République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 14 décembre 2000 à 17h
54e législature - 4e année - 3e session - 60e séance
PL 8398
Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :
Article 1
La loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977, est modifiée comme suit :
Art. 10 Constitution et buts (nouvelle teneur)
1 La fondation de droit public, nommée "Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif" (ci-après la Fondation), est créée afin de développer le parc de logements d'utilité publique dans le canton.
2 La Fondation poursuit notamment les buts suivants :
3 La fondation est déclarée d'utilité publique. Elle est exonérée de tout impôt cantonal et communal sur le bénéfice, le capital, et la liquidation, ainsi que sur l'impôt immobilier complémentaire, de l'impôt sur les gains immobiliers, des droits d'enregistrement et de la taxe professionnelle communales.
4 Son siège est à Genève.
5 Le Grand Conseil approuve ses statuts et leurs éventuelles modifications.
6 La Fondation présente un rapport d'activité annuel au Grand Conseil.
Art. 11 Fortune (nouvelle teneur)
1 La fortune de cette fondation est constituée, partiellement ou totalement, par des dotations de l'Etat ou des communes ; elle est indépendante de celle de la collectivité publique qui l'a dotée.
2 La dotation peut consister dans l'octroi de crédits ou dans la cession à titre gratuit de terrains ou d'immeubles.
3 Le capital initial de dotation de la fondation, attribué par le Conseil d'Etat, s'élève à 30'000'000.- F, dont la moitié au minimum en espèces.
Art. 11A Garantie des emprunts (nouveau)
Le Conseil d'Etat est autorisé à garantir, au nom de l'Etat, les emprunts de la fondation.
Art. 12 Ressources (nouvelle teneur)
Les ressources de la fondation sont constituées par :
Art. 13 Administration (nouvelle teneur)
1 La Fondation est administrée pour une durée de 4 ans, par un conseil désigné comme suit par le Conseil d'Etat ;
2 Le Conseil d'Etat peut désigner des représentants de services de l'Etat avec voix consultative pour siéger aux séances du Conseil de fondation.
Art. 13A Mise à disposition des terrains et immeubles (nouveau)
1 Un minimum de 70% des terrains et immeubles mis à disposition en droit de superficie par la Fondation le sera, à parts égales, aux fondations immobilières de droit public et aux coopératives d'habitation sans but lucratif.
2 Le droit de superficie est octroyé aux conditions suivantes :
Art. 13B Coopératives bénéficiaires (nouveau)
La fondation ne peut conclure des contrats de droit de superficie, au sens des articles 779 et ss du Code Civil, avec des coopératives d'habitation que si celles-ci répondent aux conditions suivantes :
Art. 14 Surveillance
La gestion de la fondation est placée sous la surveillance du Conseil d'Etat, lequel approuve son budget et ses comptes.
Article 2 Entrée en vigueur
La présente loi entre en vigueur le lendemain de la publication de l'arrêté de promulgation.
Article 3 Dissolution de la Fondation Cité-Nouvelle
1 Dans les six mois à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi, le Conseil d'Etat doit procéder à la dissolution de la Fondation Cité-Nouvelle.
2 Ses actifs et passifs sont transférés à la Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif.
ANNEXE
STATUTS
de la Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif
TITRE I
DISPOSITIONS GENERALES
Art. 1 Objet
1 La Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif (ci-après la fondation) instituée par l'article 10 de la loi générale sur le logement et la protection des locataires, du 4 décembre 1977 (ci-après la loi), a pour objet :
2 La fondation agit de son propre chef ou mandatée par le Conseil d'Etat ou toute autre collectivité ou institution publique
Art. 2 Siège
Le siège de la fondation est dans le canton de Genève, au lieu où se trouvent ses bureaux administratifs.
La durée de la fondation est indéterminée.
Art. 4 Surveillance
La fondation est placée sous la surveillance du Conseil d'Etat. Le budget, le bilan, les comptes et le rapport de gestion sont soumis chaque année à son approbation.
TITRE II
CAPITAL DE LA FONDATION
Art. 5 Capital et ressources
1 Le capital initial de la fondation est de F 30'000'000.-. Il comprend le fonds ordinaire et la dotation immobilière de l'Etat.
