République et canton de Genève

Grand Conseil

PL 8218-A
11. Rapport de la commission des finances chargée d'étudier le projet de loi du Conseil d'Etat ouvrant un crédit d'investissement de 7 343 775 F pour la police nécessaire au projet POLICE2000 «Informatisation du journal et des rapports avec l'intégration des informations dans la base de données». ( -) PL8218Rapport de M. Christian Grobet (AG), commission des finances
Mémorial 2000 : Projet, 2196. Renvoi en commission, 2237.
Rapport de Mme Salika Wenger (AG), commission des finances

MM. R. Rebord, chef de la police et directeur de projet, G. Praz, directeur de l'OPSI, représentant du DJPT au directoire du projet, ont accompagné nos travaux durant la commission du 14 juin 2000, présidée par M. Lescaze. Mme Monin était la procès-verbaliste de cette commission et nous la remercions de son travail toujours irréprochable.

Préavis de la sous-commission informatique, par M. Hausser, président

La sous-commission informatique a eu une information précise sur l'investissement en matériel, équipement, logiciels, temps de travail, ainsi que les raisons de la solution technique retenue, sous la forme d'un appel d'offre soumis aux règles AIMP. Les initiateurs du projet ont été les premiers à s'être lancés dans ce type d'opération et ils ont bénéficié de l'appui de l'ICF. Leur dossier, avec de nombreuses annexes, permet de comprendre pourquoi la solution technique Siemens - et non pas Bull - a été retenue, parce qu'elle répondait aux critères de l'appel d'offre et qu'elle était compatible avec les normes et standards définis par l'Etat. Comme dans le projet IJUGE-2001, on s'aperçoit clairement que la collaboration entre les utilisateurs de la police et le CTI est réelle. Il y a une logique pour rationaliser le nombre de saisies d'écritures, non seulement à l'intérieur du service de police, entre les postes de police et le central, mais également avec la justice de manière à ce qu'un dossier passe directement à ceux qui vont l'utiliser.

Audition de M. Rebord

La police en chiffres

C'est un budget de 240 millions de francs, 88 millions de recettes, soit autofinancé à hauteur d'un tiers, plus de 44'000 infractions annuelles dépassant de 10 % le niveau suisse de 400'000 infractions. Le canton se situe dans un rapport de 5 % si l'on considère le montant de 7 millions pour 400'000 habitants, ce qui signifie aussi un taux de criminalité important à Genève. Le nombre de délits élucidés reste faible et c'est l'un des facteurs déterminants du projet. 23 % des infractions sont des délits élucidés alors que les trois quarts échappent à la police. Les raisons en sont multiples, liées à la frontière mais également aux bases de données peu efficaces qui rendent délicate la recherche criminelle.

La police enregistre 70'000 appels par année sur le 117 pour les urgences et 350 passages de personnalités à risque dans ce qu'on appelle la Genève internationale. De manière informatisée, elle traite 240'000 rapports par année équivalant à 1,2 millions de pages, soit 3'000 par jour. Elle gère également 60'000 documents en tous genres qui sont des réquisitions en provenance du pouvoir judiciaire. Elle effectue sur les différentes bases de données plus de 5,3 millions de transactions annuelles, c'est-à-dire 14'000 transactions par jour, sur son système informatique

Le système actuel

Le système actuel est composé de trois sous-systèmes qui ne sont pas intégrés. Le premier concerne la lutte contre la criminalité qui implique la recherche criminelle. Le deuxième touche à la coordination opérationnelle et gère l'engagement des ressources, 24 heures sur 24, de tous les moyens de la police, types de véhicules, patrouilles disponibles, patrouilles engagées, heure par heure et sur quel événement. Le troisième sous-système, la gestion générale, gère notamment les amendes d'ordre et les contraventions. Ces systèmes se sont surajoutés au fil des années et on pourrait parler de stratification du système informatique de la police. Ils sont tous écrits de manière différente et nécessitent à chaque fois un mot de passe particulier de la part de l'utilisateur qui est confronté à des écrans différents et à des systèmes qui ne se parlent pas entre eux. Pour rechercher une personne, il faut à chaque fois inscrire son nom en totalité dans tous les systèmes subdivisés.

Le futur système

La police souhaite disposer d'un système intégré qui satisfasse aux besoins de gestion des problèmes auxquels elle est confrontée. Pour ce faire, elle s'est basée sur un schéma directeur, élaboré il y deux ans et approuvé par tous les chefs de service. Il inclut pour une grande partie le projet POLICE2000.

Le système futur traite en particulier de la lutte contre la criminalité et prend en compte la totalité des applications police. Il s'agit donc d'un système ouvert sur le monde, sur la Confédération, sur les autres polices suisses, sur les bases de données internes au canton, que ce soit le Palais de justice, la prison, le SAN, l'OCP, voire au-delà des frontières, Europol, Interpol, respectivement Internet.

Le manque d'ouverture actuelle vers l'extérieur est une entrave importante dans la lutte contre la criminalité, que ce soit le crime organisé ou la prévention dans les grandes manifestations, y compris les données gérées par les contrevenants et pour lesquelles il est nécessaire d'aller rechercher des informations.

