République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du vendredi 22 septembre 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 10e session - 43e séance
RD 361
En vertu de l'article 2A de la constitution genevoise qui stipule qu'il appartient aux autorités législatives et exécutives de prendre des mesures pour assurer la réalisation du principe de l'égalité entre femmes et hommes.
En vertu de la loi d'application de la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes, du 28 mai 1998 (A 2 50), le Conseil d'Etat présente au Grand Conseil un rapport contenant des mesures transversales ainsi que des plans d'action destinés à concrétiser l'égalité entre femmes et hommes.
Mesdames et
Messieurs les députés,
Promouvoir l'égalité - un défi commun aux hommes et aux femmes
Ainsi pourraient s'intituler les plans d'action et les mesures transversales proposés ci-après, comme suite au rapport du Conseil d'Etat sur la motion 928, lequel affirmait dans ses conclusions « sa volonté d'inclure la perspective de l'égalité entre femmes et hommes dans l'ensemble de ses projets et programmes et de favoriser une politique active de promotion de l'égalité ». Cette volonté s'inscrit dans un mouvement européen plus large intitulé le « gender mainstreaming », c'est-à-dire la mise en oeuvre de l'égalité au sein même des institutions, en s'appuyant sur les acquis et en collaboration avec les institutions spécialisées comme le SPPE (Service pour la promotion de l'égalité entre homme et femme). Trois conditions sont nécessaires à cette intégration de l'égalité dans la marche quotidienne d'une administration : une volonté politique clairement affichée, des moyens mis à disposition et une participation active des personnes concernées.
Une politique de l'égalité concertée, coordonnée à tous les niveaux, permet d'éviter une déperdition d'énergie et de savoir-faire. De plus, la mise en oeuvre de l'égalité ne doit en aucun cas être assimilée uniquement à la volonté d'une personne, ou encore restreinte à certains domaines d'activités - la politique des transports par exemple concerne autant les hommes que les femmes.
En résumé, l'égalité doit devenir l'affaire de tout un chacun.
Pourquoi et comment mettre en oeuvre l'égalité
Les articles 8, alinéa. 3 de la constitution fédérale et 2A de la constitution cantonale imposent aux autorités, tant fédérales que cantonales et communales, de tout mettre en oeuvre pour réaliser l'impératif d'égalité.
Quant à la manière de les mettre en oeuvre, les expert-e-s sont unanimes : force est de constater que les mesures isolées en matière d'égalité ne font pas avancer les choses assez rapidement. Elles sont nécessaires, tout comme les bureaux de l'égalité et autres instances de promotion, mais point suffisantes. Elles doivent être renforcées, par une mise en oeuvre de l'égalité au sein même des institutions, ici les départements, avec des personnes - hommes et femmes - libérées d'une partie de leurs tâches pour se consacrer à cette mission et guidées en cela par des spécialistes - le Service pour la promotion de l'égalité en l'occurrence.
Cela implique plusieurs étapes.
La première étant une volonté politique d'ores et déjà exprimée par notre Conseil d'Etat, relayée par les diverses instances cantonales, communales, etc.
La deuxième est une analyse des besoins en matière d'égalité au sein de chaque département, analyse qui se fait sur la base de statistiques, d'études, mais également de discussions avec les responsables desdits départements.
La troisième est la mise au point de plans d'action.
La quatrième est l'application concrète de cette mise en oeuvre par les services concernés.
La cinquième est une évaluation régulière.
Qui fait quoi ?
Les départements doivent exprimer leur volonté de mettre en oeuvre l'égalité, et pour ce faire, désigner une personne haut placée dans la hiérarchie, chargée de cette tâche, et par ailleurs déchargée d'une partie de ses activités. Il est également nécessaire de débloquer des fonds pour permettre l'élaboration de statistiques, pour mener à bien des études, des analyses et pour former du personnel. Et pour s'assurer du suivi de cette mise en oeuvre.
Les offices et services sont chargés de la mise en oeuvre pratique de l'égalité, en collaboration avec le Service pour la promotion de l'égalité. En effet, l'approche intégrée présuppose que les collaboratrices et collaborateurs sont parties prenantes de la démarche. En d'autres termes, ce sont les offices et services qui doivent relever les inégalités et trouver les moyens d'y remédier, aidés en cela par des spécialistes.