2 Le fonds ordinaire est constitué par :
3 La dotation immobilière de l'Etat comprend les immeubles dont la propriété est transférée par ce dernier à la fondation.
TITRE III
DROIT DE DISPOSITION
ET REPRESENTATION
Art. 6 Droit de disposition
1 La fondation a le droit de disposer, dans les limites de l'article 80 A de la Constitution et des présents statuts, des immeubles et droits de superficie inscrits à son nom au registre foncier.
2 Elle peut donner à bail ou grever de droits de superficie distincts et permanents, au sens de l'article 779 alinéa 3 du code civil, les immeubles dont elle est propriétaire et, avec l'accord du propriétaire, ceux dont elle est superficiaire.
3 Elle peut contracter des emprunts, grever ses immeubles de droits de gage, d'autres droits réels restreints ou de droits personnels.
4 Elle peut procéder au nantissement de parts sociales de coopératives d'habitation.
Art. 7 Représentation
La fondation est valablement représentée et engagée envers les tiers par la signature collective de deux membres du conseil de fondation ou par la signature de l'un d'entre eux avec celle du directeur.
TITRE IV
DROITS DE SUPERFICIE
OCTROYES PAR LA FONDATION
AUX COOPERATIVES D'HABITATION
Art. 8 Eléments essentiels
1 La fondation ne peut conclure des contrats de droit de superficie, au sens des articles 779 et ss du Code Civil, avec des coopératives d'habitation que si celles-ci répondent aux conditions suivantes :
2 Les contrats de superficie conclus par la fondation doivent revêtir la forme authentique et contenir les dispositions essentielles prévues aux articles 8 à 14 des présents statuts.
Art. 9 Durée et renouvellement
1 La durée du droit de superficie est de 99 ans au plus.
2 Cinq ans avant l'échéance du droit, les parties doivent s'avertir de leurs intentions quant à son renouvellement éventuel. Si elles le désirent, les parties peuvent prolonger le droit de superficie pour une nouvelle période de trente ans au maximum. La même procédure et les mêmes délais s'appliquent en cas de renouvellements ultérieurs.
3 La prolongation du droit de superficie fait l'objet d'un acte authentique inscrit au registre foncier.
Art. 10 Cessibilité
1 Le droit de superficie n'est cessible, avec accord du Conseil d'Etat, qu'à un autre bénéficiaire au sens de l'article 10 lettre c) de la loi.
2 La fondation peut refuser son accord :
Art. 11 Contrat de droit de superficie
A l'égard des coopératives, la fondation utilise le “ contrat type de droit de superficie ” édité par l'Association Suisse pour l'Habitat (ASH), dans le respect du chapitre II BIS de la loi générale sur le logement et du titre IV des présents statuts.
Art. 12 Retour anticipé
Si le superficiaire excède gravement sont droit réel ou viole gravement des obligations contractuelles, pour les coopératives, si elles ne remplissent plus les conditions de l'art. 8 des présents statuts, la Fondation peut provoquer le retour anticipé en demandant le transfert à son nom du droit de superficie avec tous les droits et charges qui y sont rattachés.
Art. 13 Tribunal arbitral
1 Les différends qui surgissent entre la fondation et un superficiaire à propos de la validité, de l'interprétation ou de l'exécution des contrats sont tranchés en instance unique par trois arbitres nommés conformément aux alinéas 2 et 3.
2 Chacune des deux parties désigne un arbitre; le troisième, qui a la fonction de président, est désigné par le président de la Cour de justice de Genève et choisi parmi les juges ou anciens juges du Tribunal de première instance, de la Cour de justice de Genève ou du Tribunal fédéral.
3 Si l'une des parties ne désigne pas son arbitre dans les dix jours qui suivent une sommation écrite de la partie la plus diligente, cet arbitre est également désigné par le président de la cour de justice de Genève et la nomination est réputée faite par la partie défaillante.
4 Le Tribunal arbitral se conforme aux règles du titre XXVII de la loi genevoise de procédure civile.
Art. 14 Tribunaux ordinaires
Les tribunaux ordinaires connaissent des différends qui surgissent entre la fondation et un superficiaire dans le seul cas de retard dans le paiement de la rente de superficie.
