression, dont nous assumons collectivement la responsabilité et dont nous comprenons les enjeux !
M. Roger Beer. C'est joli !
M. Alain Etienne. Vous avez tous lu le portrait qui a été fait d'elle dans la « Tribune de Genève ». J'ai été surpris du jugement excessif qui a été porté sur sa position concernant la défense de la zone agricole. J'ai, de plus, été choqué, hier soir, par le fait que le député Ducommun ait utilisé ce passage lors de son interpellation urgente...
En conclusion, les socialistes vous invitent à suivre le rapport de majorité et à refuser l'entrée en matière sur ce projet. (Applaudissements.)
M. Luc Barthassat (PDC). Le restoroute de Bardonnex est un projet plus que nécessaire pour Genève, notre canton ne possédant pas de halte autoroutière sur son territoire. Il serait impossible de le faire ailleurs qu'à Bardonnex : c'est l'Office fédéral des routes qui le souligne.
Le futur projet s'implanterait à côté de la douane de Bardonnex, une des plus importantes d'Europe, là même où des milliers d'automobilistes et des centaines de poids lourds transitent chaque jour. Pensons à ces camionneurs qui doivent s'arrêter pour dédouaner leurs marchandises, ce qui peut durer des heures, voire plusieurs jours, et qui n'ont rien pour se restaurer ou se reposer, ni WC, ni douches !
Le projet primé «Genève, porte de la Suisse», réalisé par un architecte de renommée internationale, constitue une véritable oeuvre d'art et marque magnifiquement l'entrée du territoire genevois, vu la qualité de son intégration environnementale et des espaces verts qui l'entourent.
Mesdames et Messieurs les députés, à l'heure où la protection de l'environnement prend de plus en plus d'importance et où les demandes concernant les prestations sociales sont en constante augmentation, il faut penser aussi à augmenter les rentrées fiscales.
Mesdames et Messieurs les députés des bancs d'en face, je crois que vous appelez ça le «développement durable»... N'oublions pas que, malgré une conjoncture meilleure, la création d'emplois reste très importante dans notre canton ! La majorité gauche / verte de ce parlement, en ne votant pas l'entrée en matière de ce projet de loi, a tout simplement voulu s'opposer avant même de vouloir comprendre l'importance d'un tel projet pour notre canton.
Concernant la zone agricole, nous habitons un canton-ville qui grandit continuellement. Nous ne pourrons pas mettre la zone agricole sous une cloche de verre, en étant hermétiques à toute idée nouvelle et future. Il nous faut la protéger, car c'est notre outil de travail à nous, les milieux agricoles, mais il nous faudra obligatoirement lâcher du lest, perdre un petit peu pour que notre canton puisse gagner davantage.
N'oublions pas non plus que prochainement nous devrons nous prononcer sur le projet de la renaturation de l'air, projet qui touchera une quarantaine d'hectares. Ce qui représente 400 000 m2, Monsieur Etienne, et non 40 000 comme ici, en bonne partie en zone agricole ! Nous verrons à ce moment-là si les partis de gauche et les associations de circonstance mettront le même dynamisme à la protéger !
Cet ouvrage - j'insiste sur ce point - ne coûtera pas un sou aux contribuables genevois et donnera aux milieux de l'agriculture la possibilité d'avoir une vitrine pour vendre et faire connaître leurs produits aux Européens de passage.
Vous, les grands maîtres à penser des partis de l'Alternative, vous êtes les geôliers du couloir de la mort des grands projets genevois... (Rires.) ...et vous vous apprêtez encore une fois à assassiner une grande idée, une des grandes visions frontalières ouvertes sur l'Europe pour le futur de notre canton !
Je vous prie de voter le déclassement pour ne pas commettre une telle erreur ! (Applaudissements.)
M. Walter Spinucci (R). Permettez-moi de vous livrer mes réflexions sur un échec programmé !
Pour qu'une autorité, un gouvernement, un chef, soit crédible, il convient qu'ayant présenté ses objectifs il s'efforce de s'y tenir... Il convient également qu'ayant cautionné une action et donné sa parole, il ne la reprenne pas...
Pour un gouvernement, cela constituerait une falsification que l'histoire retiendrait probablement comme une trahison, un manquement à la parole donnée, soit, comme le définit le Larousse : «une félonie»... La politique sérieuse n'est pas une polyéthique : il n'y a pas plusieurs manières de respecter l'éthique... Le respect de la parole donnée est essentiel, il est capital.
