République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 16 mars 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 6e session - 11e séance
IU 828
M. Pierre Meyll (AdG). Vous avez peut-être vu que la commune de Versoix a accepté de loger les forains, avec un écart de voix infime, puisque Versoix a voté oui à une majorité de treize contre douze.
Un référendum est en cours et il faudrait que le Conseil d'Etat prenne les dispositions nécessaires pour que, si ce référendum a lieu, les communiers puissent voter en connaissance de cause. En effet, ceux qui ont lancé ce référendum l'ont lancé avec des arguments hypocrites, en disant que le centre sportif serait dans l'impossibilité de s'agrandir si les forains venaient s'installer sur le terrain des hôpitaux, ce qui est faux.
Il semble que le Conseil municipal et certains conseillers administratifs ne croient pas tout à fait aux promesses de l'Etat et il faudrait que l'Etat s'engage à prendre des droits de préemption, par exemple, sur les terrains avoisinants, afin que l'éventuel agrandissement du centre sportif, si nécessaire, puisse être garanti. L'Etat doit garantir tant l'achat des terrains que leur déclassement. Ceci est essentiel pour que nous puissions ainsi renseigner la population d'une manière correcte.
Il faut savoir que les gens du voyage installés à Versoix depuis 1966 ont été spoliés par l'Etat de Genève des terrains qu'on leur avait donnés à la Queue-d'Arve. C'est un rappel intéressant ; il reste de cette époque deux rues aux Acacias : Leroyer et Boissonnas, du nom des deux dames qui avaient donné le terrain de la Queue-d'Arve aux forains et aux gens du voyage. Ensuite, l'Etat leur a offert «en échange», lorsqu'il a créé la Fondation industrielle Praille-Acacias, la FIPA, les terrains du Molard, qu'ils ont occupés jusqu'à ces jours, dans des conditions désastreuses. On savait dès le départ - moi-même, je m'y suis suffisamment promené pour le savoir - que c'était une zone alluviale et inondable. En l'occurrence, ce devait être une installation provisoire, paraît-il.
Concernant le référendum, il convient de bien préciser que, si on modifie ce projet de loi, il sera voté. En effet, les transactions entre le Conseil administratif et le Conseil d'Etat n'ont pas été au bout de tous les problèmes et ceci est une raison de l'échec éventuel du projet. On constate déjà des manques dans l'exposé des motifs...
Le président. Il vous faut poser votre question, Monsieur Meyll !
M. Pierre Meyll. Oui, Monsieur le président, mais la situation est grave, parce que la position de Genève est observée. Je m'excuse d'être un peu long, mais il ne faut pas oublier que, quand le Conseil d'Etat a consulté les quarante-cinq communes genevoises au sujet des forains, quarante-trois ont répondu non ! Une a répondu oui, mais a dû revenir en arrière pour des raisons économiques, une industrie de luxe refusant la proximité des forains. Seule Versoix les a acceptés ! Dans ces conditions, il faut véritablement faire un exemple et installer les forains à Versoix dans des conditions qui soient favorables, pour les forains comme pour la commune.
Versoix a une vocation cantonale, internationale et même universelle, puisqu'on y trouve l'ISDC. A proximité du centre de formation de la Croix-Rouge, il est inacceptable que l'on ne puisse pas loger des forains, parce que l'égoïsme de certains les pousse à lancer, avec des mensonges, un référendum qui risque de réussir.
Je souhaite qu'il y ait un référendum, mais je souhaite aussi que la population soit renseignée, qu'elle puisse prendre position dans des conditions saines et que Genève ne vienne pas faire concurrence à Emmen ou à Boudevilliers, en refusant des citoyens suisses, des citoyens genevois qui veulent simplement vivre différemment et qu'on veut bien tolérer chez les autres, mais pas chez soi !
C'est pourquoi je demande au Conseil d'Etat d'intervenir rapidement, afin que la situation soit clairement établie et que l'on puisse enfin loger ces forains dans des conditions favorables.