TITRE V
ORGANES DE LA FONDATION
CHAPITRE I
Conseil de fondation
Art. 15 Composition
1 Le Conseil de fondation se compose :
2 Les représentants doivent être choisis en fonction de leurs compétences et pratiques dans le domaine.
3 Les membres du conseil sont soumis à la loi concernant les membres des commissions officielles (A 2 20)
Art. 16 Responsabilité
Les membres du conseil sont personnellement responsables envers la fondation, l'Etat et les tiers des dommages qu'ils causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs.
Art. 17 Révocation
Le membre du conseil qui n'a pas assisté aux séances du conseil de fondation pendant six mois est réputé démissionnaire de plein droit. Le Conseil d'Etat peut révoquer le mandat des membres du conseil de fondation en tout temps pour de justes motifs. Il y a lieu, en particulier, de considérer comme de justes motifs le fait que, pendant la durée de ses fonctions, le membre du conseil s'est rendu coupable d'un acte grave, a manqué à ses devoirs ou est devenu incapable de bien gérer.
Art. 18 Remplacement
Il est pourvu au remplacement des membres du conseil décédés, démissionnaires ou révoqués par l'autorité qui les a désignés avant la fin de leur mandat. Un administrateur révoqué n'est pas rééligible.
Art. 19 Durée des fonctions
Les membres du conseil de fondation sont nommés en principe pour quatre ans et sont indéfiniment rééligibles; toutefois le mandat des Conseillers d'Etat prend fin à l'expiration de leur fonction publique.
Art. 20 Rémunération
Les membres du conseil sont rémunérés par jetons de présence dont le montant est fixé par le Conseil d'Etat.
Art. 21 Présidence et vice-présidence
1 Au début de chaque période de quatre ans et pour la durée de cette période, le conseil de fondation désigne son président, son vice-président et son secrétaire, qui sont rééligibles.
2 Le président et le vice-président sont choisis parmi les membres du conseil de fondation, tandis que le secrétaire peut être choisi en dehors de son sein.
Art. 22 Règlement interne
Le conseil de fondation détermine par un règlement interne l'ordre de travail, l'organisation de sa gestion et de sa surveillance.
Art. 23 Séances
1 Le conseil de fondation se réunit aussi souvent que l'intérêt de la fondation l'exige, mais au moins quatre fois l'an. Il doit être convoqué en tout temps à la demande d'au moins cinq de ses membres ou du Conseil d'Etat.
2 Le conseil ne délibère valablement que si la majorité de ses membres sont présents. Si cette condition n'est pas remplie, une nouvelle séance est convoquée, dans laquelle le conseil délibère valablement quel que soit le nombre des membres présents.
3 Les décisions sont prises à la majorité des membres présents. Pour être acceptée, une proposition doit obtenir la majorité des voix des membres présents, abstentions comprises. En cas d'égalité des voix, le président départage.
4 Les délibérations sont constatées dans un procès-verbal, signé par le président et par le secrétaire ou par les personnes ayant rempli ces fonctions.
Art. 24 Compétences et attributions
Le conseil de fondation est l'autorité supérieure de la fondation. Il a les attributions suivantes :
Art. 25 Délégation
Le conseil de fondation peut déléguer certaines de ses compétences ou une partie de ses pouvoirs à l'un ou plusieurs de ses membres, sous forme de mandat général ou spécial, qui doit être mentionné dans les procès-verbaux.
CHAPITRE II
Organe de contrôle
Art. 26 Contrôle
1 Sous réserve de la compétence du contrôle financier cantonal et de l'accord du Conseil d'Etat, le conseil de fondation confie chaque année la vérification des disponibilités et le contrôle des comptes à une société fiduciaire ou à des experts-comptables étrangers à la gestion de la fondation. Cet organe de contrôle établit chaque année un rapport écrit qui est soumis au conseil de fondation. Il est tenu d'assister à la réunion du conseil de fondation au cours de laquelle son rapport est examiné.
2 L'organe de contrôle ne peut communiquer les constatations faites par lui dans l'exécution de son mandat qu'à des membres du conseil de fondation, des Conseillers d'Etat ou leurs délégués, et aux agents du contrôle financier cantonal.