Le Service pour la promotion de l'égalité entre homme et femme n'est pas « déchargé » de la cause de l'égalité, il est chargé de la porter différemment, ce dans le but d'une plus grande efficacité. Selon son nouveau statut, le service doit fournir ressources, expertises, conseils, propositions (comme par exemple élaborer un questionnaire de sensibilisation, animer des cours, former une personne responsable de la mise en oeuvre de l'égalité au sein d'un département) et, le cas échéant, s'assurer de l'application et du contrôle.
Certains départements ne sont pas mentionnés dans ce rapport pour des raisons qui tiennent aux règles mêmes que se donne l'approche intégrée. En effet, étant donné qu'une étroite collaboration avec les membres des structures visées par le projet est nécessaire, toutes les mesures proposées dans ce document résultent de concertations, d'un travail d'équipe. Travail qui n'en est pas au même stade dans tous les départements.
De plus, l'expérience a montré qu'un suivi des progrès de la mise en oeuvre doit être fait, lequel nécessite un gros effort et serait impossible à effectuer dans tous les départements à l'heure actuelle.
Mesures transversales
Terminologie
Le Conseil d'Etat, considérant qu'il est souhaitable d'utiliser une forme respectueuse de l'égalité pour tous les actes administratifs et législatifs cantonaux, rappelle à l'ensemble de l'administration cantonale l'existence du règlement relatif à l'usage de la forme féminine des noms de métier, de fonction, de grade ou de titre dans les actes officiels, du 7 septembre 1988 (B 2 05.13).
Il proposera des directives ainsi qu'un guide de rédaction du langage législatif. Le Service pour la promotion de l'égalité est chargé de l'élaboration d'un projet de guide qui sera soumis à l'approbation de la chancellerie d'ici au mois de juin 2000.
Les commissions extraparlementaires
Pour définir les politiques publiques, l'Etat s'entoure d'expert-e-s et/ou associe, au sein de commissions extraparlementaires, des représentant-e-s des milieux concernés. Détenant une parcelle de l'autorité publique, il est important que les femmes et les hommes y soient équitablement représentés. L'article 5A de la loi sur les membres des commissions officielles, du 24 septembre 1965 (A 2 20) le prévoit d'ailleurs déjà. Le Conseil d'Etat s'engage à concrétiser cette représentation plus équitable par diverses mesures :
demander aux organismes représentés dans les commissions officielles de désigner autant de candidats que de candidates ;
tenir à jour un fichier d'expertes intéressées à siéger dans une commission ;
effectuer une évaluation à intervalle régulier.
Le Service pour la promotion de l'égalité, en collaboration avec le Centre de liaison des associations féminines genevoises, crée un réservoir de femmes compétentes et intéressées en vue du renouvellement de l'ensemble des commissions extraparlementaires lors de la prochaine législature en mars 2001.
La sphère familiale
Le Conseil d'Etat, en concertation avec les organismes concernés par les questions familiales, a élaboré sous l'intitulé « Jalons pour une politique familiale à Genève », une série de repères préalables au développement d'une politique familiale. Le Département de l'action sociale et de la santé est compétent dans ce domaine.
Sous l'angle de l'égalité des chances, toutefois, la mesure qui s'impose en priorité est le développement dans l'administration cantonale de structures de garde pour la petite enfance - le Département des finances ainsi que le Palais de justice ont des projets de crèches.
Plans d'action
L'approche intégrée de l'égalité présuppose, comme affirmé précédemment, une volonté politique, mais également une mise en oeuvre au sein des structures proprement dites. Cela signifie que les plans d'action ci-dessous ne sont pas des vues de l'esprit, mais ont fait l'objet d'une concertation, plus ou moins élaborée, engageant différents partenaires. Ces plans d'action sont donc consignés dans ce rapport, lequel est un rapport intermédiaire. Le Conseil d'Etat entendant revenir chaque année devant le Grand Conseil afin d'évaluer les mesures prises et la concrétisation des différents plans.
