République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 25 mai 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 8e session - 27e séance
P 1270-A
La Commission des pétitions a examiné cet objet lors des séances des 17 février, 14 et 28 février 2000, sous la présidence de Mme Louiza Mottaz. Mme Pauline Schaefer a pris les notes de séance.
Il s'est tout de suite avéré que seules deux invites (la première et la dernière) entraient dans la compétence du Grand Conseil, les autres concernant les autorités de la Ville. Ce fait a été confirmé par M. Freddy Wittwer, chef de l'OTC. C'est donc sur ces deux invites que porte le présent rapport, l'une demandant de supprimer les places de parcage devant la place de la Navigation, l'autre de faire respecter les dispositions légales concernant le parcage devant, mais aussi sur la place même.
Auditions
Audition des pétitionnaires : Mmes Martine Ruchat et Julia Staub et de M. Jacques Berthet
Mme Ruchat rappelle que le quartier des Pâquis est soumis à une très forte densité de population et de circulation, comme l'atteste d'ailleurs l'école primaire qui accueille plus de mille élèves, ce qui signifie que le secteur abrite de nombreuses familles avec enfants, et que ces enfants sont mis en danger par la circulation.
La pétitionnaire précise que, depuis une dizaine d'années au moins, divers plans ont été imaginés pour cette place, notamment initiés par l'Association Survap (Survivre aux Pâquis).
En juin de l'année dernière, précise Mme Ruchat, la place précitée s'est vu apposer des modifications, soit une meilleure gestion du parking et du passage du bus, de manière à éventuellement créer une véritable place. A ce sujet, elle signale la satisfaction des habitants quant à l'intervention du Conseil administratif de la Ville de Genève sur ce point.
En revanche, les résidents ont malheureusement des doléances à formuler pour ce qui concerne la manière dont s'est fait l'aménagement. En effet, Mme Ruchat explique qu'il a plutôt généré des nuisances dont les habitants seraient heureux de pouvoir se débarrasser, en même temps que de réfléchir à un nouveau concept idéal pour la Navigation.
M. Berthet explique qu'actuellement, la place est piétonne avec deux rues qui y aboutissent en culs-de-sac. On est actuellement confronté à un espace vide de tout aménagement, tandis que les voitures viennent s'entasser au fond, ignorant souvent qu'il s'agit d'une voie sans issue. Aux heures de pause et le soir, déplore M. Berthet, les véhicules se parquent ici et s'y agglutinent, créant force bouchons. Les habitants souffrent désormais des coups de klaxons réitérés si bien que la situation est devenue invivable.
La solution des pétitionnaires consisterait à supprimer ces rues et de créer une zone piétonne en rendant l'accès possible depuis les Bains des Pâquis en passant par la rue du Léman qui deviendrait alors piétonnière. La circulation ne changerait pas, précise M. Berthet, mais il n'y aurait plus ces fameux culs-de-sac.
Mme Staub fait circuler des photographies datant du début du siècle et illustrant certains endroits de Genève, depuis lors « sacrifiés » au développement de l'urbanisation. On admire d'abord le charme d'une place Saint-Gervais bien dégagée. Mme Staub présente ensuite l'espace devant la gare dont on remarque notamment l'arborisation importante et disparue depuis lors pour laisser passer le trafic automobile. Une photographie aérienne récente permet de constater une absence remarquable d'espaces verts.
En substance, la pétitionnaire milite en faveur de la création d'un lien entre Léman et Navigation, anticipant déjà que les mamans pourraient enfin lâcher la main des enfants.
Dans un premier temps, poursuit l'oratrice, il serait judicieux de pouvoir passer d'un endroit à l'autre en se passant de ces fameux culs-de-sac dont on a exposé les désagréments. Sur ce chapitre, Mme Staub rappelle qu'il est pratiquement impossible de trouver de la place aux Pâquis jusqu'à 23/24 h, mais que si l'on finit pas réaliser qu'il n'y a de toutes façons pas de possibilité de parking, le flux de circulation va diminuer immanquablement, un objectif prioritaire des habitants du périmètre. N'oublions pas, ajoute-t-elle au passage, que le parking du Grand-Casino offre toujours des places libres.