TITRE VI
FINANCES ET COMPTABILITE
Art. 27 Comptabilité
1 La fondation doit posséder une comptabilité adaptée à la nature et à l'étendue de ses affaires.
2 Sous réserve de la compétence du contrôle financier cantonal, le conseil de fondation peut confier l'organisation et la tenue de la comptabilité à une société fiduciaire ou à un expert dont le mandat est annuel et renouvelable.
Art. 28 Bilan
1 Le capital de la fondation, divisé en fonds ordinaire et dotation immobilière de l'Etat, est porté au passif du bilan.
2 Figurent également au passif du bilan :
3 Les terrains constituant la dotation immobilière de l'Etat sont portés à l'actif du bilan.
Art. 29 Durée de l'exercice
L'exercice administratif et comptable est annuel. Le bilan et le compte de pertes et profits sont arrêtés à la date du 31 décembre.
Art. 30 Répartition des excédents
Les prélèvements suivants sont effectués sur les excédents bruts réalisés après paiement des frais de fondation, d'exploitation et d'entretien et des charges financières, dans l'ordre de leur énumération et à concurrence des disponibilités :
Art. 31 Amortissements
La fondation doit amortir ses aménagements, ses constructions, ses installations, son matériel et son mobilier selon les règles d'une prudente gestion.
TITRE VII
MODIFICATIONS DES STATUTS -
DISSOLUTION
Art. 32 Modifications des statuts
Les modifications des présents statuts doivent être approuvées par le Grand Conseil.
Art. 33 Dissolution
1 Le Grand Conseil peut prononcer la dissolution de la fondation et déterminer le mode de liquidation; dans ce cas, le patrimoine de la fondation est dévolu à l'Etat de Genève.
2 La nomination des liquidateurs met fin au pouvoir du conseil de fondation et des mandataires qu'il a constitués.
TITRE VIII
PUBLICATIONS
Art. 34 Publications
Les publications concernant la fondation sont faites dans la “ Feuille d'avis officielle du canton de Genève ”.
L'objectif du projet de loi qui vous est soumis est de favoriser le développement du logement à bon marché et de l'habitat coopératif par la constitution d'une fondation spécialisée dans l'achat de terrains et d'immeubles en vue de les céder principalement à des fondations immobilières de droit public et à des coopératives d'habitation respectant certains critères.
A vrai dire, l'établissement d'une fondation de ce type est prévu depuis de nombreuses années dans la Loi générale sur le logement. Cette loi, approuvée par le peuple genevois en 1977, prévoit en effet explicitement que le Grand Conseil peut créer, sur proposition du Conseil d'Etat, une fondation de droit public destinée à faciliter l'utilisation et la mise en valeur des terrains acquis pour la construction de logements d'utilité publique. Cependant, cette fondation de droit public n'a jamais été créée, faute de volonté politique.
Cette fondation sera l'instrument d'une politique sociale du logement s'appuyant sur les acteurs publics et privés qui assureront le développement de logements bon marché ou répondant aux besoins prépondérants de la population à court, moyen et long termes.
Cet instrument est absolument indispensable. La construction de 3000 nouveaux HBM acceptée par le peuple n'est toujours pas réalisée. Au 31 décembre 1998, on ne comptait que 4472 HBM, représentant le 2.2 % seulement du parc de logement.
Outre les réticences exprimées par les communes concernées, l'obstacle principal sur lequel butte la réalisation des opérations HBM est le manque de terrains à bâtir à disposition. La création de la Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif doit, dans l'esprit des auteurs de ce projet de loi, contribuer à surmonter cet obstacle.
Nous n'entendons pas en revanche que cette fondation se substitue intégralement aux pouvoirs publics. Le Conseil d'Etat continuera, dans le cadre des autorisations d'emprunt qui lui sont périodiquement allouées par le Grand Conseil, à faire l'acquisition des terrains de tous genres (zone industrielle, zones internationales, routes, logements).
Le rôle capital des coopératives d'habitation dans la politique sociale du logement a enfin été pris en compte depuis le début de la législature. Dans son Discours de Saint-Pierre (1997), le Conseil d'Etat a annoncé qu'il entendait donner aux « coopératives et autres bailleurs sans but lucratif les moyens d'une action énergique ». De son côté, le Grand Conseil a adopté un projet amendé de motion des Verts (M 1092) invitant le Conseil d'Etat à élaborer un véritable plan d'action en faveur des coopératives prévoyant notamment la mise à disposition par l'Etat et les autres collectivités publiques de terrains ou immeubles en droit de superficie.
