République et canton de Genève

Grand Conseil

P 1161-A
7. Rapport de la commission des pétitions chargée d'étudier la pétition : Opposition à l'ouverture et à l'exploitation du café-restaurant, 6, rue Barton. ( -)P1161
Rapport de Mme Mireille Gossauer-Zurcher (S), commission des pétitions

La Commission des pétitions, sous la présidence de Luc Barthassat, puis de Louis Serex, a traité dans ses séances des 29 septembre et 6 octobre 1997, puis le 5 juillet 1999, la pétition dont voici le texte :

Pétition(1161)

Opposition à l'ouverture et à l'exploitation du café-restaurant,6, rue Barton

Nous nous permettons de vous écrire pour vous faire part de notre profonde inquiétude liée à l'ouverture prochaine de l'établissement susmentionné, bien que les habitants des immeubles 21, 23, 25, 27, 29 et31, quai du Mont-Blanc aient fait parvenir, depuis l'an passé, au président du Département des travaux publics et de l'énergie, M. Joye, ainsi qu'à celui du Département de justice et police et des transports, M. Ramseyer, des correspondances détaillées.

Nous n'avons malheureusement, à ce jour, aucune certitude en ce qui concerne la prise en compte de nos doléances. D'après la dernière lettre deM. Ramseyer, du 28 avril 1997, la demande d'autorisation d'exploiter était encore à l'examen.

A ce jour, nous n'avons pas encore reçu les nouvelles, malgré nos nombreuses demandes. Par ailleurs, nous venons d'être informés, par voie de publicité mise dans nos boîtes aux lettres, que l'ouverture officielle aura lieu le 2 juin 1997.

Aussi, au vu de nos nombreuses doléances et réclamations mentionnées dans les copies de correspondance que nous joignons à la présente, nous nous voyons obligés de recourir à une pétition afin de vous demander de surseoir à cette ouverture tant que notre association de locataires n'aura pas été entendue et n'aura pas reçu les assurances nécessaires que les problèmes acoustiques et d'isolation phonique, ainsi que ceux liés aux émanations provenant des cheminées, n'auront pas été résolus.

Nous voudrions également attirer votre attention sur le fait que des manifestations ont déjà eu lieu plusieurs fois dans la rue, devant l'établissement (verrées, cor des Alpes et guitare, vaches et interdiction de circuler dans la rue Barton), et que nous ne saurions tolérer que cette situation se reproduise.

En espérant que vous voudrez bien donner une suite rapide à notre requête, nous vous prions de recevoir, Mesdames et Messieurs les députés, l'expression de notre haute considération.

Les Habitants des 21, 23, 25, 27, 29, 31, quai du Mont-Blanc

Audition des pétitionnaires

Mme Parissa de Montenach et M. Eric Portier ont, au nom des habitants voisins du café-restaurant de la rue Barton, exprimé leurs doléances quant à l'exploitation du « Swiss Cottage ». En effet, entre la date du dépôt de la pétition et l'audition, le restaurant est entré en activité, entraînant diverses nuisances. Les pétitionnaires dénoncent le bruit causé par l'orchestre folklorique, accompagné d'un cor des Alpes ; les odeurs de cuisine sortant de bouches d'aération : l'immeuble abritant le « Swiss Cottage » était un ancien garage, bâtiment plus bas que ceux des pétitionnaires qui « profitent » donc très directement des relents de cuisine suisse (raclette, fondue) qui, selon eux, finissent par « coller aux vêtements comme à la peau ». Ils se plaignent aussi de subir des agressions de la part de clients, d'avoir leurs voitures endommagées ou, lors de l'inauguration, de n'avoir pu rentrer dans la cour réservée aux habitants, celle-ci ayant été fermée pour y organiser la fête, selon eux, sans autorisation de police.