Plan d'action dans le domaine de la fiscalité
Le respect de l'égalité entre femmes et hommes était l'un des objectifs fixés, par la cheffe du Département des finances, à la Commission de relecture de la loi sur l'imposition des personnes physiques (LIPP). Intégrer l'égalité dans la réflexion, cela signifie s'interroger de manière systématique sur les effets fiscaux d'une mesure sur le groupe des femmes et sur le groupe des hommes. Précisons d'emblée qu'au sein des membres de la Commission de relecture, l'égalité allait de soi, ce qui facilita grandement la tâche.
Problème soulevé
Le système actuel de taxation commune engendre une discrimination indirecte. En effet, le revenu souvent plus faible de l'épouse, compte tenu du barème progressif, augmente sensiblement l'impôt dû et décourage de ce fait l'activité lucrative à temps partiel de l'épouse. Sans pouvoir adopter un système de taxation séparée des époux, il est important de reconnaître un statut de sujet fiscal à chacun des conjoints.
Mesures proposées
Chaque époux est considéré comme un contribuable, les déductions sont donc chiffrées par contribuable et non plus par couple.
Chaque époux ne répond que de sa part d'impôt.
Problème soulevé
Les femmes sont peu nombreuses à se perfectionner professionnellement alors qu'elles ont des besoins en formation lorsqu'elles doivent se réinsérer sur le marché du travail.
Mesure proposée
Les frais de perfectionnement professionnel et les frais de reconversion professionnelle sont déductibles des impôts.
Problème soulevé
De plus en plus de parents de jeunes enfants ont besoin d'un deuxième salaire et doivent faire garder leurs enfants.
Mesure proposée
Le principe d'une déduction des frais de garde des enfants jusqu'à l'âge de 12 ans, pour les parents célibataires, veufs, divorcés, séparés de corps ou de fait et qui tiennent ménage indépendant avec leur(s) enfant(s) mineur(s) dont ils ont la garde, est introduit sous la forme d'une déduction sociale.
Problème soulevé
Pourquoi distinguer, comme c'est le cas aujourd'hui, les parents mariés des familles monoparentales dont les enfants majeurs ne constituent plus une charge, et ce dès que le plus jeune est devenu majeur ?
Mesure proposée
Les enfants mineurs et majeurs jusqu'à 25 ans - apprenti-e-s ou poursuivant des études - constituent une charge de famille pour les parents mariés ou non mariés.
Ces propositions sont intégrées dans les projets de loi sur l'imposition des personnes physiques, actuellement à l'étude devant la Commission fiscale du Grand Conseil.
Plan d'action dans le domaine des ressources humaines
Un projet au sein de l'Office du personnel est en cours, lequel se propose de réaliser l'égalité des chances entre femmes et hommes dans l'administration cantonale. Intégrer l'égalité dans la gestion des ressources humaines implique dès lors une sensibilisation de tous les acteurs et actrices afin qu'ils et elles en comprennent l'intérêt sur leur propre terrain d'action.
La plupart des propositions qui suivent sont intégrées dans la réforme du service public (SP 2005) et sont à l'étude dans divers groupes ou commissions de travail.
Problème soulevé
Force est de constater, statistiques à l'appui, qu'il existe un écart encore très important entre le nombre de femmes et d'hommes, notamment dans les classes de traitement 23 et plus (23 % de femmes seulement).
Mesure proposée
Augmenter le nombre de femmes dans les postes de cadres intermédiaires et supérieures grâce à un projet « Plan d'action pour la promotion des femmes aux postes d'encadrement », placé sous la responsabilité de l'Office du personnel de l'Etat. Le Conseil d'Etat a d'ores et déjà entériné cette mesure dans un extrait de procès-verbal du 8 mars 2000.
Problème soulevé
Une analyse sous l'angle de l'égalité du système d'évaluation des fonctions en vigueur à l'Etat de Genève a mis en relief un certain nombre d'effets pouvant constituer des discriminations indirectes au sens de la loi fédérale sur l'égalité (ci-après LEg).
Mesure proposée
Eliminer les discriminations indirectes pouvant découler du système d'évaluation des fonctions. Pour cela, un comité de modernisation est à l'oeuvre pour la réforme du système d'évaluation des fonctions. Il est chargé de revoir les critères retenus, d'en intégrer de nouveaux qui tiennent compte des réalités professionnelles actuelles afin de satisfaire aux exigences de la LEg.