Parallèlement, près d'une quinzaine de coopératives d'habitation se sont regroupées au sein du Groupement des coopératives d'habitation genevoises. Elles ont adopté une « Charte éthique » qui comprend des engagements concernant la qualité des logements mis sur le marché dans le domaine de l'habitabilité, de l'optimisation des coûts de construction et des économies d'énergie.
Rappelons qu'en 1990 (ce sont les dernières données statistiques disponibles) les coopératives d'habitations possédaient 6248 logements occupés par 14'365 habitants. Par rapport aux cantons de Zurich et de Bâle-Ville, la part des logements coopératifs était relativement faible, 3.8 % contre respectivement 9.1 % et 9.7 % dans les deux grands cantons urbains de Suisse alémanique.
L'intérêt qu'il y aurait à augmenter cette proportion a été mis en évidence dans une brochure publiée par l'Observatoire du logement en 1998 : « En mai 1997, pour des logements construits en 1947 et 1960, le loyer mensuel moyen atteint 505 F dans les coopératives d'habitation et 820 F pour les locataires du secteur libre. De même pour les logements construits entre 1961 et 1970, le loyer mensuel atteint respectivement 597 et 934 F ».
Pendant la période de contrôle, la différence des loyers n'est pas considérable. En revanche, il est maintenant clairement établi qu'à la sortie du contrôle, les loyers des logements construits par les coopératives d'habitation augmentent nettement moins rapidement que ceux détenus par d'autres investisseurs. Ceux-ci entendent obtenir un bon rendement sur leur investissement, supérieur aux taux hypothécaires. Les coopératives d'habitations n'ont pas besoin de rémunérer leurs fonds propres. Sous le double effet des amortissements du prêt hypothécaire et de l'érosion de l'inflation, même modeste, la valeur en francs constants des loyers diminue régulièrement.
La même somme investie par les pouvoirs publics dans des subventions destinées à des opérations réalisées par des coopératives, permet le maintien de logements à loyers très raisonnables pour une période au moins cinq fois plus longue que dans le cadre des opérations réalisées par des investisseurs privés.
Aujourd'hui, le principal frein au développement des coopératives d'habitation est la difficulté d'acquérir des terrains. La reprise économique actuelle risque d'ailleurs d'aggraver ces difficultés. Pour les jeunes coopératives, il est en effet très difficile de réunir les fonds propres avant de disposer d'un terrain ou d'un immeuble. Il leur est donc à peu près impossible d'acheter des terrains lors des ventes aux enchères ou de concurrencer des opérateurs privés lorsque le propriétaire désirant vendre son bien souhaite conclure rapidement. Pour l'acquisition de terrains ou d'immeubles, les coopératives sont donc largement dépendantes de la bonne volonté des pouvoirs publics.
Le but de ce projet de loi est de faciliter l'extension du parc des logements HBM et des coopératives d'habitation en développant une structure autonome qui a pour mission unique d'acquérir des terrains et des immeubles pour les céder en droit de superficie.
La fondation restera propriétaire du sol et encaissera un « loyer » (rente). La coopérative ou la fondation immobilière de droit public sera en revanche propriétaire des bâtiments qu'elle aura réalisés.
La fondation sera dotée d'un capital de 30 millions, dont la moitié au moins en espèces et le reste en immeubles ou en terrains.
En ce qui concerne la mise à disposition des terrains à des coopératives d'habitation, le projet de loi et les statuts proposés pour cette Fondation contiennent de très sérieux garde-fous pour éviter que les terrains mis à disposition puissent être détournés de leur fonction.
Le projet de loi prévoit la présence au sein du Conseil de la fondation, des représentants du mouvement coopératifs et des fondations immobilières de droit public. S'il est indispensable en effet que les pouvoirs publics et les différents courants représentés Grand Conseil fassent partie du Conseil, il est non moins important, pour éviter des dérives bureaucratiques, que les premiers concernés aient voix au chapitre.