D'autre part, ils ne comprennent pas comment le propriétaire du lieu a obtenu des autorisations de construire et d'exploiter alors que les chefs des départements concernés, MM. Joye et Ramseyer, par courrier, leur assuraient que rien ne serait accordé. Ils soupçonnent quelque passe-droit pour le promoteur du « Swiss Cottage », M. Hohl, organisateur des Fêtes de Genève et propriétaire du « Petit Music'Hohl ».

Ils dénoncent, enfin, l'absence de respect de certaines directives de sécurité : nombre de places, sortie de secours condamnée.

Habitant un quartier résidentiel, ils acceptent, lors des Fêtes de Genève, les désagréments temporaires qui y sont liés. Par contre, ils sont prêts à se battre aussi longtemps qu'ils devront subir les nuisances omniprésentes occasionnées par ce lieu. Ils souhaitent que le restaurant soit mis en conformité avec les lois existantes s'agissant des odeurs (le Service d'écotoxicologie, après contrôle, a estimé que les odeurs étaient inadmissibles), du bruit, de la sécurité.

Dans un courrier adressé au DTPE, en mai 1997, ils expliquent :

« ...nous sommes dans une société de droits, nous pouvons nous asseoir autour d'une table et négocier. Nous estimons que la loi doit s'appliquer à tout le monde et nous ne voulons pas qu'elle serve par favoritisme, copinage ou autres, les intérêts d'une poignée de barmans agressifs. »

Audition de M. Staehelin, chef de division, DTPE

M. Staehelin dresse un bref historique : le 17 octobre 1995, le DTPE a autorisé la transformation et la création d'un restaurant au 6, rue Barton. Les travaux ont démarré en juin 1996. A cette date, les riverains se sont rendu compte des problèmes que posaient cette construction et ont manifesté leur mécontentement. Les problèmes étaient essentiellement liés aux issues de secours et au bruit. Pourtant, aucune plainte n'avait été enregistrée lors de la mise à l'enquête. Aujourd'hui, le projet réactualisé est en suspens car il a été établi que les issues de secours empiétaient sur des propriétés privées. Ainsi, la situation actuelle est relativement confuse : alors que l'autorisation conforme est encore en suspens, nécessitant une procédure complémentaire, le restaurant est en exploitation, mais avec une restriction d'utilisation limitant la clientèle à 150 personnes au rez-de-chaussée. Il existe une requête supplémentaire pour exploiter l'étage lorsqu'un escalier mural sera construit comme issue de secours. Celui-ci aboutissant sur le trottoir qui appartient à la Ville de Genève, lorsqu'elle aura donné son autorisation d'utiliser le domaine public, la restriction tombera, ceci pour autant que les questions liées au bruit et à l'insonorisation du bâtiment soient réglées.

S'agissant des systèmes d'aération, M. Staehelin précise que les exigences initiales ont été remplies mais il imagine bien que la préparation quotidienne de fondue en grande quantité laisse des traces.

Audition de M. Frédéric Hohl

Pour M. Hohl, le « Swiss Cottage » est un lieu culturel véhiculant le patrimoine de la musique folklorique suisse pour les hôtes étrangers. Le « Swiss Cottage » est le seul restaurant folklorique suisse proposant toute l'année un décor suisse et un spectacle d'amusement : le « Heidi Show ».

Il a été créé en réponse à une demande touristique (rapport 1994 de l'Office du tourisme) dans un lieu proche de la rade et des hôtels, offrant ainsi un lieu de distraction pour les touristes, proche de leurs hôtels.

M. Hohl précise que le spectacle a lieu entre 20h45 et 21h30. Les groupes arrivent aux alentours de 19h et repartent dès la fin du spectacle, fatigués par une journée de visites. Pourtant, le restaurant possède une autorisation d'ouverture jusqu'à 2 heures du matin, mais il ferme en réalité vers 23h30 lorsque se déroulent des soirées d'entreprise, le repas pouvant se prolonger. L'orchestre se produit de 19h30 à 23h30, sans sonorisation. Le cor des Alpes, de 21h20 à 21h40.

Il tient à relever qu'il emploie 12 personnes ; qu'il offre du travail à plus de 20 musiciens suisses, à des danseuses, des animateurs.

