République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 22 juin 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 9e session - 32e séance
IU 905
M. Luc Gilly (AdG). Mon interpellation s'adresse à M. Ramseyer... (Commentaires.) Je n'en ai pas développé le mois dernier ! Monsieur Ramseyer, votre police a l'air de s'ennuyer et je suis une fois de plus consterné de devoir intervenir sur des sujets aussi futiles et qui commencent à lasser pas mal de citoyens et de citoyennes.
En l'occurrence, il s'agit d'un petit roman policier qui s'est déroulé dans vos services et dont j'aimerais vous faire part. Lundi de Pentecôte, à 2 h 30 du matin, deux jeunes femmes de 20 ans, une travailleuse et une étudiante, rentrent chez elles : depuis Saint-Gervais jusqu'aux Grottes, elles sont à trois reprises rattrapées par une voiture de police dont les occupants les dévisagent.
A la troisième fois, une des filles exaspérée leur tire la langue. En réponse, les policiers leur tiennent des propos sexistes parce qu'elles sont bras dessus, bras dessous. Les choses auraient pu en rester là, mais non ! La bergère ayant répondu au berger sur les propos sexistes, du coup, la première voiture de police en appelle une autre, qui est suivie d'une troisième : une jeep avec quatre ou cinq «Rambo» équipés jusqu'aux dents. Ce sont pratiquement huit à neuf policiers qui emmènent les deux jeunes filles au poste. L'une sera traitée correctement ; quant à la deuxième, on lui demande de se déshabiller. Pour faire bonne impression, un de vos policiers, Monsieur Ramseyer, avait déjà enfilé ses gants en caoutchouc, vous devinez pourquoi ! La fille ayant refusé de se déshabiller, l'affaire s'est calmée. Les deux filles ont pu rentrer à la maison, sans même avoir signé un papier ou fait une déposition.
Monsieur Ramseyer, je vous pose la question. Est-il normal que des agents de police qui s'ennuient s'amusent, à 2 h 30 du matin, à remonter le long des trottoirs et à harceler des jeunes gens ou des jeunes filles - ce n'est pas la première fois que j'entends ce genre d'histoire - jusqu'à ce que, à force d'allumer, cela explose, un peu comme les chars qu'on verra ou qu'on ne verra pas dimanche ? A-t-on besoin de neuf policiers pour contrôler l'identité de deux personnes, doit-on les emmener au poste de police de la Servette à des heures indues ? La police n'a-t-elle pas assez d'heures supplémentaires sans faire ce genre de boulot ? N'a-t-elle rien de plus intelligent à faire, le soir quand elle s'ennuie, que de ramener les petits copains ou d'amener deux nanas au poste de police ?
Réponse partielle du Conseil d'Etat
M. Gérard Ramseyer. La méthode employée régulièrement à mon égard par M. Gilly commence singulièrement à m'inquiéter. Monsieur Gilly, vous prenez un cas, vous profitez de la présence massive de la presse attentive... (Exclamations et rires.) ...vous décrivez des horreurs, vous faites un récit apocalyptique d'une situation que je ne connais pas, puis vous attendez de moi que je vous réponde en urgence. Je dois donc demander un dossier, une enquête de police, etc. Ce travail, Monsieur Gilly, je le fais régulièrement et je ne vous ai jamais laissé un centimètre d'action, lorsque vous vous en prenez ainsi à la police. Mais ce que je n'aime pas, Monsieur Gilly, c'est que vous décrivez des faits épouvantables - ce qui est votre droit le plus strict - que je vous réponds le lendemain, en démentant, la plupart du temps, ce que vous dites, ou du moins en le nuançant fortement, et qu'au final on retient le drame que vous avez décrit et strictement rien de la version de la police ! C'est ce que je ne trouve pas normal.
Alors, encore une fois, Monsieur Gilly, j'ai pris note et je vous répondrai demain. Je demanderai le dossier ce soir encore, mais je dis que cette manière de travailler n'est pas correcte. Si vous voulez que je continue à vous répondre, veuillez avoir l'amabilité de poser des questions, au lieu d'affirmer et de faire des descriptions comme celles que vous faites !