Problème soulevé
Manque de connaissances du personnel sur les questions d'égalité.
Mesure proposée
Le centre de formation, suite aux expériences menées avec un groupe pilote de femmes cadres supérieures, élabore une série de modules de formation « égalité » qui intégreront la palette des cours offerts aux fonctionnaires et aux employé-e-s de l'Etat.
Problème soulevé
Difficulté à concilier le temps de travail et le temps de la vie privée.
Mesure proposée
Un groupe paritaire composé de représentant-e-s de l'Etat et du personnel a été notamment chargé d'étudier comment favoriser la promotion de la femme dans la fonction publique.
Problème soulevé
Harcèlement sexuel et mobbing ne sont pas absents des lieux de travail de l'administration cantonale.
Mesure proposée
Une nouvelle procédure de traitement des situations de mobbing et de harcèlement sexuel a été mise sur pied. Une modification dans ce sens du règlement d'application de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale et des établissements publics médicaux, du 24 février 1999, a été acceptée par le Conseil d'Etat en avril 2000.
Problème soulevé
La loi cantonale d'application de la LEg instituant une commission de conciliation compétente pour connaître, tant les litiges découlant de rapports de travail de droit privé que de rapports de travail de droit public (A 2 50), est en vigueur depuis juin 1998. Elle est cependant peu utilisée.
Mesure proposée
Il serait bon de la faire mieux connaître et d'en évaluer la pratique.
Plan d'action dans le domaine de la violence
La lutte contre la violence envers les femmes a parfaitement sa place dans une politique de « mainstreaming », la violence étant reconnue comme une forme extrême de discrimination à l'égard des femmes.
Un groupe de travail « Prévention et maîtrise de la violence conjugale », placé sous l'égide du SPPE, et rassemblant les principaux partenaires institutionnels concernés (police, justice, institutions venant en aide aux victimes ou aux hommes violents, services de conseil conjugal) a publié un rapport contenant de nombreuses recommandations.
Le plan d'action suivant se fonde essentiellement sur les recommandations de ce groupe de travail. Il comprend quatre grands axes: les recherches et statistiques, l'amélioration des réponses institutionnelles à la violence conjugale, l'information et la sensibilisation du public et la prévention.
Problème soulevé
Manque de chiffres et de recherches pointues permettant de bien cibler les mesures à prendre.
Mesures proposées
Le Conseil d'Etat encourage, notamment par des incitations financières, le développement de recherches portant sur la violence à l'égard des femmes et sur les réponses institutionnelles apportées. Il établit un catalogue pluriannuel des recherches à mener et mandate les services spécialisés rattachés à l'Etat pour mener à bien ces tâches.
Problème soulevé
Difficulté pour la police de protéger efficacement les victimes, de répondre à leurs besoins et de dissuader l'agresseur de récidiver.
Mesures proposées
Directives internes à la police ordonnant
l'interpellation systématique de l'agresseur et sa détention durant 24 heures en cas de lésions corporelles, indépendamment du dépôt d'une plainte ;
l'enregistrement systématique (même en l'absence d'autres délits) des plaintes pour menaces ;
le développement d'une pratique d'injonctions faites à l'agresseur par la police ou le parquet (interdiction de contact ou de périmètre par exemple) et, si nécessaire, de bases légales.
Problèmes soulevés
Manque de connaissances du personnel policier et judiciaire en matière de violences et d'un savoir-faire spécifique permettant de gérer des situations difficiles.
Mesures proposées
Formation systématique du personnel policier et judiciaire au problème de la violence contre les femmes, à ses causes, ses conséquences, aux besoins des victimes et aux réponses à apporter au problème. Elaboration de guides d'intervention.
Problème soulevé
Lenteur des procédures.
Mesure proposée
Développement d'une plus grande synergie entre les juridictions civiles et pénales par la mise sur pied d'une cellule d'urgence à même d'intervenir très rapidement en cas de violence domestique.
Problèmes soulevés
Manque de connaissances du personnel de la santé et du social. Sous-détection des cas de violence.
Mesures proposées
Elaboration d'un module de formation sur le problème de la violence contre les femmes, ses causes, ses conséquences, les besoins des victimes et les réponses à apporter au problème. Au moyen de cet instrument, formation systématique des professionnel-le-s des secteurs de la santé et du social.