M. Ramseyer est déjà intervenu à ce sujet, mais j'aimerais que le Conseil d'Etat prenne position d'une façon très claire et très nette, afin que l'on n'aille pas au-devant d'un échec.
Le président. Je vous rappelle, Mesdames et Messieurs les députés, que les interpellations urgentes se développent en trois minutes. Je vous invite à respecter cette discipline, s'il vous plaît !
Moutinot répond immédiatement à l'interpellation de M. Meyll.
Réponse du Conseil d'Etat
M. Laurent Moutinot. Mesdames et Messieurs les députés, je remercie M. le député Meyll d'attirer votre attention sur l'importance de reloger les gens du voyage et les forains à Versoix, dans les meilleures conditions possibles.
Je vous rappelle que, quand je suis arrivé au département, il était question de les reloger aux Longs-Prés, ce qui avait entraîné une levée de boucliers massive. A partir de là, en accord avec le Conseil administratif de Versoix, avec tous les milieux qui s'étaient opposés à l'implantation d'une aire pour les forains et les gens du voyage aux Longs-Prés, nous avons trouvé la solution dite des hôpitaux.
Pendant la procédure d'enquête publique, une seule observation a été adressée par l'Association de la Bécassière qui, aujourd'hui, annonce un référendum. Aucun club sportif, à l'époque, ne s'était manifesté et pour cause : lors de l'élaboration du projet, il avait précisément été tenu compte, dans la délimitation du périmètre, d'une possibilité évidente d'agrandissement du centre sportif.
D'ailleurs, lors du débat public dans la commune de Versoix auquel j'ai participé lundi passé, le président du FC Versoix a rappelé qu'il avait besoin d'un terrain de football à une échéance de quatre ou cinq ans - ce qui nous permet de répondre à ce besoin - et non pas de plusieurs terrains disponibles immédiatement, comme le prétendent les référendaires.
Vous avez raison, Monsieur Meyll, c'est une question de dignité et de respect d'une minorité. Si je suis prêt à améliorer le projet, à donner un certain nombre de garanties, je ne suis pas prêt à entrer dans le jeu des faux prétextes, des faux arguments qui cachent mal, chez certains, leur rejet de cette minorité de nos concitoyens. Un nombre considérable de périmètres, pratiquement tous les périmètres possibles, ont été étudiés pendant quinze ans. On est arrivé à celui des hôpitaux et il est vain aujourd'hui d'imaginer qu'il y en aurait de meilleurs.
J'aimerais ici rendre hommage à la commune de Versoix et à ses autorités municipales qui ont, à l'unanimité, décidé de trouver une solution sur le territoire municipal. Je souhaite que cette unanimité de principe ne soit pas, par la suite, dévoyée par des arguments qui, pour certains d'entre eux, sont manifestement fallacieux.
En ce qui concerne les garanties formelles que vous me demandez, Monsieur Meyll, je ne peux pas donner la garantie du déclassement de ce terrain pour les besoins supplémentaires du centre sportif, dès lors que c'est votre Grand Conseil qui est bastant. Je peux, en revanche, prendre l'engagement d'entamer cette procédure et de la mener avec énergie. J'ai déjà donné cette garantie aux autorités versoisiennes et nous étions convenus de le faire en temps opportun, c'est-à-dire lorsque la réalisation de l'agrandissement deviendrait nécessaire, et non pas à froid, pour éviter que la critique ne se porte sur un déclassement dont on nous aurait dit, dans cette enceinte, qu'il était prématuré.
Alors, je vous remercie, Monsieur Meyll, dans cette campagne versoisienne, d'être aux côtés du Conseil d'Etat. Je vous assure que le Conseil d'Etat y participera avec la prudence qui sied à une intervention de l'autorité cantonale dans une affaire municipale, car vous savez qu'il peut arriver qu'elle soit mal perçue.
Cette interpellation urgente est close.