Quant à l'actualité récente, nous constatons que la gauche genevoise est d'un tempérament frileux et castrateur en ce qui concerne la finalisation des grands projets. Concernant l'affaire de Bardonnex, toutes les conditions étaient réunies pour recueillir des avantages aussi rares que prestigieux. La politique du caméléon a prévalu et le refus du 8 novembre 2000, par la commission d'aménagement du canton, d'entrer en matière a conduit à une situation antidémocratique.
Si le gouvernement a choisi la voie de ne pas respecter la parole donnée, c'est parce que certains membres du gouvernement préfèrent respecter l'engagement pris lors de la campagne électorale de l'automne 97, lorsqu'ils ont pris l'engagement écrit de remettre en cause le projet de plate-forme autoroutière de Bardonnex, animés qu'ils étaient par leur souci électoraliste... Le cafouillage déjà évident dans le projet de Blandonnet a coûté aux contribuables 500 000 F. Le renoncement de Bardonnex leur coûtera trois ou quatre fois plus, soit environ 1,5 ou, plus probablement, 2 millions... Les autogoals se suivent et se ressemblent !
Nous regrettons que la gauche en général et certains membres du gouvernement soient si peu enclins à ménager les deniers publics. A ce gaspillage d'argent public s'ajoute une fois de plus - la gauche nous y a habitués... - le non-respect de la décision du Conseil municipal de la commune de Bardonnex qui a apporté son soutien au projet de plate-forme autoroutière, par l'acceptation d'une résolution allant dans le sens souhaité, par onze oui, deux non et deux abstentions.
La gauche préfère suivre les arguments trompeurs d'un mini groupe qui défend égoïstement son petit pré carré plutôt que de respecter la volonté du conseil municipal. Face à cette désinvolture et à l'énorme gaspillage des deniers publics, le peuple du canton entier saura vous sanctionner le moment venu. (Applaudissements.)
M. Georges Krebs (Ve). Lors des débats en commission, ce projet a été comparé au Mont-Saint-Michel, aux cathédrales... Il s'agit d'un lieu néolithique, c'est un grand architecte qui a projeté cet ouvrage...
Autrefois, les architectes construisaient des cathédrales, des pyramides. Que construit-on aujourd'hui ? Des centres commerciaux, des stations-service ! Nous sommes dans une époque où le matérialisme a remplacé la spiritualité et les odeurs d'essence celles de l'encens... (Commentaires.)
Alors, la vraie question qui se pose est la suivante : avons-nous un réel besoin de cette station-service, de ce centre commercial à la frontière ?
Je pense - du reste, M. Etienne l'a très bien dit et M. Barthassat aussi - qu'il faut préserver l'outil de travail. Quel est l'outil de travail à Genève ? C'est d'abord la terre pour les agriculteurs, mais c'est aussi et avant tout l'environnement, la qualité de la vie, la sécurité ! Pourtant, on est en train de détruire notre outil de travail. Et il faut bien penser que les personnes qui vont s'arrêter à Bardonnex ne viendront pas forcément jusqu'à Genève, cité des parcs. Mais peut-être des écriteaux «Genève, oeuvre de Calatrava», «Genève, porte d'entrée de la Suisse» remplaceront-ils «Genève, cité des parcs» ! Restons raisonnables !
J'admire beaucoup ce projet, mais il est malheureusement prévu dans un site qui ne mérite pas sa présence et, de plus, il n'est pas vraiment nécessaire entre la station de la Côte et celle de Valleiry où, d'ailleurs, la vision sur Genève est beaucoup plus belle. Je vous incite d'ailleurs à vous y rendre pour le constater, et les agriculteurs pourraient tout à fait vendre leurs produits et faire de la réclame pour Genève sur ce site. (Rires et applaudissements.)
M. Hubert Dethurens (PDC). Monsieur Krebs, vous connaissez probablement mal les barrières douanières que nous avons avec la France, et je vous mets au défi d'aller porter quoi que ce soit au restoroute de Valleiry !
Mesdames et Messieurs les députés, Genève détient certainement la palme de l'originalité en matière de développement... Qui d'autre que Genève se permettrait de refuser ce qui nous est proposé ? Un restoroute pratiquement clés en main... (Rires.) ...sans que l'Etat débourse un seul centime ! De plus, la société Elf s'est engagée à reverser des royalties à l'Etat de Genève. Mais à mes yeux le plus important est son contexte : la formidable vitrine pour Genève qu'offrirait un tel projet. Le tourisme, l'agriculture, l'hôtellerie, le commerce et même l'industrie y trouveraient tous un fantastique outil de promotion.