Pour éviter une prolifération des structures et parvenir à un organigramme fondé sur une claire répartition des tâches entre les différents acteurs de la politique du logement social, le projet de loi propose la suppression de la Fondation Cité-Nouvelle et la reprise de ses actifs et de ses passifs par la Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif.
Créée en 1960, Cité-Nouvelle est une fondation de droit privé dont le but est de mettre ou d'aider à mettre à disposition des logements à loyer modéré. Contrairement à la Fondation que nous proposons, son activité n'est pas clairement délimitée. Cité-Nouvelle a réalisé plusieurs milliers de logements et s'est impliquée dans des opérations « délicates » sur demande du Conseil d'Etat, notamment pour soutenir la construction ou sauver des opérations en déconfiture. Il s'est créé au fil des ans un imbroglio total sur le rôle respectif de la Fondation Cité-Nouvelle et de l'Etat, sur les biens immobiliers de l'une et l'autre. Cette situation a d'ailleurs été soulignée par l'audit Arthur Andersen et le rapport de la Commission externe d'évaluation des politiques publiques sur le logement social (CEEPP).
Depuis le début de la présente législature, un important travail de redéfinition des objectifs a eu lieu. La réorganisation administrative et la clarification des rapports financiers entre la Fondation Cité-Nouvelle et l'Etat ont été entreprises et sont sur le point d'aboutir. Ainsi, Cité-Nouvelle devrait disposer d'une situation à peu près saine et la reprise de ses actifs et de ses passifs par la nouvelle fondation ne devrait pas constituer un fardeau financier.
Nous avons la possibilité de mettre en chantier la politique sociale du logement de demain. Ayant tiré les leçons de l'expérience, nous connaissons tous les limites du système actuel et nous savons comment corriger le tir, en privilégiant les organismes à but non lucratif. C'est une occasion à ne pas manquer et c'est dans cet esprit, Mesdames et Messieurs les députés, que nous vous prions de faire bon accueil à ce projet de loi.
Ce projet de loi est composé de deux parties et d'une annexe. La première partie (Article 1) complète et modifie les articles 10 à 14 de la Loi générale sur le logement et la protection des locataires (I 5 1) en vue de la création de la Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif. La deuxième partie (Article 2) précise que la fondation créée à l'article 1 remplace l'actuelle Fondation Cité-Nouvelle et définit les modalités d'exécution. L'Annexe à ce projet de loi est constituée des statuts de la Fondation pour la promotion du logement bon marché et de l'habitat coopératif.
La nouvelle teneur de l'art. 10 LGL concrétise l'objectif de l'actuelle disposition en créant une fondation de droit public appelée à développer le parc de logements d'utilité publique dans le canton.
L'alinéa 2 définit les buts de cette fondation. Elle devra notamment acquérir des terrains ou des immeubles permettant la création de logements à loyers bon marché (let. a), préparer les terrains à leur destination finale en collaborant à l'aménagement des quartiers (let. b), mettre ces terrains et immeubles en droit de superficie à des organismes publics et privés sans but lucratif (let. c), exceptionnellement et à la demande de leurs bénéficiaires construire ou rénover les immeubles avant de les remettre en droit de superficie (let. d), favoriser le développement de coopératives d'habitation (let. e) et assumer toute autre tâche relative à son objet que lui confient le Conseil d'Etat ou d'autres collectivités publiques (let. f).
Cette fondation est déclarée d'utilité publique et, à ce titre, est exonérée des charges fiscales relatives à son activité.
Les statuts de la fondation, annexés à la présente loi, seront approuvés par le Grand Conseil en même temps que celle-ci. Les modifications de ces statuts, qui définissent les grandes lignes du fonctionnement de la fondation, devront également être approuvées par le Grand Conseil.
Le Grand Conseil pourra suivre annuellement l'évolution de cette fondation à l'aide des rapports d'activités qui lui seront présentés.
L'Etat et les communes peuvent participer à la fortune de la fondation par des dotations (al. 1), soit au moyen d'octroi de crédit, soit par la cession à titre gratuit de terrains ou d'immeubles (al. 2).
Afin d'être en mesure de mener à bien, dès sa création, sa politique d'acquisition de terrains (art. 10, al. 1 let. a) et d'assurer son fonctionnement, la fondation est dotée d'un capital initial de 30 millions, dont au moins la moitié, en espèce, devra lui permettre d'intervenir sur le marché de l'immobilier, le restant de la dotation pouvant être constitué de terrains ou d'immeubles attribués par le Conseil d'Etat à la fondation (al. 3).