Un colloque en automne 2000 sur le thème de la violence contre les femmes et la diffusion de protocole de détection de la violence et de guides d'intervention, en collaboration avec les partenaires concernés, est destiné à sensibiliser et former ce même personnel.
Problème soulevé
Manque de coordination et de cohérence dans les réponses apportées par les différentes institutions.
Mesure proposée
Mise en place d'un modèle d'intervention contre la violence conjugale du type DAIP (Domestic abuse intervention project) qui a fait ses preuves aux Etats-Unis et en Europe, fondé sur la coordination et la cohérence des réponses des différentes institutions et dans lequel les systèmes judiciaire et policier jouent un rôle central. Le Conseil d'Etat désignera un groupe chargé de faire une étude de faisabilité.
Problème soulevé
Manque d'information des victimes sur la plainte et la procédure judiciaire.
Mesures proposées
Information détaillée et soutien spécifique au sein de l'institution policière et judiciaire aux victimes de violence conjugale et sexuelle qui déposent une plainte. Distribution des deux brochures intitulées « La violence est inacceptable. Violence conjugale, que faire ? » et puis « La violence est inacceptable. Violences sexuelles, que faire ? ».
Problème soulevé
Le grand public sous-estime l'ampleur du problème et en a une représentation stéréotypée.
Mesure proposée
La campagne nationale « Halte à la violence contre les femmes dans le couple », menée par l'ensemble des Bureaux de l'égalité de Suisse en 1997, s'est révélée fort utile. De telles campagnes devraient être menées à intervalles réguliers, s'adressant à différents publics en vue de les sensibiliser au problème. Une attention particulière devrait être accordée aux populations migrantes.
Problème soulevé
Les moyens institutionnels d'aide aux victimes sont encore insuffisants - faute de places, le foyer d'hébergement Solidarité femmes refuse annuellement autant de femmes qu'il n'en accueille.
Mesures proposées
Augmentation des subventions cantonales accordées aux institutions prenant en charge les victimes (Solidarité femmes, Viol-Secours, Aspasie) de façon à leur permettre de maintenir et de développer leurs prestations. En ce qui concerne Solidarité femmes, mise à disposition d'une maison et des ressources nécessaires afin de permettre l'ouverture d'un deuxième foyer d'hébergement.
Plan d'action dans le domaine de la formation
D'une manière générale, force est de constater que l'accès à la formation s'est très largement amélioré pour les femmes durant ces vingt dernières années. Néanmoins, la situation quant au choix scolaire et professionnel a peu évolué - les filières scientifiques restent majoritairement masculines et les jeunes filles choisissent les filières latines et modernes ou des formations professionnelles courtes.
Il s'agit en conséquence de permettre un meilleur développement scolaire et professionnel pour les filles et les garçons, d'encourager des choix professionnels atypiques et de sensibiliser le corps enseignant aux attitudes discriminatoires inconscientes, en veillant par exemple à la représentation féminine à tous les niveaux de l'enseignement.
Problème soulevé
L'enseignement et les moyens d'enseignement doivent être exempts de stéréotypes et conçus de manière à sensibiliser les élèves au droit à l'égalité.
Mesures proposées
Diffusion du classeur « Apprendre l'égalité » qui met tout un matériel de sensibilisation à la disposition du corps enseignant primaire.
Une présentation de cet outil pédagogique est prévue au printemps 2000, une exposition itinérante présentant ce classeur circulera en automne de la même année.
Problème soulevé
Les attitudes - souvent inconscientes - des maîtres et maîtresses face aux filles et aux garçons confortent les rôles stéréotypés. Un exemple parmi tant d'autres : on a pour habitude de placer un garçon turbulent à côté d'une fille plus calme, cela pour équilibrer le garçon mais sans se soucier de l'éventuel désagrément pour la fille.
Mesure proposée
Intégrer dans la formation de base et continue du corps enseignant une sensibilisation à l'égalité, aux rapports entre les hommes et les femmes dans notre société.
Problème soulevé
L'organisation scolaire, en particulier les horaires journaliers, sont difficilement compatibles avec l'exercice d'une activité professionnelle lucrative par les deux parents.