Mesdames et Messieurs les députés qui n'avez pas le permis de conduire ou qui ne vous rendez jamais en France sur la Côte d'Azur, je vous invite vivement à pratiquer ce parcours. Rien que le restoroute de Montélimar pourrait vous en convaincre ! Quelle est aujourd'hui la ville qui renoncerait à de tels équipements ? Le combat que vous menez ici pour l'écologie est un combat d'arrière-garde ! Le combat doit être porté sur la propreté des moteurs, sur la recherche de nouveaux carburants, si possible renouvelables, mais en aucun cas sur la liberté de déplacement de la population !
Mesdames et Messieurs les députés, les restoroutes ne sont pas seulement des méchants distributeurs de liquides polluants. Ils sont devenus au fil du temps des aires de délassement qui contribuent à la sécurité et aussi à faire des découvertes touristiques. En France voisine, les collectivités publiques de chaque région se battent pour obtenir de telles infrastructures, et cela avec l'appui de tous les partis politiques ! A ce propos, il est curieux de constater que les Verts et les socialistes, suisses et français, mènent le même combat pour priver l'Etat de certaines recettes... Seuls les moyens diffèrent : à Genève, on va se priver de recettes liées à la vente de carburants, alors qu'en France Jospin, Voinet, Cohn-Bendit, eux, suppriment l'impôt auto, Mesdames et Messieurs les députés ! On peut toujours rêver au jour où les roses/verts ne parleront plus la langue de bois sur les problèmes européens !
Dans son rapport de minorité dont les auteurs et les réalisateurs éventuels de ce projet ne renieraient pas la paternité, M. Dessimoz cite mieux que quiconque la liste de tous les avantages que procurerait cette réalisation. Et même si la majorité ne veut pas de ce projet, qui est peut-être gourmand en terres agricoles - je vous le concède - Genève n'a pas le droit d'abandonner purement et simplement l'idée d'un restoroute sur son territoire ! (Applaudissements.)
M. René Koechlin (L). Une fois de plus - je le disais déjà hier, permettez-moi de me répéter - l'Alliance de gauche et les Verts...
Des voix. Et les socialistes !
M. René Koechlin. ...suivis docilement - une fois n'est pas coutume - par les socialistes, s'opposent à un projet porteur pour Genève après la halle 6, le stade de la Praille, la place des Nations, l'aéroport, le parking de la Place-Neuve - et j'en passe - et, antérieurement, lors de la précédente législature, le siège de Reuters à la Pallanterie... Vous étiez contre, naturellement ! (Rires et exclamations.) Je ne vais pas vous citer tous les projets auxquels vous vous êtes opposés : j'en aurais pour la soirée ! Je vous fais donc grâce de tous les autres et de tous ceux qui viendront, car nous devons encore en examiner en commission - auxquels vous vous opposerez bien sûr, avec des motifs que je qualifierai de «surfaits» ! Aujourd'hui, c'est au tour de l'aire autoroutière de Bardonnex de passer à la trappe... Dont acte !
Je vous pose la question suivante, mais n'y répondez pas ce soir parce que vous n'en seriez pas capables : il faut d'abord que vous réfléchissiez un peu - pour une fois ! (Rires.) Quels projets proposez-vous ? En existe-t-il un seul ? Un tout petit ? Un tout petit truc ? Au moins un petit quelque chose ? Non ! Rien ! C'est le néant le plus total, parce que vous êtes incapables de proposer un projet pour Genève ! C'est quelque chose qui vous échappe, qui vous est complètement étranger, n'est-ce pas ! (Rires.) Et quand d'autres s'évertuent à vous en présenter, vous les rejetez avec dédain, à coup d'arguments surfaits, comme je le disais tout à l'heure.
Monsieur Etienne, vous disiez - vous qui vous opposez à ce projet - qu'il fallait préserver ces 4 hectares de terres agricoles idylliques, magnifiques, qui méritent d'être sauvegardés à tout prix ! Puis, un peu plus tard - en parlant du projet cette fois - vous disiez qu'il ne pouvait en tout cas pas constituer une porte pour Genève, coincé qu'il est - c'est le terme que vous avez utilisé - entre une aire douanière et une zone artisanale, donc sur un site ridicule, qui ne vaut rien puisqu'il est «coincé» entre une aire autoroutière et une aire artisanale ! Alors, ce site vaut-il la peine d'être sauvegardé parce qu'il est magnifique ou est-il «coincé»... (Rires.) ...entre deux secteurs et il ne mérite même pas qu'on en parle ? (L'orateur est interpellé par M. Etienne.) Mais c'est vous qui l'avez dit, Monsieur Etienne ! Alors, il faudrait savoir !
