République et canton de Genève
Grand Conseil
Séance du jeudi 20 janvier 2000 à 17h
54e législature - 3e année - 4e session - 2e séance
IU 796
M. Charles Beer (S). Cette interpellation s'adresse à M. Lamprecht et également au Conseil d'Etat dans son ensemble.
Cette interpellation concerne plus précisément les cours dispensés aux chômeurs et chômeuses dans le cadre de la loi sur l'assurance-chômage et dans le cadre de la logistique des mesures du marché du travail, selon l'abréviation barbare LMMT.
En premier lieu, j'aimerais revenir, Monsieur Lamprecht, sur l'interpellation urgente que j'ai développée sur le même sujet, en date du 19 mars 1998. A l'occasion de cette interpellation, il y a quasiment deux ans, je vous citais l'école Supercomm, entreprise de formation privée qui formait un certain nombre de chômeurs et chômeuses avec la particularité, selon l'information que j'avais à l'époque, de payer beaucoup moins bien qu'un certain nombre d'autres entreprises et de ne pas respecter les usages professionnels en matière de salaires. Ainsi, le cas qui m'était tombé entre les mains concernait un salaire de 35 F de l'heure, alors que les usages professionnels fixent le salaire minimum à 45 F de l'heure.
Vous m'aviez répondu à l'époque, Monsieur Lamprecht, en concluant sur ces quelques mots : «Si l'entreprise est en infraction, la sanction sera identique à celle appliquée à toute entreprise dans un cas semblable.» Eh bien, il y a eu contestation et même un recours de l'entreprise jusqu'au Tribunal fédéral. Je rappelle que celle-ci a été déboutée, mais en fin de compte et à ma connaissance il n'y a eu aucune sanction. Ainsi, nous constatons que, deux ans après cette interpellation, la même entreprise Supercomm dispense toujours très régulièrement des cours pour chômeurs et chômeuses, cours de français pour personnes non francophones et cours d'anglais de niveau intermédiaire. Or, je rappelle qu'il existe, Monsieur Lamprecht, des institutions d'utilité publique subventionnées à cet effet et qui sont même spécialisées en la matière. Je me permettrai ainsi, pour les élèves non francophones, de vous citer l'Université ouvrière comme excellente référence.
Aujourd'hui, qu'en est-il de la politique salariale dans l'entreprise ? Monsieur Lamprecht, votre action ou votre absence d'action, je n'en sais rien, a conduit à ce que le salaire minimum ne soit pas amené de 35 F à 45 F, mais de 35 F à 28 F l'heure d'enseignement. Je signale qu'une heure d'enseignement correspond à deux heures de travail, ce qui veut dire qu'aujourd'hui, dans le cadre des cours de Supercomm, où vous envoyez des chômeurs et des chômeuses, des enseignants sont payés 14 F de l'heure, soit pratiquement 5 F de moins qu'une vendeuse non qualifiée en première année dans un grand magasin, ce qui revient à un salaire mensuel de 2 500 F.
Le président. Posez votre question, Monsieur Beer, s'il vous plaît, votre temps est échu !
M. Charles Beer. Avant de poser ma question, j'aimerais dire rapidement qu'avec ce salaire de 2 500 F on ne respecte pas le règlement du Conseil d'Etat sur la passation des marchés publics en matière de fournitures et de services, incluant certaines obligations, pas plus qu'on ne respecte les procédures de la LMMT et encore moins la loi sur l'assurance-chômage et la notion de travail convenable.
Mes questions à M. Lamprecht sont les suivantes : qu'attendez-vous pour sanctionner sans délai Supercomm, dont la seule souplesse repose sur sa capacité d'ouvrir des cours sans exiger un effectif de dix élèves pour les rentabiliser, leur financement étant assuré par des salaires inférieurs de plus de la moitié à ceux pratiqués par l'IFAGE ou encore par l'Université ouvrière ?
Que comptez-vous faire pour assurer, plus généralement, le respect du dispositif légal et la dignité des conditions de travail dans ce secteur, dont vous avez la charge ? Je relève qu'à l'OCIRT aucune entreprise de formation, bien que plusieurs d'entre elles accueillent des chômeurs et des chômeuses, n'a signé le moindre engagement pour respecter les usages professionnels.
Comptez-vous insuffler une dynamique permettant ainsi la collaboration entre vos services, c'est-à-dire l'OCIRT et l'office cantonal de l'emploi ? Ma question au Conseil d'Etat est la suivante : que comptez-vous faire plus généralement, après Telecom notamment - on pourrait citer également Interpel et les entreprises de travail temporaire - pour vous assurer enfin qu'une demande écrite, lorsqu'il y a une adjudication - conformément au règlement que vous avez adopté en août 99 - soit adressée à l'entreprise, afin qu'on puisse vérifier, contrôler sur papier ? Qu'en l'absence d'engagement conforme aucune autorisation ne soit délivrée ; que des contrôles réguliers soient effectués sur les salaires réels notamment et les conditions de travail ; enfin, que des retraits d'autorisations soient effectués en parallèle des sanctions ?