Mesure proposée
Développer progressivement dans le canton des écoles à horaire continu sur le modèle des « Tagesschule » pour les parents qui le souhaitent.
Problème soulevé
Les jeunes filles ne choisissent que rarement des formations professionnelles prometteuses, telles que l'informatique, l'électronique ou la technique au sens large du terme.
Mesures proposées
Rédaction non discriminatoire de tous les documents d'informations scolaires et professionnelles.
Prise en compte de la dimension égalité dans les rencontres d'information scolaire et professionnelle destinées aux élèves de la scolarité obligatoire et postobligatoire.
Ouverture d'ateliers interactifs dans les classes de 7ème année, destinés à déconstruire les stéréotypes.
Distribution de brochures de sensibilisation auprès des parents et des élèves de 8ème et 9ème et auprès des entreprises dans le cadre de la mise en application du projet 16+ (Projet des places d'apprentissage de la Conférence suisse des déléguées à l'égalité).
Une convention a été passée avec Interface-Entreprises pour prospecter auprès d'entreprises justement afin qu'elles se mettent sur le site www.lisa-girl.ch, lequel doit motiver les jeunes filles à se lancer dans des métiers atypiques.
Problème soulevé
La sous-représentation des femmes dans les structures de l'enseignement supérieur.
Mesures proposées
Les autorités compétentes mettent tout en oeuvre pour atteindre l'équilibre tant au niveau du corps enseignant que du personnel administratif et technique.
Des tâches de mentoring pour les étudiant-e-s, le corps intermédiaire et les chercheuses/chercheurs sont introduites dans le cahier des charges du corps enseignant (HES et Université).
Conclusion
Force est de constater, tant dans les mesures transversales que dans les différents plans d'action qui précèdent, que les prémisses d'une politique active et productive d'approche intégrée de l'égalité sont là. Une série de besoins et de moyens ont été identifiés, discutés et proposés, lesquels visent à rétablir un juste équilibre entre les femmes et les hommes au sein des départements. Equilibre qui vise non point seulement à la promotion des femmes mais bel et bien à un meilleur fonctionnement, une meilleure utilisation des ressources et une meilleure productivité. Et au bout du compte à offrir un meilleur service à la population genevoise.
Une fois l'aval de notre Conseil et de votre Parlement donné, le processus de mise en oeuvre de l'égalité pourra être déclenché et cette approche menée à bien par les différents partenaires de cette aventure que sont les départements, les offices, les services et le Service pour la promotion de l'égalité.
Le Conseil d'Etat, en conséquence, entend réaffirmer une nouvelle fois sa volonté d'inclure la perspective de l'égalité entre femmes et hommes dans l'ensemble de ses projets et programmes. L'approche intégrée de l'égalité étant à l'heure actuelle le moyen le plus pertinent de réaliser cette volonté dans les délais les plus brefs.
Comme le Conseil d'Etat le précisait dans son rapport faisant suite à la motion 928, la définition et la concrétisation des plans d'action nécessitent l'engagement et la participation de chaque département et de chaque service de l'administration, et une étroite collaboration avec le Service pour la promotion de l'égalité.
Ce rapport est le premier des rapports intermédiaires qui seront soumis au Grand Conseil.
Débat
Mme Fabienne Bugnon (Ve). Madame la conseillère d'Etat, nous attendions ce rapport avec un grand intérêt. A sa lecture, nous pourrions dire que c'est un rapport en demi-teinte. Une très bonne nouvelle tout de même, j'en parlerai en premier, c'est l'augmentation des subventions. Je viens de constater, à la lecture de votre proposition de budget, l'augmentation des subventions cantonales accordées aux institutions prenant en charge les victimes, que ce soit Solidarité-Femmes, Viol-Secours ou Aspasie. Il est vrai que l'effort, traduit par la proposition du Conseil d'Etat, est substantiel. Je me réjouis que ce Grand Conseil le suive.
Dans d'autres domaines, il est difficile de trouver l'enthousiasme auquel vous nous habituez dans d'autres domaines. La systématique retenue par ce rapport est intéressante. Soulever les problèmes est évidemment indispensable, les répertorier aussi, envisager des mesures en est la conséquence. Nous attendons bien évidemment le troisième élément, c'est-à-dire la réalisation des mesures proposées. A cet égard, je souhaite vous poser quelques questions à propos des différents chapitres.