Naturellement, lorsqu'il s'agit de saper, les pires arguments sont bons... Et ce soir, les députés des bancs d'en face développent des arguments qui sont tous mauvais... Evidemment, ils estiment qu'ils sont bons et qu'ils justifient leur refus. Tant pis !
Parce que vous avez la majorité, ce projet de loi sera refusé, et nous verrons bien ce qu'il adviendra. Moi, j'imagine que Elf va mener une action en dommages et intérêts - d'ailleurs, leur avocat l'a dit tout à l'heure - contre le Conseil d'Etat qui, à mon avis, n'est plus crédible à ses yeux. En effet, après tous les engagements que ledit Conseil d'Etat a pris et toutes les promesses qu'il a faites... (L'orateur est interpellé par M. Grobet.) Joye... Et alors, Monsieur Grobet, vous croyez que lorsque vous étiez conseiller d'Etat on ne prenait pas vos promesses au sérieux ? Ça ne vaut rien, les promesses d'un conseiller d'Etat ? (Exclamations.) Vous venez de le dire à l'instant, si j'ai bien compris ! Dont acte, Mesdames et Messieurs : les promesses du Conseil d'Etat, ça ne vaut pas pipette ! Qu'on se le dise dans cette République et qu'on le dise à tous les étrangers qui essayent de réaliser un projet d'une certaine importance dans notre canton, pour son bien ! Qu'on le sache ! En ce qui me concerne, je vous assure que j'irai le dire ! (L'orateur est interpellé.) Oui, nous commençons à en avoir assez de vos oppositions perpétuelles ! Ça n'empêche que j'ai des amitiés sur les bancs d'en face ! (Eclats de rire.) Par exemple, je ne suis jamais d'accord avec Spielmann...
Une voix. De temps en temps !
M. René Koechlin. Jamais ! ...mais je le trouve sympathique et j'ai une certaine amitié pour lui. D'ailleurs, c'est une des grandes leçons que j'ai retenues de ce Grand Conseil : je me suis rendu compte qu'il y a des types avec lesquels je ne suis jamais d'accord, mais que je trouve, malgré moi, sympathiques ! C'est gênant ! (Rires.) La relation affective n'a rien à voir avec la relation idéologique : c'est la conclusion !
Cela dit, la procédure que va mener Elf durera un certain temps, et nous reviendrons proposer un autre projet dans une année, Mesdames et Messieurs ! (Applaudissements.)
Mme Anita Frei (Ve). Mon préopinant a mis le turbo, je fonctionnerai avec une énergie un peu plus douce et plus brièvement.
Décidément, la voiture, dans les débats du Grand Conseil comme sur le territoire genevois, occupe une place considérable, je dirai même excessive... Les 46 000 m2 de zone agricole à déclasser pour construire une aire autoroutière, aussi architecturalement séduisante soit-elle, sont certainement excessifs. On a déjà sacrifié des kilomètres carrés à l'autoroute de contournement, creusé une saignée irrémédiable à travers la campagne genevoise, construit une gigantesque plate-forme douanière, mais tout cela ne suffit pas ! Non, Mesdames et Messieurs les députés, Genève doit avoir son aire autoroutière ! (Exclamations et bravos.) Notre petit canton doit avoir son aire autoroutière, il ne suffit pas qu'il y en ait une juste avant et une juste après !
Et le seul moyen d'être rentable pour un restoroute, c'est d'attirer un maximum d'automobilistes. Est-ce vraiment là ce que nous voulons infliger aux riverains ? Est-ce vraiment ce que l'on souhaite pour Genève où les normes OPB et OPair sont dépassées année après année ? Est-ce vraiment là un idéal de grand projet pour Genève ?
Les Verts sont fermement opposés à un déclassement de la zone agricole pour y construire une aire autoroutière. Nous refusons le bétonnage et l'imperméabilisation d'hectares de terres, car nous défendons un usage mesuré et raisonnable du sol. Ce projet est manifestement et scandaleusement dispendieux et inutile ! Les Verts s'opposent donc, par principe, au déclassement proposé, même pour un projet aussi beau que celui de M. Santiago Calatrava... Nous préférons M. Calatrava quand il construit des gares ! (Rires et applaudissements.)
La présidente. Mesdames et Messieurs les députés, il est 19 h. Nous arrêtons nos travaux que nous reprendrons à 20 h 30. Sont d'ores et déjà inscrits : MM. Grobet, Vaucher, Beer et Brunier. Je vous souhaite un bon appétit.
La séance est levée à 19 h.