Mme Staub rapporte que la pétition a été envoyée à la Ville aussi. Elle ne sait pas, au demeurant, « où cela coince » - pompiers ? Règlements ? Elle rapporte qu'un concours a eu lieu et qu'un projet très cher a remporté la palme, mais les pétitionnaires, de leur côté, optent pour une structure toute simple. Soit c'est l'argent, soit ce sont les règlements qui posent problème et c'est la raison pour laquelle les pétitionnaires se sont adressés au Grand Conseil.
Mme Ruchat convient que la pétition demande aussi de faire respecter les règles de circulation, notamment en matière de parcage de véhicules, mais ultérieurement la question ne se poserait en fin de compte plus en ces termes puisqu'on ne pourrait plus stationner à cet endroit.
M. Berthet ajoute encore qu'aucun commerçant ne serait lésé par la fermeture prévue.
Audition de M. Freddy Wittwer, directeur de l'Office des transports et de la circulation.
M. Wittwer, précise que l'aménagement actuel de la place de la Navigation constitue un aménagement dit à titre d'essai. Dans ce contexte, souligne le directeur de l'OTC, il n'y a pas eu d'enquête publique ni d'arrêté du Département de justice et police. M. Wittwer relève qu'il s'agit d'une pratique assez courante dans les communes qui souhaitent avoir une autorisation provisoire du département, puisque la LCR (loi sur la circulation routière) permet à l'OTC de mettre en place une signalisation au titre d'essai.
L'intervenant explique qu'un aménagement provisoire est prévu pour une année et il indique que le délai se situe en mai 2000 pour la place de la Navigation. A cette date, explicite M. Wittwer, on pourra alors mettre à l'enquête publique et publier des arrêtés concrets.
Dans l'hypothèse où l'on n'enregistre aucun recours, anticipe le directeur de l'OTC, on pourra alors réaliser l'espace piétonnier puis, le cas échéant, la suppression des places de parc.
Une commissaire demande s'il existe déjà un projet d'aménagement définitif.
M. Wittwer lui répond par la négative et rappelle, à cette occasion, que les aménagements sont payés par les communes, en l'occurrence la Ville de Genève. Pour sa part, il n'en a pas eu connaissance. En substance, la Ville peut procéder aux aménagements qu'elle entend, conclut M. Wittwer, mais l'OTC n'est pas impliqué.
Un député regrette que M. Wittwer n'ait pas reçu le plan en question et fait savoir qu'il s'attendait à recevoir beaucoup plus de réponses de la part de l'OTC, même s'il reconnaît que la Ville est concernée au premier chef.
M. Wittwer relève enfin que la pétition part du principe qu'une zone piétonne est acquise alors qu'elle ne l'est pas. Quant aux places de parc, le directeur de l'OTC croit savoir que la Ville a déjà fait la demande de les supprimer. M. Wittwer révèle qu'il s'agit d'un cas problématique car on dénote la présence d'une agence de location de voitures dans le périmètre et il estime qu'il sera très difficile de supprimer ne serait-ce qu'une quinzaine de places de stationnement.
Pour ce qui a trait à l'idée d'une aire piétonne, M. Wittwer souligne qu'une telle suggestion s'inscrit dans les instructions qu'avait données l'OTC pour la Navigation et il ne voit, pour sa part, aucune raison majeure de faire opposition, bien qu'il ne puisse rien garantir.
Discussion et vote
Les commissaires ont relevé que l'OTC était prêt à entrer en matière relativement à la première et à la dernière invite des pétitionnaires. Dans le cadre de l'aménagement de la place de la Navigation, en effet, la Ville est compétente pour le reste. Les députés s'étonnent toutefois du peu de concertation entre les services de la Ville et du canton. Entre temps, M. Wittwer a toutefois informé les commissaire qu'une réunion avait eu lieu peu après son audition entre MM. Ramseyer et Ferrazino pour traiter de cet objet et mettre au point les principes de l'enquête publique.