La fondation pourra recourir à l'emprunt pour réaliser ses buts. La garantie de l'Etat sur ces emprunts permettra de réduire les charges financières et, en bout de course, les loyers proposés à la population.
Cette disposition, définissant les ressources de la fondation, reprend le contenu de l'actuel art. 12 LGL. Elles seront principalement constituées du produit des rentes versées par les bénéficiaires des droits de superficie mis à disposition par la fondation, de subventions, de dons et legs.
Les larges objectifs de cette fondation appellent la constitution d'un conseil de fondation opérationnel pouvant bénéficier de l'apport des compétences de chacun de ses membres. Autour d'un conseiller d'Etat, le conseil de fondation réunira un membre par parti représenté au Grand Conseil et nommé par celui-ci, ainsi qu'un nombre équivalent de membres nommés par le Conseil d'Etat dont deux représentants des Fondations immobilières de droit public et deux représentants du Groupement des coopératives d'habitation genevoises.
La formation de ce conseil vise à instituer une coordination entre les acteurs de la politique sociale du logement, et ce au niveau du foncier déjà, en regroupant l'exécutif (le Conseil d'Etat - al. 1, let. a - et les services de l'administration concernés - (al. 3), l'approche politique (al. 1, let. b) et les forces à même de réaliser les projets (al. 1, let. c).
Cet alinéa définit les partenaires privilégiés de la fondation (les fondations immobilières de droit public et les coopératives d'habitation). Les terrains à disposition de la fondation seront remis, à parts égales, en droit de superficie à ces partenaires (35 % à chacun au minimum), le surplus pouvant être réparti entre les bénéficiaires mentionnés à l'art. 10, al.2 let.c en fonction des besoins prépondérants de la population et des opportunités.
Selon la let. a, les terrains mis en droit de superficie par la fondation ne pourront bénéficier qu'aux destinataires prévus à l'art. 10, al.2 let.c. De plus, le Conseil d'Etat devra donner son accord à la cession d'un droit de superficie d'un bénéficiaire à un autre.
Une durée maximale de 99 ans est appliquée au droit de superficie (let. b), des prolongations d'un maximum de 30 ans pourront être accordées (let. c), d'entente entre les parties.
Les coopératives d'habitation étant des sociétés privées n'ayant pas toutes vocation à réaliser du logement d'utilité publique, il a paru nécessaire de définir le cadre minimal dans lequel devaient agir les coopératives visées par la présente loi.
Pour pouvoir bénéficier d'un droit de superficie de la fondation, les coopératives devront donc poursuivre des activités sans but lucratif (let. a), remettre leurs appartements en location à leurs coopérateurs (la PPE étant exclue) (let. b), racheter obligatoirement les parts sociales à leurs membres (il n'y a donc pas d'échange de parts sociales d'un coopérateur à un autre, ce qui tend à éviter les dessous de table), et ce à leur valeur nominale (les fonds propres amenés par le coopérateur ne portent pas d'intérêt durant son séjour dans la coopérative) (let. c), procéder à l'attribution des appartements au moyen d'une commission à laquelle ne peuvent participer ni le coopérateur sortant ni l'habitant entrant (pour éviter les « pas-de-porte ») et selon une liste d'attente (la coopérative pouvant choisir dans une liste ouverte le futur coopérateur) (let. d).
Cet article reprend la teneur de l'actuel article 14 LGL qui confie au Conseil d'Etat la surveillance de la gestion de la fondation.
Cet article précise que l'actuelle Fondation Cité-Nouvelle, vouée à être remplacée par la fondation décrite sous l'article 1 du présent projet de loi, doit être dissoute dans les six mois par le Conseil d'Etat (al. 1). Les actifs et passifs de la Fondation Cité-Nouvelle seront transférés à la Fondation pour la promotion du logement et de l'habitat coopératif. Ce transfert n'entamera toutefois en rien le capital initial de dotation de cette fondation.
Personne ne demande la parole en préconsultation.
Ce projet est renvoyé à la commission du logement.