Quant à la pétition, il estime qu'elle émane de personnes souhaitant transformer le quartier en résidence de repos. Personne n'a fait opposition suite aux parutions dans la Feuille d'Avis. Par contre, Mme de Montenac n'a cessé d'importuner les ouvriers pour toutes sortes de raisons dès le commencement des travaux. Lors d'une soirée de « pré-ouverture », dûment autorisée par la police, Mme de Montenac est arrivée à vive allure dans la foule avec sa Jeep et a insulté quelques invités dont un membre de la police genevoise qui a souri de cette excitation. M. Hohl n'a pas porté plainte afin de garder de bonnes relations avec son entourage. Il aurait souhaité une entrevue avec les pétitionnaires, mais ceux-ci l'ont obligé à discuter par avocat interposé.

Par contre, il convient que diverses améliorations doivent être faites, notamment en ce qui concerne la ventilation : le restaurant était doté, non pas d'air conditionné, mais d'air rafraîchissant. Durant les grosses chaleurs, les fenêtres ont été ouvertes, occasionnant les nuisances relevées par les pétitionnaires. Il s'engage à se doter d'un système performant (les commissaires ont pu prendre connaissance d'un courrier provenant d'une entreprise spécialisée). En ce qui concerne l'issue de secours, il fera construire un escalier externe lorsqu'il aura reçu l'autorisation de la Ville de Genève puisqu'il empiétera sur le domaine public. En effet, la situation actuelle est bloquée pour l'issue existante dans la mesure où elle ne bénéficie que de 17 centimètres de passage ; au-delà elle donne sur des parcelles de parkings privés. M. Hohl reconnaît qu'il aurait dû se renseigner au préalable conjointement avec son architecte sur cette question. L'erreur provient du fait que, sur les plans initiaux, il était indiqué que le restaurant jouissait d'un espace de 7 m2 autour du périmètre des murs et qu'ils ont confondu ce chiffre avec 7 m.... Ils avaient tous deux imaginé construire une porte de secours sous alarme, reliée directement chez les pompiers. Ainsi, elle n'aurait été utilisée qu'en cas d'incidents graves. Or, ils ont été confrontés à un refus catégorique des propriétaires des parcelles ; ceux-ci, afin de manifester leur mécontentement, ont érigé un grillage autour du restaurant, allant jusqu'à faire des trous dans ses murs, rendant ainsi l'issue de secours inopérante. Il remarque, enfin, qu'il aurait pu très bien pu faire disparaître ces places de parking puisqu'elles débordent sur son terrain !

Discussion de la commission

Suite aux diverses auditions, les députés ont souhaité suspendre leurs travaux en attendant la réalisation des travaux indispensables pour une exploitation du « Swiss Cottage » ne nuisant pas trop aux habitants riverains.

Une commissaire s'étonne des commentaires de M. Hohl qui se dit plein de bonne volonté mais qui, par ailleurs, est en contradiction avec les lois. Elle pense que, dans un autre cas, les autorités admettraient que la situation déborde le cadre admis.

Le 5 juillet 1999, la commission, mettant de l'ordre dans ses tiroirs, a repris cette pétition et confié à la rapporteuse, qui avait participé aux travaux, la mission de s'informer sur la situation actuelle.

Renseignements pris auprès des personnes concernées, les travaux ont eu lieu : l'issue de secours existe ; l'aération est performante et, selon l'ilôtier du poste de police de Pécolat, il n'y a plus eu de plaintes concernant cet établissement. Il a lui-même clos son enquête et le « Swiss Cottage » ne fait plus l'objet de surveillance de sa part.

C'est pour ces raisons que la Commission des pétitions, unanime, vous prie, Mesdames et Messieurs les députés, de bien vouloir déposer cette pétition sur le bureau du Grand Conseil, à titre de renseignement.

Mises aux voix, les conclusions de la commission des pétitions (dépôt de la pétition sur le bureau du Grand Conseil à titre de renseignement) sont adoptées.