En ce qui concerne la demande des pétitionnaires, la quasi unanimité de la commission juge tout à fait raisonnable et indiqué d'y répondre. En effet, le quartier des Pâquis est empoisonné par la circulation automobile et le manque d'espace, et il convient d'y trouver des remèdes.
La place de la Navigation mérite mieux que d'être affectée à un parking. Il est important de préserver la qualité de vie des habitants, du quartier, qui ont de bonnes idées et le mérite de se battre depuis longtemps pour améliorer leur environnement et la sécurité des piétons.
C'est pourquoi, persuadée du bien-fondé des demandes contenues dans la pétition, la commission vous propose à l'unanimité des commissaires moins une abstention, Mesdames et Messieurs les députés, de la renvoyer au Conseil d'Etat pour qu'il y donne suite.
Le renvoi au Conseil d'Etat de la pétition 1270 est accepté par 12 OUI (3 AdG, 2 DC, 2 R, 3 S, 2 Ve) et une abstention (1 L).
Pétition(1270)
relative à l'aménagement de la place de la Navigation
Mesdames etMessieurs les députés,
Les soussignés et soussignées sont très satisfait-e-s de l'initiative du Conseil administratif de réaliser une partie du projet d'aménagement piétonnier place de la Navigation - rue du Léman en discussion depuis près de dix ans. Néanmoins, ils et elles ne peuvent pas accepter que leur immeuble se retrouve entouré d'automobiles parquées en deuxième voire troisième position à l'entrée de l'immeuble de la Navigation et en trois files dans la rue de Léman.
Outre l'aspect inesthétique de la chose (en totale contradiction avec l'idée d'aménagement d'une place, lieu de rencontre et de convivialité), les soussignés et soussignées relèvent les nuisances en terme de bruits (notamment les voitures qui reculent constamment dans la rue de Léman, les klaxons d'avertissement pour appeler le propriétaire d'une voiture en 2e position) et de gaz de voitures produit par les nécessaires manoeuvres souvent fort compliquées (monter sur le trottoir, éviter les bornes) pour extraire les véhicules de ce qui est devenu un véritable parking.
Soucieux d'un véritable aménagement de la place de la Navigation, les habitants et habitantes du 4 de la place de la Navigation et du 11 rue du Léman proposent:
de supprimer les places de parcage devant l'immeuble en vue d'étendre la place de la Navigation ;
de délimiter la place par une dénivellation de la totalité de la surface avec un revêtement de sol différencié ;
de supprimer les chaînes qui marquent la limite de la zone piétonne et de les remplacer par des arbustes ;
de déplacer l'espace prévu pour les deux roues (actuellement au centre de la place) aux deux côtés de la rue du Léman sur 15 à 20 mètres avec fixation pour les cycles (ce qui empêcherait le parcage des voitures) ;
de déplacer les container de bouteilles et de vêtements (par exemple devant la Migros, rue du Môle) ;
de mettre des container de bouteilles plus esthétiques et d'un usage moins bruyant (en matière plastique par exemple) ;
d'entourer les grilles de la descente des WC par des bacs avec des plantes ;
d'ajouter des bancs publics ;
de faire respecter les règles de circulation en matière de parcage (voitures en deuxième position, voitures parquées sur l'espace piétonnier ou sur la place elle-même!).
Les habitants et habitantes du 4, place de la Navigation et du 11, rue du Léman souhaitent instamment que le Conseil administratif et le Grand Conseil tiennent compte de leurs revendications et propositions et les remercient de bien vouloir recevoir leur pétition.