Premièrement, j'aimerais savoir si le projet de guide pour la promotion de l'égalité, prévu pour le mois de juin 2000, a été édité et si nous pourrions le consulter. Deuxièmement, s'agissant des mesures soulevées pour la garde des enfants, lorsque je lis le problème soulevé - « De plus en plus de parents de jeunes enfants ont besoin d'un deuxième salaire et doivent faire garder leurs enfants. » - c'est une constatation évidente, mais lorsque je lis la mesure proposée - « Le principe d'une déduction des frais de garde des enfants jusqu'à l'âge de 12 ans, pour les parents célibataires, veufs, divorcés, etc. » - je ne comprends plus la mesure, puisqu'elle apparaît en inadéquation avec le problème soulevé. Ce sont bien les familles qu'il s'agirait d'aider dans la mesure où l'on parle d'un deuxième salaire et pas uniquement les familles monoparentales. Troisième question, le plan d'action dans le domaine de la violence. J'ai lu avec intérêt que les mesures proposées consistaient en l'interpellation systématique de l'agresseur, lorsqu'une femme est agressée, et sa détention durant 24 heures en cas de lésion corporelle, indépendamment du dépôt d'une plainte. Pour avoir affaire à beaucoup de femmes qui vivent ces agressions, je n'ai pas l'impression que la situation a vraiment changé. Je vous demande donc si l'unes des mesures proposées consisterait en un projet de loi déposé par le Conseil d'Etat.
Ensuite, en page 11 du rapport, vous parlez de la campagne nationale « Halte à la violence contre les femmes dans le couple » et vous précisez qu'elle « s'est révélée fort utile ». C'est une explication un peu légère ! Que signifie-t-elle ! Y a-t-il eu plus de plaintes, a-t-on pu aider un nombre plus élevé de femmes ? Je trouve que ce rapport est très peu développé de ce côté-là et je le regrette vraiment beaucoup !
Enfin, et ce sera ma dernière critique, ce rapport ne dit pas un mot sur le partage du temps de travail, ce qui constitue également un encouragement à l'égalité, puisqu'il permettrait par exemple à des parents de travailler moins, l'un et l'autre, et ainsi de s'occuper plus de leurs enfants.
Encore une fois, ce rapport est en demi-teinte. Il est très peu développé. Les problèmes soulevés sont très importants, les mesures proposées le sont aussi. Je regrette qu'elles ne soient pas plus développées.
Mme Anita Cuénod (AdG). Mme la conseillère d'Etat, nous sommes pour notre part déçus, non pas du plan d'action, que nous connaissons, mais du minimalisme de ce rapport. Ce rapport est minimaliste, par endroit un peu vulgarisé, comme s'il avait été écrit sur un coin de table. Pour un plan d'action, il aurait mérité d'être mieux développé et plus explicite. Ce rapport est aussi quelque peu dépassé. Vous me direz que je vais très vite, que ce rapport a été rédigé et publié il y a quelques mois déjà et que les choses se font, mais j'aurais souhaité qu'il soit actualisé. J'aurais voulu lire quelque chose de plus actuel. Sachant ce que vous faites, j'attends un autre texte, plus détaillé.
M. Albert Rodrik (S). Je suppose que vous vous souvenez que le premier rapport que nous avons reçu en début de législature, voici deux ans environ, avait suscité un accueil froid et sévère de notre part. Nous avions alors précisé, en achevant notre double intervention, Véronique Pürro et moi-même, que nous considérions que ce rapport était la clôture de l'ère révolue de l'ancien rattachement de ce service, mais que nous attendions pour la fin de cette législature un bilan différent qui soit à la hauteur de la volonté de l'autre rattachement de ce service.
Ce rapport est correctement inspiré. Il ouvre des voies intéressantes, mais c'est un peu comme Carmen. Nous arrivons, nous voilà ! C'est bien, mais il faut maintenant le faire !