La solution

La police a cherché une solution métier qui permette d'intégrer les informations saisies à partir du journal des événements au fur et à mesure qu'elles sont annoncées dans un poste, sur la centrale d'engagement ou autre, qu'elles soient ensuite récupérées et utilisées pour l'établissement des rapports. Le travail de la police se fait dans un enchaînement qui aboutit en principe au Palais de justice, respectivement au Parquet du Procureur général. C'est la raison pour laquelle elle souhaite une gestion informatisée des dossiers.

Actuellement, elle dispose encore de dossiers purement manuels avec un répertoire informatique sommaire. Ces dossiers manuels prennent d'ailleurs une telle place qu'ils menacent l'infrastructure même du bâtiment boulevard Carl-Vogt. Le projet vise également à archiver les photos, les empreintes, les objets volés et toutes autres traces utiles au métier de la police.

Le choix

La police a lancé un appel d'offres dans les formes AIMP, comme l'a relevé M. Hausser, qui a abouti, après une procédure contrôlée et supervisée quant à sa méthodologie par l'ICF. L'inspection cantonale des finances ne s'est jamais prononcée sur le choix ou sur le produit mais sur la méthodologie et les procédures. Ses remarques tout au long des différentes étapes qu'il a fallu franchir ont été extrêmement utiles.

Le système retenu offre un avantage manifeste, à savoir qu'il est utilisé déjà par 18 corps de police cantonaux en Suisse auxquels viennent de se rajouter, cette semaine encore, la police de Saint-Gall et le corps des gardes-frontière. Une procédure est en cours dans le canton de Bâle. Le système informatisé en Suisse se base sur trois plates-formes et la grande majorité sur celle du système retenu. Zurich, ville et canton, ont opté pour la solution d'un système étranger qui, depuis cinq ans, ne leur offre aucune satisfaction. Deux cantons romands restent assez isolés dans cette constellation avec un troisième système. La masse critique se situe donc manifestement autour du projet retenu qui a l'avantage aussi de correspondre à une volonté exprimée formellement par la Conférence des commandants et des directeurs de police de Suisse, à savoir de tendre vers une standardisation et à une compatibilité des systèmes techniques, qu'il s'agisse de l'informatique, d'une part, et des télécommunications d'autre part. Pour mémoire, lorsque le canton devra faire face aux importants renforts confédérés annoncés en prévision des événements fin juillet (réunion de l'ONU), on s'apercevra que de nombreux corps de police ont encore des appareils, en matière de transmission, qui ne permettent pas de travailler entre polices. Il faut que le fédéralisme soit utilisé à bon escient dans ce contexte.

Rentabilité

Le projet aura certainement des incidences au niveau des frais d'exploitation générale du futur système, évaluées à deux millions, par rapport aux 236 millions du budget police, soit un rapport de 1 %. Il y aura aussi un gain déterminant de 8 postes budgétaires sur la durée, puisque les collaborateurs, qui font un travail de back-office de codification de types d'infractions et de modus operandi n'auront plus à le faire. En effet, le système intégré interprétera immédiatement le type d'infraction, respectivement le modus operandi. Le projet POLICE2000 est également lié à un projet déposé au niveau du département visant à augmenter l'effectif du personnel administratif de la police de 35 unités pour dégager des gendarmes actuellement affectés à des tâches administratives puisque l'effectif global a été réduit de 150 unités en 10 ans.

Evaluation du projet global

Considérant qu'il s'agit d'un projet d'entreprise, que tout changement est toujours mal perçu et que les collaborateurs y sont en principe réfractaires, la police s'est associée les bons offices du professeur [Colleret], spécialisé dans la réorganisation d'entreprises, qui la guide dans ce changement, lui indique les voies à suivre, les risques et les enjeux, ceci de manière scientifique, selon des procédures d'information et d'évaluation de la perception du système auprès de 400 utilisateurs. Cette opération sera reproduite à plusieurs reprises, pendant l'évolution du projet et jusqu'à sa fin. Elle permettra de voir comment un échantillon standard d'utilisateurs ont perçu le phénomène avant, pendant et une fois qu'il est opérationnel.

Encadrement du projet

Le projet est encadré par une série de groupes de projets et directions de projets. La police a également mis en place un métaplanning qui tient compte de toute la problématique liée à la formation du personnel du corps de police, dans la mesure où il y aura environ 1'300 utilisateurs du système. Cette formation a été évaluée, en se basant sur un coût global de 450 F/jour, à plus de 2 millions de francs. Des périodes de formation sont prévues dès septembre 2001. Quant à la formation des formateurs, elle sera intégrée à l'intérieur de l'entreprise qui bénéficie déjà de techniciens en microinformatique qui soutiennent les utilisateurs tout au long de la journée.