Débat
Mme Caroline Dallèves-Romaneschi (Ve), rapporteuse. Voilà des années et des années que les habitants des Pâquis se battent pour améliorer un peu leur cadre de vie qui est envahi par la circulation automobile. Vous aurez peut-être remarqué, en lisant le rapport, que seules les première et dernière invites de cette pétition concernent notre Conseil, les autres étant de la compétence de la Ville de Genève. Pour ces deux invites, nous avons reçu des réponses « satisfaisantes » de l'OTC, l'office des transports et de la circulation. Je mets des guillemets, car l'OTC prend généralement des mesures dans ce genre d'affaire ou promet de les prendre, puis ne les fait pas respecter ou plutôt la police n'est pas en mesure de les faire respecter, parce qu'on ne lui en donne pas les moyens et parce que le chef du département, pour ne pas le citer, n'est pas très chaud pour faire respecter les mesures qu'il a lui-même imposées.
C'est donc avec un espoir réduit, mais tout de même avec un léger espoir, que nous vous proposons de renvoyer cette pétition au Conseil d'Etat, en espérant que les mesures, une fois prises, seront imposées et que leur respect sera imposé.
M. René Koechlin (L). Je m'étonne simplement que cette pétition ait atterri devant notre Grand Conseil, parce qu'elle ne soulève que des questions qui concernent le Conseil municipal de la Ville et le département de M. Ferrazino. Je veux bien qu'on la renvoie au Conseil d'Etat, mais il ne pourra que la renvoyer au Conseil administratif ou au Conseil municipal. Il me semble que tout ce qui est demandé est du ressort de ces instances et pas de ce Grand Conseil.
M. Laurent Moutinot. Je crois comprendre dans les propos de Mme la rapporteuse que les choses peuvent aller de l'avant du point de vue de l'OTC. La remarque de M. Koechlin est exacte. Je suis donc persuadé, Monsieur le conseiller administratif, que nous allons arriver, entre les départements cantonaux et municipaux, à répondre favorablement à l'essentiel de cette pétition. Quant à la poursuite des infractions en matière de parquage, il y a peut-être des difficultés d'ordre politique, mais il y a surtout des difficultés d'ordre pratique, à savoir le nombre de contractuels ou de fonctionnaires disponibles pour ce genre de tâche.
Sur le fond de la demande, il devrait pouvoir être donné satisfaction aux pétitionnaires avec une bonne collaboration entre les deux départements cantonaux concernés et les départements municipaux.
M. Christian Ferrazino (AdG). Deux mots pour répondre aux interrogations de M. Koechlin. Mon collègue Manuel Tornare et moi-même avons effectivement assisté à une assemblée du quartier pour présenter ce projet, assemblée à laquelle ont notamment participé un certain nombre de ces pétitionnaires. A la suite de cette assemblée, nous avons convenu d'intégrer la rue du Léman, qui donne accès à la place de la Navigation, dans le nouveau plan de mesures soumis à l'enquête publique pour en faire une zone piétonne. Il s'agissait en effet d'un cul-de-sac d'où les gens qui s'y infiltraient ne pouvaient pas ressortir. Par conséquent, à la demande des habitants - demande bien légitime - nous avons intégré une extension de la zone piétonne que nous avions retenue, laquelle est mise à l'enquête publique.
Sur les délais, on peut dire que l'on a répondu favorablement à la demande, puisque la demande de crédit de construction devrait être déposée au mois de février de l'année prochaine auprès du Conseil municipal. Nous souhaitons pouvoir ouvrir le chantier en septembre 2001. C'est vous dire que les mesures sont d'ores et déjà prises pour donner une suite favorable à cette demande. Mais il serait bien sûr fort agréable, comme le relève Mme Dallèves, de bénéficier d'un soutien massif à ce projet de la part du Conseil d'Etat. Je n'ai pas rencontré jusqu'à ce jour de divergences à ce propos entre la Ville et le canton. Mais ce qui va bien sans être dit va tout aussi bien en étant dit ! Par conséquent, c'est avec joie que nous prenons acte de ce soutien !
Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (renvoi de la pétition au Conseil d'Etat) sont adoptées.