Je signale à toutes fins utiles que l'école maternelle Arabelle ne doit pas être oubliée dans l'énumération de la page 12 et qu'il faut se mettre à jour à propos des projets de Solidarité-Femmes qui a entre-temps réfléchi à ces problèmes. Parmi les subventionnés privés du DASS, un effort extrêmement intelligent, et non d'arrosoir, a été fait au bénéfice d'une demi-douzaine, de six à huit subventionnés, qui en avaient particulièrement besoin et dont un certain nombre touche la problématique de l'égalité. Je compte sur la commission des finances pour ne pas le démanteler.
Nous disons notre espoir de passer du domaine des intentions correctes au domaine des réalisations concrètes. Les difficultés ne sont pas à négliger, mais cette inspiration mérite un bilan que nous espérons plus complet, plus prometteur et susceptible de vous faire avancer dans la voie de l'égalité. Est-il besoin de dire que le groupe socialiste fait confiance à la magistrate !
Mme Micheline Calmy-Rey. La cause des femmes me tient à coeur, la cause de l'égalité me tient à coeur et j'ai souhaité pouvoir rattacher le service de promotion de l'égalité au département des finances pour pouvoir mener à bien un certain nombre de projets en la matière. Des efforts financiers ont été accomplis, Mme Bugnon l'a relevé. L'une des choses que nous avons réalisées ne figure cependant pas dans ce rapport. C'est la réunion de toutes les associations concernées par les problèmes d'égalité. Nous mettons ensemble les projets, nous en assurons la cohérence et la cohésion et vous voyez apparaître des subventions liées à ce travail effectué entre associations, service de l'égalité et Etat de Genève. Vous le voyez apparaître dans le cadre des subventions de fonctionnement qui sont listées sous le service de promotion de l'égalité pour la première fois.
Nous n'avons par ailleurs pas voulu élaborer un rapport-plan d'action qui soit un plan tiré sur la comète. La démarche qui est actuellement celle du service de promotion de l'égalité est une approche intégrée. Elle signifie que le service de l'égalité se rend dans les services, discute avec les gens, mais ce n'est pas lui qui élabore les plans d'action. Ce sont les services qui élaborent les plans d'action, le service de l'égalité assurant l'appui, comme aide et comme conseil. De sorte que l'on est sûr, une fois le plan d'action mis sur papier, qu'il sera réalisé par le département concerné, puisqu'il part d'une volonté interne au département et non pas d'une volonté imposée par le service de promotion de l'égalité. Cette démarche est évidemment bien moins spectaculaire qu'un plan d'action magnifique qui aurait pu être couché sur ce papier. Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Je reconnais que le plan présenté est modeste, mais ce dont j'espère, c'est que l'on arrive finalement, plus qu'à des mots, à des réalisations.
Une dernière chose. Un certain nombre d'avancées sont effectuées, non pas par le service de promotion de l'égalité, mais dans le cadre de l'office du personnel de l'Etat. Il s'agit par exemple du partage du temps de travail. Vous savez qu'une expérience a été menée dans un certain nombre de services de l'Etat. L'université de Genève est actuellement en train d'évaluer ces expériences. Par ailleurs, la promotion des femmes cadres et un certain nombre d'autres actions sont menées par l'office du personnel de l'Etat. Tout n'est donc pas rattachable au seul service de promotion de l'égalité, de nouveau en vertu de cette volonté d'agir de façon intégrée.
Concernant vos questions particulières, je veux bien y répondre, mais en apportant des compléments écrits, si vous le permettez, parce que je ne dispose pas de toutes les réponses maintenant. Je suis également prête à actualiser les textes, le rapport ayant été déposé au mois de mai, un certain nombre de choses ont depuis, effectivement, été réalisées. Je reviendrai donc avec un rapport complémentaire de façon que vous soyez informés plus précisément. La volonté est là, mais ce n'est pas une volonté de belles paroles. Nous aimerions pouvoir passer à une phase de concrétisation. Nous ne pouvons toutefois pas fonctionner seuls, d'en haut, en partant de beaux principes et de beaux plans d'action élaborés par le service de promotion de l'égalité, mais qui ne soient finalement jamais appliqués.
Le Grand Conseil prend acte de ce rapport.
Le président. Nous avons ainsi épuré notre ordre du jour des objets anciens. Nous abordons à présent les nouveaux objets avec le point 48 de notre ordre du jour.