Discussion

La sous-commission informatique a été informée du fait que l'application retenue était déjà implantée dans une quinzaine de cantons, une ou deux villes, ainsi qu'en Allemagne et au Liechtenstein. Une interrogation demeure, liée notamment aux « fiches » qui ont soulevé l'opinion publique dans un passé qui n'est pas très lointain. Le système qui sera implanté à la police est-il susceptible de reconstituer potentiellement une logique de fiches ? Comment la police peut-elle garantir qu'elle n'est pas en train de « ficher » l'ensemble des citoyens, sous prétexte que chaque citoyen est un adversaire potentiel d'une police qui est censée le protéger ?

Il est répondu que la police genevoise n'agit que dans le contexte du droit commun, c'est-à-dire en dehors de toute intention relative à la sphère personnelle des individus, de nature religieuse, éthique, politique ou autre. Le projet POLICE2000 reste dans les limites de cet élément constitutif d'une infraction au sens du droit commun. En ce qui concerne le domaine de la protection de l'Etat, il existe un système informatisé au niveau fédéral, dénommé ISIS, qui n'est pas connecté à la police genevoise et qui en est totalement séparé. La police genevoise ne fait que transmettre, sur demande de l'autorité fédérale, des rapports sur des enquêtes en relation avec la protection de l'Etat, ceci au sens étroit du terme, c'est-à-dire les infractions contre l'Etat fédéral, contre des diplomates ou mettant en cause des fonctionnaires fédéraux et les infractions qui se situent dans le domaine du terrorisme ou de l'espionnage. Ces renseignements font partie intégrante de la banque de données fédérales. La banque de données cantonale n'enregistre que les infractions au sens du droit commun. Tout ce qui est entré ressort ensuite systématiquement, sauf les interventions de recours déposées sur le bureau du Parquet du Procureur général qui peut décider de la transmission, du classement ou d'une ordonnance de condamnation.

Peut-on véritablement parler de délit de droit commun en ce qui concerne les manifestations ?

Les délits d'émeute et de dommage à la propriété font effectivement partie du droit commun. Ce sont des infractions, dès l'instant où il s'agit de biens et de personnes. Les missions qui sont celles de la police dans ce genre d'intervention consistent à protéger les biens et les personnes, respectivement pour le compte de l'autorité fédérale qui est liée par des accords de siège, notamment avec l'organisation des Nations Unies et pour les différentes missions diplomatiques. La police genevoise n'a pas de liberté de manoeuvre par rapport aux accords de siège conclus par la Confédération.

Vote final

7 OUI (1 L, 1 DC, 2 R, 2 S, 1 AdG)

1 abstention (S)

La Commission des finances vous recommande, Mesdames et Messieurs les députés, de voter ce projet de loi.

Premier débat

La présidente. Monsieur Grobet, avez-vous quelque chose à ajouter ?

M. Christian Grobet (AdG), rapporteur ad interim. Je n'ai rien à ajouter à l'excellent rapport de Mme Salika Wenger ! 

La présidente. Merci, Monsieur le député ! (Mme Wenger entre dans la salle.) Madame Salika Wenger, voulez-vous remplacer M. Grobet ?

Mme Salika Wenger, rapporteuse. Je n'ai rien à ajouter !

La présidente. Vous n'avez rien à ajouter non plus ! Bien, nous passons au vote.

Ce projet est adopté en trois débats, par article et dans son ensemble.

La loi est ainsi conçue :

Loi(8218)

ouvrant un crédit d'investissement de 7 343 775 F pour la police nécessaire au projet POLICE2000 "; Informatisation du journal et des rapports avec l'intégration des informations dans la base de données "

Le GRAND CONSEIL de la République et canton de Genèvedécrète ce qui suit :

Art. 1 Crédit d'investissement

1 Un crédit d'investissement de 7 343 775 F (y compris TVA et renchérissement) est ouvert au Conseil d'Etat pour l'acquisition du matériel et de logiciels nécessaires au projet POLICE2000 "; Informatisation du journal et des rapports avec l'intégration des informations dans la base de données ".

2 Il se décompose de la manière suivante :

Achat de matériel bureautique

932 000 F

Application Police2000

5 161 775 F

Matériel Sûreté (SIJ) et Serveurs NT

400 000 F

Ressources externes (consultants, tierce maintenance applicative)

850 000 F

Total

7 343 775 F

Art. 2 Budget d'investissement

1 Ce crédit est réparti en tranches annuelles inscrites au budget d'investissement dès 2000 sous la rubrique 17.00.00.506.13.

2 Il se décompose de la manière suivante :

Matériel bureautique (PC, imprimante)

932 000 F

Applicatif informatique (logiciel)

6 411 775 F

Total

7 343 775 F

Art. 3 Financement et couverture des charges financières

Le financement de ce crédit est, au besoin, assuré par le recours à l'emprunt dans le cadre du volume d'investissement "; nets-nets " fixé par le Conseil d'Etat, dont les charges financières en intérêts et en amortissements sont à couvrir par l'impôt.

Art. 4 Amortissement

L'amortissement de l'investissement est calculé chaque année sur la valeur d'acquisition (ou initiale) selon la méthode linéaire et est porté au compte de fonctionnement.

Art. 5 Loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat

La présente loi est soumise aux dispositions de la loi sur la gestion administrative et financière de l'Etat de Genève, du 7 octobre 1993.